D'ici juin 2017, le gouvernement devra remettre au Parlement un rapport sur les nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux. C'est ce que prévoit l'article 60 de la loi de modernisation de notre système de santé de janvier 2016.
Cet article introduit par Aline Archimbaud du groupe écologiste du Sénat devrait permettre de faire progresser l'information et la vigilance concernant les nanos dans le domaine médical.
Il y avait en effet, selon Les Entreprises du médicament (LEEM) début 2015, 157 médicaments de médecine humaine, 8 médicaments de médecine vétérinaire et 65 dispositifs médicaux constitués d'éléments "nano" mais très peu d'informations sur l'encadrement de leur utilisation. Or à notre connaissance, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) n'a toujours pas demandé de données issues du registre R-nano collectées dans le cadre de la déclaration obligatoire ! C'est pourtant l'un des très rares organismes à y avoir droit. Depuis son rapport de 2011 sur ce sujet, l'ANSM n'a pas communiqué sur l'utilisation des nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux.
Pourtant les risques associés aux nanomatériaux méritent qu'une attention soigneuse leur soit apportée, faute de quoi les précautions ne peuvent être prises pour protéger les médecins, les personnels soignants ainsi que les patients contre leurs effets indésirables.
Nous avons appris par ailleurs qu'en avril 2016, des nanoparticules de métaux (manufacturées à dessein à l'échelle nano ?) avaient été détectées par le laboratoire italien Nanodiagnostics dans le vaccin Meningitec, utilisé pour combattre les méningites. Près de 700 familles françaises ont assigné en justice le laboratoire CSP (Centre Spécialités Pharmaceutiques), distributeur français du Meningitec, produit par le laboratoire américain Nuron. La députée européenne Michèle Rivasi a écrit à l'Agence européenne du médicament (EMA) et à l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) pour demander la transparence quant à la présence de ces particules toxiques dans les médicaments et les vaccins mis sur le marché. L'ANSM avait annoncé la parution des résultats d'une contre-expertise en mai. Début juillet elle ne les avait pas encore communiqués.
Pour aller plus loin : Nanomédecine et NBIC dans le domaine médical : promesses et risques.
Nanoparticules de dioxyde de titane dans l'alimentation : quels risques ? quelles précautions ?
Nanoparticules de dioxyde de titane dans l'alimentation : quels risques ? quelles précautions ?
Par MD, DL et l'équipe Avicenn - Le 31 mars 2015 - Dernière modification le 1er avril 2015
Cet article a vocation à être progressivement complété et mis à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr. Sommaire :
Le 17 mars, le député européen et militant anti-malbouffe José Bové a appelé au boycott des produits alimentaires contenant des nanoparticules de dioxyde de titane (TiO₂)1, brandissant sur un plateau télé des paquets de M&M's et de chewing gums Hollywood.
En cause : la nocivité supposée des nanoparticules de TiO₂ présentes dans le colorant sous le code "E171".
Les particules de TiO₂ sont utilisées pour rendre des aliments plus blancs ou plus brillants ou pour décliner une palette de couleurs en étant associées à d'autres colorants alimentaires (sur le glaçage de pâtisseries par exemple, du E171 peut être mélangé avec un colorant rouge pour obtenir du rose, etc.).
Selon José Bové, les nanoparticules contenues dans le E171 ont "des conséquences graves" : elles présentent "des risques de cancer".
Moins d'un an après la pétition s'opposant à l'utilisation de nano TiO2 dans les yaourts, le sujet revient donc une fois de plus à la "une".
Des risques de cancer ? Rien ne le prouve mais l'appel à la vigilance est justifié
Vérification faite2, il n'y a pas d'études permettant aujourd'hui de considérer ces nanoparticules comme un cancérogène (ni "possible" ni "certain") lorsqu'il est ingéré.
Certes en 2006 le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé le dioxyde de titane (TiO₂) comme cancérigène possible pour l'homme (classe 2 B) lorsqu'il est inhalé - et ce, toutes tailles confondues : l'échelle nanométrique est donc concernée mais pas plus ni moins que le TiO₂ non nanométrique3.
A noter également : les études qui ont été considérées pour cette classification portaient sur le TiO₂ sous forme de poudre avec la présomption de risques par inhalation qui concernent d'abord les travailleurs potentiellement exposés4 (notamment dans le secteur de la chimie, du bâtiment, des cosmétiques ou de l'alimentaire).
Pour le secteur spécifique de l'alimentation, les professionnels qui peuvent inhaler une grande quantité de E171 à l'état de poudre - comme les agents qui confectionnent les colorants alimentaires ainsi que les pâtissiers (qui manipulent du sucre glace ou des colorants pour leurs préparations pâtissières) - sont particulièrement exposés et devraient faire l'objet d'une sensibilisation et d'une surveillance ciblée5.
En 2004, l'l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait considéré que l'utilisation de E171 comme additif alimentaire ne posait pas de problème. Une ré-évaluation par l'EFSA est néanmoins attendue pour fin 2015 au plus tard6.
L'évaluation des risques associés au dioxyde de titane est également prévue dans le cadre de REACH : elle sera réalisée par l'Agence française de sécurité sanitaire (ANSES) en 20167.
En attendant les résultats de ces études, voici ce que l'on sait aujourd'hui8 :
Qu'advient-il des 5 à 10% restants ? Sur la base d'études menées essentiellement chez l'animal ou sur des cellules in vitro, on sait que :
Des nanoparticules de TiO₂ de 25 nm peuvent être absorbées au niveau de la bouche (études chez le cochon dont les caractérisques des cellules buccales sont très proches de celles de l'homme), avec comme effets possibles, un impact toxique, la production de molécules pro-inflammatoires et l'observation d'une destruction de cellules ("apoptose"), observés dans deux études in vitro sur cellules humaines et pour de fortes concentrations de TiO2.
Les autres transitent ensuite par l'estomac pour arriver aux intestins, et se trouvent dans des milieux aux niveaux d'acidité différents qui peuvent conduire les nanoparticules à s'agglomérer puis à se réindividualiser.
Une fois dans les intestins, les nanoparticules de dioxyde de titane peuvent être absorbées9 et pourraient :
induire des inflammations intestinales, des lésions chroniques
se diffuser dans l'organisme jusqu'au foie, à la rate, aux glandes endocrines et au cerveau, et entraîner des effets délétères - notamment en termes immunitaires - qui restent à préciser à des doses proches de celles auxquelles l'homme est réellement exposé.
avec des doses plus importantes que celles auxquelles nous sommes exposées,
sur des cellules cultivées in vitro ou sur des animaux de laboratoire (pour l'étude des effets dans l'intestin, sur des rongeurs, qui n'ont pas la même alimentation ni le même métabolisme que les hommes),
et avec des nanoparticules qui sont différentes de celles qui sont incorporées dans les produits, en l'occurrence des nanoparticules dix fois plus petites que celles que l'on trouve dans les colorants E 171.
Mais hormis les travaux en cours de réalisation à l'INRA de Toulouse dans le projet NanoGut dont les résultats ne sont pas encore connus, il n'y a pas de recherches sur les éventuels effets cancérigènes de TiO₂ ingéré, les premiers signaux mis en évidence par les rares études menées justifient les appels à la vigilance par rapport à l'ingestion répétée et chronique de ces nanoparticules.
Francelyne Marano, professeure émérite de toxicologie, considère que l'absorption de dioxyde de titane peut être nocive et pose une question centrale : "L'utiliser uniquement comme colorant pour rendre des produits plus agréables à l'il est-il vraiment utile et raisonnable ?" 10. Dans la mesure où les risques ne sont pas bien connus aujourd'hui, il est choquant de voir l'industrie agroalimentaire utiliser en grande quantité ce type de produits (ainsi que les autres additifs et composés nanométriques) sans avoir fait vérifier au préalable leur innocuité, le tout pour rendre des produits artificiellement plus "esthétiques".
Certains experts se veulent rassurants en arguant que les résultats des études sont contradictoires et qu'il n'y a pour l'instant aucune certitude sur la toxicité des nanoparticules de dioxyde de titane que l'on ingère. "C'est comme si nous venions de découvrir que le papier peut provoquer des coupures, sans avoir pu encore déterminer s'il s'agit d'un inconvénient mineur ou potentiellement mortel" a ainsi écrit Andrew Maynard11, directeur du Risk Science Center de l'Université du Michigan (USA).
Mais comparaison n'est pas raison : le rapport bénéfices / risques dans le cas du papier est incontestablement positif. Or concernant le TiO₂ (nano ou pas) dans les aliments, il est beaucoup moins évident. En outre, on peut facilement visualiser une feuille de papier, tenter d'éviter voire soigner les coupures qu'elle peut générer, tandis que les nanoparticules de dioxyde de titane sont invisibles à l'oeil nu, et leur présence n'est pas toujours signalée sur les produits !
D'autres "experts" relativisent : "La consommation de M&M's conduit plus rapidement à l'obésité qu'à un cancer"12. C'est vrai : bon nombre d'aliments contenant des nanoparticules sont des confiseries et pâtisseries. Mais les paquets de M&M's et de chewing gums Hollywood apportés par José Bové sur le plateau télé ne sont que l'arbre qui cache la forêt : beaucoup d'autres aliments en contiennent, ainsi que des produits censés ne pas nuire à la santé, notamment les dentifrices et les médicaments !
Des nanoparticules de TiO2 dans les aliments mais pas seulement : on en absorbe aussi via les dentifrices et les médicaments
Outre les confiseries et les viennoiseries, on trouve l'additif E171 dans des pains de mie, des mayonnaises, du sucre glace, des plats préparés et également des boissons.
Le site Openfoodfacts.org propose une liste des produits alimentaires contenant du TiO2 E171, avec en mars 2015, 109 produits vendus en France, dont des M&M's, des Mentos, des chewing gums Hollywood, Freedent, Malabar et Casino, des gâteaux LU, des raviolis Panzani, le hachis parmentier William Saurin, des gâteaux apéritifs Belin, les blanquettes de veau Leader Price et William Saurin, des bûches pâtissières, pizzas, sirops, etc.
Mais on trouve également du dioxyde de titane dans de nombreux médicaments (comprimés pelliculés) et dentifrices* (signalé sous la mention Cl77891). Nous avons interrogé l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) pour connaître sa position sur la présence, les risques et le cas échéant, les exigences vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques concernant le TiO₂ dans les médicaments et vous tiendrons informés si nous parvenons à obtenir une réponse.
* Certes, le dentifrice n'est pas censé être ingéré, mais les muqueuses buccales sont perméables ; c'est d'ailleurs pour ça que les granules homéopathiques et d'autres médicaments dits "orodispersibles" doivent être placées sous la langue (on parle d'un mode d'administration "sublingual") pour "fondre" à cet endroit et être rapidement absorbés par l'organisme. Donc on "absorbe" bien du dentifrice même si on ne l'"avale" pas à proprement parler.
Toutes sources cumulées, des chercheurs ont ainsi estimé l'ingestion moyenne quotidienne de TiO₂ entre 1 à 2 mg/kg de poids corporel/jour pour les enfants vivant aux USA, voire 2 à 3 mg/kg/jour pour ceux du Royaume Uni8.
Une grande variété de types de nanoparticules de TiO2
dans l'alimentaire (E171) et dans les médicaments, elles sont très majoritairement sous forme anatase (parfois associée à la forme rutile en très petite proportion) et sans enrobage
dans les cosmétiques (Cl 77891) elles sont présentes dans du maquillage, des décolorations capillaires ou crèmes solaires, sous forme rutile (ou mélange anatase / rutile) et enrobées d'une couche de silice ou d'alumine ; elles ne sont pas enrobées dans le dentifrice
dans les peintures et les ciments (CI Pigment White 6), elles sont principalement sous forme anatase (ou mélange anatase / rutile) et sans enrobage.
Cristallographie du rutile - Cristallographie de l'anatase. Voir la source
Et même au sein d'une même catégorie de produit, les nanoparticules peuvent être différentes d'un produit ou d'une marque à l'autre. Ainsi, dans le seul domaine alimentaire, l'additif E171 est composé de particules primaires d'une grande variété de tailles (de 40 à 300 nm, avec un diamètre moyen compris entre 100 et 130 nm) ; 10 à 40 % d'entre elles, selon les études, présentent au moins une dimension inférieure à 100 nm13.
Rappelons enfin que les nanoparticules de TiO₂ ne sont pas les seules nanoparticules à être utilisées dans l'agro-alimentaire...
L'opacité et la confusion entretenues par l'industrie agroalimentaire
On notera également que la marque n'a pas dit si, oui ou non, elle utilisait du dioxyde de titane de taille nanométrique dans ses M&M's et autres confiseries. Ce mutisme n'est pas nouveau ; lorsque nous avions réalisé notre dossier Nanos et alimentation en 2013, nous avions interrogé le groupe, parmi d'autres, à ce sujet : notre question était restée sans réponse15.
En fait l'ensemble des entreprises agro-alimentaires cultivent l'opacité la plus complète sur cette question16. En 2014, Ofi AM a fait une enquête auprès de 60 sociétés du Stoxx 600 pour connaître leur utilisation de nanoparticules ; sur les 30 sociétés interrogées impliquées dans le domaine de l'agroalimentaire, seules 5 (toutes spécialisées dans les boissons) ont répondu... qu'elles n'utilisaient pas de nanoparticules17. Dernier exemple en date : en janvier 2015, le magazine 60 millions de consommateurs a également partagé le même constat : près de 75 sur 100 entreprises agroalimentaires sollicitées (Nestlé, Danone, Heinz, Mars, Panzani, Nespresso, Toupargel, ...) n'avaient pas donné suite au courrier que le magazine leur avait envoyé en octobre 2014 dans lequel il leur était demandé si elles utilisaient des nanoparticules sous la forme d'additifs (E551, E550, E170, E171, E172), de nanotextures, d'ingrédients en nanoencapsulation ou de nanomatériaux utilisés dans les emballages alimentaires18.
Autre pays, autres moeurs : le principe de précaution de la marque Dunkin
Au début du mois, le TiO₂ avait aussi fait parler de lui outre-atlantique : l'entreprise américaine Dunkin a annoncé en février qu'elle renonce à l'utiliser dans le sucre de ses pâtisseries Donuts, sous la pression de l'ONG As You Sow19.
Un coup de pub pour l'entreprise soucieuse de protéger, sinon la santé de ses clients, au moins la santé de sa notoriété ?
Comme l'a rappelé Andrew Maynard, directeur du Risk Science Center de l'Université du Michigan (USA), dans un billet paru en février dans Nature Nanotechnology20, ce type de réajustement peut être un choix privilégié par certaines entreprises qui préfèrent renoncer à un risque qui peut leur coûter cher plus tard soit parce que leur produit sera interdit soit parce qu'il sera à l'origine de problèmes sanitaires ou environnementaux et/ou parce qu'il n'aura pas la confiance des clients.
Si la volonté de minimiser le risque en termes d'image de marque est une motivation à une plus grande responsabilité sociale des entreprises (RSE), donnons quitus au leader qui franchit le premier pas et invitons les autres à utiliser les recommandations des pouvoirs publics21 et des ONG (cf. ci-dessous).
Neuf ONG préconisent une plus grande responsabilité sociale des entreprises (RSE)
1 - adopter et rendre publique leur politique d'utilisation de nanomatériaux et publier une analyse des risques sanitaires de tous les nanomatériaux utilisés
2 - informer leurs fournisseurs soit de l'interdiction d'utiliser des nanomatériaux dans les aliments, les boissons et les emballages, soit de l'adoption de la politique décrite au point un
3 - étiqueter tous les produits qui contiennent des nanoparticules de taille inférieure à 500 nm
4 - adopter une approche basée sur la hiérarchie des mesures de contrôle des risques pour prévenir l'exposition des employés aux nanomatériaux.
Quels efforts de la part des acteurs français ?
AVICENN invite les acteurs français de l'agroalimentaire et de l'emballage à s'emparer de ce sujet et à nous informer sur les efforts entrepris dans le sens d'une meilleure information sur les risques associés aux nanoparticules dans l'alimentation et d'une meilleure protection du personnel et des consommateurs.
Chercheurs, fabricants, transformateurs, distributeurs, associations de consommateurs, fonctionnaires de la répression des fraudes, agences sanitaires, etc. vos contributions nous intéressent : envoyez-nous un mail à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr et nous complèterons le dossier "Nano et Alimentation".
2 - Notre vérification a été effectuée par le moyen d'entretiens téléphoniques auprès des chercheurs et experts que nous avions déjà interrogés pour réaliser notre dossier "Nano et Alimentation" en 2013 et en consultant les articles académiques disponibles en ligne, référencés ci-dessous ainsi que dans notre bibliographie Nano et Alimentation
4 - Voir notre bibliographie Nano et Santé au travail. A noter, le fait que cette classification en cancérigène 2B a été contestée au motif que les études portaient sur des rats, dont le système respiratoire est différent de celui de l'homme.
