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Nano et Agriculture
Nano et Agriculture
Par MD, DL, SC et l'équipe Avicenn - Dernière modification 24/09/2018
Ce dossier synthétique a vocation à être complété et mis à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr. Sommaire de cette synthèse du dossier complet
Les "promesses" des nanos en matière d'agriculture
De nombreuses promesses entourent les nanomatériaux dans les produits phytosanitaires. Schématiquement, on peut distinguer plusieurs types de bénéfices recherchés pour les engrais et les pesticides:
déclencher des mécanismes d'autodéfense de certains végétaux contre des maladies (produits "éliciteurs")
favoriser la biodisponibilité de la matière active :
grâce à sa taille nanométrique, la matière active est plus facilement absorbée par les plantes
ou grâce à une nano-encapsulation qui permet une libération de la matière active plus lente et plus étalée dans le temps ("effet retard")
éviter le lessivage par la pluie ou la dégradation par la lumière, grâce à l'encapsulation de la matière active
Un autre volet d'applications des nanotechnologies concerne l'agriculture dite "de précision", grâce aux nanocapteurs pour optimiser les conditions de culture.
en 2011 au Canada, la promesse reste floue sur une poussière intelligente conçue avec des nanocapteurs pour assure un meilleur contrôle de l'humidité, de la température, des conditions de sol, de la localisation de zones d'infestation pa des ravageurs En savoir + "
une équipe française en charge de ces sujets est Agrotic
aux USA, une expérimentation de l’implantation de nanocapteurs à l’intérieur même d’un végétal pour détecter précocement le stress hydrique est signalée en 2018.en savoir +... et remplacer (?) l'usage actuel de tensiomètres mesurant l'humidité du sol pour déclencher une irrigation.
Enfin, les nanotechnologies pourraient aider à la conception de capteurs plus performants permettant de détecter plus facilement des traces de produits phytosanitaires dans les produits des récoltes1.
Grâce à la déclaration obligatoire instituée par la France depuis 2013, on sait néanmoins qu'une partie des quelques 500 000 tonnes de substances nano déclarées chaque année dans le registre R-Nano est utilisée en agriculture, sans plus d'indication sur le volume exact ni sur les propriétés de ces nanomatériaux effectivement utilisés dans le secteur agricole.
Depuis 2014, l'agriculture arrive certes en tête des secteurs d'utilisation déclarés avec environ 10 000 déclarations en 2015 et 2016 (soit environ deux tiers des déclarations enregistrées dans R-Nano) pour plus de 100 déclarants3. Mais cette "première place" ne reflète pas nécessairement un fort tonnage, plutôt la bonne transmission de l'information au sein de la filière agricole et sans doute un nombre plus élevé, dans cette filière, d'intermédiaires entre les fabricants et les utilisateurs professionnels (en l'occurrence, les agriculteurs)4.
Dans le bilan 2016, une quarantaine de substances à l'état nanoparticulaires sont listées : alumine, silice, calcium, soufre, dioxyde de titane, cuivre, pigments et divers argiles (kaolin, attapulgite, terre de Fuller, ...).
→ Plutôt que des substances actives, il s'agirait essentiellement d'agents de charge / coformulants (l'ANSES procèdait, courant 2017, à des vérifications sur ce point).
En 2014, Avicenn a néanmoins pu identifier une quarantaine de produits vendus en agriculture ayant été déclarés au registre R-nano par une demi-douzaine d'entreprises... sans que l'on puisse avoir davantage d'informations : les entreprises ne fournissent en effet aucune information sur les nanomatériaux qu'elles utilisent, ni dans les fiches de sécurité des produits concernés (fiches qui ont pourtant été mises à jour après la mise en place de R-nano), ni sur leurs sites ni sur le site de l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP) : info-pesticides.org.
L'effet retard (recherché au champ) est ainsi également très sensible... dans l'information ! L'Union des industries chimiques (UIC) et le Medef, soutenus par la Fédération du négoce agricole (FNA), Coop de France et l'UIPP demandent même depuis 2015 à exonérer les distributeurs de remplir la déclaration obligatoire, ce qui ne ferait qu'accroître le déficit d'information déjà trop important aujourd'hui.
