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Applications des nanotechnologies pour l'analyse et le traitement de l'eau
Applications des nanotechnologies pour l'analyse et le traitement de l'eau
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout novembre 2020 (fiche à mettre à jour et réorganiser)Cette fiche fait partie de notre dossier Nano et Eau : elle a vocation à être progressivement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
Les nanotechnologies sont utilisées pour développer des dispositifs plus efficaces pour l'analyse et le traitement de l'eau.
Il est aujourd'hui difficile de faire la part entre les applications déjà sur le marché et celles qui n'en sont qu'au stade de la recherche et développement.
Il est également nécessaire d'être vigilant par rapport aux "effets d'annonce" de certains chercheurs soucieux de valoriser leurs recherches mais dont les résultats de recherche sont encore loin d'être transformés en produits ou procédés réels.
Le flou prévaut aussi en ce qui concerne les produits commercialisés par certaines compagnies qui utilisent le mot "nanotechnologies" comme argument "marketing" de leurs produits, sans jouer la carte de la transparence sur la nature des procédés ou des nanomatériaux utilisés.
Deux principaux domaines d'application des nanotechnologies au domaine de l'eau peuvent être distingués : l'analyse et le traitement de l'eau.
- La détection des contaminants dans l'eau
- La purification de l'eau
- Dépollution et remédiation des sols et des eaux
Avec quelle prise en compte des risques associés aux nanomatériaux utilisés ?
Et quel rapport bénéfices / risques par rapport aux alternatives naturelles ? L'innovation n'est pas uniquement technologique, comme en attestent les "solutions fondées sur la nature" (SfN) promues par les Nations Unies en 2018.
La détection des contaminants
Les nanotechnologies pourraient avoir des applications intéressantes en matière de détection des substances chimiques et biochimiques dans l'eau.
Début 2011, le Directeur général des Centres de recherche de Veolia Environnement considérait que "c'est très probablement dans ce domaine [de l'analyse] que l'on verra prochainement une industrialisation de nanotechnologies pour l'échantillonnage et l'indentification spécifique aussi bien en analyse chimique que microbiologique" 1.
Une thèse est en cours (ou en projet ?) à l'université d'Orléans sur l'élaboration de capteurs électrochimiques pour la détection de polluants émergents basés sur des carbones nanostructurés fonctionnalisés par greffage de sels de diazonium.
La purification de l'eau
Les nanotechnologies peuvent être utilisées pour désaliniser l'eau, filtrer des polluants, réduire le calcaire et/ou traiter les eaux usées.
Les procédés utilisés ou envisagés peuvent combiner différents types d'action :
- la filtration d'éléments indésirables (polluants, microbes, sel) : ce serait le procédé le plus avancé, notamment pour les membranes ; les filtres peuvent être constitués notamment :
- de nanotubes de carbone, pour extraire les virus et les bactéries de l'eau
- de membranes nanostructurées ou sur lesquelles sont ajoutées des nanoparticules ou des nanorevêtements
- Un projet de nanofiltration pour réduire les rejets en micropolluants du site SOTREMO a été déployé au Mans
- Suez Environnement a ainsi participé à un projet de recherche européen NAMATECH (2009-2012) sur l'utilisation de nanoparticules pour des membranes "particulièrement prometteuses"2
- Veolia Environnement a de son côté mis en place un partenariat avec la société américaine NanoH2O visant à mettre au point des membranes pour le dessalement de l'eau de mer : des nanoparticules hydrophiles sont ajoutées à des membranes d'osmose inverse pour favoriser le passage de l'eau3
- des chercheurs français et américains ont mis au point des "tamis nanoscopiques"4
- Arkema propose en 2018 un procédé d'ultra filtration avec un polymère fluoré Kynar® PVDF utilisant des technologies de polymères nanométriques
- en Chine, en 2018, une promesse de production industrielle de membranes de nanofibres par impression en 3D par Nano Sun, en savoir +
- de l'argile attapulgite et de zéolites naturelles, disponibles dans de nombreuses régions du monde et présentant des pores naturels de taille nanoscopique
- de nanoéponges qui piègent des contaminants (il peut s'agir notamment d'éponges de polyuréthanes recouvertes de nanoparticules d'oxyde de fer ou de nanotubes de carbone et de nanoargent)5.