5 - Des efforts commencent à être faits en ce sens : en 2014, les données recueillies dans le cadre de la déclaration obligatoire relatives aux nanoparticules de dioxyde de titane ont été communiquées à l'InVS dans le cadre du projet Epinano pour le suivi de cohortes de travailleurs exposés aux nanomatériaux. Combien seront suivis ?
15 - Voici la question que nous avions postée le 20 avril 2013 sur le formulaire de contact du groupe Mars Chocolat France : "Bonjour, Selon une étude scientifique publiée il y a plus d'un an, les M&M's contiennent des nanoparticules de dioxyde de titane (Titanium Dioxide Nanoparticles in Food and Personal Care Products, Weir A. et al., Environ. Sci. Technol., 46 (4), pp 22422250, 2012 : http://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/es204168d). Sur la liste des ingrédients des M&M's, on voit en effet que du E171 est utilisé, mais il n'est pas précisé s'il s'agit de TiO2 nano ou pas. Pourriez-vous préciser s'il vous plaît ? En vous remerciant par avance, Sincères salutations"
20 - "'course corrections' early on in the innovation development process can help reduce or avoid liabilites later on - whether these are associated with unanticipated health and environmental impacts, prohibitive costs of regulatory compliance, or loss of stakeholder confidence" : extrait de l'article d'Andrew Maynard, The (nano) entrepreneur's dilemma, Nature Nanotechnology, février 2015
Cette sélection compilée pour notre rubrique "Nanomatériaux et Santé" a vocation à être progressivement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn. 20 janvier 2021 : 13 ONG interrogent l'ECHA sur la surveillance des produits nano anti-covid-19
En janvier 2021, dans une lettre ouverte publiée en ligne, treize ONG - dont Avicenn - ont sollicité des clarifications auprès de l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) sur le cadre réglementaire et les mesures de gestion des risques en place au niveau européen sur la surveillance des produits nano anti-covid-19. Quels mécanismes garantissent que seules des substances actives autorisées sont utilisées sur le marché européen ? Quelles mesures sont prises concernant les masques traités avec des nanoparticules vendus en Europe ? Une intensification des contrôles est-elle prévue ? Une accélération de l'évaluation des substances actives biocides ? A suivre...
Retrouvez notre dossier "Nano & Covid-19" ici. 18 décembre 2020 : Deux projets nano financés par l'Anses
Les trente-quatre projets retenus par l’Anses dans le cadre du Programme national de recherche Environnement-Santé-Travail ont été dévoilés aujourd'hui. Parmi eux, deux projets concernent les nanoparticules :
Allergosil : étude des effets pro-allergisants des nanoparticules de silice amorphe en réponse aux pneumallergènes, coordonné par Mme Biola-Vidamment (Université Paris-Sud et INSERM)
Transplast : effets des micro-plastiques et nano-plastiques sur l'activité des transporteurs membranaires de xénobiotiques, coordonné par M. Fardel (IRSET/INSERM)
En savoir plus ici. 14 décembre 2020 (complété le 15 puis le 22 décembre) : Des masques aux nanoparticules d'oxyde de zinc ? Leur commercialisation en France n'est ni légale, ni sans risques
Ce matin, France inter vantait la commercialisation en Israël de masques anticovid contenant des nanoparticules d'oxyde de zinc. L'utilisation de nanoparticules d'oxyde de zinc à visée virucide dans des applications textiles grand public n'est pourtant pas approuvée en Europe. S'il est techniquement possible de se faire livrer ces masques (ou d'autres) en France, leur mise sur le marché français n'est pas légalement autorisée et constitue une non-conformité. Les risques sanitaires & environnementaux d'une diffusion de ce type de nanoparticules sont en outre non négligeables. Avicenn a interrogé le fabricant ainsi que les autorités nationales chargées de la surveillance des biocides, la DGCCRF (ministère de l'économie) et la DGPR (ministère de la transition écologique), car il y a tout lieu de penser qu'avec la pandémie actuelle la commercialisation de ce genre d'articles risque de se multiplier (en témoigne le nombre de documents que nous avons compilés ici et qui est loin d'être exhaustif). A suivre donc.
En savoir plus sur l'utilisation des nanomatériaux dans la lutte contre le covid-19 ici. 11 décembre 2020 : "Nanoparticules et vaccins contre le Covid-19 : cinq questions pour démêler le vrai du faux" par Les Décodeurs du Monde
Avicenn a exprimé à plusieurs reprises sa crainte devant l'augmentation très significative des propos conspirationnistes sur l'utilisation malveillante de nanoparticules dans les vaccins (à des fins d'asservissement voire d'extermination de la population). Ce jour, Le Monde, a publié une mise au point fort utile d'Assma Maad, de l'équipe des Décodeurs. A partager pour endiguer les fausses informations et exercer une vigilance éclairée sur les risques liés aux nanoparticules & nanomatériaux ! 8 décembre 2020 : Parler vraiment des nanotechnologies pour éviter d'alimenter la paranoïa
Dans son excellent podcast "Le Code a changé" mis en ligne aujourd'hui sur France Inter, Xavier de La Porte se penche sur la question suivante : "Pourquoi la nanoparticule s’est-elle retrouvée dans tous les complots ?". Parmi ses constats, nous partageons notamment celui-ci, à l'origine du travail même de notre association Avicenn : "Si on n'est pas capable de parler vraiment des problèmes que soulèvent une technologie nouvelle, aussi complexe et aussi intrigante que les nanoparticules, et bien ça alimente mécaniquement tous les soupçons d'un époque qui en plus est déjà portée au soupçon. Si on pense que les gens sont trop cons pour comprendre les enjeux, on excite la paranoïa".
A écouter en intégralité ici.
En savoir plus sur les nanomatériaux utilisés dans la lutte anti-covid-19 ici. 1er décembre 2020 : L'Anses publie un diagnostic rigoureux et des recommandations fortes pour améliorer l'information et l'évaluation des risques des nanomatériauxL’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a publié aujourd'hui les résultats de l’évaluation de la déclaration obligatoire des "substances à l’état nanoparticulaire". L'Anses souligne que l’absence ou la mauvaise qualité de certaines des données transmises nuit à leur exploitation par les agences de santé publique. L'Anses propose plusieurs axes d’amélioration pour fiabiliser les données du registre R-Nano et optimiser l’efficacité du système, en phase avec les propositions compilées par Avicenn depuis plusieurs années maintenant. Somme toute, ce rapport aurait pu être publié il y a plusieurs années déjà, car les limites listées sont connues de longue date - que de temps perdu donc... mais mieux vaut tard que jamais ! Reste à voir si, comment et quand les recommandations de l'Anses seront concrétisées. La balle est désormais dans le camp du ministère de la transition écologique, avec une attention très forte du côté des associations qui ont très vite réagi... contrastant avec le silence total des industriels.
En savoir plus ici. 19 novembre 2020 : La balance bénéfices / risques des peintures aux nanoparticules de TiO2 en question
Voilà des années déjà que des équipes de recherche tentent de mettre au point des applications "dépolluantes" à base de nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2). Le CEA LITEN, faisant état des recherches menées dans le cadre des projets Safetipaint 1 et 2 financés par le labex SERENADE, a publié un communiqué montrant que le rapport bénéfices / risques des nanoparticules de TiO2 ne semble pas encore concluant pour ce qui concerne les peintures "dépolluantes". Les recherches vont être poursuivies dans le cadre d'un nouveau projet européen SAbyNA de 6 millions d'euros, qui s'inscrit dans le développement de l'approche dite "safer by design". Le défi peut-il être relevé dans un délai et à un coût raisonnables ?
En savoir plus ici et là. 16 novembre 2020 : Plaidoyer pour une restriction des nanoplastiques au niveau européen
Il faut réintégrer les nanoplastiques au projet de restriction des microplastiques comme l'avait initialement proposé l'agence européenne des produits chimiques (ECHA). C'est, en substance, l'une des demandes publiées aujourd'hui par les ONG environnementales mobilisées au niveau européen pour réduire la pollution aux microplastiques, emmenées par Rethink Plastic, le Bureau européen de l'environnement (BEE), Client Earth et Break free from Plastic. L'objectif est afin d'éviter une substitution "absurde" des microplastiques interdits par des nanoplastiques qui ne seraient pas concernés par la restriction en cours de définition et d'éviter une pollution accrue due à leur diffusion dans l'environnement.
En savoir plus ici. 10 novembre 2020 (modifié et complété le 19 novembre) : Bientôt des toiles aux particules d'argent dans les lycées d'Auvergne-Rhône-Alpes pour lutter contre le covid-19 ?
Avicenn a appris le 6 novembre 2020 par l'École centrale de Lyon que le Conseil régional Auvergne Rhône-Alpes souhaiterait expérimenter des membranes à base de (nano?)particules d'argent pour lutter contre le covid-19 dans les lycées de la région. Selon le fabricant, il ne s'agirait pas de nanoparticules. Pour autant, étant donné leur toxicité et éco-toxicité, les particules d'argent - nano et non nano - sont cours de classification au niveau européen (risques d'allergie cutanée, d'anomalies génétiques, de toxicité pour la reproduction et pour la faune aquatique). Nous avons donc contacté le conseil régional d'Auvergne Rhône-Alpes et sommes en train d'échanger avec le fabricant pour obtenir des précisions - non seulement sur la distribution de taille des particules, mais également sur l'expérimentation par la Région (périmètre, calendrier, modalités, analyses bénéfices / risques). A suivre ici. 9 novembre 2020 : Faute de données suffisantes, l'évaluation des risques des nanoparticules de cuivre et d'hydroxyapatite dans les cosmétiques n'est pas possible à ce stade
Le Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs (CSSC) vient de soumettre à consultation deux avis préliminaires, l'un sur les nanoparticules de cuivre, l'autre sur les nanoparticules d'hydroxyapatite. Dans les deux cas, le CSSC fait état d'un manque de données suffisantes pour lui permettre d'évaluer ces substances.
En savoir plus ici. 26 octobre 2020 : Une meilleure gestion des risques associés aux nanomatériaux dans le projet du Plan national Santé - Environnement (PNSE 4)
Le projet de PNSE 4 dévoilé par les ministères des Solidarités et de la santé et de la Transition écologique est soumis à consultation jusqu'au 9 décembre. Son action 12 vise à "mieux gérer les risques associés aux nanomatériaux dans un contexte d’incertitude" via l'amélioration de la connaissance sur l’usage des nanomatériaux, un meilleur respect des obligations d’affichage de la présence de nanomatériaux dans les objets du quotidien et l'encadrement des nanomatériaux qui ne présentent pas une utilité forte et qui peuvent présenter des risques.
En savoir plus ici. 22 octobre 2020 : Appel à projets de recherche sur les nanomatériaux et nanoparticules
Les nanomatériaux et nanoparticules sont au programme de l'appel à projets de recherche 2021 en environnement, santé, travail de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) publié aujourd'hui. Les projets de recherche sont sélectionnés pour leur originalité et leur qualité scientifique et doivent conduire au renforcement des connaissances notamment sur des points critiques en évaluation ou gestion des risques sanitaires et pour les écosystèmes afin d’éclairer, in fine, les décideurs dans leurs politiques publiques en la matière. Les lettres d'intention sont à envoyer avant le 15 décembre 2020. 22 octobre 2020 : En quelques heures, plus de 10 000 signatures pour la pétition "Stop au dioxyde de titane dans mon corps" d'Agir pour l'environnement
L'association Agir pour l'Environnement a lancé aujourd'hui une pétition "Stop titane" demandant la prolongation de l'interdiction du dioxyde de titane dans l'alimentation et son élargissement aux médicaments et dentifrices. En cause notamment, la présence de nanoparticules.
Quelques heures après son lancement, la pétition avait déjà recueilli plus de 10 000 signatures.
En savoir plus sur la suspension du E171 dans l'alimentation ici et sur le cas des cosmétiques et médicaments là. 13 octobre 2020 (complété le 16 octobre) : Les masques de la marque distribués aux enseignants et policiers contiennent-ils des nanoparticules d'argent et de cuivre ?
Le média en ligne Reporterre alerte sur la toxicité potentielle des zéolites d'argent et de cuivre présents dans les masques de la marque DIM distribués aux enseignants (et, on l'a appris par la suite, également aux policiers et sans doute à d'autres fonctionnaires également). DIM a, selon Reporterre, affirmé qu'il ne s’agit pas de nanoparticules. Sur LinkedIn, Facebook et twitter, Avicenn a néanmoins interrogé DIM pour connaître, notamment, la distribution de taille (en nombre) des particules d'argent et de cuivre et les précautions précisées, le cas échéant, sur la fiche de données de sécurité. Au-delà de la question "nano ou pas nano ?" se pose évidemment celle du rapport bénéfices / risques pour la santé des fonctionnaires et pour l'environnement
A suivre...
En savoir plus sur les risques associés au nanoargent ici et associés au nanocuivre là. 8 octobre 2020 : Le Parlement européen a rejeté la proposition de la Commission visant à autoriser jusqu'à 50% de nanoparticules dans le E171Le Parlement européen, réuni en plénière, a voté hier, à une écrasante majorité, l'objection déposée par plusieurs députés européens contre la proposition de la Commission européenne d'autoriser les additifs E171 qui contiennent jusqu'à 50% de nanoparticules de dioxyde de titane. La Commission doit désormais modifier ou retirer sa proposition, alors que le Parlement l'appelle à "appliquer le principe de précaution et à retirer le E171 de la liste européenne des additifs alimentaires autorisés".
En savoir plus ici. 8 octobre 2020 : "Nanotechnologie, une nouveauté pas si anodine", vidéo de sensibilisation par la Fgmm
Dans une vidéo mise en ligne ce jour, Johnny Favre, Secrétaire national de la Fédération en charge de la Santé et vie au travail, résume les revendications de la Fédération générale des mines et de la métallurgie (FGMM - CFDT) en matière de nanos : la révision des seuils de nanoparticules et l’application du principe de précaution ; le contrôle du bon enregistrement et du bon étiquetage des nanomatériaux, un registre R-Nano européen, une autorisation préalable à la mise sur le marché des nanomatériaux, ainsi que l’évaluation des risques en utilisant mieux le Document unique d’évaluation des risques (DUER). Autant de mesures discutées lors de la journée de sensibilisation organisée par la Fgmm en janvier 2019 à laquelle Avicenn avait participé.
En savoir plus sur les nanos et la santé au travail ici. 7 octobre 2020 : C'est désormais avéré chez l'humain : des nanoparticules de TiO2 peuvent traverser le placenta et contaminer le foetus
L'exposition de la femme enceinte au dioxyde de titane conduit à une accumulation de nanoparticules de TiO2 dans le placenta et à une contamination du foetus. Cette étude a été menée par des scientifiques de l'INRAE, du LNE, du Groupe de Physique des Matériaux de Rouen, du CHU de Toulouse, de l’Université de Picardie Jules Verne et de l’Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse. Elle vient confirmer des présomptions fortes, suite à des publications chez l'animal. Comme le rappelle le communiqué de l'INRAE, l'utilisation du dioxyde de titane dans les denrées alimentaires a été suspendue en France, mais il est encore utilisé dans les dentifrices, écrans anti-UV, des crèmes et poudres cosmétiques et les produits pharmaceutiques. D'où des demandes de plus en plus pressantes en faveur de son interdiction dans les cosmétiques et les médicaments. En savoir plus ici. 5 octobre 2020 : Liste et documentation des nanomatériaux les plus préoccupants en cosmétique
Le Comité scientifique européen pour la sécurité des consommateurs (CSSC) a adopté aujourd'hui un avis scientifique préliminaire sur la sécurité des nanomatériaux dans les cosmétiques. Le CSSC a identifié certains aspects des nanomatériaux qui constituent une base de préoccupation pour la sécurité de la santé des consommateurs lorsqu'ils sont utilisés dans des cosmétiques. Il a également établi un classement inédit et particulièrement intéressant des nanomatériaux figurant dans le catalogue européen des nanomatériaux utilisés en cosmétiques par ordre de priorité en fonction du potentiel de risque. En tête de liste : le MBBT (filtre UV) et l'argent colloïdal (nano), suivi de très près par la tris-biphenyl triazine (filtre UV), le cuivre colloïdal, le platine (et poudre de platine et platine colloïdal), les copolymères de styrène/acrylate, le dioxyde de titane (TiO2), différents types de silice, ...