A l'inverse, Avicenn a fait des propositions qui aideraient à renforcer les efforts de vigilance collective5.
Quel impact sur les sols agricoles où sont épandues les boues des stations d'épuration ?
Il existe également une autre voie d'entrée, non intentionnelle cette fois, de nanomatériaux dans les sols agricoles : l'épandage de boues de station d'épuration, qui contiennent des nanomatériaux (filtrés lors de l'épuration). Or, si certains contaminants font l'objet de contrôle, il n'y a aujourd'hui aucune obligation de suivi des nanomatériaux ou de leurs résidus dans les sols et les cultures...
Des études montrent pourtant que le nanoargent qui se retrouve dans les boues d'épuration produit des effets toxiques sur les vers de terre ou les microorganismes du sol essentiels au cycle naturel de l'azote .
En France, des chercheurs français de l'ISTERRE ont constaté des modifications de l'activité enzymatique de sols cultivés après épandage de boues de stations d'épuration contaminées, même à faible doses, par des nanoparticules d'argent.
Fin 2015, l'OCDE a publié un rapport qui juge "alarmant" l'épandage agricole des boues d'épuration des eaux usées, eu égard aux risques liés à la présence des nanomatériaux dans ces boues.
Quelle information des agriculteurs et quels impacts sur leur santé ?
De manière générale, les agriculteurs sont très peu informés sur les utilisations et les risques des nanomatériaux et les nanotechnologies6.
Si les fabricants informent désormais les réseaux de distribution sur la nécessité de remplir la déclaration R-nano comme la loi les y oblige, ils sont beaucoup plus avares d'informations en ce qui concerne "ce qui est nano" dans les pesticides et engrais qu'ils proposent ainsi que sur les questions liées à la présence de ces nanomatériaux dans leurs produits.
C'est pourquoi l'association Avicenn milite pour davantage de transparence sur les recherches, l'utilisation, la commercialisation et les impacts des nanomatériaux, notamment en agriculture. Les agriculteurs sont en effet exposés à leur insu aux nanomatériaux contenus dans les mélanges qu'ils manipulent et pulvérisent.
Vu les risques sanitaires associés aux nanomatériaux, il y a lieu de s'inquiéter et de prendre les mesures de prévention et de précaution qui s'imposent.
Les distributeurs sont tenus de transmettre aux agriculteurs le n° de déclaration (cf. Arrêté du 6 août 2012, Art. 3, II) mais il serait nécessaire d'aller plus loin, en imposant le fait qu'ils leur fournissent surtout une information sur la nature des nanomatériaux présents dans leurs produits, les raisons d'être du dispositif R-Nano, les risques associés à ces substances et les mesures de protection adéquates... une information que les fabricants devraient, en amont, être également tenus de fournir.
Les nanomatériaux, du fait de leur petite taille, sont très mobiles et peuvent traverser les barrières de protection des cellules végétales et peuvent causer des dommages non négligeables sur la flore et la faune, notamment les micro-organismes de certains sols7...
Ils peuvent également remonter la chaîne alimentaire (des chercheurs ont mis en évidence le transfert de nanomatériaux des racines vers les feuilles (de blé ou de colza par exemple) et vers les graines de végétaux (par exemple dans des germes de soja).
Les argiles "nano" sont utilisées pour piéger des molécules de matières actives et provoquer une diffusion lente, ce que l'on nomme "l'effet retard". Si le support est nanostructuré, en interne ou à la surface, la matière active "capturée" ou "encapsulée" l'est donc très probablement elle aussi.
Si la quantité globale de produit actif utilisée est plus faible grâce à un ratio surface / volume plus important à l'échelle nanométrique, faut-il pour autant se réjouir de l'efficacité accrue de plus petites quantités ?