- la dissolution chimique des polluants par oxydation grâce à l'utilisation de nanoparticules réactives (titane, oxyde de fer par exemple) : les nanocatalyseurs pourraient être utilisés pour décomposer chimiquement les polluants. Les nanoparticules d'oxyde de titane sont par exemple des catalyseurs plus efficaces que l'oxyde de titane à l'échelle macroscopique et pourraient servir à détruire les contaminants par photocatalyse sous l'effet de rayons UV.
- Début 2011, Veolia Environnement était impliqué dans l'étude de nanoparticules pour la catalyse de type oxydante ou réductrice afin d'éliminer des polluants dans l'eau, avec des perspectives d'applications encore incertaines6.
- Des recherches ont été menées ou sont toujours en cours :
- au laboratoire GEPEA (Ecole des Mines de Nantes)7
- à l'Institut européen des membranes de Montpellier8
- D'autres recherches sont menées dans beaucoup d'autres pays9.
- l'extraction des polluants par aimantation : les nanoparticules magnétiques ont une grande surface par rapport à leur volume et peuvent ainsi facilement former des liaisons chimiques avec des contaminants véhiculés par l'eau - tels que l'arsenic, le mercure, le plomb, le pétrole - et être ensuite extraits à l'aide d'un aimant. Des applications seraient déjà commercialisées et les recherches sont nombreuses dans ce domaine10.
- l'élimination des bactéries, par l'utilisation de nanoparticules métalliques (nanoparticules d'argent ou de cuivre) aux propriétés antibactériennes.
Projet de recherche : NanoSELECT : Des nanomatériaux biologiques pour purifier l'eau, Suède, FP7 ; http://www.cordis.europa.eu/result/rcn/165353_en.html
Voir aussi :
- Hymag’in, une start-up française qui fabrique des nanoparticules de magnétite pour purifier de l’eau contaminée.
- la désalinisation est un enjeu important, avec :
- aux USA en 2017 une recherche sur une combinaison de distillation membranaire et de nanophotonique.
- en 2018 une publication chinoise sur une méthode testée en laboratoire, associant l'intégration de nanoparticules de tellure dans l’eau avec la plasmonique. Le taux d’évaporation de l’eau est multiplié par trois sous l’effet des rayons du soleil. Ainsi, en 100 secondes la température passe de 29°C à 85°C. La création des nanoparticules est extrêmement complexe et n’offre aucune possibilité de commercialisation pour l’instant.
Dépollution et remédiation des eaux
Voir notre rubrique dédiée "Dépollution et remédiation des sols et des eaux par les nanos" sur la page Nano et Environnement
En savoir plus
- Lire aussi sur notre site :
- les autres fiches du dossier "Nano et Eau", et notamment :
- la fiche Acteurs Nanomatériaux / nanotechnologies et Eaux qui se penche sur les stratégies des trois principales sociétés françaises qui traitent l'ensemble du circuit de l'eau, du captage à l'épuration
- la Bibliographie générale "nano et eau"
- les fiches sur les risques associés à certains des nanomatériaux utilisés :
- Ailleurs sur le web :
- En français :
- Dépollution de l'air et de l'eau par effet photocatalytique des nanomatériaux, Yamin Leprince, Professeur des universités, Physique de la matière condensée, 16 janvier 2021
- La nanotechnologie pour assainir l'eau en milieu agricole, Agence Science Presse, 5 mars 2018
- Des membranes durablement hydrophiles pour l'ultrafiltration de l'eau, Arkema, date ?