En savoir plus ici. 30 septembre 2020 : Sur Twitter, peurs et rumeurs relatives à l'utilisation de nanoparticules dans les vaccins et les écouvillons des tests PCR
Dans le cadre de sa veille, l’association Avicenn a observé depuis la crise sanitaire du Covid-19 une augmentation très significative, sur les réseaux sociaux, des propos complotistes alertant sur l'utilisation prétendument délibérée de nanoparticules, dans les vaccins et les tests PCR, à des fins d'asservissement voire d'extermination de la population. Ces peurs et rumeurs existaient déjà auparavant au sein du courant "antivax", mais elles ont été très largement exacerbées par les projets de vaccination dans le contexte du Covid-19 ainsi que par les perspectives de déploiement de la 5G (accusée, par les plus extrêmes et sans fondement scientifique, de pouvoir activer à distance les nanoparticules innoculées via les vaccins ou les PCR). Comment aider le grand public à démêler le vrai du faux ? Si des efforts de fact-checking sont nécessaires, leur efficacité est-elle d'avance condamnée à n'être que marginale ?
En savoir plus ici. 17 septembre 2020 : La toxicité des nanoparticules d'or est d'autant plus grande que les particules sont petites
Des chercheur·es de l'Imperial College de Londres ont mis en évidence que les perturbations causées par les nanoparticules d'or sur les membranes sont d'autant plus importantes que la taille des nanoparticules est petite ; les nanoparticules plus petites (5-10 nm) déforment même considérablement la membrane, la courbant parfois vers l'intérieur avec plusieurs nanoparticules empilées, causant une distorsion tubulaire. Les nanoparticules plus petites peuvent donc provoquer des effets secondaires toxiques indésirables dans l'organisme lorsqu'elles ne sont pas fonctionnalisées. L'équipe de recherche appelle donc à bien prendre en considération ce facteur taille notamment lors de la conception de nanoparticules médicales. En savoir plus ici et là. 31 août 2020 : Nouvel appel à la vigilance concernant le recours au nanoargent dans la lutte anti-covid19
Dans une tribune publiée sur l'Observatoire européen des nanomatériaux, l'ONG Health Care Without Harm Europe (HCWH) demande à limiter le recours au nanoargent, renforcé en cette période de lutte contre le covid-19, non seulement dans le domaine médical mais aussi dans les produits grand public. Dorota Napierska, responsable du programme "Safer Chemicals" d'HCWH rappelle en effet qu'il n'y a pas suffisamment de preuves que la présence d'agents antimicrobiens dans les textiles, les surfaces et le mobilier hospitaliers ait une valeur ajoutée par rapport au nettoyage et à la désinfection classiques dans la lutte contre les maladies nosocomiales. Quant à l'utilisation toujours croissante de nano-argent dans les produits de consommation, elle menace à la fois les consommateurs et l'environnement en les exposant à de nouvelles sources de ce métal, avec des conséquences néfastes sur les organismes et les écosystèmes, ainsi qu'un risque d'accroissement de la résistance aux antimicrobiens. HCWH recommande que les nanomatériaux utilisées dans les produits de santé soient évaluées non seulement pour leur activité antivirale initiale, mais aussi pour leur durabilité dans les conditions réelles d'utilisation et leur résistance à des nettoyages et désinfections répétés (pour évaluer leur relargage potentiel). Dorota Napierska conclut en rappelant qu'historiquement, l'absence d'examen des risques liés à des agents chimiques apparemment bénéfiques a entraîné des expositions à grande échelle qui ont conduit à des effets néfastes sur la santé humaine et l'environnement, découverts des années ou des décennies plus tard, bien après que les dommages aient été causés. "Nous avons l'occasion d'éviter de répéter les mêmes erreurs avec le nano-argent". En savoir plus ici. 26 août 2020 : Vers des nanoparticules d'argent moins nocives pour l'homme et l'environnement ?
Des chercheur·e·s français·e·s ont annoncé avoir développé un nanomatériau biocide "safer by design" comportant un assemblage de nanoparticules d'argent reliées entre elles par une molécule bio-inspirée. Il libère des ions Ag(I) de manière lente et contrôlée, contrairement aux nanoparticules d'argent utilisées actuellement qui subissent des processus non contrôlés de transformations et de libérations des produits. En savoir plus ici sur les risques des nanoparticules d'argent et là sur le concept de "safer by design". 3 août 2020 : Avicenn a enfin reçu le rapport de l'ANSM sur les nanomatériaux dans les médicaments et les dispositifs médicaux
Suite à son n-ième demande, mais en lettre recommandée avec accusé de réception cette fois, Avicenn a enfin obtenu le rapport sur "les nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux" de l'agence nationale de santé et du médicament (ANSM). Rappelons qu'il aurait dû être, selon la loi, communiqué au Parlement il y a trois ans. Sans date ni auteur(s), ni précision sur la méthodologie, et avec des références majoritairement datées, ce rapport présente des limites importantes. Mais ses recommandations sont, elles, intéressantes et plus que jamais d'actualité : évolutions à apporter à la normalisation et réglementation pour une meilleure identification et évaluation des nanomédicaments et dispositifs médicaux ; modifications du registre R-nano convergentes avec les demandes portées par les acteurs de la précaution et de la prévention ; implication accrue de l'ANSM sur le sujet, etc. Avec quelles déclinaisons concrètes ?
En savoir plus sur les nanos dans les médicaments ici et sur la nanomédecine là. et 22 juillet 2020 : Une attention particulière portée par l'IGAS et l'IGF à la sécurité des nanoparticules dans les cosmétiques
Un rapport sur l'organisation de la sécurité sanitaire des produits cosmétiques et de tatouage, daté d'avril 2020 et réalisé conjointement par l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'inspection générale des finances publiques (IGF), a été mis en ligne ce jour ; il n'a pas de mots assez durs pour pointer le "désengagement significatif" et le "désinvestissement critique" des pouvoirs publics en matière de cosmétovigilance et de sécurisation des cosmétiques, aujourd'hui en "déshérence". Le rapport accorde une attention particulière aux nanoparticules : les incertitudes sur les risques potentiels qui y sont associés ; les nanoparticules non déclarées par les opérateurs économiques ; les travaux menés (ou pas) par l'ANSM, l'ANSES, la DGCCRF, le SCL, le CSSC... Les inspections préconisent la construction de connaissances sur l'impact des nanoparticules, une clarification de la définition des nanoparticules et de la démarche de déclaration avant mise sur le marché et enfin, la mise en place d'un dispositif pérenne de coordination, avec de réels moyens pour l’expertise, la production de connaissances et la surveillance. En savoir plus ici. Mars-Juillet : Le zoom de la rédaction : Nano et covid-19
Le covid-19 donne place à une course contre la montre pour trouver et mettre au point le plus rapidement possible des dispositifs de tests, de prévention et de traitement du virus. Au sein de la communauté scientifique et industrielle, des acteurs développant des nanomatériaux font valoir que les propriétés spécifiques de ces derniers pourraient contribuer à cet effort de lutte contre le coronavirus. Avicenn compile en ce moment des exemples d'applications (déjà commercialisées ou en cours de recherche & développement) des nanomatériaux pour lutter contre le covid-19 : tests de dépistage & diagnostic, vaccins, équipements de protection (masques, blouses, ...), produits désinfectants utilisés pour les lieux et équipements publics, voire même des traitements antiviraux et/ou des traitements des infections dues au covid-19. Certaines paraissent prometteuses, d'autres sont très peu étayées, toutes posent question : quelle réelle efficacité ? à quelle échéance ? et quels risques pour la santé et l'environnement ? En savoir plus ici. 9 juillet 2020 : A quand la diffusion du rapport gouvernemental sur les nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux ?
Avicenn a envoyé une lettre recommandée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé pour réclamer la diffusion du rapport gouvernemental sur les nanomatériaux dans les médicaments et les dispositifs médicaux. Ce rapport aurait dû être rendu public depuis trois ans maintenant, selon la loi de modernisation de notre système de santé de 2016. En savoir plus ici. 2 juillet 2020 : Encore des nanoparticules non étiquetées dans des crèmes solaires
Les associations WECF et Agir pour l'Environnement ont analysé 71 crèmes solaires pour enfants. Pour 3 produits ciblés en particulier, les ONG ont trouvé des nanoparticules, mais sans mention [nano] sur l'emballage comme l'exige pourtant la loi. Les ONG demandent, entre autres, une enquête de la DGCCRF et de l’ANSM et des sanctions dissuasives. La Fédération des Entreprises de la Beauté (FEBEA) a immédiatement réagi en niant le fait que des fabricants ne respecteraient pas la loi, mais sans preuve à l'appui. Les laboratoires Biarritz ont "réfuté catégoriquement les résultats de cette enquête" et la "stigmatisation de la crème solaire enfants SPF50+ AlgaMaris®". En savoir plus ici. 27 mai 2020 : A l'heure où le nanoargent est de plus en plus utilisé, notamment dans le contexte du covid-19, une nouvelle publication de chercheur·es de Grenoble et Strasbourg, parue dans Environmental Science: Nano, vient rappeler que la vigilance doit être de mise : leurs expériences montrent qu'une exposition répétée aux nanoparticules d'argent induit, sur des macrophages de souris, des effets biologiques plus néfastes qu'une exposition unique, bien que moins d'argent soit internalisé lors d'une exposition répétée. En savoir plus ici.
15 mai 2020 : Une revue de la littérature scientifique réalisée par des chercheur·es du CEA montre que les particules de dioxyde de titane (TiO2), de taille nanométrique et microscopique, entraînent des dommages de l'ADN sur divers types de cellules, pulmonaires et intestinales, même à des doses faibles et réalistes. En savoir plus ici. 10 avril : Le journal L'Opinion rapporte qu'aux Etats-Unis, Alex Jones, le "champion américain des conspirationnistes" et soutien de Donald Trump, fait la promotion de produits à base de nano-argent pour lutter contre le coronavirus. L’autorité américaine chargée du contrôle de l’alimentation et du médicament (FDA) lui a demandé de mettre fin à cette campagne, sous peine d'amende. En effet, les nanoparticules d'argent présentent des risques importants pour la santé et davantage encore pour l'environnement et leur efficacité pour lutter contre le covid-19 n'est pas établie. Cet épisode illustre la vigilance nécessaire afin de contrer l'opportunisme de certains acteurs, qui n'hésitent pas, sur la base de promesses non étayées, à compliquer la tâche déjà ardue des autorités sanitaires. En savoir plus ici.
6 avril 2020 : Alors que les nanomatériaux peuvent franchir le placenta et atteindre le fœtus, les données sur les impacts des nanomatériaux sur la fertilité féminine et sur les capacités reproductrices sont trop rares. C'est le constat qu'a dressé le Centre national de recherche sur l'environnement de travail du Danemark suite à la revue de la littérature qu'il a effectuée pour le compte de l'Observatoire européen des nanomatériaux (EUON). Ce manque de données entraîne des incertitudes sur les effets toxiques potentiels des nanomatériaux sur plusieurs générations. Les chercheurs recommandent une meilleure coordination des tests et un suivi des résultats lorsque des effets préoccupants sont identifiés. En savoir plus ici.
2 avril 2020 : Contrairement à une affirmation souvent véhiculée, les agrégats ou agglomérats de nanoparticules ne sont pas si inoffensifs que ça. Publiés début 2020, des résultats de recherche menées en Belgique montrent que les grands agglomérats de nanoparticules de dioxyde de titane ne semblent pas moins actifs en termes de toxicité que les petits agglomérats (en savoir plus ici) et que les agrégats de nanoparticules de silice ne doivent pas être considérés comme nécessairement moins toxiques que les petits agrégats (en savoir plus là).
10 mars 2020 : Des fabricants de silice ont tenté de défendre leur produit en attaquant une importante étude académique parue l'année dernière, qui avait mis en évidence les lésions sur le foie et les reins de souris exposées par voie orale à des nanoparticules de silice. Les chercheurs visés ont à leur tour répondu, en démontant point par point les critiques mises en avant par les fabricants de silice. En savoir plus ici et là.
18 février 2020 (complété le 25 février) : Le règlement délégué qui entérine la classification du dioxyde de titane (TiO2) comme cancérogène de catégorie 2 par inhalation a été publié au Journal officiel de l'Union européenne. Il s’appliquera à compter du 1er octobre 2021. En savoir plus ici.
5 février 2020 : La Commission européenne a demandé au Comité Scientifique Européen pour la Sécurité des Consommateurs (SCCS) de déterminer les nanomatériaux pour lesquels des préoccupations spécifiques peuvent être identifiées et justifiées afin d'établir une liste prioritaire de nanomatériaux pour l'évaluation des risques. Concernant les nanomatériaux sur lesquels le SCCS avait fourni des avis non concluants (argent colloïdal ; copolymère styrène / acrylates ; silice notamment), le SCCS est invité à évaluer si un risque potentiel peut être identifié. En savoir plus ici.
3 février 2020 : Le Comité de la Prévention et de la Précaution (CPP) a dévoilé son nouveau rapport intitulé : "Nanotechnologies - Nanoparticules : Quels dangers, quels risques ?" qui fait le point sur les connaissances actuelles sur les dangers et risques pour l’Homme et l’environnement, la gestion de ces risques en France et en Europe et propose des recommandations concrètes... Près de quinze ans avant son premier rapport sur le sujet, le CPP considère lui-même que nombre de ses recommandations de 2006 peuvent toujours être proposées en 2020 et que "ce constat illustre une fois encore le décalage entre d’un côté l’analyse d’un risque pour la santé, et de l’autre côté sa prise en compte par les politiques publiques nationales et européennes". En savoir plus ici.
1er janvier 2020 : La suspension de l'additif alimentaire E171, composé de (nano)particules de dioxyde de titane entre en vigueur en France. Dans un communiqué de presse publié quelques jours plus tôt, l'association Agir pour l'Environnement saluait cette "décision historique et courageuse" et soulignait que les fabricants et distributeurs ont déjà largement anticipé cette suspension : on ne recense aujourd’hui presque plus de produits contenant du E171 en France. Une "nouvelle preuve de l’inutilité de cet additif" selon l'association, qui rappelle par la même occasion son souhait que cette suspension du dioxyde de titane soit "étendue à tous les produits susceptibles d’être ingérés" (dentifrices et médicaments), au vu de la dangerosité de l’additif confirmée par des études scientifiques compilées par Avicenn.
Archives des années précédentes
ARCHIVES - Brèves 2012 à 2019 sur le thème "nano et santé"
ARCHIVES - Brèves 2012 à 2019 sur le thème "nano et santé"
Par l'équipe Avicenn
Cette sélection compilée pour notre rubrique "Nanomatériaux et Santé" est désormais archivée.
Les brèves de l'année en cours sont accessibles ici.
2019
- 17 décembre 2019 : Trois projets relatifs aux risques associés aux nanomatériaux ont été retenus par l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) dans le cadre de son Programme national de recherche "Environnement Santé Travail" suite à l'appel à projets 2019 :
NanOCo : Impact sur les fonctions endocrines de NANoparticules métalliques seules et en mélange avec des composés Organiques perturbateurs endocriniens pour l’analyse de l’effet COcktail
NANOWAVE : Evaluation de la co-exposition de nanomatériaux avec des ondes radiofréquences
NaPeauLi : Développement d’un modèle expérimental pour l’étude de la décontamination de la peau après une exposition cutanée aux nanoparticules métalliques
Les nanomatériaux sont aussi au programme de travail 2020 de l'Anses : préparation de la consultation publique sur la recommandation de définition des nanomatériaux, poursuite des travaux sur les nanoparticules dans l’alimentation prévus par le PNSE3, ainsi que sur les filières industrielles qui utilisent des nanoparticules, poursuite de la gestion du portail national de déclaration obligatoire et synthèse des pistes d'exploitation et de partage de données issues de r-nano, évaluation de substances sous forme nanométrique dans le cadre de REACH, ...
- 3 décembre 2019 : Dans une tribune du Monde, 200 chercheurs remettent en cause la réduction des crédits alloués à la recherche et à l’expertise scientifique sur les risques environnementaux et leurs impacts sanitaires, sans lesquelles les autorités ne peuvent disposer d’expertises transparentes et solides sur lesquelles prendre les meilleures décisions, notamment sur le dossier des... nanoparticules.
- 2 décembre 2019 : Suite à l'émission de la RTS sur les nanoparticules dans l'alimentation, le Conseil européen de l'industrie chimique (CEFIC) a souhaité apporter une "précision" publiée sur le site de l'émission selon laquelle "l’EFSA a confirmé l’absence de risque attaché à l’additif" [NDLR : une interprétation particulièrement biaisée des avis de l'EFSA dont le CEFIC ne relaie pas les mentions relatives aux incertitudes pourtant soulignées par l'agence européenne de sécurité des aliments], que "d’autres études menées conformément aux lignes directrices de l’OCDE n’ont pas démontré d’effets adverses" et que "la Food and Environment Research Agency du Royaume-Uni, le Tübitak Marmara Research Center en Turquie et l’Institut pour la sécurité alimentaire (RIKILT) aux Pays-Bas ont conduit une étude sur la consommation orale de particules nanométriques et en particulier du dioxyde de titane. Cette étude n’a révélé aucun risque significatif à l’exposition aux nanoparticules". Cette étude date de 2015. Et le CEFIC ne mentionne pas les nombreuses études publiées depuis, qui, elles, font état d'effets inquiétants.