Moins de matière active à l'unité sur une surface traitée peut permettre de diminuer l'indicateur IFT (indice de fréquence de traitement). Mais est-ce que cela limite pour autant les impacts environnementaux ? Les outils existent-ils pour aider les agriculteurs à limiter les erreurs d'épandage ? Les gains recherchés en termes d'économie de matière active seront-ils toujours aussi intéressants comparés au prix des outils de précision dont les agriculteurs devraient s'équiper et aux contraintes induites par leur utilisation ? Le débat est ouvert et les inquiétudes sont légitimes.
En définitive, beaucoup de questions restent en effet sans réponse à ce jour :
Quel est le volume de nanomatériaux utilisés dans le domaine agricole ?
Qu'est-ce qui est "nano" dans les pesticides et engrais ? Est-ce la matière active ? Est-ce un ingrédient dans la formulation ?
Pourquoi les fabricants de produits phytosanitaires y ont-ils recours ? Quels sont les bénéfices attendus ?
Quelle est l'influence de la taille des particules actives sur les propriétés des formulations? C'est annoncé plus précis et mieux ciblé donc plus efficace, mais que se passe-t-il après la délivrance de la substance?
Quels risques ont été identifiés ? Quelles sont les mesures de précautions prises ? Avec quel degré de fiabilité ?
Une étude publiée en 2018 dans Nature Nanotechnology le confirme : "Actuellement, il n’existe aucune étude scientifique solide qui a analysé l’efficacité des formulations contenant des nanoparticules et leur impact sur l’environnement dans des conditions de plein champ. Ceci constitue une lacune cruciale dans nos connaissances et rend actuellement impossible une évaluation approfondie et globale. Des travaux de recherche supplémentaires à cet effet s’avèrent nécessaires"8.
Le développement massif des nanomatériaux, sans autre mesure pour mieux connaître et circonscrire le relargage aujourd'hui anarchique des nanomatériaux, ressemblerait à s'y méprendre à une bombe à retardement... C'est pourquoi les voix s'élèvent depuis une quinzaine d'années pour réclamer une meilleure anticipation et régulation des usages des nanomatériaux. Afin de ne pas renouveler les erreurs du DDT, de l'atrazine ou encore des insecticides "néonicotinoïdes", il est important de mieux connaître les produits utilisés par les agriculteurs afin de pouvoir pronostiquer et minimiser les risques.
Car une solution isolée peut devenir un problème si tous les agriculteurs épandent les mêmes produits au même moment sur un même territoire... l'agriculture a déjà été confrontée à de tels dilemmes et des pratiques de gestion collectives existent, de façon contrainte ou volontaire selon les lieux et les sujets.
4 - Les distributeurs de la filière agricole sont bien rodés à la transmission des informations, notamment avec la gestion des redevances pollution, via la base nationale de données sur les ventes PhytoData.
6 - Ce constat émane des échanges entre Avicenn et divers acteurs de l'agriculture ; il a été dressé également par trois étudiants de l'ISARA, Beucher M, Chignier M & Hess S dans un projet étudiant Maestro réalisé en 2016 en partenariat avec Avicenn
Par MD, DL et l'équipe Avicenn - Dernier ajout février 2019
Cette sélection de documents initialement compilés pour réaliser notre dossier Nano et Agriculture est périodiquement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn.
Elle est classée par type d'acteurs (recherche, pouvoirs publics, ONG, ...), afin de permettre aux lecteurs de contextualiser l'information qu'il y trouvera. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant des références à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.Sommaire
Projet de document présentant les initiatives et activités relatives à la gestion et à l'évaluation des risques des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture, juin 2012
→ Comme souligné dans le préambule de ce dossier, le flou domine concernant les applications des nanos dans l'alimentation : les applications énumérées ci-dessous proviennent de différentes sources compilées dans notre bibliographie1. Elles ne sont pas nécessairement toutes déjà commercialisées, ni présentes sur le marché français. Les promesses comme les risques demandent à être mieux évalués.
