Mi-mars 2016, BASF a rendu public le rapport final avec les conclusions de son Dialogforum Nano 2014-2015, un espace déchange sur les problèmes politiques et sociétaux liés aux nanotechnologies associant des représentants de groupes environnementaux, dassociations de consommateurs, dorganismes de recherche, de syndicats, de pouvoirs publics et de BASF.
Ce long travail constructif mérite dêtre salué. Deux regrets néanmoins :
Il sest essentiellement concentré sur la transparence : les questions de responsabilité et de gestion des incertitudes ont été reléguées en second plan.
Bilan 2014 de la déclaration des "substances à létat nanoparticulaire"
Bilan 2014 de la déclaration des "substances à létat nanoparticulaire"
Du mieux en matière de transparence et de traçabilité... mais la marge de progression reste grande !
Par MD, DL et l'équipe Avicenn
Article mis en ligne le 12 novembre 2014 - Dernière modification le 12/01/15
400 000 tonnes de nanomatériaux produits ou importés en France en 2013 ont fait l'objet d'une déclaration par des entreprises ou des laboratoires de recherche cette année. Cest le résultat publié dans le bilan officiel de la deuxième année du dispositif R-Nano en France le 12 novembre dernier. C'est 100 000 tonnes de moins que l'année précédente, malgré un triplement du nombre de déclarations.
Le bilan officiel : trois fois plus de déclarations et deux fois plus de déclarants quen 2013
Ce rapport rappelle le cadre réglementaire, présente la procédure de la déclaration obligatoire des "substances à l'état nanoparticulaires" (abrégées en "substances nano" dans le reste du texte ci-dessous) et le fonctionnement de la plateforme informatique de R-nano.
Il explicite les définitions applicables et les règles retenues pour lexploitation des données, présente des données générales sur les déclarations et recense les noms chimiques et les usages déclarés ainsi que les bandes de tonnage correspondantes, agrégées par substance.
Les principaux résultats de la déclaration annuelle 2014 des "substances nano" produites, importées et distribuées en 2013, sont les suivants :
Au 31 mai 2014, plus de 1 700 déclarants ont effectué plus de 10 400 déclarations (contre 930 déclarants et 3 400 déclarations en 2013)
1490 entités françaises ont soumis au moins une déclaration (670 en 2013)
Les acteurs français ayant déclaré se répartissent comme suit (un déclarant pouvant être à la fois dans plusieurs catégories) :
209 importateurs français en 2014 (12 % des déclarants)
54 producteurs français en 2014 (3% des déclarants)
1403 distributeurs en 2014 (83% des déclarants)
34 "autres" (2 % des déclarants)
Il y a eu une montée en puissance du dispositif par rapport à la première année de mise en place du dispositif, surtout auprès des distributeurs, du fait notamment d'une meilleure transmission des informations dans les chaînes de distribution.
Près de 400 000 tonnes de substances nano ont été mises sur le marché en France en 2013 (500 000 tonnes déclarées mises sur le marché en 2012) :
275 000 tonnes de substances produites
122 000 tonnes de substances importées
Selon le ministère de l'écologie, la diminution observée des quantités produites et importées pourrait être due au fait que les acteurs, au vu de lexpérience de lannée précédente, ont pu bénéficier de données plus précises concernant les substances mises sur le marché (et ainsi déclarer des quantités de "substances" et non de "mélanges" par exemple).
Parmi les principales catégories figurent les matériaux de construction, peintures et rénovation (~25%), les cosmétiques (23%) et les produits phyto pharmaceutiques utilisées en agriculture (22%).
Quelle exploitation des données ?
Selon le ministère de l'écologie :
En 2014, les données déclarées relatives aux nanotubes de carbone et au nano-dioxyde de titane ont été communiquées à l'InVS dans le cadre du projet Epinano pour le suivi de cohortes de travailleurs exposés aux nanomatériaux.
L'INERIS va également exploiter certaines données issues de la base R-nano dans le cadre de ses programmes dappui au ministère de lécologie, notamment pour lévaluation des risques accidentels (inflammabilité, explosivité).
En 2015, l'ANSES va s'appuyer sur un groupe de travail afin de déterminer et lister les usages qui peuvent être fait des données collectées dans le cadre des travaux dévaluation de l'Agence.
Avec quels moyens ? La hausse du nombre de déclarations risque de rendre délicate l'exploitation des données. L'ANSES a-t-elle les moyens suffisants pour faire face à l'afflux d'informations collectées ?
Premiers éléments d'analyse
Avicenn présente ci-dessous ses premiers éléments d'analyse du rapport et va collecter les réactions des différentes parties prenantes sur cette page : vos avis, réactions et analyses nous intéressent : n'hésitez pas à nous les envoyer (redaction(at)veillenanos.fr) afin que nous puissions donner à nos lecteurs le point de vue de l'ensemble des acteurs concernés.
Plus de déclarants = plus de personnes sensibilisées et mieux protégées ?
Le ministère se félicite qu'un nombre croissant d'acteurs se soient mobilisés pour effectuer la déclaration obligatoire, notamment les distributeurs dont le nombre a doublé entre 2013 et 2014 et qui ont effectué la majorité des déclarations.
L'augmentation du nombre de déclarants et de déclarations était néanmoins prévisible. L'année 2013 avait été en effet la première année de mise en place du dispositif, il est normal qu'au fil du temps les acteurs concernés soient plus nombreux à être informés et à appliquer la loi.
Grâce au système d'enregistrement et à la transmission par les fournisseurs du numéro de déclaration à leurs clients, de nombreux acteurs professionnels ont été informés par leur(s) fournisseur(s) de la présence de nanomatériaux dans les produits qu'ils achetaient et ont pu à leur tour informer leurs clients. Au final, plus d'acteurs ont pu découvrir qu'ils manipulaient des produits contenant des "substances nanos" : via cette prise de conscience, on peut espérer qu'un certain nombre d'entre eux ont commencé à (ou vont pouvoir) mettre en place des mesures pour limiter l'exposition professionnelle à ces substances : est-ce le cas ? Vos témoignages nous intéressent (redaction(at)veillenanos.fr).
Il est dommage qu'aucune communication publique du ministère n'ait accompagné la mise en ligne du rapport : aucun communiqué de presse, tweet, etc. n'a alerté les médias afin de donner plus de visibilité au travail réalisé et de sensibiliser encore davantage d'acteurs potentiellement concernés.
Le nanoargent et les nanotubes de carbone font leur apparition dans le bilan
- Le nanoargent apparaît mais dans une fourchette comprise entre 0,1 à 1 kg seulement (page 43 de l'annexe 1). Cette quantité négligeable par rapport aux quantités de nanoargent estimées1 confirme et illustre les limites de R-Nano qui ne contient aucune donnée sur les nanomatériaux qui ne sont pas importés en tant que tels : les nanomatériaux déjà intégrés aux produits (électroménagers, textiles, objets de puériculture, etc.) à l'étranger avant d'arriver en France ne sont pas soumis à déclaration ! Idem pour ceux dont le relargage n'est pas "intentionnel"... bien qu'il puisse exister sous l'effet de l'usure, de l'abrasion ou du lavage des produits, entraînant des risques pour l'environnement.
- Les nanotubes de carbone multi-parois apparaissent eux aussi, avec une quantité comprise entre 1 et 10 tonnes (page 27 de l'annexe 1 ).
Plus de transparence ? Il reste une grande marge de progrès...
Il y a eu moins de 60 déclarations pour lesquelles au moins une demande de confidentialité sur le nom chimique ou sur les usages a été déposée en 2014, contre 112 en 2013.
Les 6 demandes de dérogation défense déposées ont toutes été refusées par le ministère de la défense, et pour le reste, aucun nom chimique ne demeure confidentiel au titre du secret industriel et commercial du fait de l'application de règles dont l'UIC et le MEDEF auraient voulu quelles protègent davantage la confidentialité des données ce à quoi Avicenn s'est opposée lors des réunions du groupe de travail dédié à ce dispositif2., au nom de la transparence et de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE).
Selon le ministère :
en 2014, les demandes de confidentialité ont dû faire l'objet d'une justification plus précise qu'en 2013.
les déclarants ont pu être rassurés par la forme donnée à la publication des données 2013 qui ne portait pas atteinte au secret industriel et commercial
N'y aurait-il cependant d'autre choix, pour gagner davantage de données, que de sacrifier la clarté et le caractère exploitable des données collectées ?
Une interprétation des données très difficile à mener - concernant l'agriculture... mais aussi tous les autres secteurs
Comme l'an passé, en dépit des efforts déployés par l'administration pour rendre le document plus lisible, le rapport public reste très délicat à analyser.
On en trouve une illustration à travers l'augmentation considérable du nombre de déclarations dont l'usage déclaré entre dans la catégorie "agriculture, sylviculture et pêche" : de 1,2% en 2013, la part de ces déclarations est passée à 64% en 2014 ! Mais ces chiffres ne fournissent en fait aucune indication fiable sur le volume ou la quantité de nanomatériaux utilisés dans l'agriculture.
La forte proportion de ces déclarations s'explique notamment du fait que 99% de ces déclarations ont été remplies par des distributeurs (6 373 sur 6 412) : dans le secteur agricole, la pratique des enregistrements est déjà très rodée dans le cadre de la base nationale de données sur les ventes PhytoData.
Afin d'essayer d'éclaircir l'utilisation des nanomatériaux dans l'agriculture, Avicenn a mis en ligne une bibliographie sur le sujet "nano et agriculture" sur ce site veillenanos.fr et prépare un dossier plus détaillé. Vos commentaires et suggestions nous intéressent (redaction(at)veillenanos.fr).
Plus généralement, dans l'état actuel du dispositif, on ne peut pas apprécier les quantités de nanomatériaux utilisés pour quelque secteur que ce soit. Il ne s'agit pas ici de la conséquence de l'application des règles de confidentialité : même l'ANSES, dans la base R-Nano, n'a pas dinformation sur la quantité respective des différents usages des substances déclarées !
Quelles améliorations apporter au dispositif ?
Malgré les avancées tangibles mises en évidence par ce deuxième bilan, on peut encore regretter que l'étroitesse du dispositif ne permette toujours pas de disposer d'une bonne représentation sur les quantités, la nature et l'usage des nanomatériaux commercialisés en France.
Il reste encore beaucoup à faire pour consolider notre capacité collective à évaluer et minimiser l'exposition des consommateurs, des travailleurs et de l'environnement aux divers nanoproduits et à leurs résidus et pour agir de façon adaptée notamment en interdisant certains usages.
Une révision du décret instituant la déclaration obligatoire a été envisagée pour 2015 pour clarifier certains points du texte. Mais elle est suspendue à la décision que la Commission européenne va prendre suite à la consultation en 2014 concernant la mise en place d'un éventuel registre nano à l'échelle européenne. ). Si la Commission décide de mettre en place un registre européen similaire à R-Nano, le registre européen se substituera aux registres nationaux (français, belge et danois). Mais si la Commission renonce ou met en place un registre contenant moins d'informations ? II faudra rendre possible l'interopérabilité entre les registres nationaux et le décret devrait être modifié en conséquence.
Un certain nombre de failles du dispositif actuel doivent être colmatées pour en améliorer efficacité - qu'il s'agisse du futur registre européen ou du registre R-Nano "version 2". Nous en avons recensé plusieurs sur notre fiche sur le dispositif R-Nano qui propose également plusieurs mesures afin de répondre à l'objectif de traçabilité mais également de mieux connaître les usages finaux de ces "substances nano" et mieux informer le consommateur.
65% des susbtances produites et/ou importées sous le seuil d'enregistrement de REACh
65 % des substances produites et/ou importées le sont en quantité inférieure à une tonne (cf. tableau 9 de la page 24), seuil en deçà duquel lobligation denregistrement de REACh ne s'applique pas. Voilà qui permet d'objectiver le débat sur l'encadrement des nanomatériaux par REACh en prouvant, chiffres à l'appui, l'insuffisance de ce Réglement3. LIRE AUSSI :
2 - Lors de la réunion de mars 2014, des représentants de fédérations industrielles ont demandé à ce que toute demande de confidentialité sur le nom chimique soit répercutée automatiquement en aval de la chaîne d'approvisionnement. AVICENN s'est déclaré défavorable à cette rétention dinformations. Le ministère a proposé un compromis et demandé au prestataire informatique la mise en place de 2 avertissements à destination des déclarants, qui sera effective en 2015 :
pour le déclarant amont, un rappel qu'il doit fournir une justification et se rapprocher de ses clients qui utiliseront le n° fourni pour les inviter à reporter la demande de confidentialité dans leur propre déclaration
pour le déclarant aval, un message stipulant qu'une demande de confidentialité pour la non mise à disposition du grand public a été faite sur le nom chimique de la déclaration qu'il est en train d'importer
En guise de réponse aux demandes des pouvoirs publics et de la société civile, la Commission européenne a lancé en 2014 une "consultation sur les mesures de transparence concernant les nanomatériaux sur le marché" annoncée début 20131 afin de définir et délaborer les moyens les plus appropriés pour accroître la transparence et assurer l'encadrement des nanomatériaux2.
L'avis de marché public, effectivement publié en juin 2013, précisait que "la Commission envisagera notamment la possibilité de proposer, en plus des obligations REACH et CLP existantes, la tenue d'un registre des nanomatériaux et des produits contenant des nanomatériaux. L'étude doit permettre de collecter les données pertinentes requises pour cette analyse d'impact, à savoir notamment :
les coûts et la charge administrative liés à d'éventuelles obligations d'enregistrement pour les entreprises,
les impacts possibles sur leur compétitivité et les risques éventuels pour l'innovation en Europe,
ainsi que les avantages potentiels de l'information ainsi générée pour les consommateurs et les responsables politiques, en comparaison avec les sources d'information existantes" 3.