- 19 novembre 2019 : Les nanoparticules dans l'alimentation sont au menu de "A bon entendeur", l'émission suisse de référence en matière de consommation, intitulée ce soir : "E171, E551… vous reprendrez bien quelques additifs ?" Parmi les organisations interrogées en France : le LNE, l'INRA de Toulouse, Agir pour l'Environnement et Avicenn :
- 14 novembre 2019 : Les nanotubes de carbone sont les premiers nanomatériaux à intégrer la SinList, liste de substances à remplacer d’urgence parce que trop dangereuses. En savoir plus ici.
- 13-15 novembre 2019 : Le Groupe Interdisciplinaire pour les Etudes en NanotoxicologieS (GIENS) s'est réuni à Trappes pour la 5ème édition de son séminaire annuel ; Avicenn n'a trouvé aucune information disponible sur le contenu des sites des participants à cette réunion (chercheurs du CEA, de l'INERIS et de l'INRS et LNE).
- 4 novembre 2019 : Le Comité Scientifique Européen pour la Sécurité des Consommateurs (SCCS) vient de publier le document "Guidance on the Safety Assessment of Nanomaterials in Cosmetics" adopté les 30-31 octobre derniers. Il remplace le précédent document de 2012 (SCCS/1484/12) et intègre les récents développements dans le domaine de la recherche sur la sécurité des nanomatériaux afin d'aider les fabricants et évaluateurs dans leur travail de caractérisation et évaluation des risques sanitaires liés aux nanomatériaux utilisés dans le domaine cosmétique.
- 17 octobre 2019 : Danielle Lanquetuit d'Avicenn était ce midi sur France 5 pour le dossier sur les nanoparticules dans l'émission "La Quotidienne", avec Francelyne Marano de l'université Paris-Diderot. L'émission est disponible en replay ici.
- 17 octobre 2019 : Lors de la journée de rencontres scientifiques Anses & ADEME sur la qualité de l'air, Françoise Pons, professeur de Toxicologie à l’Université de Strasbourg a fait une présentation sur l'"impact des caractéristiques physicochimiques sur l’effet inflammatoire et pro-allergisant respiratoires des nanoparticules manufacturées". L'étude de 35 nanoparticules carbonées de taille, charge, composition chimique et chimie de surface différentes a notamment montré que :
les nanoparticules les plus petites sont plus toxiques que les plus grosses
les nanoparticules qui s’agrègent dans le milieu de culture des cellules sont plus toxiques que celles qui restent dispersées
l’ajout de groupements polyéthylène glycol à la surface de nanoparticules de toxicité modérée diminue la cytotoxicité de ces nanoparticules
les nanoparticules positives préparées à partir d’une polyamine à chaine longue branchée ont montré une activité pro-inflammatoire dose-dépendante
les macrophages ont développé une réponse inflammatoire plus importante que les cellules épithéliales.
- 15 octobre 2019 : L'Observatoire européen des nanomatériaux (EUON) fait savoir qu'il est ouvert aux suggestions de sujets sur lesquels pourraient porter ses futures études. Le hic ? Il est précisé d'emblée qu'aucune recherche en laboratoire ne pourra être effectuée dans ce cadre, alors que c'est ce qui fait principalement défaut pour permettre une meilleure évaluation des risques sanitaires et environnementaux associés aux nanomatériaux. Sans ces données de recherche, il y a fort à parier que les dites études risquent de se conclure par le sempiternel refrain "more research is needed" (d'autres études sont nécessaires).
- 4 octobre 2019 : Parmi les différentes conclusions du Conseil de l'Union européenne concernant la politique environnementale européenne pour 2021-2030 figure la demande d'une présentation par la Commission de la stratégie de l'Union pour un "environnement non toxique". Les nanomatériaux sont cités parmi les substances qui doivent être traitées de manière approfondie, à l'instar des perturbateurs endocriniens et des effets combinés des produits chimiques.
- 4 octobre 2019 : La classification du dioxyde de titane en "cancérogène suspecté" (catégorie 2) par inhalation a été adoptée par la Commission européenne dans le cadre d'un acte délégué. Avec quelle portée, quelles limites et quelles conséquences ? A suivre... Pour plus d'informations sur les étapes qui ont précédé cette adoption, cliquez ici.
- 1-8 octobre 2019 : La "transparence totale" revendiquée par le gouvernement sur l'incendie de Lubrizol à Rouen implique de répondre à la question suivante : est-ce que des nanomatériaux ont brûlé dans l'incendie ? Pour le savoir, les autorités peuvent commencer par vérifier si Lubrizol a déclaré des substances à l'état nanoparticulaire dans le registre R-nano pour leur site de Rouen. Est-ce le cas et, si oui, lequelles et en quelles quantités ? Avec quels risques associés ? Avicenn a posé ces questions aux instances concernées. C'est important car les nanomatériaux sont plus mobiles et peuvent être plus inflammables, explosifs, et traverser les barrières physiologiques, avec des conséquences potentiellement néfastes tant pour la santé que pour l'environnement.
- 30 septembre 2019 (complété le 4 octobre 2019) : Le député européen Eric Andrieu a envoyé une question écrite à la Commission européenne afin de savoir si les États membres se prononceront sur la suspension française du E171 et si la Commission envisage d’étendre cette dernière au niveau européen pour protéger l’ensemble des consommateurs. Deux jours après, le député a rédigé un tweet pour signaler cette question et préconisation soutenues par le Bureau Européen des Unions de Consommateurs (BEUC) et d'autres associations. Malik Duhaut, lobbysite de Fleishman-Hillard, lui a répondu que l'EFSA a trouvé qu'"il n'y avait rien pour remettre en cause la sécurité du E171". Une réponse "likée" par Dervla Gleeson, lobbyiste de la société British American Tobacco (un rapport avec le fait que le TiO2 est utilisé par l'industrie du tabac, pour blanchir le papier à cigarettes au moins, peut-être aussi dans les filtres ?)
- 30 septembre 2019 : L'association Foodwatch Pays-Bas annonce, dans un communiqué de presse en néerlandais, que plusieurs marques lui ont promis de supprimer le E171 de leurs produits alimentaires : Remia, Mora, Mars, Goodbite, Lindt, Haribo et A.Vogel suivant les recommandations émises le 21 août dernier par le Bureau de la recherche et de l'évaluation des risques (BuRO) du ministère de l'alimentation néerlandais visant à réduire l'exposition des consommateurs au E171.
- 3 octobre 2019 : Avicenn a été auditionnée par le Conseil économique, social et environnemental (CESE) dans le cadre de la saisine : "Gestion des risques : quel bilan tirer de REACH au regard des ambitions initiales ?". Avicenn a rappelé le long et fastidieux parcours qui a abouti fin 2018 à la révision des annexes de REACH pour adapter le règlement aux spécificités des nanomatériaux à compter de 2020. Elle a ensuite partagé ses craintes quant au fait que le principe "pas de données, pas de marché" ne soit pas appliqué de si tôt pour les nanomatériaux, avant de formuler trois préconisations : 1 - la mise en place d’un dispositif spécifique pour les nanomatériaux produits ou importés en deçà de une tonne par an ; 2 - la création d’un fonds dédié, "pare-feu" garant de la fiabilité des résultats et de la confiance ; 3 - une attention nécessaire pour les matériaux dits "avancés" qui n’entrent pas dans la définition des nanomatériaux mais qui déploient aussi pour beaucoup des propriétés spécifiques à l'échelle nano. Plus d'informations dans notre document "Enregistrement et évaluation des nanomatériaux dans REACH : Quel bilan ? Quels défis à relever ?".
- 26 septembre 2019 : Le communiqué de presse dans lequel la Michigan State University présente son étude minimisant les effets de l'additif E171* titre sur le caractère "prématuré" de la suspension française du E171. *Deux semaines plus tôt, l'étude en question avait été pointée du doigt par une coalition d'associations, questionnant sa rigueur scientifique et son indépendance.
- 26 septembre 2019 : Dans un article intitulé "À quel point la nanomédecine est-elle risquée ?" publié sur le site du Conseil fédéral suisse, on peut lire que le devenir et les effets des nanoparticules ayant vocation à être utilisées en nanomédecine n'a pas fait l'objet de recherches approfondies. Dans le cadre d'un consortium international, les chercheurs du Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherche (EMPA) ont élaboré des lignes directrices pour la nanomédecine afin de pouvoir développer des nanoparticules plus sûres. Pour assurer la sécurité des patients, une norme mondiale est nécessaire selon les chercheurs. L'occasion de rappeler que le rapport sur les nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux préparé par l'ANSM n'a toujours pas été rendu public, alors qu'il est attendu depuis plus de deux ans maintenant !
- 26 septembre 2019 : Dans un article intitulé "À quel point la nanomédecine est-elle risquée ?" publié sur le site du Conseil fédéral suisse, on peut lire que le devenir et les effets des nanoparticules ayant vocation à être utilisées en nanomédecine n'a pas fait l'objet de recherches approfondies. Dans le cadre d'un consortium international, les chercheurs du Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherche (EMPA) ont élaboré des lignes directrices pour la nanomédecine afin de pouvoir développer des nanoparticules plus sûres. Pour assurer la sécurité des patients, une norme mondiale est nécessaire selon les chercheurs. L'occasion de rappeler que le rapport sur les nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux préparé par l'ANSM n'a toujours pas été rendu public, alors qu'il est attendu depuis plus de deux ans maintenant !
- 25 juin 2019 : L'inhalation de nanoparticules de dioxyde de titane chez des personnes souffrant d'hypertension induit une altération hémodynamique irréversible associée à des dommages structurels cardiaques pouvant conduire à une insuffisance cardiaque. C'est ce qu'ont mis en évidence des chercheurs italiens dans un article paru hier dans Particle & Fibre Toxicology.
- 11 juin 2019 : La réduction de l'exposition aux nanomatériaux était à l'ordre du jour d'une réunion de préfiguration du 4ème plan national santé-environnement (PNSE4), au ministère de la transition écologique et solidaire. Avicenn, auditionnée, a présenté les 20 propositions de la société civile sur les nanomatériaux, compilées pour l'occasion. Vos remarques, suggestions d'ajout ou d'améliorations, sont les bienvenues : redaction@veillenanos.fr !
- 25 mars 2019 : Après les alertes sur les nanoparticules de dioxyde de titane dans l'alimentation (E171), les cosmétiques (CI77891) et les médicaments, des marques promeuvent désormais des enrobages de médicaments sans TiO2. A suivre ici.
- 21 mars 2019 : Quelle place sera accordée aux nanomatériaux dans le Plan "Mon environnement, ma santé" ? Les travaux d'élaboration de ce 4ème plan national santé - environnement (PNSE4) ont été lancés le 21 mars 2019 par les ministères de la transition écologique et solidaire et le ministère des solidarités et de la santé. Sa sortie officielle est prévue pour début 2020. Avicenn suivra les efforts déployés sur la transparence et la vigilance nano et compilera les informations sur une page dédiée de veillenanos.fr.
- 13 février 2019 : Selon APMnews, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) recommande de faire évoluer et de renforcer la réglementation sur les médicaments et les dispositifs médicaux comprenant des nanomatériaux. Le rapport destiné au Parlement est attendu depuis l'été 2017 mais pas encore public. Avicenn le demande depuis un an et demi...
- 31 janvier 2019 : La nanomédecine est très prometteuse... mais la vigilance sur les effets indésirables doit être à la hauteur des bénéfices escomptés ! Un article publié le 28 janvier dans Nature Nanotechnology montre que les nanoparticules de dioxyde de titane, de silice et d'or peuvent induire des modifications de l'endothélium et donc une fuite de cellules tumorales, à l'origine de métastases. Selon Frédéric Lagarce, professeur de biopharmacie et praticien hospitalier à Angers, "ce qui est intéressant / original c'est de montrer un risque potentiel des nanotechnologies dans le traitement des tumeurs alors que ces technologies sont souvent présentées comme la réponse pour améliorer les performances des anticancéreux. Il faudrait maintenant vérifier si ces modifications endothéliales sont aussi retrouvées avec les nanoparticules polymères ou lipidiques, beaucoup plus utilisées pour encapsuler des actifs et cibler les tumeurs. Si cela était malheureusement le cas, toute la stratégie des nanomédecine (très orientée cancer) serait remise en cause". En savoir plus ici.
- 4 décembre 2018 : "Nanoparticules et alimentation : un risque émergent en santé humaine ?" : cette question est aussi le titre d'une revue de la littérature scientifique qui vient de paraître dans les "Cahiers de Nutrition et de Diététique". Les auteurs résument le défi d'entrée de jeu : "L’effet de taille permet à ces agents de passer les barrières biologiques et de diffuser dans l’organisme, jusqu’à s’accumuler dans les organes systémiques où leur forte réactivité chimique peut être source de toxicité. Face aux applications nouvelles en alimentation, l’exposition orale à ces produits représente donc un nouveau défi en toxicologie". Et soulignent en conclusion à quel point "les enjeux de santé publique impliqués sont potentiellement énormes, si l’on envisage par exemple l’impact possible des nanoparticules d’argent sur l’obésité ou de TiO2 sur les fonctions immunitaires et le risque de cancer colorectal". A retrouver prochainement dans notre dossier Nano et Alimentation.
- 29 novembre 2018 : Le titane est "très présent dans beaucoup des échantillons testés" par l'association Générations futures qui dévoile aujourd'hui les analyses de mèches de cheveux et le lancement de sa campagne Désintox, en soulignant notamment "l’urgence d’obtenir un plan de retrait rapide du TiO2 dans l’alimentation".
- 25 octobre 2018 : Dans son article "Crèmes antirides : des filtres UV malvenus", 60 Millions de consommateurs pointe (notamment) le nano dioxyde de titane dans les crèmes anti-rides : "les filtres incorporés dans ces antirides sont controversés. En particulier (...) du dioxyde de titane sous forme nano. Dans une crème de soin à visée purement esthétique comme un antirides, la présence de filtres UV à risque avéré, ou même seulement soupçonnés de toxicité, n’est pas acceptable".
- 7 septembre 2018 : Plus de 80 pigments de taille nano sont utilisés sur le marché européen dans de nombreux secteurs industriels, mais une étude de l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) indique que leurs risques sont encore insuffisamment connus et que leur innocuité n'est pas assurée. Plus d'informations :
- 6 septembre 2018 : Une étude menée à Marseille & Grenoble confirme que les nanoparticules de TiO2 utilisées dans des peintures d'intérieur génèrent une pollution de l'air intérieur, avec l'émission de composés organiques volatiles (COV), acétaldéhyde & formaldéhyde, à des doses plus fortes que prévu. En savoir plus ici.
- 10 août 2018 : Dans un entretien à Radio Canada, André Cicolella, toxicologue et président du Réseau Environnement Santé (RES), alerte sur les nanoparticules de plastique présentes dans notre environnement. Santé Canada précise de son côté que le gouvernement canadien est "conscient que des nanoparticules ont été utilisées dans des produits de consommation, notamment dans les plastiques" et que ses chercheurs continuent d’examiner les nouvelles données scientifiques associées aux nanomatériaux, tout en affirmant qu’ils ne disposent "pas de données suffisantes en ce moment pour conclure que les applications où des nanomatériaux sont incorporés ou utilisés dans des plastiques, avec ou sans plastifiants comme le bisphénol A et les phtalates, ont une incidence sur la santé humaine".
- 26 juillet 2018 : Fin juillet, 8 ONG ont interpellé les ministères de la santé, du travail et de l'environnement français sur la classification du dioxyde de titane (constitué pour partie de nanoparticules) en cours de discussion au niveau européen : dans un courrier daté du 26 juillet 2018, Agir pour l’environnement, le Bureau européen de l'environnement (BEE), la CFDT, ECOS, France nature environnement (FNE), HEAL, CIEL et Générations Futures ont souligné à nouveau l’importance d’une position forte de la France sur ce dossier et demandé si une position officielle française a été communiquée par les autorités à la Commission, et si oui, en quels termes. Plus de détails ici.
- 25 juin 2018 (complété le 10 juillet 2018) : Le Haut Conseil de la Santé publique (HCSP) a rendu un rapport appelant à protéger les travailleurs et les populations des risques liés aux nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2). Le travail du HCSP fournit un état des lieux très documenté et des préconisations fortes, réunies dans un programme d'actions concret et ambitieux qui mérite d'être relayé auprès des entreprises, travailleurs et populations. Quels échos et quelles suites les ministères commanditaires de ce rapport (ministères des Solidarités et de la Santé, du Travail et de la Transition écologique et solidaire) envisagent-ils de donner au rapport du HCSP et à ses conclusions ? Avicenn leur a posé la question et nous vous tiendrons informés de leurs réponses.