- Les méduses à la rescousse de l'environnement, INSERM, 15 juillet 2015
- Des nanoparticules pour l'assainissement du sol et de l'eau, Techno-science, 2 juillet 2015
- Sciences physiques et nanotechnologies - Quelles nouvelles perspectives pour déssaler l'eau aux Etats-Unis ?, Bulletins électroniques Etats-Unis, novembre 2014
- DREAM : Les nanomatériaux dans les filières de l'eau et des milieux aquatiques, Pôle de compétitivité DREAM, mai 2014
- Enjeux des nanotechnologies et des nanoparticules dans le secteur de l'eau , Richard Varrault, Waternunc, 2011
- Les nanotechnologies d'épuration de l'eau : Faits et chiffres, SciDev.Net, Grimshaw D, mai 2009
- En anglais :
- Purifying water with a partly coated gold nanoparticle, Jade Boyd, Rice University, 22 juin 2020
- Magnetic nanoparticles ease removal of microcontaminants from wastewater, ETH Zurich, Phys.org, 17 mai 2019
- NEWT, Nanosystems Engineering Research Center for Nanotechnology-Enabled Water Treatment (USA)
- Photocatalytic Treatment Techniques using Titanium Dioxide Nanoparticles for Antibiotic Removal from Water, Armando A et al., in Application of Titanium Dioxide, Edited by Magdalena Janus, InTech, juillet 2017 (open access)
- Nano4water (projet européen)
- New study shows how nanoparticles can clean up environmental pollutants, MIT News, 21 juillet 2015
- Nanotechnology for Water Treatment and Purification, Hu, Anming, Apblett, Allen (Eds.), Series: Lecture Notes in Nanoscale Science and Technology, Vol. 22, XVI, 373 p., 2014
- Use of Nanotechnology against Heavy Metals Present in Water, Zhang M et al, in Heavy Metals In Water: Presence, Removal and Safety, 2014
- Purifying Water With Nanotech, Institute of Electrical and Electronics Engineers (IEEE), décembre 2013
- Chemist to Bring Low-Cost, Inkjet-printed Nano Test Strips to Pakistan for Drinking Water Tests, University of Massachusetts Amherst, juillet 2013
- Porous boron nitride nanosheets for effective water cleaning, Lei W et al., Nature Communications, 4, 2013
- Water Desalination across Nanoporous Graphene, Nano Lett., 12 (7) : 3602-3608, juin 2012
- Workshop Nanomaterials for Water Treatment: Opportunities and Barriers, Conclusions, Tecnalia, octobre 2010
NOTES et REFERENCES
1 - Entretien de M. Hervé Suty, Directeur général des Centres de recherche de Veolia Environnement, accordé à Richard Varrault (Waternunc), publié en 2011
2 - Entretien de Mme Zdravka Doquang, Responsable Pôle Analyse et Santé au CIRSEE (Suez Environnement), accordé à Richard Varrault (Waternunc), publié en 2011
3 - Entretien de M. Hervé Suty, Directeur général des Centres de recherche de Veolia Environnement, accordé à Richard Varrault (Waternunc), publié en 2011 : "Le principe consiste à introduire dans la membrane filtrante qui fait quelques dizaines de micromètres d'épaisseur des nanoparticules hydrophiles (de l'ordre de quelques %). Cette "charge" dispersée de façon homogène qui va faciliter le passage de l'eau, permettra de réduire les pressions et donc de diminuer les consommations énergétiques d'un procédé qui est relativement énergivore au départ. Les nanoparticules sont dans la matrice (...). Ce type de produit qui arrive sur le marché maintenant est en cours d'évaluation à l'échelle industrielle par nos équipes de R&D et nous avons un partenariat pour la commercialisation de ces nouvelles membranes sur le marché du dessalement. Veolia est généralement ce que l'on qualifie d'un "end-user" qui sélectionne les membranes en fonction de leurs performances intrinsèques pour une application donnée. Dans le cas du dessalement par osmose inverse, il est clair que cette nouvelle approche peut conduire à une nouvelle génération de membranes plus performantes ; les résultats d'évaluation des performances sont attendus dans le courant du premier trimestre 2011 et les premières utilisations pour le dessalement d'eau de mer courant 2011. Dans les membranes, d'autres études sont en cours sur le développement de matériaux nanostructurés mais les développements sont en cours et les applications sont attendues pour plus tard, d'ici 5 à 10 ans."
Selon le fabricant, les nanoparticules ne présentent pas de risques pour la qualité de l'eau : cf. sa FAQ : "Do nanoparticles pose any potential risks to water quality?
No. LG NanoH2O's QuantumFlux membrane elements are completely safe for the treatment of potable water. The Qfx SW 365 ES, Qfx SW 400 ES, Qfx SW 400 SR and Qfx SW 400 R are all NSF Standard 61 certified, which means that they have been independently evaluated by NSF International, the global organization that provides standards development, product certification, auditing, education and risk management for public health and safety. NSF Standard 61 certification attests to the safety and viability of the Qfx SW 365 ES, Qfx SW 400 ES, Qfx SW 400 SR and Qfx SW 400 R membrane elements when used in the production of drinking water."
4 - Cf. Dessaler l'eau de mer avec des filtres à l'échelle nano, Laboratoire Interdisciplinaire Carnot de Bourgogne, 29 mars 2018
5 - Voir par exemple :
- Des éponges en nanocellulose contre les marées noires, Industrie et Technologie, 9 décembre 2014. Mise au point par deux chercheurs, Gilles Sèbe du LCPO de l’université de Bordeaux 1 et Philippe Tingaut, de l’Empa près de Zurich, lauréats pour cette éponge du Prix des techniques innovantes du salon Pollutec.