Le marché a été confié aux cabinets de conseil Risk & Policy Analysts Ltd. (RPA) et BiPRO GmbH. RPA est venu prendre connaissance du registre français des nanomatériaux R-Nano lors d'une réunion du groupe de travail R-Nano piloté par le Ministère de l'Ecologie en mars 2014, auquel Avicenn a participé (la seule ONG présente, à côté de nombreux représentants des fédérations professionnelles).
option 1 : un guide de recommandations afin de mettre en oeuvre un modèle basé sur les "meilleures pratiques", destiné aux Etats membres qui veulent lancer leur propre registre des nanomatériaux au niveau national (approche "soft law")
option 2 : une approche structurée afin de recueillir toutes les informations disponibles dans un observatoire des nanomatériaux au niveau européen ("Nanomaterials Observatory")
option 3 : une régulation instaurant un registre européen des nanomatériaux dans lequel seraient uniquement déclarées, chaque année, les substances à l'état nanoparticulaire
option 4 : une régulation instaurant un registre européen des nanomatériaux dans lequel seraient déclarés, chaque année, les usages, y compris les substances, mélanges et articles avec rejet intentionnel
Selon Chemical Watch, lors de la réunion du CASG nano de mars 2014, la Commission avait affirmé qu'elle avait prévu des exemptions potentielles au registre, notamment :
pour les substances à l'état nanoparticulaire utilisées pour la recherche et développement,
Pourquoi une telle mesure ? Deux arguments ont été avancés, chacun contesté par le Bureau européen de l'environnement (BEE) :
premier argument invoqué : il s'agirait d'alléger la quantité d'informations qui serait sinon trop importante. Le BEE a rappelé que l'objectif du registre est justement d'obtenir des informations.
second argument : les pigments et les substances, parce qu'ils sont sur le marché depuis de nombreuses années, ne présenteraient pas de risques. Le BEE conteste une telle affirmation qu'il juge complètement infondée : l'absence d'informations n'est pas synonyme d'absence de risques !
La Commission a répondu qu'elle allait revoir ses propositions concernant les exemptions et les a en effet rendu moins explicites dans la version définitive de la consultation mise en ligne le 13 mai : les questions 4 et 5 de la section VIII permettent aux sondés d'exprimer leur préférence pour une exemption de "certains types de nanomatériaux" ou de "certains types d'usages", libres à eux de préciser leur demande. La contre-argumentation est donc moins évidente pour celles et ceux qui n'ont pas été informés des points soulevés plus haut et ne peuvent avoir connaissance des demandes des autres sondés.
Quid des nanomatériaux dont le relargage, même non intentionnel, est pourtant bien réel ?
Lors de la réunion du CASG nano de mars 2014, la Commission avait également précisé que les substances considérées seraient limitées aux seules nanosubstances censées être intentionnellementrelarguées par les produits qui les contiennent, suscitant le mécontentement d'une partie des participants.
La raison invoquée par la Commission ? Une question de coût.
Dans la Section VIII de la version définitive de la consultation mise en ligne le 13 mai, elle offre la possibilité aux sondés de cocher (ou non) comme devant être soumises à déclaration : les substances / les mélanges contenant des nanomatériaux / les articles contenant des nanomatériaux dont le relargage est intentionnel / les articles contenant des nanomatériaux dont le relargage n'est pas intentionnel.
Le dernier point concerne les nanomatériaux supposés incorporés aux produits mais qui peuvent pourtant s'en désolidariser, du fait de leur usure, de l'abrasion, du lavage ou lors de la fin de vie des produits (comme les nanorevêtements des textiles ou des surfaces par exemple).
Le registre français R-Nano a été construit en excluant ces nanomatériaux dont le relargage n'est pas intentionnel - mais le bilan de sa première année de fonctionnement a permis de constater qu'il est du coup largement incomplet : le nanoargent a ainsi complètement échappé au registre R-Nano en 2013 (alors même que son utilisation est importante et ses risques pour la santé ou l'environnement sont de plus en plus documentés)5.
Des études scientifiques ont en effet montré que, lors du lavage notamment, du nanoargent peut se détacher des textiles auxquels il est intégré6 et se retrouver dans les eaux usées (avec des conséquences encore très mal évaluées sur le fonctionnement des stations d'épuration, la qualité de l'eau du robinet et les terres agricoles sur lesquelles sont épandues les boues des stations d'épuration).
Des chercheurs ont également montré que des nanotubes de carbone (dont les risques sont eux aussi de plus en plus reconnus), même contenus dans une matrice, peuvent être relargués dans l'environnement sous l'effet du soleil et d'une humidité modérée ou de l'abrasion7.
"Atelier" à Bruxelles le 30 juin 2014
Un "atelier" a été organisé par la Commission le 30 juin à Bruxelles ("validation workshop on transparency measures for nanomaterials"). Les présentations sont téléchargeables ici.
Trois nouveaux rapports publiés en juin 2014
La Commission européenne a publié en juin 2014 trois rapports que lui ont fournis les cabinets BiPro et RPA :
the Evaluation Report8 donne un aperçu des régimes existants (dont le registre français R-Nano) et évalue leur impact.
the Building Blocks Report9 aborde les risques, les dangers, les chaînes de valeur et l'innovation.
the Options Assessment Report10 définit et analyse les quatre options présentées dans le projet de document de travail qui a été publié avec l'annonce de la consultation publique.
La Nanotechnology Industries Association (NIA), qui compte parmi ses membres L'Oréal ou Tetra Pak, a lancé une consultation fin mai auprès de ses membres pour préparer une réponse d'ici le 4 juillet11 ; pour mémoire la NIA avait défendu une position minimaliste dans le cadre de la consultation de 2013 sur l'adaptation des annexes de REACh aux nanomatériaux, avec pour objectif affiché celui de "ne pas entraver la compétitivité ni l'innovation des entreprises".
La Commission européenne a reçu 202 réponses à cette consultation publique :
100 réponses en provenance de l'industrie
102 réponses en provenance des autres parties prenantes (dont une dizaine émanant de pouvoirs publics et 85 environ émanant d'ONG - dont Avicenn - ou de citoyens)
A l'exception de 14 réponses dont les auteurs ont demandé la confidentialité (8 industriels et 6 non-industriels), toutes les autres contributions sont téléchargeables sur le site de la Commission, dont certaines sont anonymisées.
FRANCE - Une consultation en toute discrétion sur le décret de déclaration nano
FRANCE - Une consultation en toute discrétion sur le décret de déclaration nano
Le Ministère de l'Ecologie a lancé une consultation restreinte sur la 2ème version du projet de décret relatif à la déclaration des substances à l'état nanoparticulaire mises sur le marché. L'Avicenn vous informe sur le contenu de ce projet, la publicité qui lui a été donnée, ainsi que son calendrier.
par MD avec l'équipe Avicenn - 15 avril 2011 (dernière modification juillet 2011) Sommaire
- Une déclaration obligatoire dès août 2011 selon les lois Grenelle, une première consultation sur le décret d'application en janvier 2011
Les lois Grenelle 1 et Grenelle 2 ont prévu la mise en place d'une déclaration obligatoire des substances à l'état nanoparticulaire fabriquées, importées ou mises sur le marché en France.
Initialement prévue pour août 2011, cette déclaration a pour objectifs de :
mieux connaître les nanomatériaux produits, importés ou mis sur le marché (identité, quantités, usages) ;
assurer la traçabilité des nanomatériaux - des fabricants, aux utilisateurs professionnels, en passant par les distributeurs et les importateurs ;
fournir les éléments nécessaires à l'évaluation des risques et à linformation du public.
En la matière, la France serait ainsi le premier pays à se doter d'un tel dispositif obligatoire attendu par de nombreux acteurs : pour l'heure, les inventaires qui ont le mérite d'exister0, loin d'être exhaustifs, sont élaborés à partir de déclarations des industriels ou d'hypothèses sur la composition des produits, sans vérification possible, faute de moyens financiers, humains et / ou techniques.
A noter cependant, en ce qui concerne le volet "information du public", le fait que le législateur n'est pas allé jusqu'à prévoir un étiquetage de ces "substances à l'état nanoparticulaire" : une fois commercialisées, ces nanos "disparaissent" de la vue du consommateur. Toute personne désirant en savoir plus pourra se tourner vers l'ANSES, dont les modalités de réponse restent encore à définir, du fait de limites à la publication des données recueillies dans le cadre de la déclaration obligatoire, liées au secret industriel ou commercial.
- Une première consultation sur le décret d'application en janvier-février 2011
Une première consultation publique avait été lancée sur son site par le Ministère de l'Ecologie du 5 janvier au 28 février dernier sur une première version de projet de décret.
Associations de protection de lenvironnement, associations de consommateurs, organismes de recherche publics, syndicats de travailleurs, syndicats et organisations professionnels, ministères concernés et collectivités locales avaient été prévenus par courrier.
Une soixantaine de réponses auraient été reçues1, dont celle de l'ANSES.
Mars-Avril 2011 : une seconde consultation en toute discrétion
Une deuxième version du projet de décret (V2) relatif à la déclaration des substances à l'état nanoparticulaire mises sur le marché, datée du 28 mars 2010, a été envoyée aux organismes ayant répondu à la première consultation. Selon nos informations, cette V2 a été soumise à une consultation restreinte entre le 29 mars et le 11 avril.
Selon une source ministérielle, "une quinzaine de commentaires écrits" auraient été envoyés à ce jour sur la V2.
Par rapport à la V1, les éléments les plus notables sont :
la simplification de la définition de "substance à l'état nanoparticulaire" qui gagne en lisibilité mais abandonne la référence au projet de recommandation de la Commission européenne. En cause, le retard pris par la Commission dans l'adoption de cette définition du fait de blocages au niveau européen en raison des désaccords entre parties prenantes, que l'on retrouve également à l'échelle française.
le durcissement de la sanction en cas de non respect de l'obligation légale : l'article art. R. 523-20 ajoute en effet une sanction administrative (une amende de 1500 euros avec astreinte journalière de 150 euros) à la sanction pénale déjà prévue dans la V1 (une "contravention de la 5ème classe" d'un montant de 1500 ), qualifiée par certains de "nano-amende".
Quelle transparence ?
Sur la soixantaine d'institutions ayant répondu à la première consultation, rares sont celles qui ont jugé opportun de publier en ligne l'avis qu'elles ont communiqué au ministère. Nous avons identifié ceux de l'ANSES, de NanoNorma, de VivAgora, d'Ingénieurs et Scientifiques de France ou du MEDEF. A notre connaissance, l'Institut National de Recherche et de Sécurité a également répondu mais n'a pas publié sa réponse à la première consultation ni ses commentaires à la deuxième.
Selon nos informations, le ministère n'a pas prévu de rendre publiques les contributions reçues - comme avait pu le faire, lors du débat de 2009-2010, la Commission nationale du débat public2, ou comme il est souvent d'usage dans le cadre des consultations européennes, pour lesquelles les réponses sont généralement publiées (au moins sous la forme d'extraits et au moment de la parution du texte définitif).
Une telle transparence a pourtant été encouragée par l'OCDE de 2010 : « La France pourrait établir un registre unique sur Internet de tous les projets de dispositions en consultation. Pour assurer une plus grande efficacité et responsabilisation publique le registre devrait aussi incorporer les commentaires des parties avec l'argumentation et la réponse des autorités réglementaires »3.
En matière de transparence, il est à noter que c'est... la Société Française de Métallurgie et de Matériaux (SF2M) et le Groupe Français de la Céramique (GFC) qui ont publié la deuxième version du projet de décret ! Le texte, contrairement à la première version du projet, ne figure pas sur le site du ministère de l'Ecologie et du Développement durable, qui ne l'a communiqué qu'aux seuls acteurs ayant répondu à la première consultation.
Quelle place pour la société civile ?
La V2 a fait hier l'objet d'une réunion avec les acteurs de la recherche publique, suivie aujourd'hui par une autre réunion avec les acteurs de l'industrie. Pas de réunion prévue, à notre connaissance, avec la société civile. Pourquoi la dynamique collégiale du Grenelle de l'Environnement, qui a accordé aux ONG une place au même titre qu'aux industriels, n'a-t-elle pas été poursuivie - surtout pour un décret d'application des lois Grenelle ?
Les délais seront-ils tenus ?
Selon les lois de Grenelle, la déclaration dev(r)ait entrer en vigueur en août 2011,
Ce projet de V2 nécessite une notification auprès de la Commission européenne4, ce qui entraînerait un délai supplémentaire avant la publication du décret final.
Les discussions en cours et à venir, selon qu'elles seront plus ou moins consensuelles, pourraient également avoir des répercussions sur le calendrier. Selon nos dernières informations, la V2 aurait fait l'objet d'"un meilleur accueil que la première version".
Le décret sera-t-il publié - et en quels termes - avant août 2011 ? Suspense... L'Avicenn continue sa veille sur le sujet.
Sans déclaration, une navigation à vue
Sans une telle déclaration, scientifiques et agences sanitaires en sont aujourd'hui réduits à faire des estimations à la louche et à l'aveuglette, comme en atteste cette publication scientifique récente de chercheurs de Caroline du Nord : Estimating Production Data for Five Engineered Nanomaterials As a Basis for Exposure Assessment, relayée par NanoWerk ce 11 avril : Does anyone know how much nanomaterials are produced? Anyone...? .
Dans cet article, la production de nanoargent aux Etats-Unis n'est estimée qu'à 20 tonnes par an. Pour mémoire, en 2008, deux scientifiques, Mueller & Nowack, avaient estimé la production annuelle mondiale à 500 tonnes par an5.