- 10 avril 2018 : Selon une étude académique américaine relayée par Top Santé, des nanoparticules d'oxyde de zinc, présentes sur le revêtement intérieur de boîtes de conserve, se retrouvent dans les aliments et risquent d'entraîner une moins bonne absorption des nutriments et une plus grande perméabilité de l'intestin, transférant dans le sang des composés indésirables. Plus d'informations dans notre dossier "Nano et Alimentation".
- 22 mars 2018 : Le magazine 60 millions de consommateurs a trouvé des nanoparticules de dioxyde de titane dans 6 médicaments très courants, notamment des médicaments pour enfants. Le magazine souligne que le dioxyde de titane fait partie des excipients, c’est-à-dire des ingrédients qui ne jouent aucun rôle thérapeutique. Il est utilisé comme colorant, non indispensable dans ces médicaments. Par principe de précaution, 60 millions de consommateurs préconise de remplacer tout médicament incorporant du dioxyde de titane par son équivalent sans dioxyde de titane, quand c'est possible (malheureusement pas toujours !) et demande une mention [nano] obligatoire dans les médicaments, comme c’est le cas dans les cosmétiques ou l'alimentation.
L'article 60 de la loi de modernisation de notre système de santé avait prévu que le gouvernement remette au Parlement, à l'été 2017, un rapport sur les nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux. En mars 2018, aucune trace de ce rapport et malgré ses nombreuses relances auprès de l'ANSM et du ministère de la santé, Avicenn n'a pas réussi à avoir plus d'infos, sinon que le rapport serait finalisé et en cours de validation interministérielle... depuis plusieurs mois ! A suivre ici...
- 5 mars 2018 : La consultation de l'EFSA sur ses orientations en matière d'évaluation des risques relatifs aux nano dans l'alimentation est close depuis hier. Notre association Avicenn a soumis des commentaires pour rappeler les attentes fortes en matière d'évaluation des risques sanitaires liés aux nanoparticules dans l'alimentation et encourager les efforts d'amélioration dans ce domaine ainsi que dans celui de l'information et de la protection des consommateurs.
- 15 février 2018 : Au sujet des nanomatériaux dans les peintures industrielles, l'université de Namur relaie sur twitter qu'une étude menée par certains de ses chercheurs "confirme leur non-toxicité". Quand il s'agit de pointer les risques potentiels des nanomatériaux, on entend souvent, à juste titre, "attention, il ne faut pas généraliser !". Quand il s'agit de vanter leur "non-toxicité", la prudence semble s'être envolée ? Les recherches sur ce sujet sont en effet encore rares et embryonnaires et toute généralisation serait à ce stade bien hâtive...
2017
- décembre 2017 : Les nanoparticules sont expressément mentionnées comme risques émergents dans la Stratégie nationale de santé 2018-2022 du Ministère des solidarités et de la santé ! Sont prévues des actions sur les sources de pollution qu'elles représentent et la limitation de notre exposition. Reste à voir quand et comment...
- décembre 2017 : A noter, une "première" juridique en Europe sur l'exposition professionnelle aux nanoparticules : un juge espagnol a considéré qu'un travailleur ayant subi une greffe de rein ne doit pas être affecté à un poste exposant aux nanomatériaux. Cet avis pourrait avoir des répercussions notables dans les mois et années à venir. Plus d'informations dans notre Dossier "Nano et santé au travail"
- décembre 2017 : Deux actions nanos sont prévues dans les fiches actions des Etats généraux de l'alimentation (dans le cadre de l'atelier 8 dédié à la sécurité sanitaire de l’alimentation française) :
Établir un plan d'action relatif aux nanomatériaux dans l'alimentation, éclairé notamment par l'avis de l'Anses, s'inscrivant dans une stratégie nationale globale qui sera portée au niveau européen (lancement des travaux au niveau national au premier semestre 2018)
Porter au niveau européen une demande d’harmonisation des différentes définitions existantes des nanomatériaux (REACH, INCO, etc.) en relation avec le développement d'études toxicologiques et de méthodes d’analyse adaptées à la forme nano.
- 31 août 2017 : Suite à notre lettre ouverte et au dossier de 60 Millions de consommateurs, le gouvernement vient de publier un communiqué sur les travaux menés et sur les actions à venir concernant les nanoparticules de dioxyde de titane dans l'alimentation.
- 17 juillet 2017 : Dans une lettre ouverte au gouvernement, la société civile presse les pouvoirs publics de mieux informer et agir sur les risques sanitaires et environnementaux entraînés par la présence de nanomatériaux dans de nombreux produits de consommation courante.
- INTERNATIONAL : Retrouvez l'actu des nanos en lien avec les questions de santé au travail dans notre lettre VeilleNanos n°4-5
par MD - novembre 2012
Une rubrique spéciale de la Lettre VeilleNanos n°4-5 porte sur les questions de santé au travail soulevées par les nanomatériaux et nanotechnologies.
- PAYS-BAS : Bientôt un suivi épidémiologique des travailleurs exposés aux nanomatériaux ? Consultation jusqu'au 10 août
par MD - 12 juin 2012
Le Conseil de la Santé des Pays-Bas recommande la mise en place d'un registre d'exposition et d'un système de surveillance de la santé des travailleurs en contact avec des nanoparticules manufacturées. Et sollicite les avis des organisations et personnes intéressées jusqu'au 10 août prochain. L'occasion de voir ce qui se passe en France dans ce domaine.
Lire notre brève ici.
- ALLEMAGNE : Controverse sur l'étude par BASF des effets de nanomatériaux sur la santé
par MD, DL et l'équipe Avicenn - 29 mai 2012
L'annonce récente d'un partenariat entre le gouvernement allemand et BASF pour une étude des effets de nanoparticules sur les poumons a suscité une polémique sur l'objectivité des futurs résultats. L'Avicenn a voulu en savoir plus...
Lire notre article ici.
- EUROPE : Les biocides contenant des nanomatériaux particulièrement encadrés à partir de 2013
par MD, 22 mai 2012
Le Règlement Biocides a été définitivement adopté par le Conseil de l'Union européenne le 10 mai 2012. Le texte adopté prévoit notamment que les biocides contenant des nanomatériaux devront faire l'objet de contrôles plus stricts, d'une procédure d'autorisation spécifique et d'un étiquetage ad hoc indiquant - fait inédit - les risques liés aux nanomatériaux utilisés.
Voir notre article de janvier pour un rappel des faits.
- INTERNATIONAL : Consultation de l'OMS sur les nanomatériaux et la santé au travail jusqu'au 31 mars
par MD - 27 mars 2012
Afin d'améliorer la sécurité des travailleurs potentiellement exposés aux nanomatériaux, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a entrepris de rédiger des Directives sur "la protection des travailleurs contre les risques potentiels des nanomatériaux manufacturés".
L'OMS a récemment rendu public le document préparatoire qu'elle a conçu à cet effet et lance un appel au public en vue de recueillir des commentaires d'ici le 31 mars.
Plus d'informations ici.
- EUROPE : Les biocides contenant des nanomatériaux particulièrement encadrés à partir de 2013
par MD avec l'équipe Avicenn - 25 janvier 2012
Le Parlement européen, a adopté ce 19 janvier, une position en vue de l'adoption du "Règlement Biocides" concernant la mise à disposition sur le marché et l'utilisation des produits biocides. Le texte adopté prévoit notamment que les biocides contenant des nanomatériaux devront faire l'objet de contrôles plus stricts, d'une procédure d'autorisation spécifique et d'un étiquetage ad hoc indiquant - fait inédit - les risques liés aux nanomatériaux utilisés.
Lire notre article ici.
Le comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé" de l'ANSES
Le comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé" de l'ANSES
par MD et l'équipe Avicenn - Dernier ajout décembre 2020
Cette fiche a vocation à être complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr. Sommaire
L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a conçu le comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé" comme un espace d'échanges et de questionnements visant à nourrir et interroger les travaux scientifiques conduits ou encouragés par le groupe de travail pérenne "Nanomatériaux et santé" que l'ANSES a mis en place en 2012.
Objectifs du comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé"
Les objectifs assignés au comité de dialogue :
échanger et débattre sur les travaux scientifiques produits ou à encourager ;
questionner leurs domaines de validité ou d'application ;
faire des propositions sur les orientations de recherche à conduire ou sur des expertises à mener ;
faire des recommandations sur la valorisation de ces travaux à des fins d'information.
Composition
Ce comité de dialogue est ouvert à des représentants en France d'associations de citoyens, de syndicats de salariés, de fédérations d'entreprises, et d'organisations patronales qui peuvent justifier d'activités (information, analyse/réflexion, veille, production, distribution, etc.) et de connaissances dans le domaine des nanomatériaux.
Composition actuelle* :
représentants associatifs : Avicenn, le Comité pour le Développement Durable en Santé (C2DS), le Collectif interassociatif sur la santé (CISS), France Nature Environnement (FNE), Sciences Citoyennes (FSC), UFC Que Choisir, l'Union nationale des associations familiales (UNAF), Women in Europe for a Common Future (WECF).
représentants des industriels ou fédérations d'entreprises : l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA), EDF, la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA), le MEDEF, le Syndicat de l'industrie du médicament vétérinaire (SIMV), THALES, l'Union des industries chimiques (UIC), et depuis fin 2014 la Fédération professionnelle des entreprises de l'eau (FP2E)
* Un appel à manifestation d'intérêt pour la mise en place du comité avait été lancé en avril 2012 : les organisations intéressées ont été invitées à se manifester par courriel. La configuration du comité a depuis évolué pour intégrer de nouveaux acteurs ayant manifesté de l'intérêt pour faire partie de cette instance de dialogue.
Réunions
Le comité se réunit de 1 à 4 fois par an.
La 11ème réunion s'est tenue le 1er décembre 2020. Au programme :
Résultats de l’étude juridique sur les enjeux, freins et leviers juridiques autour de l’exploitation et du partage des données issues du registre R-nano (T. Berger)
Présentation de l’avis et du rapport sur la déclaration annuelle des nanomatériaux : « évaluation des potentialités d’exploitation et de partage des données déclarées » (ANSES)
Feuille de route sur les nanomatériaux dans le cadre du PNSE (DGS et DGPR)
Projet de recherche APR : ExproPNano, Evaluation des expositions professionnelles aux particules nanométriques (stratégie de mesurage couplée à de l’analyse d’activité)
La 10ème réunion s'est tenue le 9 juin 2020, en visioconférence (du fait du covid-19). Au programme :
Présentation de l’avis et du rapport sur les nanomatériaux dans les produits destinés à l’alimentation (ANSES)
Point d’information sur l’avancement des travaux de l’Agence (ANSES)
Bilan R-Nano 2019 et évolution de l’Annexe REACh (DGPR)
Avis scientifique et technique sur la définition des nanomatériaux (ANSES)
Travaux sur la Valeur Toxicologique de Référence (VTR) Nanos TiO2 par inhalation et Valeur Limite d’Exposition Professionnelle (VLEP)
La 9ème réunion a eu lieu le 26 novembre 2018. Au programme :
Registre R-nano : retour sur l’exercice de déclaration 2018 et perspectives (DGPR)
Actualités règlementaires nationales et européennes (DGPR)
Contrôle de l’étiquetage des nano-ingrédients dans les produits alimentaires ; actions européennes (DGCCRF)
Nanomatériaux dans l’alimentation : De l’identification à la substitution (ANIA)
Actions de terrain pour le repérage des situations à risque et la prévention des risques professionnels liés aux nanoparticules (DIRECCTE Nouvelle Aquitaine)
Point sur les projets retenus dans le cadre du PNR-EST (ANSES)
Point sur les travaux en cours dans le domaine des nanomatériaux (ANSES)
Avancement des travaux du GT « Nanomatériaux et alimentation » (ANSES)
La 8ème réunion s'est tenue le 14 décembre 2017.
Présentation du bilan 2017 de la base r-nano
Les actualités nano suivies par le ministère de la transition écologique aux niveaux national, européen et international
Les nanomatériaux dans le Plan santé travail (PST 3)
L'utilisation des nanomatériaux dans le secteur du bâtiment et l'approche de prévention de l'OPPBTP
Le programme de travail de l'ANSES sur les nanomatériaux
Les résultats d'analyses menées par la DGCCRF sur la présence de nano-ingrédients dans les produits alimentaires
Le projet NAnERO, suivi longitudinal d'une cohorte en milieu aéroportuaire : exposition professionnelle aux nanoparticules atmosphériques et santé respiratoire
La 7ème réunion s'est tenue le 28 mars 2017.
Autosaisine « Nanomatériaux dans les produits destinés à l'alimentation »
Saisine « Exposition alimentaire aux nanoparticules de dioxyde de titane »
Travaux en cours à l'Agence sur la présence de nanoparticules dans les préparations phytopharmaceutiques
Point sur l'évaluation du TiO2 et de ses nanoformes par l'ANSES dans le cadre de Reach
Projet de recherche 'Nanotransbrain' financé dans le cadre de l'APR
Nanoparticules et médicaments
La 6ème réunion s'est tenu le 31 mars 2016. Au programme :
Présentation du bilan 2015 de la base r-NANO
Présentation des outils de nanométrologie du Laboratoire National d'Essais (LNE)
Présentation de la méthode de screening à haut débit pour la nanotoxicologie (CEA)
Bilan des travaux de l'Anses dans le domaine des matériaux et perspectives
La 6ème réunion s'est tenue le 30 avril 2015. Au programme :
La présentation du bilan 2014 de la base r-NANO par la Direction générale de la prévention des risques du Ministère de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie
Le projet de recherche en cours NANOGUT par Eric Houdeau, Directeur de Recherche à l'INRA, Unité Toxalim
Le rapport et l'avis de l'Anses relatif à la mise à jour des connaissances sur l'évaluation des risques sanitaires et environnementaux liés à l'exposition aux nanoparticules d'argent.
La 5ème réunion s'est tenue le 11 décembre 2014.
Matinée sur les risques professionnels liés aux nanomatériaux
Après-midi : point d'avancement des rapports :
Évaluation des risques sanitaires et environnementaux liés à l'exposition aux nanoparticules d'argent : mise à jour des connaissances
Méthode d'évaluation des niveaux de risques sanitaires et des dangers écotoxicologiques des produits contenant des nanomatériaux manufacturés
La 4ème réunion devait se tenir à l'automne 2013. Elle a été reportée au 29 avril 2014. Ont été présentés :
La composition, le fonctionnement et le périmètre de travail du Comité de dialogue
Portée et limites
Ce comité est un exemple concret de l'ouverture d'une agence sanitaire nationale à la société civile sur le champ des nanos demandée depuis longtemps par cette dernière et que l'Etat s'était engagé à renforcer, via le groupe de travail interministériel nano ("task-force") piloté par le Commissariat général au Développement durable dans son communiqué de février 2012.
Le périmètre de ce comité de dialogue, limité aux effets sanitaires des nanomatériaux, ne recouvre qu'un segment de l'ensemble des enjeux soulevés par les nanotechnologies ; il constitue une pièce du puzzle plus large qu'il reste à construire, celui demandé expressément par certaines associations lors du débat national sur les nanotechnologies en vue d'une discussion plus en amont et plus générale sur l'utilité des nanos.
Questions subsidiaires : les autres instances publiques ou para-publiques (notamment le CCNE, le CPP, la CNIL, le CNC, le CNRS, le CEA, l'INERIS, l'ANSM, l'Agence de Biomédecine, l'INVS, ou l'INRS) proposeront-elles des initiatives similaires en ce qui les concerne ? Si oui, la société civile pourra-t-elle suivre ? Comment économiser le temps de chacun et grouper les efforts ? En amont de la participation aux initiatives de concertation, réelles ou hypothétiques, l'AVICENN réalise une veille de l'information mutualisée dans un esprit citoyen à laquelle nous vous invitons à participer dans un esprit de partage de l'information et de co-vigilance.
La conférence environnementale accouchera-t-elle d'une étiquette "nano" ?
La conférence environnementale accouchera-t-elle d'une étiquette "nano" ?
La ministre de l'écologie Ségolène Royal a annoncé le 1er décembre qu'elle allait demander à l'Europe la mise en place d'une stratégie européenne d'étiquetage des produits de consommation courante contenant des nanomatériaux et de restriction des produits dangereux en contact avec la peau.
Les ministres annoncés à la table-ronde "santé-environnement" étaient :
Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes
Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt
Geneviève Fioraso, secrétaire d'État chargée de l'Enseignement supérieur et de la Recherche
Ségolène Royal, ministre de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie
Côté ONG, au moins deux associations ont formulé des préconisations
concernant les nanomatériaux :
le Réseau Environnement Santé (RES) qui, parmi ses 10 mesures phrases pour intégrer la santé environnementale dans la politique de santé, a demandé l'"exclusion des usages induisant une exposition grand public pour les substances de type CMR, Perturbateurs Endocriniens, Nanomatériaux (alimentation, cosmétiques, produits domestiques)".