- Low energy water purification enabled by nanomaterial-coated sponges, Science for Environment Policy, février 2015 (article académique : Conducting nanosponge electroporation for affordable and highefficiency disinfection of bacteria and viruses in water, Liu, C et al., Nano Letters, 13(9): 4288-93, 2013)
6 - Entretien de M. Hervé Suty, Directeur général des Centres de recherche de Veolia Environnement, accordé à Richard Varrault (Waternunc), publié en 2011 : "On peut également utiliser des nanopoudres deTiO2 (libres ou fixées), pour la photocatalyse et l'élimination de polluants mais aussi des nanopoudres adsorbantes (charbon actif ou autres), qui vont permettre des éliminations sélectives de certains polluants par transfert et non plus par dégradation.
Nous travaillons là encore avec des laboratoires du domaine public mais aussi des fabricants industriels pour mettre au point de nouvelles technologies et arriver à des procédés intensifs de traitement. Ces procédés doivent répondre à un certain nombre de critères de performance sur des considérations technico-économiques mais ils doivent également s'inscrire dans une démarche de développement durable et apporter un plus par rapport aux technologies actuelles sur ces aspects. Le devenir des polluants éliminés avec la formation de sous produits par exemple mais aussi celui des nanoparticules dans leur mise en œuvre sont deux aspects critiques de ces recherches.
Typiquement dans le domaine de l'oxydation qui a été très étudié dans les 30 dernières années avec un développement industriel tout relatif, les nanotechnologies peuvent être de nature à repositionner certains procédés de façon favorable en levant des verrous jusqu'à lors rédhibitoires. (...) Pour les matériaux nanostructurés le gain, le rapport coût/bénéfice, n'est pas encore atteint. Par contre pour les matériaux incorporant des nanoparticules, comme les membranes pour lesquelles une poudre est dispersée dans une matrice polymèrique, c'est justifié et ceci d'autant plus si la durée de vie des produits est améliorée. La durée de vie des membranes est en générale de l'ordre de 5 ans, si on peut les faire durer 10 ou 15ans cela devient vraiment très intéressant."
7 - Devenir de polluants émergents lors d'un traitement photochimique ou photocatylitique sous irradiation solaire, thèse de Vanessa Maroga Mboula, Ecole des Mines de Nantes, 2012
8 - Voir les projets de recherche du département Génie d'élaboration de membranes inorganiques photocatalytiques de l'Institut européen des membranes (IEM) de Montpellier (CNRS, UM2, ENSCM) pour élaborer des membranes à base de nanoparticules de dioxyde de titane afin de développer des systèmes de couplage entre la séparation membranaire et la dégradation photocatalytique de polluants pour le traitement d'eaux usées
9 - Voir par exemple :
- Mat baits, hooks and destroys pollutants in water, Rice University, mars 2018 : "The mat depends on the ability of a common material, titanium dioxide, to capture pollutants and, upon exposure to light, degrade them through oxidation into harmless byproducts"
- Des nanoparticules pour soigner... les cours d'eau et les sols contaminés, Le Soleil (Canada), juillet 2015
- Un nanomatériau pour dégrader les perturbateurs endocriniens, Le Journal de l'Environnement, novembre 2014
10 - Cf. notamment :
- Des chercheurs iraniens et finlandais ont mis au point une méthode à base de nanoparticules d'oxyde de fer pour retirer le nitrate et le nitrite de l'eau : cf. Scientists Present Simple Method to Eliminate Nitrate, Nitrite from Water, Soil, Iran Nanotechnology Initiative Council, février 2015
- Des chercheurs de la Rice University aux Etats-Unis ont utilisé des nanoparticules de rouille (dioxyde de fer) pour extraire l'arsenic de l'eau : cf. Low-Field Magnetic Separation of Monodisperse Fe3O4 Nanocrystals, Yavuz C T et al. Science, 2006
Fiche initialement créée en février 2015
Nanomatériaux / nanoparticules dans l'eau
Nanomatériaux / nanoparticules dans l'eau
Par l'équipe Avicenn - Dernière modification mai 2020
Ce dossier a vocation à être complété et mis à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn.
Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant des références à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
La commercialisation et l'utilisation de nanomatériaux manufacturés se sont considérablement accrues depuis le début des années 2000 dans de nombreux domaines : cosmétiques, textiles, électroménager, équipements de sport, vitres et matériaux de construction, voitures, aéronautique, bateaux, alimentation, etc.