Une telle divergence dans les estimations s'explique par le manque de données fiables existant à ce jour. D'où l'intérêt de voir se développer des déclarations obligatoires - en France mais également à l'étranger - afin de remédier à ces lacunes.
l'inventaire de 2010 réalisé conjointement par le BEUC, Bureau européen des unions de consommateurs et l'ANEC, association européenne pour la coordination de la représentation des consommateurs dans la normalisation
l'inventaire du think tank américain Project on Emerging Nanotechnologies (PEN) mis à jour en mars dernier
ou le Guide des nanotechnologies des Editions des Techniques de l'Ingénieur, seconde édition, avril 2011
Enquête(s) en cours : quelles nanos dans les matelas Bultex Nano ? Et quel sort fait aux nanos dans le label OEKO-TEX® ?
Enquête(s) en cours : quelles nanos dans les matelas Bultex Nano ? Et quel sort fait aux nanos dans le label OEKO-TEX® ?
par DL, MD et l'équipe Avicenn, le 22 mai 2015
La compagne de publicité Bultex Nano lancée par le fabricant de matelas en 2014 a conduit plusieurs personnes à nous demander si les matelas "Bultex Nano" contiennent des nanomatériaux et, si oui, quels types de nanomatériaux.
Vous trouverez ci-dessous les éléments que nous avons collectés. Cette fiche a vocation à être complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
A priori, selon le site du fabricant, il ne s'agit pas de nanoparticules, mais d'une structuration interne du matelas sous forme d'alvéoles de taille nanométrique :
Les informations disponibles sur le site, peu précises, laissent à penser qu'il s'agit de mousses particulières utilisant des polymères nouveaux, légers et qui ne se tassent pas trop.
S'il ne semble pas y avoir lieu de s'alarmer quant à de potentiels risques pour les clients, la question de précaution peut être posée pour les transformateurs susceptibles d'inhaler des poussières lors de la fabrication et de la découpe de mousses : cf. http://www.atiscuir.com/pages/decoupe_de_mousse_sur_mesurepag.html.
La question du cycle de vie du produit se pose également : les matelas sont présentés comme étant "plus durables"... mais de 7% seulement. Comment vieillissent ces mousses, nano ou pas ? Au bout de combien de temps le matelas se déteriore-t-il en poussière jaunie ?
Quant à l'antibactérien utilisé, rien n'est dit non plus sur sa composition. Nous avons posté une question demandant la nature de l'antibactérien via le formulaire de contact il y a plusieurs mois, sans retour à ce jour.
Nous avons exploré la certification OEKO-TEX®. Il y a 2 questions sur la présence de nanoparticules et leur relargage en cours de lavage dans le formulaire de demande de cette certification, mais on ignore si cela constitue un motif de refus de certification ou non. Est-ce que si le fabricant déclare la présence de nanomatériaux mais affirme qu'ils sont intégrés dans une matrice qui est censée empêcher leur relargage, la certification est accordée ?
Divers tests sont demandés, mais ne portent pas explicitement sur la taille ou les propriétés / la toxicité spécifiques de l'échelle "nano".
Les critères de contrôles ne mentionnent pas la taille nano, et disent simplement "si c'est légal ou non interdit légalement".
En attendant d'en savoir plus, les conseils de grand-mère restent d'actualité pour une bonne hygiène de la chambre à coucher et lutter contre les acariens :
éviter de chauffer les chambres à coucher à plus de 18°C
aérer la chambre tous les jours pendant au moins quinze minutes
aspirer le matelas une fois par mois
retourner le matelas tous les 6 mois au moment du changement de saison
étendre couettes et oreillers dehors / au soleil quand il fait beau et sec
laver couettes, oreillers et couvertures une fois par an
éliminer tapis et moquette
Vous avez mené une enquête de votre côté et obtenu des informations que vous pouvez partager avec nous ? Merci de nous écrire à redaction(at)veillenanos.fr.
Nano et Santé au travail (3c/3) : Recommandation c : Informer et former les travailleurs et leur hiérarchie
Nano et Santé au travail (3c/3) : Recommandation c : Informer et former les travailleurs et leur hiérarchie
Par MD, et l'équipe Avicenn - Dernière modification octobre 2020
Cette fiche fait partie de notre Dossier Nano et Santé au travail. Elle a vocation à être complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
Théoriquement, les travailleurs doivent être informés et formés
Il n'y a pas de dispositions spécifiques sur les nanomatériaux dans la directive-cadre européenne sur la sécurité et la santé au travail de 19891. Cette dernière précise cependant qu'il est de la responsabilité de l'employeur d'assurer la sécurité des travailleurs, notamment via une information et une formation adéquates et régulièrement actualisées sur la sécurité, ainsi que des instructions spécifiques.
Ces dispositions générales sont à décliner concrètement, tout particulièrement dans le cas des nanomatériaux, dans la mesure où les risques liés à ces substances sont encore mal connus et potentiellement importants.
Dans les faits, un fort déficit d'information et de sensibilisation...
Sur le terrain, le niveau d'information est variable en fonction des secteurs :
dans certaines grandes entreprises, certains grands organismes de recherche ou entreprises issues des universités (spin-off), il semble y avoir une meilleure organisation et mise à disposition de l'information sur les risques et sur les mesures de prévention à prendre concernant la manipulation des nanomatériaux
à l'inverse, dans les petites et moyennes entreprises, chez les artisans ou travailleurs indépendants, beaucoup de personnes sont amenées à manipuler sans le savoir des produits semi-finis et/ou finis contenant des nanomatériaux.
Il ne faudrait pas pour autant penser que la situation des grandes entreprises ou des laboratoires de recherche est optimale (cf. paragraphe suivant). Les enquêtes menées auprès des industriels montrent un niveau très bas de préoccupation et/ou de transparence, certaines entreprises refusant de répondre aux questions, ce qui n'a pas permis d'obtenir des données de qualité2.
De l'avis de beaucoup d'acteurs, l'information sur les lieux de travail est encore largement insuffisante et il reste un grand travail de sensibilisation et d'information à effectuer afin que puissent émerger les conditions d'une mise en oeuvre d'une politique de prévention.
L'information et la formation sont à développer auprès de différents publics :
des préventeurs en santé et sécurité au travail dans l'entreprise : service HSE des entreprises, membres de comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et des élus de comités d'entreprise (CE), délégués du personnel (DP), référents santé sécurité, médecin du travail d'entreprise ou de groupe, infirmière d'entreprise, médecin de prévention dans la fonction publique, ...
des opérateurs en contact avec les nanomatériaux
des personnes chargées du nettoyage, de l'entretien et de la maintenance des équipements et des locaux - y compris ceux provenant d'entreprises extérieures et d'intérimaires
des responsables de laboratoire ou de service
des médecins du travail
des services de contrôle de l'Etat (DREAL, DIRECCTE, ...)
des branches et fédérations professionnelles
... voire une perception minimisée des risques due à différents biais
Les enquêtes menées auprès des chercheurs en nanosciences / nanotechnologies (chimistes ou physiciens) montrent une faible sensibilisation aux risques associés aux nanomatériaux - que ce soit aux Etats-Unis et au Canada (à l'inverse des toxicologues, écotoxicologues, biologistes, ou chercheurs en sciences sociales généralement plus prudents)3, en Europe4 mais aussi en France au CEA5 par exemple : le risque lié aux nanomatériaux est soit minimisé, soit considéré comme étant "sous contrôle". Dans ce dernier cas pourtant, le "contrôle" des risques s'arrête aux portes du laboratoire ! Les risques relatifs aux produits qui en sortent ne sont pas maîtrisés, exposant du coup des travailleurs amenés à les utiliser ou les réparer et/ou des consommateurs, sans que ces derniers en aient conscience.
Ce constat vaut également en Asie du Sud-Est, notamment dans des pays fortement impliqués dans les nanotechnologies (l'Indonésie, la Malaisie, les Philippines, Singapour, la Thaïlande et le Vietnam), où la question des risques et de la sécurité autour des nano n'est pas encore considérée comme un enjeu important par les chercheurs trop "enthousiastes" pour s'occuper de nano-sécurité6...
Des supports d'information à adapter aux nanos : fiches de donnée de sécurité, fiche techniques, Document unique
La fiche technique des produits peut parfois donner quelques informations mais aujourd'hui uniquement en termes de caractéristiques physico-chimiques.
Le Document unique, outil de management de la sécurité, est autre un support d'information important dans lequel les CHSCT devraient veiller à ce que figurent les informations nécessaires sur les risques associés aux nanomatériaux manipulés dans l'entreprise.
Quelles actions d'information et de formation ?
Quelles actions d'Avicenn?
L'association de veille et d'information civique sur les enjeux des nanosciences et des nanotechnologies (Avicenn) mène une veille sur les nanomatériaux et la santé au travail, accessible au public depuis 2011.
Avicenn participe également à des conférences et manifestations sur le sujet "nano et santé au travail" :
L'information et la protection des salariés par rapport aux risques des nanomatériaux figuraient parmi les engagements du Grenelle de l'environnement de 20077.
La loi Grenelle 1 de 2009 stipulait que, concernant les "substances à l'état nanoparticulaire ou de matériaux contenant des nanoparticules", "l'Etat veillera à ce que l'information due aux salariés par les employeurs soit améliorée sur les risques et les mesures à prendre pour assurer leur protection" (art. 42).
Qu'en est-il concrètement ?
Au regard des fonds publics dépensés depuis plus d'une dizaine d'années afin d'accélérer la commercialisation des innovations nanotechnologiques et la "révolution industrielle", les efforts en matière d'information sur les risques et les moyens de prévention semblent encore bien timides, mais des progrès ont néanmoins été observés :
Fin 2015, le ministère du travail avait inclu plusieurs actions relatives aux nanomatériaux dans le Plan national de Santé au travail (PST3) 2016-2019, notamment l'action suivante : "dans les secteurs d'activité les plus concernés par les expositions aux nanomatériaux, informer les entreprises et les acteurs de prévention sur les mesures de gestion des risques adaptées existantes, et notamment les moyens de protection collective" (action 1.12).
Selon nos informations (non confirmées par le ministère), le Ministère du travail devait bientôt proposer :
un guide nano pour les médecins inspecteurs du travail dans les Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE)
un guide nano pour les services de santé au travail.
Du côté des services déconcentrés, certaines DIRECCTE ont déjà réalisé des réunions, conférences et/ou supports d'information sur les nanomatériaux pour sensibiliser les acteurs de la prévention dans les entreprises ainsi que les employeurs et instances représentatives des entreprises (CHSCT, délégués du personnel) :
la Direccte et la CARSAT d'Auvergne Rhône-Alpes, avec les services Santé Travail 73 et Santé au Travail de Villefranche et du Beaujolais, ont mis au point un ensemble d'outils pour aider les préventeurs à repérer les nanos dans les entreprises afin de mettre des mesures prévention adaptées : bibliographie de référence et kit de repérage des nanos dans les entreprises, présentés au salon Préventica Lyon 2020
une série de réunions d’information sur les nanomatériaux a été organisée par la Direccte Centre - Val de Loire à l’attention des professionnels de la prévention des risques au travail, entre septembre et décembre 2018
une intervention de la Direccte Nouvelle Aquitaine, Table Ronde "nanomatériaux" lors du Colloque "Substances Dangereuses : les risques se dévoilent" à Limoges, 11 octobre 2018
une brochure par les DIRECCTE et DREAL Pays de la Loire, SSTRN, AMEBAT, médecins du travail des services autonomes des Pays de la Loire et médecin du travail de Man Diesel : Nanomatériaux : Professionnels, êtes-vous concernés ? en novembre 2017
l'une à destination des caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) et DIRRECTE (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi)
l'autre à destination des préventeurs et salariés d'entreprises.
En 2018 INRS a mis sur pied deux wébinaires accessibles à tous en ligne :
- L'INERIS a été à l'initiative d'une démarche de certification volontaire pour la sécurité des personnes au poste de travail en présence de nanoparticules : appelée Nano-CERT, son référentiel a été adopté par un comité de certification constitué du CEA, du CNRS, d'industriels, de représentants d'ONG et d'organismes de formation. La certification des personnes est "volontaire", car il n'est pas obligatoire de dispenser une formation "certifiante" (mais l'employeur a tout de même l'obligation de fournir une formation à la sécurité du poste de travail). Autre limite : les certifications portent sur le process, le matériel, le poste de travail et les compétences humaines... mais ne portent pas sur les nanomatériaux eux-mêmes, dont le danger n'est pas évalué dans ce cadre. L'INERIS a également présenté ses travaux lors d'une rencontre INERIS - Société civile / Nanotechnologies portant sur l'avancée des connaissances et l'évaluation de l'exposition au poste de travail et sa sécurisation en mars 2014. En 2017, un nouveau cycle de formations "Maîtrise des risques potentiels liés aux nanomatériaux pour préventeurs" a été organisé à Paris, en novembre.
- Quelques caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT), notamment celles de Nord-Picardie et d'Alsace Moselle, ont réalisé des brochures ou vidéo d'information8.
- Les collectivités financent indirectement certaines formations comme le "Défi Nano", organisé par le Pôle Risques et le Pôle Trimatec : des journées de formation collective et de conseil individuel pour aider les PME dans la gestion des risques nano, se tiendront à Aix-en-Provence, du 22 au 25 septembre 2015 en partenariat avec le LABEX Serenade, le Critt Chimie PRIDES Novachim et l'INERIS.
