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FRANCE - Une consultation en toute discrétion sur le décret de déclaration nano
FRANCE - Une consultation en toute discrétion sur le décret de déclaration nano
Le Ministère de l'Ecologie a lancé une consultation restreinte sur la 2ème version du projet de décret relatif à la déclaration des substances à l'état nanoparticulaire mises sur le marché. L'Avicenn vous informe sur le contenu de ce projet, la publicité qui lui a été donnée, ainsi que son calendrier.
par MD avec l'équipe Avicenn - 15 avril 2011 (dernière modification juillet 2011) Sommaire
- Une déclaration obligatoire dès août 2011 selon les lois Grenelle, une première consultation sur le décret d'application en janvier 2011
Les lois Grenelle 1 et Grenelle 2 ont prévu la mise en place d'une déclaration obligatoire des substances à l'état nanoparticulaire fabriquées, importées ou mises sur le marché en France.
Initialement prévue pour août 2011, cette déclaration a pour objectifs de :
mieux connaître les nanomatériaux produits, importés ou mis sur le marché (identité, quantités, usages) ;
assurer la traçabilité des nanomatériaux - des fabricants, aux utilisateurs professionnels, en passant par les distributeurs et les importateurs ;
fournir les éléments nécessaires à l'évaluation des risques et à linformation du public.
En la matière, la France serait ainsi le premier pays à se doter d'un tel dispositif obligatoire attendu par de nombreux acteurs : pour l'heure, les inventaires qui ont le mérite d'exister0, loin d'être exhaustifs, sont élaborés à partir de déclarations des industriels ou d'hypothèses sur la composition des produits, sans vérification possible, faute de moyens financiers, humains et / ou techniques.
A noter cependant, en ce qui concerne le volet "information du public", le fait que le législateur n'est pas allé jusqu'à prévoir un étiquetage de ces "substances à l'état nanoparticulaire" : une fois commercialisées, ces nanos "disparaissent" de la vue du consommateur. Toute personne désirant en savoir plus pourra se tourner vers l'ANSES, dont les modalités de réponse restent encore à définir, du fait de limites à la publication des données recueillies dans le cadre de la déclaration obligatoire, liées au secret industriel ou commercial.
- Une première consultation sur le décret d'application en janvier-février 2011
Une première consultation publique avait été lancée sur son site par le Ministère de l'Ecologie du 5 janvier au 28 février dernier sur une première version de projet de décret.
Associations de protection de lenvironnement, associations de consommateurs, organismes de recherche publics, syndicats de travailleurs, syndicats et organisations professionnels, ministères concernés et collectivités locales avaient été prévenus par courrier.
Une soixantaine de réponses auraient été reçues1, dont celle de l'ANSES.
Mars-Avril 2011 : une seconde consultation en toute discrétion
Une deuxième version du projet de décret (V2) relatif à la déclaration des substances à l'état nanoparticulaire mises sur le marché, datée du 28 mars 2010, a été envoyée aux organismes ayant répondu à la première consultation. Selon nos informations, cette V2 a été soumise à une consultation restreinte entre le 29 mars et le 11 avril.
Selon une source ministérielle, "une quinzaine de commentaires écrits" auraient été envoyés à ce jour sur la V2.
Par rapport à la V1, les éléments les plus notables sont :
la simplification de la définition de "substance à l'état nanoparticulaire" qui gagne en lisibilité mais abandonne la référence au projet de recommandation de la Commission européenne. En cause, le retard pris par la Commission dans l'adoption de cette définition du fait de blocages au niveau européen en raison des désaccords entre parties prenantes, que l'on retrouve également à l'échelle française.
le durcissement de la sanction en cas de non respect de l'obligation légale : l'article art. R. 523-20 ajoute en effet une sanction administrative (une amende de 1500 euros avec astreinte journalière de 150 euros) à la sanction pénale déjà prévue dans la V1 (une "contravention de la 5ème classe" d'un montant de 1500 ), qualifiée par certains de "nano-amende".
Quelle transparence ?
Sur la soixantaine d'institutions ayant répondu à la première consultation, rares sont celles qui ont jugé opportun de publier en ligne l'avis qu'elles ont communiqué au ministère. Nous avons identifié ceux de l'ANSES, de NanoNorma, de VivAgora, d'Ingénieurs et Scientifiques de France ou du MEDEF. A notre connaissance, l'Institut National de Recherche et de Sécurité a également répondu mais n'a pas publié sa réponse à la première consultation ni ses commentaires à la deuxième.
Selon nos informations, le ministère n'a pas prévu de rendre publiques les contributions reçues - comme avait pu le faire, lors du débat de 2009-2010, la Commission nationale du débat public2, ou comme il est souvent d'usage dans le cadre des consultations européennes, pour lesquelles les réponses sont généralement publiées (au moins sous la forme d'extraits et au moment de la parution du texte définitif).
Une telle transparence a pourtant été encouragée par l'OCDE de 2010 : « La France pourrait établir un registre unique sur Internet de tous les projets de dispositions en consultation. Pour assurer une plus grande efficacité et responsabilisation publique le registre devrait aussi incorporer les commentaires des parties avec l'argumentation et la réponse des autorités réglementaires »3.