De plus en plus de nanomatériaux, nanoparticules ou résidus de nanoparticules sont présents dans les eaux usées et conduits pour partie jusqu'aux stations d'épuration, puis dans les rivières et cours d'eau. Avec quelles conséquences pour la faune et la flore aquatiques ? Quid des microorganismes des sols sur lesquels sont épandues les boues de station d'épuration ?
Des inquiétudes se profilent parmi un nombre croissant d'acteurs. Qui fait quoi sur ces différents aspects ?
Sur toutes ces questions, seules sont aujourd'hui accessibles des informations éparses, souvent difficiles à comprendre pour le non spécialiste ou n'abordant qu'un aspect particulier sans donner de vision d'ensemble.
Ce dossier initié en 2015 rassemble donc les informations disponibles ainsi que les questions qui se posent aujourd'hui et qui pourraient devenir un problème en l'absence d'action de la part des différentes institutions concernées.
Il s'agit d'une base que nous souhaitons compléter et mettre à jour en fonction de l'évolution des connaissances : vos contributions sont les bienvenues !

Sommaire
- Applications des nanotechnologies pour l'analyse et le traitement de l'eau
- Détection / caractérisation des résidus de nanomatériaux dans l'eau
- Relargage et devenir des nanomatériaux dans l'eau
- Problèmes dans les stations d'épuration ?
- Effets sur la faune et la flore aquatiques
- Quelles actions des pouvoirs publics et des gestionnaires de l'eau ?
- Consultation Naneau en 2016 : une action Avicenn soutenue par l'ONEMA
- Mettre les nanos au menu des Assises de l'eau 2018
- Consultations des Agences de l'Eau : de novembre 2018 à mai 2019
Donner votre avis du 2/11/18 au 2/05/19 - Annexes :
LIRE AUSSI sur notre site :
- Notre dossier synthétique Nanomatériaux et Environnement
- Notre page Nanoplastiques
Fiche initialement mise en ligne entre février 2015
Nanos et plastiques
Nanos et plastiques
Par l'équipe Avicenn - Dernière modification février 2021Cette fiche a vocation à être complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant des références à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
De plus en plus de nanoparticules de plastique envahissent les sols (après épandage des boues des stations d'épuration1 notamment), les rivières et les océans.
Certains nano-plastiques proviennent de la dégradation des plastiques (emballages, déchets, etc.) en microparticules, qui se décomposent ensuite en nanoparticules2.
D'autres micro- et nano-plastiques sont quant à eux intégrés intentionnellement dans des mélanges utilisés par les consommateurs ou les professionnels3 :
- dans des produits cosmétiques (microbilles utilisés pour leurs propriétés exfoliantes - interdites en France depuis 2018)
- dans des détergents et produits de nettoyage
- dans des peintures, revêtements et matériaux de construction
- dans des produits pharmaceutiques
- dans des produits phytosanitaires (enrobages d'engrais par exemple, pour les libérer de manière progressive)
- dans le secteur pétrolier et gazier
- ...
Leur rejet et diffusion dans les écosystèmes entraînent des effets néfastes en cascade mais encore insuffisamment évalués, depuis la faune aquatique jusqu'aux autres animaux (dont les humains) qui s'en nourrissent4. Des chercheurs mènent des recherches sur le sujet, en France5 et ailleurs6 pour évaluer leurs effets sur l'environnement - éco-toxicité, mais également rôle dans la dissémination d'autres polluants adsorbés à leur surface (on parle d'"effet Cheval de Troie") et dans la survenue d'"effets cocktails" déclenchés par l'association à d'autres nanoparticules ou substances indésirables7.
En janvier 2019, l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) avait proposé de restreindre certains de ces micro- et nano-plastiques intégrés à dessein par les industriels8. Mais en juin 2020, suite au lobbying des industriels, l'ECHA a retiré les nanoplastiques de son projet de restriction, suscitant l'indignation des ONG, notamment le Bureau européen de l'environnement (BEE)9 qui redoute que les industriels substituent des nanoplastiques aux microplastiques une fois la réglementation en vigueur.