- Des services de santé au travail inter-entreprises et/ou interprofessionnels sont aussi mobilisés :
Le Centre Médical Interentreprises Europe (CMIE), membre associé d'Avicenn depuis 2011, sensibilise depuis lors ses préventeurs de santé en utilisant les ressources documentaires repérées et compilées par Avicenn ; il a contribué à la réalisation de ce dossier. Il prévoit de présenter ses travaux sur les nanomatériaux, avec Avicenn, au prochain congrès bisannuel de médecine du travail en juin 2016.
L'association interprofessionnelle des centres médicaux et sociaux de santé au travail de la région Île-de-France (ACMS) a réalisé une étude portant sur le repérage des nanoparticules et la sensibilisation des employeurs dans les secteurs d'activité suivis par ses équipes de santé au travail.
Depuis 2009, l'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) a publié plusieurs articles sur les nanomatériaux et les risques pour les travailleurs dans son magazine Prévention BTP.
- Le 13 octobre 2016, l'ENSIC et le LRGP ont organisé une journée Promotion Procédés Produits (J3P) consacrée aux "Nanoparticules : Quels risques ? Quelles protections ?" à Nancy.
Quelles actions des syndicats ?
Plusieurs syndicats au niveau européen et au niveau français ont déployé des actions d'information accessibles à tous :
- Au niveau français, lors du débat public national de 2009-2010, les principaux syndicats (FO, CFE-CGC, UNSA, CFDT, CFTC, CGT) avaient produit des cahiers d'acteurs. Depuis :
La CFTC9 a publié fin 2010 une brochure "Santé au travail, les nanotechnologies", et distribue des documents réservés aux adhérents à l'occasion des formations des militants.
La CFDT a organisé une journée d'échange sur les nanomatériaux en décembre 2013 et a publié à cette occasion deux fascicules d'information : un guide de 32 pages et un "quatre-pages" synthétique. La CFDT recommande aux militants syndicaux de poser les questions des risques associés aux nanomatériaux au sein des différentes instances représentatives des personnels (IRP) - sans se limiter d'ailleurs aux seuls aspects de santé au travail, mais en posant également les questions d'ordre économique et social, éthique, environnemental, etc. au sein des différentes instances ad hoc : le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), l'instance des délégués du personnel (DP), les comités d'établissement ou d'entreprise (CE ou CCE) ou encore les conseils d'administration (CA) lorsqu'ils existent. En 20 juin 2016, la CFDT a également envoyé un courrier aux ministères concernés leur demandant formellement de faire en sorte que la prévention des risques professionnels liés aux nanomatériaux soit une priorité. Elle réalise régulièrement des formations internes sur le sujet nano.
Quelles actions des industriels ?
Très rares sont les industriels qui acceptent de communiquer publiquement sur leurs activités dans le domaine des nanotechnologies10. Dans ces conditions, il est difficile de savoir lesquels informent - et comment - leurs travailleurs et leurs clients professionnels sur les risques associés aux nanomatériaux.
Certaines entreprises ou fédérations d'entreprises ont néanmoins déployé des efforts en ce sens :
- BASF, qui a joué un rôle pionnier en matière de recherche, prévention et communication sur les risques associés aux nanotechnologies11
- l'UIC qui a rédigé un Guide de bonnes pratiques - Nanomatériaux et HSE, en mars 2009
- la FEBEA qui a également diffusé - à ses adhérents uniquement - un Guide de bonnes pratiques concernant la mise en oeuvre des nanomatériaux
- Saint-Gobain, qui a élaboré un Code de conduite (non accessible en externe)
Adopter une approche en phase avec la responsabilité sociale des entreprises (RSE) exige de s'inscrire dans une démarche de co-vigilance en partageant les informations avec les autres acteurs... en amont et en aval de la chaîne de production !
Ne pas oublier les intérimaires et sous-traitants
L'information des travailleurs intérimaires et sous-traitants est elle aussi cruciale et devrait faire l'objet d'une attention particulière (quand elle est aujourd'hui par trop négligée)12.
En bout de chaîne, zéro info pour les maçons, coiffeurs, agriculteurs, boulangers, pâtissiers, etc.
Les (nombreux) travailleurs impliqués dans des activités professionnelles en aval de la chaîne de production, pas spécifiquement "nano", mais exposés sans le savoir à des produits contenant des nanomatériaux, sont vulnérables car ni (in)formés ni protégés...
Travailler peut nuire gravement à votre santé, Sous-traitance des risques, mise en danger d'autrui, atteintes à la dignité, violences physiques et morales, cancers professionnels, Annie Thébaud-Mony, La Découverte, 2008
Peu d'informations précises sur les applications nano dans l'agro-alimentaire
Il est dans les faits très difficile d'avoir une idée précise des applications des nanotechnologies dans l'agro-alimentaire1 : peu d'informations sont accessibles sur les types de nanomatériaux à l'étude ou déjà utilisés, ainsi que sur les quantités et les usages correspondants, tout comme sur les entreprises concernées. "Les produits alimentaires et les aliments diététiques fondés sur les nanotechnologies, de même que les matériaux d'emballage alimentaire, sont déjà disponibles pour le consommateur dans certains pays, et d'autres produits et applications en sont au stade de la recherche-développement, dont certains seront peut-être mis sur le marché prochainement. Compte tenu de ces progrès, on s'attend à ce que les produits alimentaires dérivés des nanotechnologies soient de plus en plus disponibles pour le consommateur ces prochaines années et ce, partout dans le monde". Ce constat dressé en 2009 par des experts réunis par la FAO et l'OMS2 vaut toujours aujourd'hui.
En effet, d'après le rapport de l'ANSES (mai 2020), "l’identification exhaustive des produits alimentaires contenant des nanomatériaux s’avère très complexe. En effet, peu de sources permettent actuellement l’identification de ces produits. Par ailleurs, la mention des ingrédients présents sous forme nanoparticulaire au niveau de l’étiquetage de ces produits, telle que prévue par le Règlement européen concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires (INCO), ne s’applique qu’aux ingrédients présents en quantité suffisante (seuils qui ne sont pas précisément définis et pas nécessairement adaptés aux ingrédients nanométriques) et repose sur une définition des nanomatériaux faisant toujours l’objet de controverses."
Des inventaires de produits de consommation courante (dont les produits alimentaires) contenant des nano existent, mais leur fiabilité est limitée car ils sont élaborés à partir de déclarations des industriels ou d'hypothèses sur la composition des produits (souvent sans vérification possible, faute de moyens financiers, humains et/ou techniques).
Alors que des applications sont déjà commercialisées aux Etats-Unis ou en Asie3, elles seraient plus limitées au Royaume-Uni4, en France et plus généralement à l'échelle européenne5.
Depuis la mise en ligne de ce dossier en 2013, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a néanmoins fait réaliser un "inventaire des additifs alimentaires et d'autres ingrédients alimentaires / matières en contact avec les aliments / utilisations des additifs alimentaires dans le domaine des nanotechnologies" accessible en ligne, mais en anglais uniquement : Inventory of Nanotechnology applications in the agricultural, feed and food sector, Rikilt et JRC, EFSA supporting publications, juin 2014.
Depuis 2014, le nombre d'entreprises déclarant utiliser des nanomatériau dans le secteur alimentaire n'a cessé d'augmenter, comme le montre le registre R-Nano. Néanmoins, cette croissance n’est pas forcément liée à un accroissement des usages des nanomatériaux dans ce secteur d’activités ; il s'agit peut-être simplement d'une meilleure assiduité des déclarants.
Quelle réalité derrière les chiffres ?
Le domaine agro-alimentaire est celui dans lequel ont été annoncés les plus importants développements de la R&D et de la commercialisation des nanotechnologies. Plusieurs estimations du marché mondial des nanos dans l'alimentation ont été réalisées, proposant des chiffres allant de plusieurs centaines de millions à plus de 20 milliards de dollars :
En 2004, la société de conseil Helmut Kaiser Consultancy avait estimé le marché mondial à 2,6 milliards de dollars à l'époque et pronostiquait qu'il pourrait atteindre jusqu'à 20,4 milliards de dollars en 20106
En 2007, la société de conseil Cientifica l'avait quant à elle évalué à environ 410 millions de dollars en 2006 avec une prévision de 5,8 milliards de dollars en 20127.
La vigilance est toutefois de rigueur devant ces chiffres mirobolants fournis par des cabinets de conseil aux industriels qui peuvent avoir intérêt à "gonfler" les estimations ; en outre, il n'est pas toujours précisé si ces chiffres intègrent ou non la valeur des aliments incorporant des nanos en sus de la valeur des nanomatériaux ou nanotechnologies considérés8.
Des entreprises prudentes... au moins en termes de communication
Sur la période 2009-2011, 183 brevets ont été recensés contenant les mots clés "nano" et "food" dans le titre du brevet9. Ces brevets ont-ils fait l'objet d'une exploitation commerciale par des entreprises agroalimentaires ?
En 2008 aux Etats-Unis, l'ONG As You Sow avait demandé à McDonald's et Kraft Foods s'ils utilisaient des nanomatériaux dans leurs produits et emballages alimentaires. Leurs échanges avaient conduit ces deux géants américains de l'alimentaire à créer une page spécifique sur leur site internet respectif11,12 où ils assurent ne pas utiliser les nanotechnologies, tout en reconnaissant étudier les possibilités qu'elles peuvent offrir13.
Quatre ans plus tard, en 2012, la même ONG As You Sow a envoyé un questionnaire à 2500 entreprises de l'agro-alimentaire sur leur utilisation (ou non) de nanomatériaux : seulement 26 entreprises ont répondu (deux d'entre elles seulement ayant déclaré que leurs produits contenaient des nanomatériaux)14.
En 2014, Ofi AM a fait une enquête auprès de 60 sociétés du Stoxx 600 pour connaître leur utilisation de nanoparticules ; sur les 30 sociétés interrogées impliquées dans le domaine de l'agroalimentaire, seules 5 (toutes spécialisées dans les boissons) ont répondu... qu'elles n'utilisaient pas de nanoparticules15.
En janvier 2015, le magazine 60 millions de consommateurs révélait que près de 75 sur 100 entreprises agroalimentaires sollicitées (Nestlé, Danone, Heinz, Mars, Panzani, Nespresso, Toupargel, ...) n'avaient pas donné suite au courrier que le magazine leur avait envoyé en octobre 2014 dans lequel il leur était demandé si elles utilisaient des nanoparticules sous la forme d'additifs (E551, E550, E170, E171, E172), de nanotextures, d'ingrédients en nanoencapsulation ou de nanomatériaux utilisés dans les emballages alimentaires16.
La méthode Coué des pouvoirs publics
Lors du débat public national sur les nanotechnologies de 2009-2010, les réponses apportées par les pouvoirs publics aux nombreuses questions soulevées par les citoyens sur les nanotechnologies dans l'alimentation17 se voulaient plutôt rassurantes.
En octobre 2012, le ministère français de l'agriculture et de l'agroalimentaire veut toujours croire qu'"à ce jour, les applications commerciales des nanotechnologies dans l'aliment restent marginales" se basant sur le fait qu'"aucune demande d'autorisation, obligatoire avant toute mise sur le marché d'un nouvel aliment, n'a été recensée au niveau européen"18.
Mais si le domaine alimentaire est bien l'"un des domaines offrant la plus grande protection du consommateur vis à vis des nanoparticules" avec de nombreux textes européens censés encadrer les nanomatériaux dans l'alimentation19, il ne faut pas croire que tout est "sous contrôle" : des scientifiques ont ainsi mis en évidence la présence de nanoparticules de dioxyde de titane dans les Trident, M&M's et Mentos par exemple20, suscitant l'émoi de nombreuses personnes et une défiance accrue vis-à-vis des autorités sanitaires censées nous protéger21. Le retard, la complexité et le flou juridiques ont permis la commercialisation de produits alimentaires contenant des nanomatériaux sans que les autorisations préalables aient été demandées auprès des autorités compétentes par les entreprises qui les produisent et sans l'étiquetage nécessaire (pourtant rendu obligatoire à partir de fin 2014)22.
→ Afin d'en savoir plus, AVICENN a synthétisé dans le présent Dossier Nano et Alimentation les informations et questionnements disponibles sur le sujet en mai 2013 (et actualisé depuis).
A qui profitent les applications nanos dans l'alimentation, quels sont les risques pour notre santé, quelles recommandations ont été émises, quelles sont les initiatives en cours ou à venir dans le domaine ? Découvrez ce que nous avons commencé à repérer.
Il s'agit d'une base que nous souhaitons compléter et mettre à jour en fonction de l'évolution des connaissances : vos contributions sont les bienvenues !
3 - En 2004, la société de conseil Helmut Kaiser Consultancy (HKC) avait estimé que plusieurs centaines de sociétés dans le monde seraient positionnées sur ce créneau, les Etats-Unis ayant le leadership, suivis par le Japon et par la Chine : Nanotechnology in Food and Food Processing Industry Worldwide 2008-2010-2015. En 2009, la FSA (l'agence exécutive du Royaume-Uni responsable de la protection de la santé publique en ce qui concerne l'alimentation) a réitéré ce constat auprès de la Chambre des Lords (Cf. Nanotechnologies and Food, 2010, p.3).
4 - En avril 2009, la Food and Drink Federation avait affirmé à la Chambre des Lords : "We know of no food products currently on the market produced by companies within our membership that either contain, are packaged in, or have used nanotechnologies in their production" (Cf. Nanotechnologies and Food, 2010, p.75).