France Nature Environnement (FNE) qui a également inclus parmi ses revendications"le retrait immédiat de certains nanomatériaux présents dans les produits alimentaires et leurs emballages et tout particulièrement le nano-dioxyde de titane dans les produits destinés aux enfants".
A l'issue de la conférence, il a été officiellement annoncé que la Ministre de l'Ecologie Ségolène Royal proposera au Conseil Environnement du 17 décembre 2014 à Bruxelles qu'une stratégie d'étiquetage des produits de consommation courante contenant des nanomatériaux et de restriction des produits dangereux en contact avec la peau soit mise en place au niveau européen.
Un groupe de travail sera mis en place au niveau national pour préciser ces propositions au cours du premier semestre 20151.
Ce groupe sera-t-il le même que celui de la "task force nano" qui avait été mise en place pour le débat public national sur les nanotechnologies de 2009-2010 et qui s'était essouflé depuis le départ de son pilote Françoise Lavarde début 20142 ?
La question de l'étiquetage "nano", simple en théorie, promet néanmoins d'être complexe dans sa concrétisation tant les défis à relever sont nombreux (au niveau scientifique mais également au niveau de la juridiction européenne) : le dicton selon lequel "le diable se cache dans les détails" est encore plus vrai à l'échelle nano...
A la suite de la Conférence environnementale 2014, le Premier Ministre présentera en janvier 2015 la feuille de route pour la transition écologique, traduisant les engagements du Gouvernement qui résulteront de l'ensemble de ces travaux.
A l'issue de la conférence, l'ONG Women in Europe for a Common Future (WECF) s'est réjouie des annonces sur les nanomatériaux faites par l'exécutif3. Mi-décembre elle a cependant dénoncé l'absence de l'étiquetage nano à l'ordre du jour du Conseil des ministres Environnement de l'Union européenne malgré la volonté affichée de la Ministre de l'écologie Ségolène Royal lors de Conférence environnementale4.
Mise à jour juin 2015 : Voir les suites données à ce projet ici LIRE AUSSI :
les nanomatériaux de diamètre compris entre 10 et 100 nm pénètrent plus profondément dans les alvéoles pulmonaires que les particules micrométriques et passent ensuite, pour partie, dans le sang
les nanomatériaux plus petits restent dans les voies aériennes supérieures et peuvent...
- être rejetés vers l'extérieur (éternuement, mouchage)
- être avalés lors de la déglutition et passer dans le système digestif puis dans l'ensemble de l'organisme
- pénétrer dans les terminaisons nerveuses tapissant les fosses nasales, puis remonter le long des prolongements neuronaux et entrer dans le cerveau via le bulbe olfactif.
Lorsqu'ils sont ingérés, les nanomatériaux peuvent se diffuser dans l'organisme2 jusqu'au foie, la rate, les intestins les glandes endocrines et au cerveau.
En quelle proportion ? Cela dépend des nanomatériaux et des conditions dans lesquelles ils évoluent dans l'organisme. Ainsi, les scientifiques estiment que :
90 à 95% du TiO₂ ingéré serait rejeté dans les excréments3 ; mais même si la fraction qui reste est faible, il ne faut pas négliger l'effet d'accumulation, vu la forte exposition toute au long de la vie, qui peut conduire à des doses cumulées potentiellement néfastes pour l'organisme ; une publication récente a ainsi confirmé la présence de nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) dans le foie et la rate de 15 humains (et non plus seulement sur des rats de laboratoire). Dans la moitié des cas, les niveaux étaient supérieurs à celui jugé sans danger pour le foie4.
l'oxyde de zinc (ZnO) serait quant à lui plus fortement absorbé par l'organisme car mieux dissous dans l'environnement gastrique.
Les nanoparticules ont tendance à s'agglomérer en milieu aqueux ou acide et à retrouver une individualité en milieu basique. Par exemple les nanoparticules de silice ou d'argent isolées en milieu salivaire, s'agglomèrent après acidification dans l'estomac mais se retrouvent de nouveau à l'état particulaire dans l'intestin à pH neutre5.
La petite taille des nanomatériaux explique également leur propension à se diffuser dans l'organisme en empruntant les systèmes nerveux, sanguin et lymphatique.
Les nanomatériaux peuvent en effet franchir les différentes barrières physiologiques : barrières nasale6, bronchique / alvéolaire7, intestinale8, placentaire9, hémato-encéphalique10 (qui protège normalement le cerveau des agents pathogènes et toxines circulant dans le sang).
Certains nanomatériaux peuvent ensuite traverser les membranes cellulaires11.
Les nanomatériaux peuvent enfin s'accumuler avec le temps (en particulier les nanoparticules métalliques) :
dans les ganglions lymphatiques (entraînant leur gonflement chronique)12 et dans certains organes13 (tube digestif, foie14, rate15 mais aussi estomac, reins, poumons, testicules, coeur, cerveau16)
dans le sang
et à même à l'intérieur des cellules17 (au niveau du cytoplasme et du noyau par exemple).
Combien de temps les nanomatériaux peuvent persister dans l'organisme ? On l'ignore aujourd'hui et la réponse sera différente là encore en fonction du type de nanomatériau considéré.
La capacité à franchir les barrières physiologiques, l'affinité des nanomatériaux pour tel ou tel type d'organe ou de cellule, ainsi que leur toxicité sont très variables d'un nanomatériau à un autre car elles dépendent fortement de leurs caractéristiques physico-chimiques.
Certains nanomatériaux peuvent être dégradés et/ou éliminés par les urines et les fèces, mais cela ne signifie pas pour autant qu'ils ne posent pas problème : lorsque l'organisme doit se débarrasser de produits chimiques, il met en oeuvre un certain nombre de stratégies de détoxification dont les processus peuvent entraîner une toxicité18.
De nombreuses questions très importantes sont encore aujourd'hui non résolues. Comment évaluer les processus d'élimination ou de dégradation des nanoparticules ? Comment identifier les produits de dégradation et leurs effets ? Comment contrôler la persistance des nanoparticules dans les organes ? Quel est le lien entre biopersistance, réactivité, dégradation et toxicité des nanoparticules ? Malgré des progrès en nanométrologie, il n'y a pas encore de réponses bien établies à ce jour. La vitesse de dégradation / élimination des nanoparticules in vivo (quelques mois) est beaucoup plus lente que celle observée in vitro (quelques heures ou jours)19.
"Internalisation et translocation de nanoparticules d'oxyde de silice et d'oxyde de titane dans des cellules épithéliales bronchiques, endothéliales pulmonaires et musculaires" par Mornet S et al. et "Étude du passage de la barrière air-sang de nanotubes de carbone après une exposition pulmonaire" par Czarny et al, in Dossier du participant préparé pour la Restitution du Programme national de recherche environnement santé travail (PNREST), octobre 2015
10 - Chez l'animal, le passage de nanoparticules dans le cerveau a été mis en évidence pour des nanoparticules de types variés (argent, dioxyde de titane (TiO2), dioxyde de manganèse oxydes de fer, iridium, carbone, polystyrène, etc.) et de tailles allant de 2 à 200 nanomètres (nm). Cf. notamment :
Chez l'humain, des chercheurs ont récemment apporté la preuve que des nanoparticules métalliques (magnétite) issues de l'air pollué arrivent jusqu'à notre cerveau, franchissant la barrière spécifique à cet organe, la barrière hémato-encéphalique (sur la base d'analyses d'échantillons de cerveaux de 37 personnes décédées, de tout âge, et résidant toutes dans des villes polluées : Mexico et Manchester). Cf. Magnetite pollution nanoparticles in the human brain, Maher BA et al., PNAS, juillet 2016
Singh, S et al., Endocytosis, oxidative stress and IL-8 expression in human lung epithelial cells upon treatment with fine and ultrafine TiO2: Role of the specific surface area and of surface methylation of the particles, Toxicology and Applied Pharmacology, 222 (2), 141-151, 2007
Geiser, M et al., Ultrafine Particles Cross Cellular Membranes by Nonphagocytic Mechanisms in Lungs and in Cultured Cells, Environ Health Perspect., 113 (11), 1555-1560, 2005
Limbach, LK et al., Oxide Nanoparticle Uptake in Human Lung Fibroblasts: Effects of Particle Size, Agglomeration, and Diffusion at Low Concentrations, Environmental Science & Technology, 39 (23), 9370-9376, 2005.
Des chercheurs britanniques ont alerté sur les risques liés au transfert de nanoparticules contenues dans les tatouages vers le sang, les vaisseaux lymphatiques et différents organes. Voir le communiqué de l'Université de Bradford (Royaume-Uni) et l'article des Amis de la Terre Australie : Des nanoparticules dans les tatouages pourraient causer des cancers (en anglais), 4 novembre 2013
Nanotechnologies et nanoparticules dans l'alimentation humaine et animale, Afssa (aujourd'hui ANSES), mars 2009 : le tube digestif, le foie et la rate sont les principaux organes cibles. Après administration par voie orale, des nanoparticules peuvent aussi être retrouvées dans l'estomac, les reins, le foie, les poumons, les testicules, le cerveau et le sang.
Nanotechnologies et nanoparticules dans l'alimentation humaine et animale, Afssa (aujourd'hui ANSES), mars 2009 : le tube digestif, le foie et la rate sont les principaux organes cibles. Après administration par voie orale, des nanoparticules peuvent aussi être retrouvées dans l'estomac, les reins, le foie, les poumons, les testicules, le cerveau et le sang.
Nanotechnologies et nanoparticules dans l'alimentation humaine et animale, Afssa (aujourd'hui ANSES), mars 2009 : le tube digestif, le foie et la rate sont les principaux organes cibles. Après administration par voie orale, des nanoparticules peuvent aussi être retrouvées dans l'estomac, les reins, le foie, les poumons, les testicules, le cerveau et le sang.
Dans le cerveau, les nanoparticules peuvent pénétrer dans les cellules de tous types : on en a observé dans les neurones, les astrocytes (qui assurent diverses fonctions importantes, notamment l'apport de nutriments aux neurones) et les cellules microgliales (des cellules immunitaires qui protègent le système nerveux des pathogènes) : cf. Bencsik A, Le cerveau est-il à l'abri d'un impact d'une exposition à des nanomatériaux ?, Biologie Aujourd'hui, 208 (2), 159-165, septembre 2014
Nanotechnologies et nanoparticules dans l'alimentation humaine et animale, Afssa (aujourd'hui ANSES), mars 2009 : le tube digestif, le foie et la rate sont les principaux organes cibles. Après administration par voie orale, des nanoparticules peuvent aussi être retrouvées dans l'estomac, les reins, le foie, les poumons, les testicules, le cerveau et le sang.
Hussain Baeza-Squiban A, Impacts physiopathologiques des nanoparticules inhalées, Biologie Aujourd'hui, 208 (2), 151-158, septembre 2014 : "les nanoparticules sont le plus souvent présentes dans des vésicules mais quelquefois libres dans le cytoplasme sans que l'on sache toujours si c'est à la suite d'une libération des nanoparticules à partir de vésicules dont la membrane se serait rompue ou d'une entrée par diffusion des nanoparticules. Selon les types cellulaires considérés et les nanoparticules étudiées, les voies d'internalisation des nanoparticules peuvent être très variées, allant de la diffusion passive des mécanismes actifs tels que la phagocytose, la macropinocytose ou l'endocytose dépendante de la clathrine ou de la cavéoline"
Bencsik A, Le cerveau est-il à l'abri d'un impact d'une exposition à des nanomatériaux ?, Biologie Aujourd'hui, 208 (2), 159-165, septembre 2014 : dans le cerveau, les nanoparticules peuvent pénétrer dans les cellules de tous types ; on en a trouvé par exemple dans le cytoplasme et dans le noyau des cellules gliales et neuronales.
Quels effets néfastes des nanomatériaux sur la santé ?
Quels effets néfastes des nanomatériaux sur la santé ?
Par l'équipe Avicenn - Dernière modification juin 2020
Cette fiche est la troisième partie de notre Dossier Nano et Risques pour la santé. Elle a vocation à être complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
Sommaire :
Fruit de l'évolution, le corps humain s'est adapté à un environnement relativement stable depuis des milliers d'années : il a développé depuis longtemps des mécanismes de défense contre les agressions extérieures. Mais depuis plus d'une cinquantaine d'années maintenant, soit un temps très court au regard de l'évolution, un nombre exponentiel de molécules chimiques de synthèse ont été mises sur le marché, avec pour certaines des effets très néfastes sur notre organisme, qui n'est pas armé pour y faire face. Aux problèmes liés au plomb, au mercure, au DDT, aux perturbateurs endocriniens, etc. viennent désormais s'ajouter des enjeux sanitaires liés aux nanoparticules manufacturées, qui du fait de leur petite taille, peuvent pénétrer dans le corps humain et se diffuser ensuite dans l'organisme... avec des effets encore très mal connus sur la santé humaine pour plusieurs raisons :
il n'y a pas d'études épidémiologiques chez l'homme1 ; les études menées jusqu'à présent ont été effectuées principalement in vitro sur des cellules isolées ou sur des organes mis en culture, plus rarement in vivo chez l'animal : les résultats ne sont donc pas nécessairement généralisables à l'homme ;
les effets des nanomatériaux sont très différents d'un nanomatériau à un autre : ils dépendent fortement des caractéristiques physico-chimiques des nanomatériaux considérés (par exemple, les nanoparticules de dioxyde de titane et de carbone sous forme fibreuse génèrent plus d'effets inflammatoires que les formes sphériques)
les effets des nanomatériaux varient en fonction de l'état dans lequel ils pénètrent dans l'organisme (différent selon l'étape du cycle de vie des nanomatériaux) et des transformations qu'ils subissent dans l'organisme au contact d'autres éléments (notamment les différents fluides biologiques : sang, lymphe, salive, suc gastrique, mucus, etc. dont l'acidité ou la teneur en sel, par exemple, affectent la toxicité des nanomatériaux).
du fait de leur petite taille et des transformations qu'elles subissent au cours de leur parcours dans l'organisme, et malgré des progrès en nanométrologie, les nanoparticules restent difficiles à détecter, à quantifier, à caractériser et à suivre dans le corps humain et jusque dans les cellules.
Dans les poumons, les nanomatériaux peuvent provoquer une inflammation pulmonaire : les macrophages ne parviennent pas toujours à éliminer les nanomatériaux non agrégés et agglomérés, dont l'accumulation peut causer à la longue une inflammation pouvant conduire à certaines pathologies pulmonaires ; les nanotubes de carbone rigides et longs soulèvent des inquiétudes sur leur capacité à provoquer des réactions pulmonaires similaires à celles induites par l'amiante2 (voir aussi plus bas : veillenanos.fr/...AppareilRespiratoire)
D'autres effets toxiques ont déjà été démontrés au niveau du coeur, du foie, de la rate, de l'estomac, des reins notamment3 (oedèmes du foie, lésions du coeur, mastocytes dans les tissus de l'estomac chez de jeunes rats par exemple4).
- Effet des nanomatériaux sur les cellules (cytotoxicité) :
C'est au niveau cellulaire que s'intéressent la majorité des études sur la toxicité des nanoparticules à ce jour ; il s'agit d'observer la survie des cellules après l'exposition.
il a été montré que les nanoparticules peuvent alors avoir des effets sur la morphologie, le fonctionnement et la viabilité des cellules (détérioration du cytosquelette cellulaire, lésions des membranes cellulaires et des mitochondries, interruption de la synthèse d'ATP) ; l'échelle nanoparticulaire permet à la particule d'interagir avec les différents organites de la cellule.
une augmentation du stress oxydant ainsi que des inflammations cérébrales entraînées par des nanoparticules ont également été mises en évidence, or ces deux phénomènes sont susceptibles d'endommager les neurones et d'accélérer les maladies neurodégénératives, telles que les maladies d'Alzheimer ou de Parkinson
les nanoparticules paraissent même capables d'entraîner l'apoptose (le suicide cellulaire) des neurones
L'apoptose des cellules (suicide cellulaire) a été observé sur d'autres types de cellules pour différents types de nanoparticules (dont les nanotubes de carbone, quantum dots, fullerènes, nanoparticules d'or ou de TiO2 )6.
En outre, l'agrégation de nanoparticules au sein d'une cellule provoque en elle-même des mécanismes toxiques.
- Effet des nanomatériaux sur l'ADN (génotoxicité) :
Les nanomatériaux peuvent entraîner des perturbations au niveau de l'ADN (pour rappel, l'ADN humain a une largeur de 2 nm)...