Depuis la mise en ligne de ce dossier en 2013, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a néanmoins fait réaliser un "inventaire des additifs alimentaires et d'autres ingrédients alimentaires / matières en contact avec les aliments / utilisations des additifs alimentaires dans le domaine des nanotechnologies" accessible en ligne, mais en anglais uniquement : Inventory of Nanotechnology applications in the agricultural, feed and food sector, Rikilt et JRC, EFSA supporting publications, juin 2014.
Les applications les plus nombreuses concernent les emballages et matériaux en contact avec les denrées alimentaires
La plupart des applications des nanotechnologies dans le domaine alimentaire concernent aujourd'hui les matériaux au contact des aliments : emballages, surfaces de découpes, instruments de cuisine, parois de réfrigérateurs, filtres à eau par exemple.
Elles ont pour but de :
renforcer leur solidité, rigidité et résistance à la dégradation : nano nitrure de titane pour prévenir les rayures sur les emballages plastiques par exemple
accroître leur transparence (emballages plastiques)
permettre une meilleure conservation des aliments en protégeant nourriture ou boisson contre :
les écarts de températures (stabilité thermique)
les UV : nanoparticules d'oxydes de titane TiO2 dans des emballages plastique, nanoparticules d'oxyde de zinc,
la perte des arômes et les échanges gazeux (entrée d'oxygène, fuite de gaz carbonique) : nanoargiles, nanoparticules d'oxydes de titane dans des bouteilles plastique pour des bières aux Etats-Unis ; nanoparticules de nitrure de titane dans des emballages en PET (PolyEthylène Téréphtalate) autorisées en Europe2
l'humidité, l'oxygène (nanocouches d'aluminium ou d'oxyde d'aluminium utilisées pour des emballages de barres de chocolat)
les microbes, bactéries ou champignons : nano oxyde de zinc (ZnO) à l'intérieur de boîtes de conserve, nano dioxyde de titane (TiO2) ; nanotubes d'halloysite et nanoargents que l'on retrouve également sur les parois internes de certains réfrigérateurs, sur des planches à découper, des récipients hermétiques pour la conservation des aliments, barquettes alimentaires, films transparents3, etc.)
ou encore favoriser un meilleur écoulement des sauces4.
Les recherches nano dans le domaine des emballages alimentaires donnent lieu à de nombreuses publications académiques sur le sujet5.
Elles se complexifient et s'élargissent désormais également aux applications comme les nanocapteurs biologiques incorporés dans des emballages dits "intelligents" pour vérifier que la chaîne du froid a été respectée, assurer la traçabilité des aliments ou détecter et signaler les détériorations, bactéries ou contaminants dans les denrées alimentaires6.
Début 2013 en France, l'Agence Nationale de la Recherche (ANR) a intégré dans son son appel à projets P2N (Nanotechnologies et nanosystèmes) , entre autres, un appel pour soutenir des recherches sur "l'apport des nanotechnologies aux emballages intelligents et aux revêtements"7. Le projet européen NanoPack s’est vu accorder 7,7 millions d’euros par l’Union européenne dans le cadre de Horizon 2020, afin de développer des emballages antimicrobiens à base de nanotechnologies pour améliorer la sécurité alimentaire et réduire les déchets alimentaires8.
Un point de débat porte sur la possibilité que des nanomatériaux migrent des emballages (ou des revêtements de surfaces des instruments de cuisine) jusqu'aux denrées alimentaires qu'ils contiennent ou avec lesquelles ils entrent en contact ; les modalités de ce transfert et les risques qu'ils pourraient entraîner sont encore largement méconnus et très variables puisqu'entrent en ligne de compte de multiples facteurs (la température, la durée du conditionnement, la nature des denrées conditionnées : liquides ou solides, etc.).
En 2009, l'Association Nationale des Industries Alimentaires (ANIA) affirmait que "l'absence de migration dans les produits alimentaires a été démontrée"9. PlasticsEurope, association regroupant des fabricants de plastique européens, a commandité une étude dont les résultats publiés en 2013 tendent également à minimiser la probabilité d'occurrence d'une telle migration10.