Trois ans plus tard, début 2012, une experte du Comité scientifique auditionnée par la FSA (l'agence exécutive du Royaume-Uni responsable de la protection de la santé publique en ce qui concerne l'alimentation) considérait toujours qu'il n'y avait pas de nanomatériaux dans l'alimentation au Royaume-Uni : Nano-tech food to arrive in UK no time soon, Food Manufacture, 30 janvier 2012
9 - Sur les 183 brevets publiés entre 2009 et 2011 (http://wokinfo.com, consulté le 2 Janvier 2012) contenant les mots clés "nano" et "food" dans le titre du brevet, 47 étaient liés à des applications d'emballage ou de revêtement, 19 brevets concernaient des nano-additifs et 10 à la détection de composés dans l'alimentation. Cf. le projet de document présentant les initiatives et activités relatives à la gestion et à l'évaluation des risques des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture, FAO/OMS, juin 2012
11 - Page "Nanotechnology" du site www.aboutmcdonalds.com : "McDonald's Corporation is working to understand the use of nanotechnology and its application in food and packaging products. Given the current uncertainty related to potential impacts of nano-engineered materials, McDonald's does not currently support the use by suppliers of nano-engineered materials in the production of any of our food, packaging and toys" - Contenu mis en ligne en 2008, resté inchangé depuis (à la date de mai 2013)
12 - Page "Nanotechnology" du site www.kraftfoodsgroup.com : Currently we're not using nanotechnology. But as a leading food company, we need to understand the potential this technology may hold for us in terms of food safety, product quality, nutrition and sustainability. That is why our research and development teams always keep their eyes on the scientific research, as well as consider potential applications where nanotechnology may be used in packaging material. (...) If we ever intend to use nanotechnology, we will make sure that the appropriate environmental, health and safety concerns have been addressed. This includes going through our own stringent quality-control processes, as well as working with our suppliers to make sure the proper assessments have been completed." - Contenu mis en ligne en 2009, resté inchangé depuis (à la date de mai 2013)
21 - A titre d'exemple, voir l'article d'Olivier Toma (président du Comité pour le Développement Durable en Santé C2DS) daté du 24 avril 2003, intitulé Les nanoparticules polluent les friandises de nos enfants. Faut-il laisser faire ?, et qui conclut ainsi : "rassurez-vous, on continue à « évaluer » à « réfléchir » (du côté de l'Anses et de celui de l'INERIS, par exemple) pendant que nos enfants se gavent de sucreries aux nanoparticules. Là encore, faudra-t-il attendre une cataclysme à la Médiator pour, enfin, prendre les dispositions nécessaires à protéger nos enfants et même leurs parents ?"
COSMÉTIQUES - C'est l'été, le temps du soleil... et des controverses sur les risques liés aux nanomatériaux dans les crèmes solaires
COSMÉTIQUES - C'est l'été, le temps du soleil... et des controverses sur les risques liés aux nanomatériaux dans les crèmes solaires
par MD et DL avec l'équipe Avicenn - 6 juillet 2011
Ne pas utiliser de produits cosmétiques - en particulier les crèmes solaires - contenant des nanoparticules de dioxyde de titane sur une peau lésée ou sur les coups de soleil. Ne pas les utiliser non plus sur le visage ou dans des locaux fermés quand elles se présentent sous formes de spray. Voilà les recommandations de l'Afssaps rendues publiques à la mi-juin.
Jugeant que la pénétration cutanée "semble limitée aux couches supérieures de la peau saine", l'agence se veut néanmoins rassurante... tout en demandant davantage d'études.
Une semaine plus tard, le 23 juin, aux Etats-Unis, la Food & Drug Administration (FDA) est accusée de manquer à sa mission de protection des consommateurs par trois associations qui militent pour l'étiquetage et la vérification de l'innocuité des nanos dans les crèmes solaires.
En ce début d'été, l'Avicenn fait le point sur le dossier controversé des nanos dans les écrans solaires.
Répondant à une demande de la Direction générale de la santé (DGS), l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a analysé les données scientifiques relatives à la pénétration cutanée, la génotoxicité et la cancérogénèse des nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) et de l'oxyde de zinc (ZnO) utilisées sous forme de nanoparticules comme anti-UV dans les produits cosmétiques.
Dans deux rapports publiés mi-juin1, elle constate que les études scientifiques actuelles ne montrent pas de pénétration cutanée significative du nano TiO2 pour les peaux saines, mais ne permettent pas de tirer de conclusion dans un sens ou dans l'autre pour les peaux lésées. L'Afssaps recommande donc de ne pas appliquer de crème contenant du nano TiO2 sur des peaux lésées (par exemple par des coups de soleil) du fait des risques potentiels pour la santé humaine.
Concernant le nano ZnO, une étude menée en Australie montre en revanche que le zinc peut se retrouver dans la circulation sanguine et les urines - mais à des doses très faibles.
Les études de génotoxicité issues de la littérature scientifique sur les nanoparticules de TiO2 et de ZnO ont donné des résultats contradictoires et ne permettent pas d'évaluer le risque des nanoparticules utilisées dans les produits cosmétiques car elles ont été menées sur des nanoparticules différentes de celles utilisées dans les produits cosmétiques.
Les données de toxicité chronique et de cancérogenèse sont également limitées - quantitativement et qualitativement - si bien que l'Afssaps ne tire pas de conclusion. Toutefois, des études réalisées par voie respiratoire ayant montré une toxicité pulmonaire chez le rat - dans des conditions d'exposition néanmoins différentes de celles rencontrées par les humains - l'Afssaps déconseille d'utiliser sur le visage ou dans des locaux fermés les cosmétiques contenant des nanoparticules et se présentant sous formes de spray.
Aux Etats-Unis, la Food and Drug Administration vient quant à elle d'être pointée du doigt pour son absence de prise de position en la matière : trois associations de protection de l'environnement ou des consommateurs demandent l'étiquetage et la vérification de l'innocuité des nanos dans les crèmes solaires du fait des risques potentiels pour la santé2.
Risqués les nano dans les cosmétiques ? Tout dépend qui l'on écoute
Certaines marques cosmétiques se veulent rassurantes et affirment qu'il n'y a pas de risque.
En octobre 2009, lors de la réunion publique d'Orléans organisée dans le cadre du débat public national par la CNDP, Pascal Courtellemont, responsable du département sécurité du produit au sein du groupe LVMH Recherche, affirmait qu'"il n'y a pas de pénétration cutanée du dioxyde de titane à travers la peau (...). La maîtrise de la sécurité de nos produits cosmétiques et solaires est totale. En aucun cas, une industrie cosmétique, quelle qu'elle soit, ne va prendre le risque de mettre sur le marché un ingrédient dont elle ne maîtrise pas le profil toxicologique"3.
Plus près de nous, en avril dernier, la Nanodermatology Society, financée par de grandes industries pharmaceutiques, chimiques et cosmétiques, a publié sa position officielle sur les crèmes solaires : "The Nanodermatology Society believes that nano-based sunscreens do not pose serious health risks to consumers"4. Traduction : la Nanodermatology Society croit que les écrans solaires contenant des nanos ne posent pas de risques graves pour la santé des consommateurs". Et ce sur la base d'une sélection d'études dont les protocoles - et donc les conclusions - sont contestés par des associations de protection de la santé, de l'environnement ou des consommateurs.
De leur côté, les associations de protection de la santé, de l'environnement ou des consommateurs appellent à la vigilance.
Dans le communiqué que trois associations américaines ont tout récemment envoyé à la FDA et à la presse, Michael Hansen, de l'association de protection des consommateurs Consumers Union critique les études de pénétration cutanée des nanomatériaux : menées sur des temps très courts (24h maximum pour la plupart)2, elles ne reflètent pas les conditions réelles d'utilisation. L'Afssaps note également que beaucoup d'études sont réalisées sur une durée de 72 heures maximum. Des chercheurs européens qui viennent de publier une revue de la littérature sur les risques sanitaires du nano TiO2 appellent eux aussi à la réalisation d'études plus poussées sur l'application répétée de crème solaire au nano TiO2, ainsi que sur l'application sur une peau endommagée.
Les trois signataires du communiqué - Consumers Union, ICTA et Les Amis de la Terre - figurent parmi les ONG les plus actives sur le sujet ; ils militent depuis 20065 contre l'utilisation généralisée des nanomatériaux par l'industrie cosmétique, notamment dans les crèmes solaires, alors qu'ils présentent des risques pour la santé humaine. Ils exercent un lobbying auprès des pouvoirs publics et des industriels afin de promouvoir le principe de précaution.
Sur la base des mises en garde des Amis de la Terre, une section du syndicat enseignant australien (the Victorian branch of the Australian Education Union - AEU) a même recommandé que ces crèmes solaires ne soient pas utilisées par les élèves ni par les enseignants6 : les enfants notamment, dont la peau est plus fine, pourraient être davantage exposés et vulnérables.
Les ONG soulignent la mise en évidence, par des scientifiques, de la capacité du nano Tio2 à endommager les membranes cellulaires des bactéries et des crustacés ; à causer le cancer chez la souris, suite aux perturbations qu'il entraîne au niveau de l'ADN ; à passer la barrière du placenta, entraînant des troubles fonctionnels et pathologiques.
La vigilance est toutefois de mise, car ces constatations ont été faites pour des expérimentations qui sont éloignées des conditions d'utilisation du nano TiO2 des crèmes solaires (certaines études portent par exemple sur l'ingestion de nanoparticules, et non pas leur application cutanée). Pour en savoir plus, se rapporter au rapport de l'Afssaps, au site NanoCEO qui liste de nombreux articles académiques sur les risques du nano dioxyde de titane, ou sur la base de données alimentée par ICON (International Council on Nanotechnology) aux Etats-Unis.
Ces ONG font remarquer qu'une étude de toxicologie australienne (Gulson, 2010 - citée par l'Afssaps1 mais à laquelle ni la FDA ni la Nanodermatology Society ne font référence) a montré une augmentation des taux en zinc dans le sang et les urines chez des volontaires traités avec du nano ZnO.
Une autre association environnementale américaine, the Environmental Working Group, est moins opposée à l'utilisation de crèmes solaires contenant des nanomatériaux ; elle fait valoir que le dioxyde de titane et l'oxyde de zinc sont moins nocifs pour l'organisme que d'autres substances utilisées dans certaines crèmes solaires, véritables perturbateurs endocriniens. Toutefois, EWG déconseille les crèmes solaires au nano TiO2 et ZnO qui se présentent sous forme de poudre ou de sprays7.
Les questions liées à la santé des consommateurs ne pas doivent pas faire oublier les questions liées à la santé des travailleurs de l'industrie cosmétique potentiellement exposés aux nanomatériaux (comment garantir qu'ils soient bien protégés ?), ni celles liées à l'environnement : l'Afsset a estimé l'année dernière que lusage des crèmes solaires aboutit à un relarguage de nano TiO2 dans le milieu naturel de 230 tonnes par an, rien quen France.
Comment éviter d'utiliser des produits... non identifiables ?
La mise en garde de l'Afssaps va donc dans le sens des messages envoyés depuis 2006 par ces ONG. Reste un détail... pourtant crucial : comment éviter d'utiliser ces produits... alors qu'ils ne sont ni identifiés et ni identifiables aujourd'hui par le consommateur ? Il est en effet impossible aujourd'hui de savoir si une crème solaire contient des nanos ou non, car il n'est pas fait mention des nanomatériaux sur létiquetage par les marques de cosmétiques.
Le ministère de la santé, l'Anses ou l'Affsaps ne fournissent pas non plus les informations dont ils peuvent disposer sur le sujet. Le projet de décret relatif à la déclaration des substances à l'état nanoparticulaire mises sur le marché protège au contraire la confidentialité des informations fournies par les entreprises, au nom de la protection du secret industriel ou commercial.
La situation devrait changer en Europe dans deux ans : le nouveau Réglement Cosmétiques de 2009 exige qu'à partir de 2013 les fabricants indiquent la présence de ces nanomatériaux dans la liste des ingrédients des cosmétiques. Une règle détiquetage prévoit que soit indiqué, dans le cas du TiO2 : Titanium dioxyde [nano].
Transparence des crèmes solaires nano, opacité des industries cosmétiques
Enfin, aux présomptions de toxicité de ces produits, vient se greffer un autre problème, lié aux réticences structurelles d'une grande majorité des entreprises à communiquer les informations requises.
Si les crèmes solaires deviennent translucides grâce à l'utilisation de nano TiO2 et ZnO, les associations de protection de la santé, de l'environnement ou des consommateurs regrettent pour leur part le manque de transparence des marques cosmétiques.
Des crèmes solaires nano moins blanches
En octobre 2009, lors de la réunion d'Orléans2 du débat public national sur les nanotechnologies, Gérard Redziniak, de la Société française de Cosmétologie, a insisté sur le gain, pour le consommateur, de la transparence permise par les nanoparticules de TiO2.
Commentant la photo ci-après, qui montre, à droite une "vieille" crème solaire avec de l'oxyde de titane non nanoparticulaire et à gauche, la même protection solaire, avec des nanoparticules d'oxyde de titane, il a affirmé : "quand il utilise un produit solaire, le consommateur ne veut pas ressembler au Pierrot. Il préfère être beau et bien bronzé."
"Etre beau", certes, mais est-on sûr que le gain obtenu en terme d'esthétique n'est pas perdu en terme de sécurité pour le consommateur ? Non, selon Francis Quinn, alors directeur du développement durable chez L'Oréal, qui ajoutait, lors de la même réunion : "C'est un produit qui intrinsèquement est beaucoup plus efficace pour arrêter le rayonnement ultraviolet que la version traditionnelle qui est toute blanche. Ce n'est donc pas seulement un choix esthétique pour le consommateur, qui n'est pas tout blanc, mais une protection nettement meilleure".
Rien n'est moins sûr, répondent de leur côté les Amis de la Terre qui conseillent de s'en tenir aux formules sans nanoparticules - dont certaines peuvent également être transparentes - et reprochent aux marques cosmétiques leur opacité.