Jusqu'à présent, peu d'études ont examiné la génotoxicité de nanoparticules, un phénomène qui ne détruit pas nécessairement les cellules, mais qui peut conduire à :
des mutations cancéreuses si le dommage n'est pas (ou mal) réparé (les dommages à l'ADN et les mutations sont la première étape vers le cancer : deux ou trois mutations peuvent suffire à déclencher le processus)
des problèmes sur le système reproductif et le développement foetal
Mais les premières études menées ont montré que certaines nanoparticules peuvent endommager directement l'ADN7 : des dommages ont été constatés in vitro (nanotubes de carbone, nanoparticules d'oxyde de zinc) et in vivo (nanotubes de carbone, nanoparticules de dioxyde de titane).
En 2014, des chercheurs du MIT et de la Harvard School of Public Health (HSPH) ont mis au point un outil permettant de comparer la génotoxicité de différentes nanoparticules. Ils ont observé notamment la génotoxicité de nanoparticules d'oxyde de zinc (ZnO - utilisé dans les écrans solaires), d'argent, d'oxyde de fer, d'oxyde de cérium et de dioxyde de silicium8.
En 2019, des chercheurs canadiens ont montré que les nanoparticules d'argent entraînaient des dommages de l'ADN chez les moules d’eau douce9.
En 2020, des chercheur·es français·es ont eux établi que les particules de dioxyde de titane (TiO2), qu'elles soient de taille nanométrique ou microscopique, produisent des dommages génotoxiques sur divers types de cellules, même à des doses faibles et réalistes10.
La génotoxicité peut être le résultat :
de la production de radicaux libres (stress oxydant), la plus fréquemment mise en évidence, y compris à distance de la particule
de la libération d'ions à partir des nanoparticules
de perturbations des fonctions de contrôle du cycle cellulaire (perturbation de la division cellulaire et désorganisation du trafic cellulaire)
de l'interaction des nanomatériaux avec l'ADN ou l'appareil mitotique (lésions ou mutations de l'ADN, perturbation de la ségrégation des chromosomes pendant la mitose - potentiel aneugène)
Beaucoup de questions restent encore très peu explorées et méritent d'être mieux étudiées. Outre les effets cités plus haut, on manque encore cruellement de données sur les points suivants :
- Effet des nanomatériaux sur le système immunitaire ?
Des nanomatériaux peuvent entraîner des effets adjuvants (pouvant induire des réactions d'hypersensibilité ou d'allergie) - dans le cas de nanoparticules utilisées à cette fin dans les vaccins notamment.
Par ailleurs, de nombreuses interactions avec le système immunitaire ont été mises en évidence11 : réactions inflammatoires très fortes, immunostimulation, immunosuppression (par exemple des nanotubes de carbone par blocage des lymphocytes B) ou encore réactions auto-immunes.
Les cellules de l'immunité ne parviennent pas nécessairement à éliminer les nanomatériaux et peuvent elles-mêmes s'en trouver dégradées voire éliminées (ex : apoptose des macrophages).
En outre, la sensibilité aux nanoparticules semble plus forte pour les organismes dont le système immunitaire est défaillant : des nanoparticules de TiO2 ou d'or utilisées à des doses faibles, n'induisant pas d'inflammation chez l'animal sain, augmentent l'hyperréactivité bronchique, provoquent des dommages épithéliaux et une inflammation dans un modèle d'asthme professionnel induit chez la souris. Des observations similaires ont été faites chez des animaux exposés à des nanoparticules de noir de carbone et présensibilisés à un allergène12.
NB : La recherche biomédicale cherche à synthétiser des nanoparticules "furtives", c'est-à-dire non reconnues par l'organisme afin d'éviter une réaction immunitaire, ce qui n'est pas le cas des nanomatériaux utilisés pour des applications industrielles. A cette fin, les chercheurs les enrobent d'un polymère, souvent le poly-éthylène-glycol (PEG). Or, même dans le cas où elles sont synthétisées de cette façon, le problème se pose à long terme de la stabilité de l'enrobage, car ce dernier peut se modifier et s'altérer avec le temps. De plus, une étude a montré la possibilité de production d'anticorps anti-PEG avec un risque de réponse inflammatoire ou anaphylactique13 .
- Effet des nanomatériaux sur les capacités reproductrices et le développement embryonnaire (reprotoxicité) et la descendance
Les dommages à l'ADN mentionnés plus haut peuvent introduire des mutations, pouvant également contribuer à perturber la reproduction et le développement des générations suivantes.
La petite taille et la grande mobilité des nanoparticules permet leur passage dans les organes reproducteurs et à travers la barrière placentaire.
Un certain nombre d'études expérimentales ont montré, chez l'animal, des perturbations du développement embryonnaire14.
Les études concernant le système reproducteur font également état d'une toxicité des nanoparticules pour le système reproducteur mâle (perturbation de la production de testostérone, diminution de la prolifération des spermatogonies, diminution de la mobilité et de la vitalité des spermatozoïdes) et féminin conduisant à une diminution de la fertilité15.
Des nanomatériaux peuvent entraîner des perturbations hormonales (et considérés comme perturbateurs endocriniens ?)16.
Les premières études cherchant à évaluer l'effet des nanoparticules sur la santé du fœtus et de l'embryon et les implications sur la santé de la descendance après la naissance sont particulièrement inquiétants17.
En avril 2020, une analyse de la littérature a de nouveau souligné le manque de données concernant l'impact des nanomatériaux sur la fertilité féminine et le besoin d'études sur leurs effets sur les capacités reproductives18.
- Effet des nanomatériaux sur le cerveau et l'ensemble du système nerveux ?
Encore peu d'études in vivo de toxicité pour le système nerveux sont disponibles, mais les rares études existantes suggèrent que l'exposition in utero et postnatale aux nanomatériaux est possible, avec des changements dans la plasticité synaptique, l'expression des gènes et le neurocomportement19.
Selon une revue de la littérature de 201420, outre les effets sur les cellules neuronales déjà citées plus haut :
des perturbations de l'activité électrique des neurones de souris ont aussi été relevées, avec parfois l'inhibition de réseaux entiers, ce qui laisse présager des perturbations des fonctions de traitement et de transfert de l'information normalement assurées par les neurones
les nanoparticules sont également susceptibles de perturber la synthèse de neurotransmetteurs (les molécules qui assurent la communication entre neurones), notamment la dopamine et la sérotonine, qui jouent un rôle clé dans la régulation du sommeil et de l'humeur
une baisse des capacités locomotrices a été observée chez la souris
enfin, plusieurs expériences en tube à essai ont montré que les nanoparticules peuvent accélérer l'agrégation de certaines protéines formant des fibres dans les neurones ou autour, en particulier les bêta-amyloïdes et alpha-synucléines, qui s'agrègent respectivement dans les maladies d'Alzheimer et de Parkinson ; les nanoparticules pourraient alors entraîner ou accélérer ces maladies ainsi que d'autres pathologies neurodégénératives.
D'autres travaux plus récents confortent ces craintes :
la thèse de Clémence Disdier : Evaluation of TiO2 exposure impact on adult and vulnerable brains, Université Paris-Saclay, juin 2016 : "l'exposition aux NPs de TiO2 induit des altérations fonctionnelles de la BHE et une neuro-inflammation qui pourraient conduire à des troubles neurologiques. L’identification des médiateurs et la description des effets neurotoxiques restent encore à préciser".
- Effet des nanomatériaux sur la flore intestinale ?
Des nanoparticules (argent, zinc, magnésium, titane, ...) sont très utilisées industriellement pour leurs propriétés bactéricides, avec des conséquences inquiétantes sur la flore intestinale.
Une perturbation de la flore intestinale a également été mise en évidence par plusieurs études récentes21.
- Effet des nanomatériaux sur le système cardiovasculaire ?
Les nanoparticules inhalées par l'homme et qui passent à travers les poumons jusque dans le système sanguin, augmentent les risques d'accident cardiaque :
des chercheurs de l'Université d'Edimbourg ont par exemple montré qu'une fois présentes dans le sang, elles ont tendance à s'accumuler sur les vaisseaux endommagés et fragiles des patients ayant déjà été victimes d'un accident cardiaque ; selon Mark Miller, qui a dirigé la recherche publiée en 2017, "un nombre même limité de ces particules peut avoir des conséquences graves"22.
d'autres chercheurs en Italie ont publié en juin 2019 des résultats montrant que l'inhalation de nanoparticules de dioxyde de titane chez des personnes souffrant d'hypertension induit une altération hémodynamique irréversible associée à des dommages structurels cardiaques pouvant conduire à une insuffisance cardiaque23.
- Effet des nanomatériaux sur l'appareil respiratoire ?
La pénétration, la déposition, la translocation et l’élimination pulmonaire des nanomatériaux ont des effets biologiques potentiels sur l’appareil respiratoire (stress oxydant, inflammation, génotoxicité,…).
Les expositions cumulées aux nanomatériaux peuvent entraîner à long terme :
la survenue ou l’aggravation de pathologies respiratoires chroniques (asthme, broncho-pneumopathies chroniques obstructives)24
mais aussi de graves infections pulmonaires comme après exposition à l’amiante ou à la silice2.
- Effet des nanomatériaux sur la chevelure ?
Des dermatologues des Hôpitaux Bichat et Rothschild ont, pour la première fois, observé au Synchrotron soleil la présence de nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) le long de follicules pileux d’une patiente atteinte d’alopécie frontale fibrosante (chute de cheveux en haut du front) qui utilise quotidiennement, depuis 15 ans, des écrans solaires contenant du TiO225.
Quel rôle de vecteur d'autres toxiques ?
Outre les effets toxiques qu'ils peuvent directement entraîner au sein des espèces bactériennes et des cellules dans lesquelles ils peuvent pénétrer, les nanomatériaux peuvent y apporter des molécules extérieures. C'est l'effet "cheval de Troie" ; on redoute donc notamment qu'ils favorisent le transport de polluants - métaux lourds ou pesticides par exemple26, ce qui pose question à l'heure où nous sommes exposés de façon chronique à différents polluants à faibles doses.
Quels effets cocktails ?
Les interactions entre les nanomatériaux et d'autres substances sont difficilement identifiables et maîtrisables ; on parle alors d'"effet cocktail" avec un corpus scientifique qui commence à se constituer sur ceux impliquant des nanomatériaux 27.
Quels mécanismes expliquent la toxicité des nanomatériaux ?
Différents mécanismes expliquent la toxicité des nanomatériaux mais ils ne sont pas tous encore bien compris.
- Libérations d'ions :
Les métaux lourds présentent souvent une toxicité lorsqu'ils sont sous formes d'ions (solubles et biodisponibles). Or, outre leur toxicité propre, les nanoparticules constituent également de potentiels réservoirs d'ions pouvant les diffuser par exemple au contact de l'eau ou en fonction des interactions avec l'environnement et générer une toxicité à distance. C'est le cas en particulier des nanoparticules d'argent, qui libèrent des ions d'argent très toxiques pour les bactéries (sans que cette libération soit le seul facteur de toxicité du nanoargent)28.
- Induction ou amplification d'un stress oxydant :
L'induction d'un stress oxydant est considérée comme un mécanisme majeur dans la toxicité des nanoparticules. Certains types de nanomatériaux (en particulier les oxydes métalliques) peuvent produire des espèces réactives de l'oxygène (ERO ou radicaux libres), des molécules très réactives qui oxydent et dégradent d'autres molécules à leur surface ou induire leur production par des cellules29 ; ces ERO entraînent un stress oxydant, mécanisme indirect de la carcérogénèse. De nombreuses maladies sont associées au stress oxydant observé lorsque la production de radicaux libres dépasse la capacité de l'organisme à les combattre. Les nanoparticules pourraient également amplifier les effets d'un stress oxydant causé par d'autres contaminants : des études récentes ont ainsi montré qu'en présence de nanoparticules, même à faibles doses, l'organisme est susceptible de moins bien réagir au stress oxydant provoqué par la présence de polluants dans l’environnement cellulaire, avec des conséquences non négligeables (mutagénèse, instabilité génomique) potentiellement à l’origine de pathologies variées, et notamment de cancers30.
- Interactions des nanomatériaux avec des protéines :
Lorsqu'elles pénètrent dans un environnement cellulaire, les nanoparticules sont rapidement recouvertes d'une couronne de biomolécules (des protéines, qui forment la "corona") ; la nature des molécules présentes dans la corona est susceptible de modifier le devenir et la persistance de la nanoparticule dans l'organisme ainsi que sa toxicité. L'albumine a par exemple un effet stabilisant sur les nanoparticules tandis que le fibrinogène peut provoquer leur agrégation31. Le système immunitaire réagit différemment selon le type de nanoparticules et de protéines composant leur couronne.
Vers un accroissement des résistances à certains traitements ?
Des nanomatériaux sont utilisés pour leurs propriétés bactéricides, fongicides (toxiques pour les champignons), antivirales32 voire antirétrovirales (VIH et hépatites B pour les nanoparticules d'argent33). Or, leur utilisation massive dans l'industrie soulève des inquiétudes quant aux résistances potentiellement développées par les agents pathogènes34.
Devant tant de signaux d'alerte, des acteurs réclament l'application du principe de précaution
Mener des études supplémentaires ? Lesquelles et à quel prix ? Financées par le contribuable et/ou les industriels ?
Un consensus se dégage clairement dans la communauté scientifique et au-delà sur la nécessité de développer les efforts de recherche au vu des divers effets nocifs déjà identifiés, même en assez faible quantité. De nombreux acteurs ont appelé à la réalisation d'études supplémentaires afin de combler les incertitudes restantes sur les risques sanitaires nanomatériaux. Pour autant, est-ce réalisable dans des délais raisonnables sachant que de nouveaux nanomatériaux toujours plus complexes sont produits et commercialisés chaque jour ? Se pose en outre la question de la prise en charge par les industriels eux-mêmes du coût de ces recherches.
Les méthodes scientifiques pour approfondir les connaissances sur la toxicité des nanoparticules sont l'objet de débats également. Certains chercheurs recommandent de recourir à des modèles animaux reproduisant des scénarios d'exposition chronique prolongée, pour lesquels les données manquent tant sont nombreux les points qui restent à confirmer et à préciser et qui ne peuvent être totalement éclaircis par des études in vitro35. Avec en arrière-plan l'épineuse question des considérations éthiques sur l'expérimentation animale...
(In)former les médecins et les soignants
La médecine moderne s'est développée en valorisant auprès des médecins la dimension thérapeutique de leurs outils de travail, sans suffisamment les encourager à s'interroger sur leurs éventuels effets toxiques en dehors des effets secondaires présentés par les industriels.
Par ailleurs, notre environnement a considérablement changé depuis un siècle avec une accélération technologique de plus en plus forte et la mise sur le marché de produits contenant des substances chimiques dont la multiplication et la diffusion à grande échélle génère, pour certaines, des effets largement indésirables ; si quelques formations de santé-environnementale ont vu le jour ces dernières années, elles restent rares et optionnelles pour les médecins et pharmaciens.
Sur le terrain, de nombreuses maladies dont on ne comprend pas les causes ("idiopathiques") sont donc très probablement en lien avec des expositions chroniques à ces polluants environnementaux.
Ainsi, constatant que des nanoparticules peuvent provoquer une inflammation (directe ou à distance) sur les cellules ou tissus et dans la mesure où elles sont susceptibles de suivre tout type de trajets (nerveux, sanguins et lymphatiques), des altérations neurologiques non expliquées pourraient par exemple être dues à des nanoparticules.
Les nanoparticules ayant la taille de virus et étant repérées comme des éléments du "non-soi" par le corps, celui-ci met en place des procédés de défense identiques à ceux des maladies infectieuses, pouvant porter gravement à confusion.
Enfin, les différents impacts des nanoparticules sur le système immunitaire et les cellules sanguines pourraient également être à l'origine de nombreux problèmes de santé inexpliqués.
Au-delà du fait que ce type de risque n'est pas pris en compte par les soignants aujourd'hui, la grande difficulté réside ensuite, même en cas de doute, à mettre en évidence... :
d'une part la présence de nanoparticules du fait de leur taille et de leurs possibles migrations
et d'autre part le lien de cause à effet avec la (ou les) pathologie(s) constatées : les tumeurs cancéreuses par exemple ne livrent pas d'indication sur ce qui les a déclenchées, et nous sommes exposés à une grande quantité de substances chimiques, avec des interactions difficilement identifiables et maîtrisables (cf. l''"effet cocktail" 27).