Dans un rapport publié le 16 novembre 2020, par les ONG environnementales mobilisées au niveau européen pour réduire la pollution aux microplastiques, emmenées par Rethink Plastic, le Bureau européen de l'environnement (BEE), Client Earth et Break free from Plastic ont réitéré leurs craintes et recommandé de réintégrer les nanoplastiques au projet de restriction des microplastiques comme l'avait initialement proposé l'agence européenne des produits chimiques (ECHA), en faisant porter les restriction sur les particules de moins de 5 mm, sans limite inférieure de taille. L'objectif est d'éviter une substitution "absurde" des microplastiques interdits par des nanoplastiques qui ne seraient pas concernés par la restriction en cours de définition et d'éviter une pollution accrue due à leur diffusion dans l'environnement10 - d'autant qu'il est techniquement possible de mesurer les particules plastiques de taille nanométrique11.
La version finale de l'ECHA devrait être rendue publique d'ici décembre 2020, puis transmise à la Commission pour qu’elle formule sa proposition ; la procédure ne devrait pas être finalisée avant 2022.
En août 2019, suite à la publication d’une analyse de l’état de la recherche sur les microplastiques dans l’eau de boisson, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) avait appelé à renforcer la recherche sur les micro- et nanoplastiques et à prendre des mesures énergiques contre la pollution par le plastique12.
En août 2020, un rapport13 du Centre commun de recherche (JRC) et le Global Coalition for Regulatory Science Research (GCRSR) a été publié ; il résume les échanges d'une conférence sur le sujet des nanoplastiques qui a réuni en 2019 près de 200 acteurs en provenance de 36 pays différents. Parmi les recommandations émises:
- un effort de coordination en matière de terminologie, définitions, échantillonnage, caractérisation et évaluation du danger et de l'exposition aux nanoplastiques afin de produire des matériaux de référence, ainsi que des normes, orientations et réglementations "robustes"
- une plate-forme d'information et d'échange sur les nano- et microplastiques
- une collaboration entre les parties prenantes, le développement de la confiance via une transparence sur les données14 .
NB : Dans les cosmétiques, des alternatives existent pour obtenir l'effet exfoliant recherché : poudre d’amandes, coques de noix de coco ou noyaux d’olives concassés par exemple.
En savoir plus
Lire aussi sur notre site :
- Nos fiches :
Ailleurs sur le web :
En français :
- Septième Continent
- Nanoplastiques, la face cachée d’une pollution mondiale, vidéo, Journal du CNRS, mars 2019
- Plastic Soup Foundation
- Are There Nano- and Microplastics in the Workplace?, Murashov V et al., NIOSH (USA), février 2020
- 'Nanoplastics’ - Use of suitable terminology for representation in waste, degradation of plastics and presence in the environment, Nanotechnology Industries Associations (NIA), février 2020
- Focus on Nanoplastic, Nature Nanotechnology, avril 2019
- European strategy for plastics in a circular economy, Commission européenne, janvier 2018
- Presence of microplastics and nanoplastics in food, with particular focus on seafood, EFSA, mai 2016
- Plastic in Cosmetics, UNEP, 2015
Notes et références
1 - Les STEP efficaces avec les nanoplastiques, Le Matin, 5 février 2019
2 - Voir par exemple :
- La lente fragmentation des plastiques décryptée, Julienne Fanon, The Conversation, octobre 2019
- Sachets de thé Infusions aux microplastiques et nanoparticules, Que Choisir, septembre 2019
- Plastic waste disintegrates into nanoparticles, study finds, Lund University, décembre 2018 et Nanoplastics formed during the mechanical breakdown of daily-use polystyrene products, Ekvall MT et al., Nanoscale Adv., 1 : 1055-1061, 2019
3 - Voir notamment :
- La fabrication de nanoplastiques, résumée en vidéo ci-dessous dans le cadre du programme de recherche européen OPTINANOPRO (2015-2018), axé sur les secteurs de l’emballage, de l’automobile et de l’énergie solaire (résumé en français ici). Les 25 produits polymères créés ont été testés jusqu'au compostage. Question citoyenne à documenter : quel est devenir de cette fragmentation ? Des nanoparticules de plastiques contenant des nanoparticules ?
- Un autre programme européen MINANO achevé en 2013 indique les types de plastiques incorporant des nanoparticules : polypropylène (PP) pour les nanocomposites plastiques et au polychlorure de vinyle (PVC) pour les nanocomposites bois-plastique et des mousse de polystyrène (pour l'isolation des bâtiments). Les nanoparticules fonctionnalisées ajoutées sont du magnesium dihydroxide (MDH) Mg(OH)2, de l'oxyde de zinc nano ZnO, et du nanoargent.