Opacité des industries cosmétiques
En 2008, l'association de protection de consommateurs Consumers Union avait testé un certain nombre de crèmes solaires prétendument "naturelles" et révélé que 80% des crèmes testées contenaient des nanoparticules8.
En mai 2010, les Amis de la Terre Australie ont dénoncé le fait que de nombreuses marques de cosmétiques refusent de révéler si leur produits solaires contiennent ou non des nanoparticules ; le résultat de leur enquête menée début 2010 permet de voir la réponse fournie par 140 marques de cosmétiques à la question de la présence ou non d'éléments nano dans leurs crèmes solaires. Quatre marques (Clarins, M.A.C. Cosmetics, Skinceuticals and Tropicare) ont explicitement refusé de répondre. Seules quelques marques, dont Dior et Body Shop, ont reconnu en utiliser9.
Critiquée pour avoir refusé de participer en 2007 au Nanoforum consacré aux cosmétiques10, la Fédération des Entreprises de la Beauté (FEBEA) a tout de même participé au débat public national de 2009-2010 en France, et produit un cahier d'acteurs qui affirme que le nano dioxyde de titane est utilisé dans les produits de protection solaire "depuis bientôt 20 ans".
Dans un échange11 très intéressant et très riche avec le toxicologue Andrew Maynard, l'association des Amis de la Terre estime qu'il est du devoir des industries non seulement de mieux tester l'innocuité de leurs produits mais également d'être plus transparents.
Se pose ainsi la question du rôle des différents acteurs : si les associations de consommateurs, de protection de l'environnement ou de la santé sont un rôle de garde-fou, le poids de la preuve ne doit pas porter uniquement sur elles : les entreprises ont une responsabilité à assumer, sous la vigilance des pouvoirs publics.
Quels sont les défis à relever en terme de réglementation et de traçabilité ?
Aux USA, trois députés américains viennent de déposer une proposition de loi intitulée Safe Cosmetics Act au Congrès américain le 24 juin dernier. S'il est voté, ce texte obligerait les entreprises à déclarer à la FDA leur utilisation de nanomatériaux, en donnant des précisions sur ces derniers (dont la taille et des données toxicologiques) - informations qui devraient être rendues publiques. Le texte donnerait à la FDA le pouvoir d'exiger que l'étiquette des cosmétiques concernés mentionne la présence de nanomatériaux manufacturés, ce dont se félicitent les Amis de la Terre USA dans un communiqué.
De ce côté-ci de l'Atlantique, la déclaration obligatoire des substances à l'état nanoparticulaire prévue par les lois de Grenelle en France ou le Réglement Cosmétiques en Europe changeront-ils la donne en assurant un meilleur accès à l'information et une meilleure prévention des risques ? Certains en doutent.
Un futur étiquetage déjà sujet à caution
S'il permettrait au consommateur, théoriquement, d'y voir un peu plus clair, l'étiquetage prévu par le Réglement Cosmétiques européen ne réglera pas tous les problèmes, liés à la question plus générale de la définition des nanomatériaux, toujours pas stabilisée et source de controverses.
Par exemple, si les nanomatériaux utilisés excèdent le seuil des 100 nm et/ou forment des aggrégats ou agglomérats, ils pourraient échapper aux dispositions prévues par le Réglement. Or Pascal Courtellemont (LVMH Recherche) affirmait (toujours en octobre 2009) que le nano dioxyde de titane s'agglomère "lorsqu'il est mis dans les matrices cosmétiques. (...) On passe de tailles qui avoisinent les dizaines de nanomètres à 150 nanomètres, puis à des agglomérats à 1 ou 3 microns"2.
Selon un journaliste américain12, la marque Burts Bees a déclaré renoncer à utiliser des particules d'une taille inférieure à 200nm. Depuis mars 2011, une autre marque américaine, Badger, affiche avoir renoncé à utiliser des particules d'oxyde de zinc d'une taille inférieure à 120 nm depuis mars 201113.
100, 120, 150, ou 200 nm : dans tous les cas, le seuil choisi l'est de façon arbitraire (le SCENIHR, Comité scientifique européen pour les nouveaux risques émergents, a ainsi souligné l'absence de fondement scientifique au seuil souvent avancé de 100 nm) et laisse sceptiques les consommateurs, associations et agences sanitaires : comment prétendre en toute bonne foi que la toxicité des particules disparaît à telle ou telle taille, mais que leurs propriétés anti-UV ou leur transparence, elles, sont conservées ?
Comment s'assurer du respect de l'obligation de déclaration des nanomatériaux par les entreprises ?
En France, le projet de déclaration des substances à l'état nanoparticulaire mises sur le marché prévoit que les importateurs, fabricants ou distributeurs les déclarent à l'Anses. Les entreprises se conformeront-elles aux exigences de la loi ? Beaucoup en doutent. Les sanctions prévues seraient trop peu dissuasives : de nombreuses entreprises pourraient préférer prendre le risque d'une amende plutôt que d'afficher la composition nano de leurs produits et prendre alors le risque de voir les consommateurs se détourner de leurs produits.
En Nouvelle Zélande, les nanomatériaux utilisés ou importés pour être intégrés dans les cosmétiques doivent être signalés à l'Autorité de Management des Risques Environnementaux ; mais en juin 2010, le Sustainability Council de Nouvelle Zélande déplorait qu'aucun signalement n'ait été effectué, malgré la présence de nombreux produits cosmétiques contenant des nanomatériaux sur le marché néozélandais14.
Dans le doute, comment choisir sa crème solaire ?
Pour ceux qui voudraient éviter d'utiliser des produits solaires contenant des nanomatériaux, sachez que "les produits de protection solaire de haut grade, produits 50 ou 50 +, contiennent tous du dioxyde de titane nano" selon Anne Dux, représentante la Fédération des entreprises de la beauté2.
Rien ne sert de déboucher les tubes de crèmes au supermarché ou dans sa pharmacie pour vérifier leur transparence : certaines marques ont développé des produits solaires sans nano mais tout de même transparents.
L'ONG américaine Environmental Working Group (EWG) a mis en place une base de données "Skin Deep Cosmetic Safety database" et un guide des crèmes solaires accessible en ligne à l'adresse http://breakingnews.ewg.org/2011sunscreen.
Le 1er décembre 2010, Les Amis de la Terre Australie ont publié de leur côté un Guide des crèmes solaires 2010-2011 téléchargeable sur leur site internet, où figurent notamment, parmi les marques utilisant des nanomatériaux : Ambre Solaire, Garnier, Kosmea, Avéne, Helena Rubinstein, Lancôme, L'Oréal, Maybelline et Shu Uemera15.
Le référentiel "Cosmos Organic" de la certification Cosmos (Cosmetic Organic Standard) interdit les nanomatériaux16.
A l'heure actuelle, au vu des nombreux problèmes de seuil, de mesure, et d'opacité relevés plus haut, il est cependant difficile de s'assurer de l'absence de nanomatériaux dans les crèmes.
60 millions de consommateurs a réalisé dans son n° de juillet-août un dossier sur cette question : sur les dix crèmes solaires testées, tous contenaient des nanoparticules, même dans les produits bio où elles sont interdites. Des résultats qui font (re)dire à Marie-Jeane Husset, directrice de la rédaction, que "le droit à l'information est l'un des droits fondamentaux des consommateurs". Tant que la mise en regard du gain d'efficacité des formules nanométriques par rapport à leur plus grande toxicité ne sera pas effectuée de manière plus poussée et plus transparente, le doute subsistera et le principe de précaution s'imposera.
Quelles alternatives ?
Du fait des controverses nées de l'utilisation de nanoparticules métalliques dans les crèmes solaires, certains chercheurs se sont penchés sur des alternatives... faisant néanmoins intervenir elles aussi des éléments nanométriques, mais naturels et, selon eux, moins toxiques : des chercheurs de l'Université du Tennesse ont ainsi mis en évidence les propriétés anti-UV de nanoparticules secrétées par du lierre grimpant et font valoir qu'il s'agit d'une alternative sérieuse aux nanoparticules de dixoyde de titane ou oxyde de zinc17.
En attendant la confirmation de cette piste (parmi d'autres), les recommendations des agences sanitaires, médecins et associations de protection de la santé ou de l'environnement sont, elles, sans effet secondaire inconnu : minimiser le temps d'exposition au soleil entre midi et 16h, porter chapeau, lunettes de soleil et vêtements légers, et privilégier l'ombre sont les meilleurs moyens de limiter les risques liés au soleil. Et nul besoin d'avoir une thèse en toxicologie pour les appliquer !
Ce qu'il reste à éclaircir...
Au niveau européen, le Réglement Cosmétiques qui prendra effet à partir de 2013, prévoit un régime de notification spécifique des produits contenant des nanomatériaux six mois avant leur mise sur le marché, mais ce régime ne s'applique pas aux filtres ultra violets. Les raisons de cette exception ? Elles ne sont pas explicitées dans le texte. L'Avicenn cherche à éclaircir ce point et a interrogé plusieurs personnes à ce sujet. Nous sommes encore dans l'attente de leur réponse.
Si vous avez des éléments d'information sur la question, n'hésitez pas à envoyer un mail à redaction[AT]veillenanos.fr
EUROPE : Quel encadrement des nanomatériaux par REACh ?
EUROPE : Quel encadrement des nanomatériaux par REACh ?
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout février 2021
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En 2020, plus d'informations sur les nanomatériaux fabriqués ou importés en Europe... en théorie
Selon le Règlement n°2018/1881 modifiant les annexes de REACH, depuis 2020, des informations spécifiques doivent être apportées par les entreprises sur les substances nanos enregistrées dans REACH et mises sur le marché au-delà d'une tonne par an (par entreprise).
Outre les données déjà requises, il est désormais nécessaire de préciser les paramètres physico-chimiques des nanomatériaux comme la distribution granulométrique en nombre, la fonctionnalisation ou le traitement de surface, la forme ou le rapport d'aspect, la surface spécifique, ...
Le texte apporte ainsi des clarifications et de nouvelles dispositions concernant:
- la caractérisation des nanoformes ou sets de nanoformes couverts par l'enregistrement (annexe VI);
- l'évaluation de la sécurité chimique (annexe I);
- les informations requises pour l'enregistrement (annexes II et VII à XI);
- les obligations des utilisateurs en aval (annexe XII).
L'analyse d'impact doit prendre en compte l'intégralité du cycle de vie des nanomatériaux, avec les possibles transformations physico-chimiques que pourra subir la substance nano depuis sa production jusqu'à sa fin de vie, en passant par les altérations possibles du fait de l'usage, etc.
Le nouveau texte des annexes révisées de REACH intègre la majeure partie des demandes formulées par les Etats membres et ONG européennes depuis plusieurs années (voir les éléments archivés ici).
La possibilité pour l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) de demander des informations complémentaires, que la Commission voulait limiter aux seules substances produites au-delà de 100 tonnes, a été élargie, grâce aux demandes de la France et des ONG mobilisées sur le sujet, aux substances nano produites au-delà de 10 tonnes.
Quelle définition des "nanomatériaux" / "nanoformes" ?
La révision des annexes de Reach devait intégrer la recommandation révisée de définition du terme "nanomatériau", attendue depuis 2014 et annoncée comme imminente (... depuis 2015 !) mais du fait de son report au second semestre 2019 (du fait des élections européennes et du renouvellement de l'exécutif européen), c'est toujours la recommandation de 2011 qui est aujourd'hui encore la définition de référence.
Le fait que REACH, un Règlement co-signé par le Parlement et le Conseil européens, fasse référence à une recommandation de définition établie par la seule Commission, sans validation par le Parlement et le Conseil, pourrait être source d’insécurité juridique du Règlement, dans la mesure où une controverse émaille cette définition. En effet, le report de cette révision, année après année, s'explique notamment du fait que cette définition et sa révision sont sources de tensions, car les répercussions peuvent être très différentes selon les termes et les seuils chiffrés retenus.
Après avoir demandé des délais et aménagements... l'industrie chimique commence lentement à enregistrer ses nanoforme
L'entrée en vigueur de la révision des annexes de Reach se heurte à la résistance de certaines entreprises et fédérations industrielles : le Conseil européen de l'industrie chimique (CEFIC) a ainsi demandé dès 2019 des délais de mise en œuvre de la réglementation et plaidé pour des assouplissements1 (au motif que les "nanoformes" à déclarer (individuellement ou en groupe(s)), les informations à fournir, les méthodes de mesure et de caractérisation à retenir, etc.. ne sont pas encore complètement calées ou disponibles).
Pour autant, les industriels pouvaient fournir les données dont ils disposent au 1er janvier 2020 et les compléter par la suite.
Fin février 2020, l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) a indiqué n’avoir reçu au 1er janvier que 95 dossiers d'enregistrement de nanomatériaux concernant 36 substances seulement (contre ~300 attendues). Les autres nanomatériaux (non enregistrés) sont donc illégalement sur le marché selon le principe "pas de données, pas de marché" du règlement européen REACH. L'ECHA a donc enjoint les entreprises à soumettre au plus vite les dossiers d'enregistrement des "nanoformes" encore non enregistrées2.
Fin mai 2020, l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a fait un nouveau point : 37 enregistrements de nanoformes avaient été soumis depuis le 1er janvier 2020, faisant monter le nombre total de substances nano enregistrées de 34 à 54. Cette augmentation, bien que significative, est toutefois loin de combler l'écart avec le nombre attendu de substances (aux alentours de 375)3.
Des précisions apportées par l'ECHA
Début décembre 2019, l'agence europénne des produits chimiques (ECHA) a publié la mise à jour de deux documents d'orientation pour aider les entreprises à préparer des dossiers d'enregistrement REACH pour leurs substances chimiques couvrant des nanoformes4 et remplir ainsi les nouvelles exigences légales en matière de nanomatériaux applicables à compter du 1er janvier 2020.