Pourtant d'autres études ont montré qu'une migration est possible, avec même dans certains cas la mise en évidence d'effets néfastes (moins bonne absorption des nutriments et plus grande perméabilité de l'intestin, transférant dans le sang des composés indésirables)11. La migration des produits chimiques (nano ou non) contenus dans les emballages alimentaires vers les denrées qu'ils contiennent constitue de toute évidence une question majeure pour les années à venir12.
Quelles applications dans les denrées alimentaires elles-mêmes ?
On a longtemps soupçonné la présence de nanomatériaux dans des produits alimentaires, mais il n'est pas aisé d'identifier ce qui relève de la R&D de ce qui est déjà sur le marché, pour les raisons mentionnées dans notre préambule.
en 2016, les premiers tests de l'association Agir pour l'Environnement, ont établi la présence de nanoparticules non étiquetées dans six produits analysés : biscuits LU, chewing gums Malabar, blanquette de veau William Saurin et épices Carrefour, puis bonbons "Têtes brûlées" goût framboise et chewing-gums NEW'R de Leclerc.
ensuite en août 2017, le magazine 60 Millions de consommateurs a à son tour révélé que les 18 produits sur lesquels l'association a fait réaliser des tests contenaient eux aussi des nanomatériaux13
plus tard, en janvier 2018, les tests du magazine Que Choisir en ont identifié dans 7 produits alimentaires14.
Depuis fin 2017, la DGCCRF (répression des fraudes) a présenté des résultats partiels de ses analyses, qui viennent confirmer celles publiées par les associations mentionnées plus haut : dans la quasi totalité des produits alimentaires testés et composés d'additifs, des nanoparticules ont été détectées... sans que l'étiquetage comporte de mention [nano]15.
Après l'ONG Center for Food Safety qui propose depuis 2015 un inventaire d'environ 300 produits alimentaires contenant des nanomatériaux aux USA (mis à jour début 2018), l'association Agir pour l'Environnement (APE) a mis en ligne, en mars 2017, le site http://www.infonano.org, une base de données répertoriant aujourd'hui plus de 300 produits alimentaires suspectés de contenir des nanoparticules.
Voici également ce que la littérature scientifique ou marketing permet également de recenser comme applications existantes ou à venir :
- Certaines sont présentées comme des solutions innovantes à des problèmes nutritionnels et/ou sanitaires :
diminution de la teneur en graisse16, en sel17, en calories ou en émulsifiants des aliments, sans altération de leur goût (le rapport surface / volume étant plus important à l'échelle nanométrique, un même poids de graisse ou de sel, sous forme nano, permettant de couvrir une zone plus importante de la surface alimentaire)
des nanoparticules d'oxyde de zinc (ZnO) seraient par exemple utilisées comme complément nutritionnel (pour renforcer le système immunitaire notamment),
des nanoparticules de fer seraient moins nocives pour les intestins que le fer administré sous sa forme classique19
des principes actifs, vitamines, enzymes, oligoéléments sont nanoencapsulés dans des aliments, afin d'augmenter leur biodisponibilité : protégés par la nanocapsule, les éléments en question se dégraderaient moins vite et seraient mieux absorbés par notre organisme.
lutte contre les intoxications alimentaires : des nanoparticules peuvent être utilisées pour lutter contre les infections alimentaires causées par des agents pathogènes (comme les bactéries E. coli ou salmonelles par exemple)
- D'autres pour des facilités techniques (ou de confort ?), sans nécessairement d'avantage nutritionnel ou sanitaire :
des nanoparticules de dioxyde de silice (SiO2 : E550/551) utilisées pour fixer l'humidité et empêcher l'agglomération des grains de sel ou de sucre, des épices, du cacao et des autres denrées en poudre comme les soupes en poudre et nouilles instantanées, divers assaisonnements pour viande hachée et burrito ou guacamole, etc.20
des nanoparticules de carbonate de calcium (E170) et d'oxyde de magnésium (E530) sont également utilisées comme anti-agglomérants
modification des arômes, saveurs, couleurs et textures des aliments :
des nanoparticules de dioxyde de titane (additif alimentaire E171) utilisées dans toutes sortes de denrées alimentaires, dont des compléments alimentaires et des médicaments21 servent :
de pigment blanc, utilisé pour rendre des aliments plus blancs, ou pour décliner une palette de couleurs en étant associé à d'autres colorants alimentaires (sur le glaçage de pâtisseries par exemple, un pâtissier pourra ainsi mélanger du E171 avec un colorant rouge pour obtenir du rose, etc.)