4 - Cf. Les coquilles Saint-Jacques aspirent des milliards de particules de plastique, National Geographic, 5 décembre 2018 (résumé de l'étude en anglais : Uptake, Whole-Body Distribution, and Depuration of Nanoplastics by the Scallop Pecten maximus at Environmentally Realistic Concentrations, Al-Sid-Cheikh M et al., ES&T, 52(24) : 14480-14486, 2018. Et Scientific Colloquium 25 “Microplastics and nanoplastics in food and feed”, EFSA, juin 2020
5 - Voir notamment :
- Parmi les trente-quatre projets retenus par l’Anses dans le cadre du Programme national de recherche Environnement-Santé-Travail en 2020, le projet "Transplast" vise à étudier les effets des micro-plastiques et nano-plastiques sur l'activité des transporteurs membranaires de xénobiotiques (il est coordonné par M. Fardel (IRSET/INSERM)).
- Le nano-plastique, une soupe au goût amer ?, vidéo, Journal du CNRS, mars 2019 (Julien Gigault- CNRS ; Mélanie Davranche - Université Rennes 1, Géosciences Rennes, CNRS / Université Rennes 1 ; Magalie Baudrimont - Epoc - Environnements et paléoenvironnements océaniques et continentaux, CNRS / Université de Bordeaux / EPHE)
- Le projet EMPEC sur les nanoparticules générées par la dégradation de plastique, financé dans le cadre du Programme national de recherche Environnement-Santé-Travail (PNREST 2017) de l'agence nationale de sécurité sanitaire (Anses)
- PlastiGar, un projet de recherche inédit pour mesurer et suivre la pollution plastique dans la Garonne et son impact sur la biodiversité, Laboratoire Interactions moléculaires et réactivité chimique et photochimique (IMRCP, CNRS/UT3, Paul Sabatier), Laboratoire Évolution et diversité biologique (EDB, CNRS/UT3, Paul Sabatier/IRD), l’Institut de chimie de Toulouse (ICT, CNRS/Toulouse INP/UT3, Paul Sabatier/IRD), octobre 2018
- Un océan de plastique - Diaporama sonore, Le Journal du CNRS, mai 2018: Contrairement aux microplastiques qui se concentrent dans la couche supérieure des océans, les fragments nanométriques se retrouvent dans toute la colonne d'eau. Alexandra Ter Halle et de son équipe tentent de mieux cerner ces infimes particules et leur impact sur l'écosystème marin
- PEPSEA, Projet de recherche sur les nanoparticules de plastiques dans l'environnement: source, impact et prédiction, ANR, 2018-2021
- Nanoplastics - Projet de recherche sur les microplastiques, nanoplastiques dans l'environnement marin : caractérisation, impacts et évaluation des risques sanitaires, ANR (ANSES, CNRS-DR17-LEMAR, GEPEA UMR 6144 Laboratoire Génie des Procédés Environnement et Agroalimentaire, Ifremer LER-PAC, IMMM UMR CNRS 6283, LM2E UMR 6197), 2016-2019 :
- Nanoplastics impaired oyster free living stages, gametes and embryos, Tallec K et al., Environmental Pollution, 242(B) : 1226-1235, novembre 2018
6 - Voir par exemple :
- The Mobility of Plastic Nanoparticles in Aqueous and Soil Environments: A Critical Review, Brewer A et al., ACS EST Water, 2020
- La pollution plastique menace aussi les plantes (et au passage, notre alimentation), Marcus Dupont-Besnard, 23 juin 2020
- Differentially charged nanoplastics demonstrate distinct accumulation in Arabidopsis thaliana, Xiao-Dong Sun et al., Nature Nanotechnology, 22 juin 2020
- Micro- and nano-plastics in our environment: Understanding exposures and impacts on human health, Call H2020-SC1-BHC-2018-2020
- Focus on Nanoplastic, Nature Nanotechnology, avril 2019
- Emergence of Nanoplastic in the Environment and Possible Impact on Human Health, Lehner R et al., Environ. Sci. Technol., 2019
- Quantifying ecological risks of aquatic micro- and nanoplastic, Besseling E et al., Critical Reviews in Environmental Science and Technology, 2019
- Biological Effects and Implications of Micro- and Nanoplastics in the Aquatic Environment, Rist S, thèse, Technical University of Denmark, 2019
- Closing the gap between small and smaller: towards a framework to analyse nano- and microplastics in aqueous environmental samples, Mintenig, SM et al., Environ. Sci.: Nano,5 : 1640-1649, 2018
- Nanoplastics in the Aquatic Environment, Mattsson K et al., in Microplastic Contamination in Aquatic Environments - An Emerging Matter of Environmental Urgency, 379-399, 2018