A compter du 2 novembre 2020, les fabricants de nanomatériaux devront fournir un nom pour les nanoformes ou les groupes de nanoformes de leur substance5 lors de leur enregistrement dans le cadre du règlement REACH. Cela permettra aux déclarants et aux autorités de faire référence sans ambiguïté aux nanoformes enregistrées dans les documents réglementaires (décisions, fiches de données de sécurité). Les entreprises qui ont déjà enregistré leurs nanoformes n'ont pas besoin de prendre des mesures immédiates, mais devront fournir un nom dans la prochaine mise à jour de leur dossier d'enregistrement. Un nouveau manuel d'enregistrement sera disponible en octobre 20206 avec des conseils sur la préparation des dossiers d'enregistrement qui couvrent les nanoformes.
Quels contrôles d’ici 2024 ?
L’ECHA a affiché, dans son plan d’action, se donner pour objectifs de focaliser ses contrôles de conformité pour la période 2019-2023 sur les substances produites ou importées au-delà du seuil de 100 tonnes par an. Les nanomatériaux risquent donc de passer à la trappe !
Pourquoi ? Parce qu’ils sont produits en quantité moindre dans leur catégorie : les bilans r-nano en France publiés depuis 2014 montrent que plus de la moitié des déclarations sont inférieures à une tonne.
[Du fait de leur forte réactivité, les nanomatériaux peuvent être utilisés en moindre quantité par rapport à d’autres matériaux pour apporter les propriétés recherchées (la petite taille des nanomatériaux leur confère une surface de réaction plus grande que le même matériau non nanométrique ; le ratio surface / volume est plus important).]
Parmi les éléments qui attisent nos craintes sur la faiblesse des contrôles, vient le fait que nous n’ayons relevé aucune mention du cas des nanomatériaux :
ni dans le plan d’action de l’ECHA concernant REACH dévoilé ces dernières semaines8
L’ECHA disposera-t-elle des moyens de contrôle suffisants et adaptés, tant en termes de ressources techniques, qu’humaines et financières ?
Des lacunes encore fortes concernant l'évaluation des risques environnementaux posés par les nanomatériaux
En mars 2020, des experts de l'Agence allemande pour l'environnement (UBA) et de l'Institut national néerlandais pour la santé publique et l'environnement (RIVM) ont demandé une mise à jour des protocoles d'évaluation des risques des nanomatériaux afin de réduire les incertitudes et prendre pleinement en compte leur impact sur l'environnement. Les experts, impliqués dans le projet européen NanoFASE, considèrent notamment que malgré les données exigées spécifiquement sur les nanomatériaux depuis le 1er janvier 2020 dans le cadre de REACH, des incertitudes fortes demeurent concernant l'évaluation de leurs risques environnementaux. Leur article académique paru dans la revue Integrated Environmental Assessment and Management propose diverses recommandations9.
Un dispositif spécifique pour les nanomatériaux produits ou importés en deçà d'une tonne par an ?
Mi-2019, le Conseil de l'Union européenne a demandé à la Commission européenne d'étendre le mandat de l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) afin qu'elle puisse collecter et mettre à disposition des données de recherche sur la caractérisation, le danger et l'exposition potentielle de nanoformes de substances qui n'étaient jusqu'à présent pas enregistrées sous REACH, leur tonnage annuel étant inférieur au seuil d'une tonne par an10.
Un fonds abondé par les entreprises qui importent, produisent ou utilisent ces nanomatériaux manufacturés, permettrait de mutualiser le financement des outils de caractérisation et les recherches indépendantes sur les risques associés aux nanomatériaux et pallier ainsi le manque de moyens nécessaires pour le travail de caractérisation des nanomatériaux et d’évaluation des risques. Confié à un intermédiaire public qui jouerait le rôle de "pare-feu" avant de flécher les financements vers des laboratoires indépendants et reposant sur une procédure d'évaluation robuste et transparente des projets et des résultats (avec une ouverture aux ONG et citoyens), ce compte "nanosafety" permettrait également de garantir une meilleure fiabilité des résultats et de restaurer la confiance.
Une attention nécessaire pour les matériaux dits "avancés"
En sus des nanomatériaux au sens strict, il est nécessaire d’intégrer à la réglementation les matériaux dits "avancés" qui déploient aussi pour beaucoup des propriétés spécifiques à l'échelle nano (céramiques & polymères "de pointe", renforcés par des biofibres et/ou des nanocharges, matériaux composites "intelligents", matériaux bio-actifs, nanocapteurs, etc.)
Selon un rapport commandité par l'Observatoire européen des nanomatériaux et publié en 19 septembre 2019, les réglementations actuelles de l'Union européenne offriraient un cadre réglementaire adéquat pour caractériser et identifier les nanomatériaux de "prochaine génération"11. Sur les huit experts interrogés, la moitié venait directement de l'industrie. Côté protection de la santé ? Aucun expert auditionné. Côté protection de l'environnement ? Un seul fonctionnaire (allemand). Les experts de notre réseau partagent notre scepticisme sur l’analyse proposée par ce rapport. La démocratie sanitaire et environnementale vaut mieux que ça.
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- Notre rubrique Gouvernance
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Après une décennie de participation active mais peu fructueuse aux processus relatifs à la gouvernance européenne des nanomatériaux, les organisations de la société civile sinterrogent. A quoi bon continuer à participer aux consultations et groupes de travail si au final leurs recommandations ne sont jamais prises en compte par la Commission européenne ?
Malgré tout, les enjeux sont trop importants pour déclarer forfait. Les ONG restent donc mobilisées et ont décidé de réaffirmer haut et fort la nécessité dun meilleur encadrement des nanomatériaux, afin de mieux protéger la santé humaine et lenvironnement.
Dans un texte en cours de préparation qui sera publié en septembre, elles comptent réaffirmer notamment le besoin :
d'une réglementation spécifique aux nanomatériaux concrétisant réellement le principe de REACH "pas de données, pas de marché"
de responsabilisation des fabricants sur lensemble du cycle de vie des nanomatériaux ou produits en contenant
de transparence sur les données collectées
détiquetage des nanomatériaux
détudes sur les impacts sanitaires, environnementaux, éthiques, légaux et sociaux des nanotechnologies
dune bio-surveillance de lenvironnement, des populations et des travailleurs
dune gouvernance plus inclusive et participative, avec une meilleure prise en compte des recommandations des ONG.
Les ONG qui souhaiteraient rejoindre cet appel peuvent se manifester auprès de redaction@veillenanos.fr et contact@avicenn.fr.
Une pétition en ligne a été lancée le 3 juin depuis les USA pour demander à Danone de retirer le nano dioxyde de titane de ses yaourts à la grecque. Elle a été retirée le 6 juin1.
La pétition protestait contre l'utilisation de nanoparticules de TiO2 dans ces yaourts pour les rendre plus blancs selon la couverture presse qui a relayé la publication d'un rapport des Amis de la Terre USA - ce dernier se basait sur l'inventaire des "nanoproduits" du Project on Emerging Nanotechnologies (PEN) du Wilson Center et une étude scientifique publiée en 20122.
Outre le fait que des risques potentiels sont associés au nano dioxyde de titane, l'auteur Kristi Arnold interpelait Danone sur l'utilité de cet additif (le TiO2 est utilisé sous forme d'additif - E171 - comme colorant blanc) : "nous n'avons pas besoin que nos yaourts soient plus blancs".
Elle demandait à Danone et autres entreprises similaires d'arrêter de "polluer nos yaourts avec des métaux inutiles".
En deux jours à peine, la pétition avait recueilli plus de 33000 signatures.
Cette pétition émanant d'une initiative individuelle (l'auteur s'exprimait à titre personnel et non pas au nom d'une association de consommateurs) mais bien relayée par les réseaux sociaux est, à notre connaissance, la première du genre concernant les nanoparticules dans l'alimentation.
En France, France Nature Environnement (FNE) demande depuis 2007 un moratoire sur "les nanos-objets à usage non médical et en contact, dans leur usage normal, grand public, avec le corps humain et l'alimentation". Les Amis de la Terre ont eux défendu un moratoire total lors du débat public national sur les nanotechnologies de 2009-2010.
Pour rappel, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) vient de rappeler que les études relatives à l'exposition aux nanoparticules par la voie orale ont été très limitées jusqu'à aujourd'hui.
Le 5 juin, nous avons demandé à Danone France la confirmation de la présence de nanoTiO2 dans ces yaourts - et les autres (car sa présence n'est pas - encore ? - obligatoirement mentionnée sur les étiquettes). Et l'avons interrogé sur les suites que l'entreprise allait donner à cette pétition.
Le 12 juin, "Danone Produit Frais France" nous a répondu que l'entreprise "n'utilise pas ce colorant E171 dans ses produits, qui fait partie de la liste des colorants interdits chez Danone. De façon générale, Danone Produit Frais France n'a pas de nanoparticules dans ses produits".
Le retrait de la pétition
Mises à jour :
le 5 juin en soirée : sur son compte twitter officiel, le 5 juin "the Dannon company" à New York a démenti utiliser du dioxyde de titane dans ses yaourts à la grecque3
dans la nuit du 6 au 7 juin, la pétition a été retirée du site en ligne, et ses signataires ont reçu un mail de la plate-forme Care2 sur laquelle elle était hébergée : l'erreur proviendrait d'une "interprétation erronée" de l'inventaire du Project on Emerging Nanotechnologies (PEN) du Wilson Center (WC) ; la fiche sur les yaourts à la grecque a été retirée de l'inventaire entre le 5 et le 6 juin, ainsi que celles des autres produits cités par l'étude Weir 20122 (notamment des produits laitiers des marques Daisy, Lactalis, Albertsons, Shamrock Farms4) .
le 18 juin, le Wilson Center (WC) a publié un court texte précisant que les yaourts à la grecque de chez Danone avaient certes été initialement listés dans l'inventaire, mais dans la catégorie 5 ce qui signifie que la mention de la présence de nano dans ce produit n'émanait pas du fabricant mais d'un article de journal ou d'un distributeur5.
le 19 juin, en réponse aux questions que nous avions adressées au WC, Todd Kuiken, "Senior Research Associate" du "Science and Technology Innovation Program" a apporté les précisions suivantes : le WC a retiré l'intégralité des produits cités par l'étude scientifique de Weir en 20122 jusqu'à ce que le WC puisse produire une meilleure explication des résultats de cette étude. A suivre donc.
Quelles conclusions en tirer ?
Cet épisode met en évidence certains points importants :
l'absence d'étiquetage obligatoire strict contribue à dégrader la confiance des consommateurs :
Aux Etats-Unis, la Food & Drug Administration (FDA) permet aux produits alimentaires contenant moins de 1% de dioxyde de titane de ne pas préciser la présence de TiO2 (E171) sur l'étiquette des ingrédients.
En attendant, ceux qui souhaitent éviter d'ingérer du TiO2 peuvent étudier les étiquettes sur lesquelles cet additif alimentaire peut être signalé sous la forme E171.
Pour ceux qui souhaitent en savoir plus, voir sur le site Openfoodfacts.org :
la liste des produits alimentaires contenant du TiO2 E171, qui elle comptait 67 produits vendus en France à la date de mise en ligne de cet article (juin 2014), dont des M&M's, des Mentos, des chewing gums Hollywood, Freedent, Malabar et Casino, des gâteaux LU, le fromage Caprice des Dieux (dont le E171 a été retiré depuis, selon l'Alliance fromagère), le hachis parmentier William Saurin, des gâteaux apéritifs Belin, la blanquette de veau Leader Price.
Après l'échec de cette pétition, les associations de consommateurs françaises et européennes vont-elles se (re)mobiliser davantage sur la présence de nanoparticules dans l'alimentation ?
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Notre dossier "Nano et Alimentation"
Nos fiches :
Agriculture et nanomatériaux : comment assurer une meilleure transparence et traçabilité ?
Agriculture et nanomatériaux : comment assurer une meilleure transparence et traçabilité ?
Par DL, MD et l'équipe Avicenn - 16 avril 2015 - Article modifié le 15/03/2017
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Les fabricants de produits phytosanitaires demandent que les distributeurs n'aient à remplir la déclaration obligatoire des nanomatériaux
Avicenn a appris courant 2015 que les représentants nationaux de distributeurs de produits phytosanitaires* se sont joints au MEDEF via l'Union des Industries Chimiques (UIC) pour demander au Ministère de l'écologie une simplification consistant à restreindre l'obligation de déclaration des substances à l'état nanoparticulaire aux seuls fabricants. Aucune information publique n'a été faite sur cette demande.
* la Fédération du négoce agricole (FNA) et Coop de France avec l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP)
Petit retour en arrière pour resituer cette demande...
Depuis 2013, les entreprises et laboratoires concernés ont l'obligation de déclarer chaque année les quantités et les usages de nanomatériaux qu'ils produisent, distribuent ou importent en France ; la déclaration s'effectue auprès de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES).
L'année dernière ce n'est que fin avril, à quelques jours de la date limite de déclaration du 1er mai, que la plupart des distributeurs qui vendent des engrais et pesticides aux agriculteurs avaient été prévenus par leurs fournisseurs de cette obligation de déclaration. C'est d'ailleurs à cette occasion qu'ils avaient découvert la présence de certains nanomatériaux dans une gamme restreinte de produits phytosanitaires.
Dernier maillon de la chaîne d'approvisionnement concernée par cette obligation de déclaration, les distributeurs auprès des agriculteurs s'étaient retrouvés pris au dépourvu. Avicenn avait porté cette question à connaissance du Ministère de l'écologie et de l'ANSES lors de la 4ème réunion du comité de Dialogue "nano et santé" de l'ANSES, le 29 avril 2014.