de vernis transparent rendant un produit plus brillant (chewing gums dragéifiés, M&M's, comprimés de médicaments)
des nanoparticules, notamment des nanosilices (additifE550/551), sont ajoutées dans certains produits alimentaires (plats surgelés, glaces, sauces, etc.22) afin de rendre leur texture plus homogène, plus onctueuse...
des nanoparticules d'argent ont été retrouvées dans l'additif alimentaire E17423 utilisé comme colorant argenté et décoratif pour les pâtisseries et chocolats
des nanoparticules d'or (E175) sont utilisées comme colorant doré pour les confiseries et pâtisseries
des nanoparticules d'oxyde de fer (E172) sont utilisées comme colorant pour donner une teinte rouge, jaune ou noire à des confiseries et biscuits ou à l'enveloppe de certaines charcuteries comme des saucisses de Francfort24
des nanoparticules de carbonate de calcium (E170) sont également utilisées comme colorant blanc
des recherches sont faites pour diffuser des saveurs, par ouverture progressive de nanocapsules.
des nanoagrégats de cacao permettraient d'accroître l'arôme de chocolat grâce à l'augmentation de la surface qui entre en contact avec les papilles gustatives25
En septembre 2018, plus de 80 pigments de taille nano ont été recensés sur le marché européen par l'agence européenne des produits chimiques (ECHA).
allongement de la durée de conservation :
intégration de nanocapsules qui libèrent progressivement des substances conservatrices dans les aliments ; ajout d'un caroténoïde (lycopène synthétique nanométrique, antioxydant) aux limonades, jus de fruits, fromages et margarine par exemple
ajout de nanoparticules de dioxyde de titane par exemple (TiO2, E171), que l'on trouve par exemple pour les chewing-gums Trident, les M&M's, Mentos et autres bonbons, des barres chocolatées ou crèmes à café Nestlé26
ajout de nanoparticules de platine pour décomposer l'éthylène et ralentir le mûrissement des fruits et légumes27
ajout de nanorevêtements sur des fruits coupés pour allonger leur durée de conservation28
→ Début 2013 en France, l'Agence Nationale de la Recherche (ANR) a intégré dans son son appel à projets P2N (Nanotechnologies et nanosystèmes), entre autres, un appel pour soutenir des recherches sur "la protection et vectorisation de micronutriments indispensables au travers d'aliments nanostructurés" ou encore sur "les nouveaux additifs ou compléments alimentaires sous forme nanométrique"7.
Fin 2015, les niveaux estimés d'exposition alimentaire du TiO2 chez l'homme sont mille fois plus importantes que celles de perturbateurs endocriniens comme le bisphénol A : chez l'adulte de 0,2 à 1 mg/kg poids corporel/jour, et chez l'enfant / adolescent aux Etats-Unis de 1 à 3 mg/kg/jour (jusqu'à un maximum estimé à 6 mg au Royaume-Uni pour les plus exposés)29, du fait de la forte teneur en TiO2 dans les confiseries.
Nous absorberions en moyenne environ 124 mg de nano-silice par jour30.
D'autres sources indirectes de contamination de notre alimentation par des nanomatériaux manufacturés
Outre les voies d'entrée mentionnées plus haut (migration des emballages ou applications directes dans les denrées alimentaires), des résidus de nanomatériaux manufacturés peuvent être présents dans notre tube digestif en provenance de différentes sources :
Une contamination via les engrais et les pesticides ?