- Ingestion of micro- and nanoplastics in Daphnia magna – Quantification of body burdens and assessment of feeding rates and reproduction, Rist S et al., Environmental Pollution, 228 : 398-407, septembre 2017
7 - Cf. Are gold nanoparticles and microplastics mixtures more toxic to the marine microalgae Tetraselmis chuii than the substances individually?, Davarpanah E, Guilhermino L, Ecotoxicology and Environmental Safety, 181 : 60-68, octobre 2019
8 - Cf. ECHA proposes to restrict intentionally added microplastics, ECHA, 30 janvier 2019 ; ANNEX XV RESTRICTION REPORT - PROPOSAL FOR A RESTRICTION- intentionally added microplastics, ECHA, janvier 2019 : "‘microplastic’ means a material consisting of solid polymercontaining particles, to which additives or other substances may have been added, and where ≥ 1% w/w of particles have (i) all dimensions 1nm ≤ x ≤ 5mm, or (ii), for fibres, a length of 3nm ≤ x ≤ 15mm and length to diameter ratio of >3"
9 - Le 1er septembre 2020, l'ONG Bureau européen de l'environnement (BEE) a alerté sur le lobbying des industriels qui ont fait reculer l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) dans son projet de restriction des microplastiques ajoutés intentionnellement dans de nombreux produits (détergents, peintures et encres, matériaux de construction, médicaments et engrais) : incluses dans le projet initial, les nanoparticules de plastique ont été retirées du projet présenté en juin par l'ECHA. Dans l'article "Microplastiques : lobbying aux frontières du minuscule" paru le même jour dans Le Monde, la journaliste Stéphane Horel relaie les travaux du BEE qui montrent comment les industries chimiques et leurs fédérations (CEFIC, PlasticsEurope), en prônant l'autorégulation, sont parvenues à faire passer de 1 à 100 nanomètres la taille des particules de plastique concernées par les mesures de restriction envisagées par l'ECHA. Les microplastiques seraient ainsi interdits, mais pas les nanoplastiques alors que ces nanoparticules sont "à la fois plus toxiques et plus facilement absorbées par les cellules vivantes" a souligné le BEE.
10 - The road to an effective EU restriction of intentionally-added microplastics, Rethink Plastic, le Bureau européen de l'environnement (BEE), Client Earth et Break free from Plastic, 16 novembre 2020 (p.15)
11 - Voir par exemple :
- Caractériser les microplastiques dans les milieux marins : Le LNE impliqué dans le projet MOUSTIC, LNE, 12 février 2021 (partenariat LNE - Institut des matériaux Jean Rouxel (IMN) - Laboratoire de sécurité des aliments de l’ANSES (site Boulogne-sur-Mer) - INRAE (unité BIA)).
- Measuring particle size distribution and mass concentration of nanoplastics and microplastics: addressing some analytical challenges in the sub-micron size range", Caputo F et al., Journal of Colloid and Interface Science, 401-417, avril 2021.
- Georges Favre, directeur Institut LNE Nanotech, sur LinkedIn, 25 janvier 2021 : "ES-SMPS can be also a good option in this aim by providing number concentration and a size range from a few nm to 500 nm. Work to develop an ISO standard on this analytical approach will start in an early future"
12 - Cf. L’OMS appelle à renforcer la recherche sur les microplastiques et à prendre des mesures énergiques contre la pollution par le plastique, OMS, 22 août 2019
13 - Cf. Global Summit on Regulatory Science 2019 Nanotechnology and Nanoplastics, JRC & GCRSR, Publications Office of the European Union, 2020
14 - Parmi les autres préconisations plus générales :
- un accroissement des efforts pour garantir que les essais concernant les nanomatériaux, et tout particulièrement ceux utilisés en nanomédecine, soient rigoureux, reproductibles et comparables entre les échantillons et les situations, tout au long de la filière de développement
- une harmonisation des méthodes, des normes et des matériaux de référence
- l'intensification des efforts internationaux en cours pour faire face aux dangers potentiels des nanomatériaux pour la santé et l'environnement
- le développement des collaborations et une communication continue sur la recherche scientifique en matière de réglementation des nanomatériaux, ainsi que l'harmonisation appropriée des structures juridiques et réglementaires
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Fiche initialement créée en février 2019