Afin de remédier à cette difficulté, le ministère avait accordé in extremis un délai d'un mois1 pour l'ensemble des distributeurs aux utilisateurs professionnels (tous secteurs d'activité confondus, i.e pas spécifiquement dans le domaine agricole).
Les distributeurs concernés, déjà organisés pour transmettre à la place des agriculteurs des statistiques de vente pour la gestion des redevances pollutions, ont fait au mieux, dans le délai qui leur avait été accordé. (Dans le secteur agricole, la pratique des enregistrements est déjà très rodée dans le cadre de la base nationale de données sur les ventes PhytoData).
Il en a résulté une augmentation considérable par rapport à 2013 du nombre de déclarations dans la catégorie "agriculture, sylviculture et pêche" : de 1,2% en 2013, la part de ces déclarations était passée à 64% en 2014, sans que le nombre de fabricants ait beaucoup varié : la forte proportion de ces déclarations s'explique notamment du fait que 99% de ces déclarations ont été remplies par des distributeurs (6 373 sur 6 412)2.
Cette année, l'information est arrivée sur le terrain (aux distributeurs en lien avec les agriculteurs) début avril ; le 30 avril, le ministère a encore une fois accordé un délai d'un mois supplémentaire, en reportant, pour les seuls distributeurs auprès d'utilisateurs professionnels, la date limite de déclaration du 1er (initialement prévu par le décret de 2012) au 31 mai 2015.
Le ministère de l'écologie nous a appris fin juillet qu'il avait décidé d'en discuter en associant les autres parties prenantes dans le cadre du GT R-nano (la prochaine réunion devrait avoir lieu courant octobre 2015). Il a déjà fait part à l'UIC de ses réserves (dont celles que identifiées par Avicenn, cf. ci-dessous) et de contreparties nécessaires, ce qui devrait l'amener à préciser sa proposition.
Analyse, questions et proposition alternative d'AVICENN
Alléger la charge de travail des distributeurs au prix d'une restriction de l'information des autorités sanitaires, des agriculteurs et des consommateurs ?
La demande exprimée par les distributeurs au ministère de l'écologie irait dans le sens d'un allègement de la charge de travail des distributeurs déjà soumis à des obligations d'enregistrement importantes3. Ces derniers envisagent que l'exonération de la déclaration n'intervienne qu'"à partir du moment où le produit est conditionné à l'état final tel qu'il sera commercialisé à l'utilisateur final", afin de permettre aux autorités sanitaires de conserver un minimum d'information exploitable.
Pour autant, cette demande priverait d'information les principaux acteurs concernés :
- les autorités perdraient une information cruciale, même si insuffisante encore à ce stade, pour assurer la traçabilité des nanomatériaux qui figure parmi les objectifs principaux de la déclaration
- les distributeurs informés pour la première fois en 2014 n'auraient pas davantage d'informations
- les agriculteurs, directement concernés lors de la manipulation et l'épandage des produits et théoriquement informés pour la première fois en 2014 de la présence de nanomatériaux dans les produits, seraient dépossédés de la faculté de décider d'utiliser ou non des produits contenant des nanomatériaux introduits par les fabricants à leur insu et sans pouvoir juger eux-mêmes de leurs avantages et inconvénients
- mais aussi à terme les riverains, les clients des agriculteurs, les consommateurs et associations de consommateurs, etc.
Certes de nombreuses questions restent aujourd'hui sans réponses du fait d'un déficit d'information déjà important. Mais la demande des distributeurs ne ferait qu'accroître ce déficit. D'autres pistes doivent être explorées pour alléger leur travail sans perdre d'information et au contraire en gagner.
De nombreuses questions sur l'utilisation des nanomatériaux en agriculture sont toujours sans réponse aujourd'hui
Lors de ses échanges en 2014 avec des acteurs majeurs du domaine agricole (dont le réseau des coopératives agricoles), AVICENN avait pu constater que si les fabricants informent désormais bien les réseaux de distribution sur la nécessité de remplir la déclaration R-nano comme la loi les y oblige, ils sont beaucoup plus avares d'informations en ce qui concerne "ce qui est nano" dans les pesticides et engrais qu'ils proposent ainsi que sur les questions liées à la présence de ces nanomatériaux dans leurs produits.
Les questions suivantes restent en effet sans réponse à ce jour :
- Quel est le volume de nanomatériaux utilisés dans le domaine agricole ? En 2014, on a appris grâce à R-Nano que 64% des déclarations entraient dans la catégorie "agriculture, sylviculture et pêche", mais ce chiffre ne fournit en fait aucune indication fiable sur le volume ou la quantité de nanomatériaux utilisés dans l'agriculture, le registre R-nano n'étant malheureusement pas accessible au public)2.
- Qu'est-ce qui est "nano" dans les pesticides et engrais ? Est-ce la matière active ? Est-ce un ingrédient dans la formulation ?
- Pourquoi les fabricants de produits phytosanitaires y ont-ils recours ? Quels sont les bénéfices attendus ?
- Quels risques ont été identifiés ? Quelles sont les mesures de précautions prises ? Avec quel degré de fiabilité ?
En 2014, Avicenn a initié un travail de repérage afin d'en savoir plus4.
Linventaire des Amis de la Terre Allemagne recense 3 produits dans la catégorie jardinage, notamment deux produits du fabricant Syngenta contenant depuis 2008 des microémulsions de particules de 100 nanomètres les rendant parfaitement solubles et permettant de mieux rincer les pulvérisateurs en ne laissant aucun résidu sur les parois : le fongicide Banner Maxx pour le gazon et les plantes ornementales et le régulateur de croissance pour le gazon Primo Maxx.
Cependant, aucune information sur l'échelle nanométrique des composants ne figure sur les fiches de sécurité des produits5 ni sur les différents sites du fabricant Syngenta.
En agriculture, les argiles (naturelles ou synthétiques comme des formes de zéolites, aussi nommées nanoclay ou tamis moléculaires) semblent être le principal élément "nano" ajouté pour piéger des molécules de matières actives et provoquer une diffusion lente, ce que l'on nomme "l'effet retard".
Mais si le support est nano, alors la matière active "capturée" ou "encapsulée" ne l'est-elle pas ?
Cela peut être un bénéfice... ou un risque : car si la quantité de produit actif est plus petite grâce à un ratio surface / volume plus important à l'échelle nanométrique, faut-il pour autant se réjouir de l'efficacité accrue de plus petites quantités ?
Moins de matière active à l'unité sur une surface traitée peut permettre de diminuer l'indicateur IFT (indice de fréquence de traitement). Mais est-ce que cela limite pour autant les impacts environnementaux ? Les outils existent-ils pour aider les agriculteurs à limiter les erreurs d'épandage ? Les gains recherchés en termes d'économie de matière active seront-ils toujours aussi intéressants comparés au prix des outils de précision dont les agriculteurs devraient s'équiper et aux contraintes induites par leur utilisation ? Le débat est ouvert et les inquiétudes sont légitimes.
En 2014, nous avons pu identifier environ une quarantaine de produits vendus en agriculture ayant été déclarés au registre R-nano. Aucune des 42 fiches de sécurité consultées ne mentionne cependant d'information sur un ingrédient à la taille nanométrique, bien que certaines aient été mises à jour après la mise en place des définitions réglementaires européenne et française.
Parmi les 44 firmes qui commercialisent des produits pour les cultures en France6, 7 se sont senties concernées en 2014 par la déclaration au R-nano pour des usages en agriculture. (Quatre d'entre elles sont aussi fournisseurs pour des produits espaces verts et jardins). Mais à cette date, on ne trouvait pas d'information sur des "nanos" sur leurs sites ni sur le site de lUIPP info-pesticides.org, ce qui est toujours le cas en 2015.
L'effet retard (recherché au champ) est ainsi également très sensible... dans l'information !
Il est important et urgent de porter à ces questions toute la considération qu'elles méritent
Afin de ne pas renouveler les erreurs du DDT, de l'atrazine ou encore des insecticides "néonicotinoïdes", il est important de mieux connaître les produits utilisés par les agriculteurs afin de pouvoir pronostiquer et minimiser les risques.
Car une solution isolée peut devenir un problème si tous les agriculteurs épandent les mêmes produits au même moment sur un même territoire... l'agriculture a déjà été confrontée à de tels dilemmes et des pratiques de gestion collectives existent, de façon contrainte ou volontaire selon les lieux et les sujets.
Ignorance versus co-vigilance - Proposition alternative : et si on mutualisait les informations en partant des enregistrements existants ?
Plutôt que d'opter pour l'ignorance à travers la solution demandée par les représentants nationaux de distributeurs de produits phytosanitaires, Avicenn propose de réfléchir à des pistes alternatives qui permettraient l'exercice d'une "covigilance" par les différents acteurs concernés.
Il pourrait par exemple être demandé aux fabricants d'actualiser le registre e-phy (catalogue des engrais et pesticides autorisés en agriculture consultable en ligne), en spécifiant avec le numéro d'autorisation de mise sur le marché (AMM) lorsque le produit contient des nanomatériaux et est donc concerné par la déclaration R-nano.
Lorsqu'ensuite les distributeurs renseigneraient la base nationale de données sur les ventes Phytodata avec les codes postaux des agriculteurs acheteurs finaux7, l'information sur les usages serait plus complète que dans le registre R-nano et ce, sans enregistrement supplémentaire.
Les codes postaux sont certes relativement imprécis pour géolocaliser des usages mais suffisants pour hiérarchiser et, le cas échéant, alléger la surveillance là où il n'y a pas d'enjeu ou l'augmenter en ciblant les pratiques émergentes "à risques" sur des territoires ou des groupes de population à prévenir.
Qu'en pensent les responsables des différents registres, les distributeurs, les agriculteurs ? Avicenn poursuit l'enquête...
Fin juillet 2015, le ministère de l'écologie nous a précisé qu'il n'avait pas encore creusé nos pistes mais en avait pris bonne note : il intégrera cette discussion dans le cadre d'un retour d'expérience plus global du dispositif R-nano, qui pourrait avoir lieu courant 2016.
Gérer l'information à la source semble un circuit court avec des gains de temps pour les acteurs sur le terrain (après une phase d'investissement public en logiciel informatique pour lier les différents registres).
Mais les utilisateurs finaux, dont les pratiques sont observables ainsi à distance, devraient également avoir en retour un droit de consultation de ces données, comme aide aux décisions individuelles et collectives.
Ce besoin de transparence des données ne se pose pas uniquement en agriculture. Quid des secteurs de la santé, avec les usages médicaux en hôpitaux et à domicile ? Et dans la chaîne des acteurs, comment les centrales d'achat qui fournissent les pharmacies se sont-elles organisées pour remplir le registre R-nano ? A quels niveaux des chaînes de distribution est-il pertinent de collecter l'information ? A quels niveaux la restituer si nécessaire pour être en capacité d'émettre des alertes pour borner des usages le cas échéant, en anticipant des effets indésirables ?
Dans les domaines de consommation courante (alimentation, cosmétiques, textiles) que peuvent faire les distributeurs des grandes et moyennes surfaces pour éclairer les décideurs publics et les consommateurs? A minima, dans un avenir proche, il est nécessaire que R-nano devienne consultable au moins comme e-phy.
3 - Les acteurs agricoles sont soumis à des enregistrements sans bénéficier aujourd'hui en retour des informations agrégées qui leur seraient pourtant utiles.
Ainsi les distributeurs passent du temps à remplir Phytodata sans avoir en retour les données agrégées des matières actives les plus vendues par tous les distributeurs sur leur zone de chalandise avec les limites de bassins versants, qui leur fournirait une valeur indicative des flux entrants dominants. Ce serait un outil pour anticiper localement et éviter que tout le monde répande la même chose.
Un bassin versant représente l'ensemble d'un territoire drainé par un cours d'eau et ses affluents. Les zones de chalandise représentent le territoire des clients d'un fournisseur. Ce n'est qu'en ajoutant les statistiques de ventes des fournisseurs d'un territoire de l'eau que l'on peut avoir une idée des quantités utilisées pour faire un pronostic d'impact sur les ressources en eau.
Du côté des agriculteurs, le fait que leurs fournisseurs renseignent les données à leur place constitue une simplification administrative pour eux, avec une obligation fiscale à la clé, mais rien n'existe pour aider aux décisions de gestion environnementale... Toute information compilant des données pour produire des aides aux décisions collectives ne devrait-elle pas être à disposition d'abord des praticiens de terrain pour décider ensemble s'il faut réorienter des pratiques?
Ce qui se faisait il y a quinze ans en circuit court et en auto-gestion sur des bassins expérimentaux était plus opérationnel... Si quelques opérateurs nationaux administratifs ont gagné une information plus complète sur le territoire national et une collecte fiscale, la phase de retour pour actions sur le terrain est encore inachevée...
7 - L'organisme de centralisation des données de l'observatoire des ventes Phytodata (6000 distributeurs référencés) est l'agence de l'eau Artois Picardie, et pour des usages de fiscalité seulement. Le fichier est hébergé par l'INERIS, piloté par l'ONEMA pour le Ministère de l'écologie, "DEB Direction eau et biodiversité DGALN Direction de l'alimentation, du logement et de la nature Bureau GR4". Et le Ministère de l'Agriculture ? Les personnes qui pourraient être autorisées à faire une demande d'usage sont les partenaires du plan Ecophyto. Piloté par le Ministère de lagriculture, le plan Ecophyto associe, tant au niveau régional que national, lensemble des parties prenantes : administrations, professionnels agricoles et non agricoles, recherche, organisations non gouvernementales.
Les Instituts Techniques n'auraient pas accès à ces données.
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