En matière de transparence, il est à noter que c'est... la Société Française de Métallurgie et de Matériaux (SF2M) et le Groupe Français de la Céramique (GFC) qui ont publié la deuxième version du projet de décret ! Le texte, contrairement à la première version du projet, ne figure pas sur le site du ministère de l'Ecologie et du Développement durable, qui ne l'a communiqué qu'aux seuls acteurs ayant répondu à la première consultation.
Quelle place pour la société civile ?
La V2 a fait hier l'objet d'une réunion avec les acteurs de la recherche publique, suivie aujourd'hui par une autre réunion avec les acteurs de l'industrie. Pas de réunion prévue, à notre connaissance, avec la société civile. Pourquoi la dynamique collégiale du Grenelle de l'Environnement, qui a accordé aux ONG une place au même titre qu'aux industriels, n'a-t-elle pas été poursuivie - surtout pour un décret d'application des lois Grenelle ?
Les délais seront-ils tenus ?
Selon les lois de Grenelle, la déclaration dev(r)ait entrer en vigueur en août 2011,
Ce projet de V2 nécessite une notification auprès de la Commission européenne4, ce qui entraînerait un délai supplémentaire avant la publication du décret final.
Les discussions en cours et à venir, selon qu'elles seront plus ou moins consensuelles, pourraient également avoir des répercussions sur le calendrier. Selon nos dernières informations, la V2 aurait fait l'objet d'"un meilleur accueil que la première version".
Le décret sera-t-il publié - et en quels termes - avant août 2011 ? Suspense... L'Avicenn continue sa veille sur le sujet.
Sans déclaration, une navigation à vue
Sans une telle déclaration, scientifiques et agences sanitaires en sont aujourd'hui réduits à faire des estimations à la louche et à l'aveuglette, comme en atteste cette publication scientifique récente de chercheurs de Caroline du Nord : Estimating Production Data for Five Engineered Nanomaterials As a Basis for Exposure Assessment, relayée par NanoWerk ce 11 avril : Does anyone know how much nanomaterials are produced? Anyone...? .
Dans cet article, la production de nanoargent aux Etats-Unis n'est estimée qu'à 20 tonnes par an. Pour mémoire, en 2008, deux scientifiques, Mueller & Nowack, avaient estimé la production annuelle mondiale à 500 tonnes par an5.
Une telle divergence dans les estimations s'explique par le manque de données fiables existant à ce jour. D'où l'intérêt de voir se développer des déclarations obligatoires - en France mais également à l'étranger - afin de remédier à ces lacunes.
l'inventaire de 2010 réalisé conjointement par le BEUC, Bureau européen des unions de consommateurs et l'ANEC, association européenne pour la coordination de la représentation des consommateurs dans la normalisation
l'inventaire du think tank américain Project on Emerging Nanotechnologies (PEN) mis à jour en mars dernier
ou le Guide des nanotechnologies des Editions des Techniques de l'Ingénieur, seconde édition, avril 2011
Il fait suite à la conférence Nanocode du 29 septembre dernier, sur un sujet important que nous avons déjà abordé1 - celui de la mise en place d'une recherche "responsable" dans le domaine des nanosciences et nanotechnologies.
Pour mémoire, le projet NanoCode est un projet européen financé dans le cadre du 7ème PCRD européen dont le but est de développer un cadre stratégique (MasterPlan) guidant le développement et la mise en uvre du Code de bonne conduite pour une recherche responsable en nanosciences et nanotechnologies ; ce Code est une recommandation de la Commission européenne datée du 7 février 2008, qui n'a pas, pour l'heure, de valeur juridique.
Selon ses auteurs, le MasterPlan s'appuie sur les enseignements tirés de consultations menées en 2010 et 2011 auprès des parties prenantes de huit pays européens, mais aussi d'Argentine, de Corée du Sud et d'Afrique du Sud (300 experts avaient répondu à un questionnaire en ligne, 150 experts avaient participé à des entretiens individuels et des focus groups)2.
Les résultats de cette consultation ainsi qu'une version de travail de ce MasterPlan et un prototype du CodeMeter (un outil d'évaluation du respect des principes du Code) ont fait l'objet de discussions lors des ateliers nationaux avec les acteurs des pays partenaires. Cette version officielle du MasterPlan présente une sélection des idées, options et recommandations émises par ces derniers concernant la révision et la mise en uvre du Code ; elle met notamment en exergue la préférence des parties prenantes, les aspects pratiques de mise en oeuvre, la nécessité de changements structurels et substantiels du Code.
A noter, des conférences dans les Etats membres partenaires de NanoCode sont encore en cours. La conférence française aura lieu le 30 novembre 2011 à Paris, de 14h à 17h30 à l'ENS, 45 rue d'Ulm, dans le 5ème. Elle est gratuite et ouverte aux représentant(e)s des administrations publiques, élu(e)s, industriels, ONG, et au grand public.
Vos retours sur le rapport et/ou la conférence sont bienvenus à l'adresse suivante : redaction(at)veillenanos.fr pour alimenter notre analyse pluraliste de ces publications et réunions.
Ce site est édité par l'association AVICENN qui promeut davantage de transparence & de vigilance sur les nanos.
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