Des nanomatériaux contenus dans des produits phytosanitaires et fertilisants (et ceux présents dans les boues des stations d'épuration utilisées comme engrais) utilisés en agriculture pourraient remonter la chaîne alimentaire31. Les connaissances sur l'utilisation des nanomatériaux comme pesticides ou engrais sont encore très lacunaires32, mais il a été montré par exemple que des nanoparticules contenues dans des pesticides vaporisés peuvent traverser la pelure des fruits et légumes33.
Une contamination via l'alimentation animale et les médicaments vétérinaires ?
Des nanoparticules pourraient également être utilisées dans l'alimentation animale ou les traitements médicamenteux pour les animaux destinés à la consommation humaine34.
Mais en 2009, l'Afssa écrivait : "Après consultation de l'Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) et de la Direction du végétal et de l'environnement (DiVE) il apparaît qu'aucun médicament vétérinaire ou produit phytosanitaire relevant des nanotechnologies n'a été soumis à autorisation à ce jour en Europe"35.
Une contamination plus générale ?
Plus généralement, des résidus de nanomatériaux manufacturés peuvent également être présents dans notre alimentation sans avoir été introduits à dessein par l'industrie agroalimentaire, mais plus prosaïquement du fait du relargage et de la dispersion des nanomatériaux manufacturés dans l'environnement et de leur transfert dans la chaîne alimentaire36:
- ceux qui sont présents dans les milieux aquatiques peuvent être absorbés par l'appareil digestif des moules37 ou par des algues, lesquelles sont ingérées par du zooplancton dont se nourrissent les poissons38 qui peuvent se retrouver dans nos assiettes : Source : Cedervall et. al, Food Chain Transport of Nanoparticles Affects Behaviour and Fat Metabolism in Fish, PLoS ONE, 7(2): e32254 (2012).
- ceux qui sont présents dans les sols peuvent être absorbés par les racines, puis transférés :
vers les graines des végétaux (par exemple dans des germes de soja)39
vers les feuilles (de blé, de colza ou de salade par exemple)40 :
Nano in packaging coming to a fridge near you, Catherine Simoneau, Joint Research Centre (JRC), Institute for Health and Consumer Protection (IHCP), European Union Reference Laboratory for Food Contact Materials (EURL), 2012
"Vous reprendrez bien une cuillerée de nanoparticules ?" (chapitre 5) in La civilisation des nanoproduits, Jean-Jacques Perrier, éditions Belin, septembre 2017
17 - Cf. Nanotechnology helps food manufacturers make healthier food, 30 juillet 2012 : "A novel product from Tate & Lyle, Soda-lo, was one of only a few products being marketed, he said. It enabled added salt levels to be reduced by up to 30% in foods such as bread, pizza bases, pastry, savoury pie fillings, cheese and baked snacks, without loss of flavour or structure".
Plus de 4 000 médicaments contiennent le colorant E171 ; parmi les plus consommés : Doliprane, Dafalgan, Efferalgan et les génériques de paracétamol, Advil et les génériques d'ibuprofène, Spasfon, Augmentin et génériques d'amoxicilline, Tahor et Crestor (statines), médicaments à base de metformine (antidiabétiques), d'omeprazole (contre les ulcères et le reflux gastro-oesophagien), de losartan (antihypertenseurs).
Les compléments alimentaires sont aussi concernés : une recherche sur un site de parapharmacie remonte 650 résultats qui concernent la plupart des grandes marques (Arkopharma, Forte Pharma, Omega Pharma, Juvamine, Oenobiol, Naturactive, Solgar, Pileje, etc.) et des secteurs (minceur, fatigue, stress, ménopause, confort articulaire, etc.).
Nanoparticules : une méthode pour étudier les faibles doses, CEA, 16 avril 2015 : deux équipes du CEA Saclay (DSM-Iramis et DSV-IBITECS) sont parvenues à suivre le parcours de nanoparticules de dioxyde de titane à des doses environnementales dans des moules de rivière.