En savoir plus
- Sur notre site :
La rubrique Nano et Santé de notre site veillenanos.fr
1 - Un dispositif de surveillance épidémiologique des travailleurs potentiellement exposés aux nanomatériaux a cependant été mis en place en France, mais ses résultats ne seront pas connus ni exploitables avant de nombreuses années. Voir notre fiche sur le programme EpiNano
3 - Afssaps (devenue ANSM), Évaluation biologique des dispositifs médicaux contenant des nanomatériaux, Rapport scientifique, février 2011, p 45 : "Les organes les plus souvent touchés appartiennent au système réticulo-endothélial, incluant le foie et la rate, en accord avec l'observation fréquente de la capture des nanomatériaux par ce système. Le rein est un autre organe habituellement touché, puisqu'il a été identifié dans certaines études de toxico-cinétique comme la voie d'élimination primaire pour de nombreux nanomatériaux dont les nanotubes de carbone et les fullerènes" (se référer au document pour les références bibliographiques détaillées)
Aillon, KL et al., Effects of nanomaterial physicochemical properties on in vivo toxicity. Advanced Drug Delivery Reviews, 61 (6), 457-466, 2009
Hussain, S et al., Carbon black and titanium dioxide nanoparticles elicit distinct apoptotic pathways in bronchial epithelial cells, Part Fibre Toxicol, 7, 10, 2010
10 - Cf. TiO2 genotoxicity: an update of the results published over the last six years, Carriere M, Arnal ME, Douki T, Mutation Research/Genetic Toxicology and Environmental Mutagenesis, 15 mai 2020 : cette revue de la littérature scientifique, réalisée par des chercheur·es du CEA, montre que les particules de dioxyde de titane (TiO2), de taille nanométrique et microscopique, entraînent des dommages de l'ADN sur divers types de cellules, pulmonaires et intestinales, même à des doses faibles et réalistes.
Immunotoxicité des nanoparticules, Brousseau P et al., intervention au 83e du Congrès de l'Acfas, Colloque 210 - Présence, persistance, devenir et effets des nanomatériaux dans l'environnement, mai 2015
13 - Cf. Ishida T et al., PEGylated liposomes elicit an anti-PEG IgM response in a T cell-independent manner, Journal of Controlled Release, 122 (3), 349-355, 2007
Maternal exposure to nanosized titanium dioxide suppresses embryonic development in mice, Hong F et al., International Journal of Nanomedicine, 12: 6197–6204, 2017 : "Chez la souris gestante exposée par voie orale aux NPs de TiO2 entre 0 et 17 jours de gestation à des doses allant jusqu’à 100 mg/kg pc/jour, la concentration en Ti augmente dans le sérum de la mère, dans le placenta et dans le fœtus. Des anomalies de poids et de développement squelettique sont également retrouvées dans le fœtus. Ces résultats indiquent que les NPs de TiO2 peuvent traverser la barrière placentaire chez la souris en entrainant des conséquences dans le développement foetal" (résumé du HCSP in Bilan des connaissances relatives aux effets des nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) sur la santé humaine, avril 2018)
Hormonal and molecular alterations induced by sub-lethal toxicity of zinc oxide nanoparticles on Oreochromis niloticus, Saudi Journal of Biological Sciences, 27(5) : 1296-1301, mai 2020 : "Zn-ONPs treatment in a doses equal to 1/2 and 1/3 of LC50 can induce hormonal alteration in fish at both cellular and molecular levels. At cellular levels represented in a significant decrease in serum GH, TSH, T3, T4, FSH, LH, E2, testosterone and insulin hormones with a significant increase in both ACTH and cortisol levels with no change in glucagone levels. At the molecular levels there were a significant down regulation in transcriptional levels of GH, IGF-I, insulin and IRA genes"
Silver nanoparticles disrupt regulation of steroidogenesis in fish ovarian cells, Degger N et al., Aquat Toxicol., 4;169:143-151, novembre 2015 : cette étude montre que des nanoparticules d'argent (nAg) peuvent affecter les gènes spécifiques qui régissent la stéroïdogenèse, conférant aux nAg un potentiel de perturbation endocrinienne (cité par la lettre RES-Actus n°15, novembre 2015).
27 - Dans leur grande majorité, les études de nanotoxicologie isolent les substances nanométriques ; rares sont celles qui étudient les effets d'interaction entre substance(s) nanométrique(s) et autres substances pénétrant dans l'organisme, mais on commence à voir apparaître la confirmation d'effets cocktails impliquant des nanomatériaux (la liste qui suit n'est pas exhaustive !) :
Pour plus d'information sur l'effet cocktail, voir :
le rapport State of the Art Report on Mixture Toxicity, 2009, par Andreas Kortenkamp, Thomas Backhaus, et Michael Faust, commandité par la DG Environnement de la Commission européenne
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Les nanoparticules sont expressément mentionnées comme risques émergents dans la Stratégie nationale de santé 2018-2022 rendue publique par le Ministère des solidarités et de la santé fin 2017 : sont prévues des actions sur les sources de pollution qu'elles représentent et la limitation de notre exposition. Reste à voir quand et comment... Avicenn plaide pour apporter rapidement des améliorations au registre R-nano, afin que les professionnels de la santé disposent d'un outil opérationnel pour mieux cerner les expositions, afin de les réduire.
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Rubrique initialement mise en ligne en juillet 2015
EpiNano, dispositif de surveillance épidémiologique des travailleurs potentiellement exposés aux nanomatériaux
EpiNano, dispositif de surveillance épidémiologique des travailleurs potentiellement exposés aux nanomatériaux
Par MD, DL et l'équipe Avicenn - Dernier ajout juin 2018
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Le dispositif de surveillance Epinano a été lancé début 2014 par l'Institut national de veille sanitaire (lnVS). Il vise à constituer une population de travailleurs produisant ou manipulant des nanomatériaux et à suivre dans le temps l'évolution de leur état de santé dans un objectif de surveillance épidémiologique.
Exercer un suivi généraliste des éventuels effets sur la santé à moyen et long termes d'une exposition professionnelle aux nanomatériaux
Permettre la mise en place d'études ad hoc explorant des hypothèses de recherche spécifiques
Origine
Dès 2006, un rapport du Comité de la Prévention et de la Précaution (CPP) avait souligné que "des études épidémiologiques sur des populations exposées, notamment en milieu professionnel, doivent être entreprises" 1.
Un groupe de travail2 comprenant des épidémiologistes, des toxicologues, des médecins du travail, des physico-chimistes et des acteurs du système de prévention a été réuni par l'Institut de recherche en santé publique (IReSP) à partir de 2007, pour analyser cette question.
En 2008, l'Afsset (devenue aujourd'hui ANSES) avait à son tour écrit qu'en vue de la "réalisation d'études épidémiologiques spécifiques chez les travailleurs potentiellement exposés, il est indispensable de mettre en oeuvre un dispositif de recensement des personnels travaillant au contact des nanomatériaux et de surveillance des conditions de travail" 3.
En réponse à une demande des ministères de la santé et du travail4, l'institut national de veille sanitaire (lnVS, devenu en 2016 Santé publique France) avait réalisé une étude de faisabilité d'un suivi épidémiologique des travailleurs et des chercheurs exposés aux nanomatériaux, publiée en 20115.
Le protocole du dispositif de surveillance EpiNano est déployé depuis par Santé publique France (qui a repris les missions de l'INVS depuis 2016).
Il est entré dans sa phase opérationnelle depuis le début de l'année 2014, après avoir été soumis début 2013 au Comité consultatif sur le traitement de l'information en matière de recherche dans le domaine de la santé (CCTIRS) et à la CNIL qui lui tous deux donné un avis favorable.
Pilotage et partenaires
Santé publique France est responsable du pilotage du dispositif.
la Direction générale du travail (DGT) avec qui une convention a été signée en mars 2014 ; l'inspection médicale du travail (via les Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi - DIRECCTE) contribuera à faire connaître le dispositif auprès des entreprises
l'INRS, le CEA, l'INERIS, pour ce qui concerne l'évaluation des expositions aux nanomatériaux et la métrologie des aérosols aux postes de travail.
Un protocole en trois étapes
Le protocole conçu par l'InVS se voulait pragmatique et évolutif. Pour son démarrage, EpiNano a été échelonné en trois étapes :
1) l'inclusion des entreprises oeuvrant dans le domaine des nanomatériaux manufacturés (par questionnaire adressé aux entreprises - identifiées notamment sur la base du registre R-Nano)
2) au sein des entreprises, le repérage des postes de travail potentiellement exposés aux nanomatériaux et caractérisation semi-quantitative de l'exposition (par visite d'observation en entreprise)
3) l'inclusion des salariés affectés ou intervenants à ces postes (par un questionnaire adressé aux salariés) et leur suivi généraliste dans une cohorte prospective, via un questionnaire tous les trois ans.
Les travailleurs identifiés comme potentiellement exposés doivent être inclus dans un registre pour constituer une cohorte prospective avec un suivi épidémiologique.
Le suivi sanitaire est orienté sur la surveillance des effets respiratoires et cardiovasculaires, mais conserve un caractère généraliste.
La cohorte doit servir également aux études ad hoc explorant des hypothèses de recherche spécifiques.
Un programme centré sur les nanotubes de carbone et le nano-dioxyde de titane...
Dans un premier temps EpiNano a été limité à deux familles de nanomatériaux : nanoparticules de dioxyde de titane et nanotubes de carbone, sous forme de poudres. Leurs risques commencent en effet à être bien documentés6.
Il était prévu dès le départ qu'il puisse être ensuite étendu à d'autres nanomatériaux.
En 2014, les données déclarées dans R-Nano et relatives aux nanotubes de carbone et au nano-dioxyde de titane ont été communiquées à l'lnVS pour ce projet Epinano.
.. puis élargi aux nanoparticules de silice et au noir de carbone
Le programme aurait été élargi aux nanoparticules de silice depuis janvier 2016 (information obtenue en mars 2017, lors du comité de dialogue nano de l'ANSES)..
Cette liste peut encore être amenée à évoluer en fonction du contexte industriel national et scientifique.
... qui se heurte à des difficultés de mise en oeuvre
Selon différentes sources proches du dossier, l'exploitation des données du registre déclarées dans R-Nano s'avère très difficile : les données sont parcellaires, leur analyse est compliquée et l'identification des sites où sont manipulés les nanomatériaux déclarés n'a pas été aisée au lancement du projet.
En outre, très peu d'entreprises acceptent d'ouvrir leurs portes et celles qui acceptent ne vont pas nécessairement jusqu'au bout de la démarche.
Mi-20169, 156 entreprises avaient été contactées, sur lesquelles 22 entreprises seulement avaient accepté d'adhérer au dispositif et avaient été visitées par l'équipe EpiNano de l'InVS ; sur les 149 postes de travail mettant en oeuvre des nano-objets et observés par l'équipe, la moitié environ a été classée potentiellement exposant. Ce travail a permis d'identifier 158 personnes éligibles dans EpiNano dont un tiers a déjà intégré le dispositif en complétant le questionnaire d'inclusion.
Début octobre 201610, le nombre d'entreprises volontaires était passé à 29, dont 27 ont été visitées, avec 153 postes observés et 155 travailleurs éligibles ; 63 seulement avaient donné leur accord pour faire partie du suivi avec un double questionnaire (actif et passif) pour un croisement avec d'autres bases de données (SNIIRAM, PMSI, CepiDC).
Le médecin du travail était associé au projet dans 11 entreprises, en participant à la réunion de présentation de projet et/ou à la visite. Dans quatre entreprises, le médecin a porté le projet en tant que personne-ressource. Certains médecins ont décliné leur participation par manque de temps et/ou le caractère non-prioritaire des NOAA par rapport à d'autres risques professionnels.
En 2016 et 2017, de nouvelles modalités ont été élaborées avec l’Inspection médicale du travail pour faciliter l’identification des entreprises produisant ou utilisant des nanomatériaux et améliorer le repérage des postes exposants. Désormais le médecin du travail et son équipe sont au centre de ce dispositif de veille sanitaire, avec un rôle de promoteur de la cohorte, auprès de la direction de l’entreprise, avec l’appui des médecins inspecteurs du travail et de Santé publique France.
La première version de l'auto-questionnaire individuel d'inclusion comptait 27 pages à lui seul ! Il en fait 15 désormais, favorisant un meilleur taux de réponse de la part des travailleurs.
A cause du faible nombre d'entreprises volontaires, des retards pris dans la modification du protocole et de reconfigurations de l'équipe projet, la bonne conduite du programme a été mise à mal, au moins temporairement. L'enjeu est donc de garder les cohortistes et d'en intégrer un plus grand nombre.
Comment contribuer à sa réussite ?
Toutes les entreprises oeuvrant dans le domaine de la production, de la transformation ou de l'utilisation de nanomatériaux en France sont invitées à prendre contact avec la responsable du projet : Kathleen Chami de Santé publique France.
O33-2 Epinano, the french program for epidemiological surveillance of workers potentially exposed to engineered nanomaterials: the state of play after first 18 months of operation, Occupational & Environmental Medicine, 73(1), décembre 2016
10 - Chiffres fournis par Kathleen Chami (Santé Publique France / InVS) lors de la Journée Nanomatériaux des J3P à Nancy le 13 octobre 2016
Fiche initialement créée en février 2014
Au vu des risques liés aux nanomatériaux, l'ANSES préconise un encadrement renforcé
Au vu des risques liés aux nanomatériaux, l'ANSES préconise un encadrement renforcé
Par MD, DL et l'équipe Avicenn - Article mis en ligne le 15 mai 2014 - Dernière modification le 10 juillet 2014
L'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) a rendu public son rapport d'évaluation des risques liés aux nanomatériaux attendus depuis 2013. Ce rapport largement relayé par les médias est maintenant dans les mains des tutelles de l'ANSES. Quelles suites donneront-elles aux recommandations émises par l'agence ?
Depuis 2006, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de lalimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a publié plusieurs expertises sur les risques sanitaires et environnementaux liés aux nanomatériaux manufacturés ; la dernière analyse concernant les nanomatériaux dans leur globalité remontait à 20101.
En 2012 l'ANSES a confié à son groupe de travail pérenne "nanomatériaux et santé" un travail de mise à jour des connaissances sur ces risques.
Fin avril 2014, le rapport finalisé a été présenté au comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé" ouvert à la société civile et auquel Avicenn participe. Il a ensuite été publié le 15 mai sur le site de l'ANSES2.
Il s'agit d'une "revue de la littérature" et non pas de la présentation de résultats de recherches effectuées au sein des laboratoires de l'ANSES.
Le point sur les risques sanitaires et environnementaux associés aux nanomatériaux manufacturés intentionnellement
Le rapport traite :
- des risques liés aux nanomatériaux manufacturés intentionnellement ; il ne porte donc pas sur les nanoparticules naturelles ou "incidentelles".
- dans les domaines de l'alimentation, de l'environnement et de la santé ; bien que les risques sur les dérives éthiques possibles liées aux mésusages des nanotechnologies (surveillance ou manipulation du vivant notamment) ne soient pas traités en profondeur car hors du domaine de compétence de l'ANSES, ils font tout de même l'objet d'une présentation synthétique - phénomène suffisamment rare pour être signalé.
Des risques préoccupants mais encore difficiles à évaluer
L'ANSES montre que malgré la progression des connaissances scientifiques, les incertitudes restent importantes quant aux effets des nanomatériaux sur la santé et l'environnement.
Elle met en évidence des caractéristiques de danger très diverses - un tableau clinique qui fait "froid dans le dos" selon Pierre Le Hir du Monde3 qui cite parmi les effets répertoriés par l'ANSES de certains nanomatériaux sur les organismes vivants : "des retards de croissance, des malformations ou anomalies dans le développement ou la reproduction chez des espèces modèles", ainsi que "des effets génotoxiques et de cancérogénèse", ou encore "des effets sur le système nerveux central, des phénomènes d'immunosuppression, des réactions d'hypersensibilité et d'allergie".
L'ANSES insiste néanmoins sur la grande complexité à appréhender les situations d'exposition pour l'homme et l'environnement, rendant difficile de mener des évaluations spécifiques des risques.
Sur la base de tests in vitro et in vivo sur l'animal (il n'y a pas de données sur l'homme), le rapport met en évidence la capacité des nanomatériaux à passer les barrières physiologiques et pointe également la toxicité de certains d'entre eux.
Principales recommandations
L'ANSES émet plusieurs recommandations, notamment :
stimuler la recherche pour réduire les incertitudes scientifiques encore très nombreuses, via la mise en œuvre de projets pluridisciplinaires permettant de développer les connaissances sur les caractéristiques des nanomatériaux et de leurs dangers, tout au long du cycle de vie des produits; il s'agit notamment de favoriser le développement d'essais de sécurité pertinents pour évaluer les risques sanitaires des produits contenant des nanomatériaux destinés à être mis sur le marché.
se doter d'outils réglementaires et normatifs pour mieux protéger l'homme et l'environnement : l'ANSES se dit favorable à l'interdiction de certains nanomatériaux dans des produits grand public ! Le faisceau de données disponibles sur la toxicité de certains nanomatériaux apparaît en effet à l'Anses scientifiquement suffisant pour envisager leur encadrement selon la réglementation européenne CLP (règlement de classification, étiquetage et empaquetage des substances et des mélanges) et REACh (substances chimiques). L'Anses a, dans ce cadre, récemment publié des recommandations visant à adapter le règlement REACh à la prise en compte des caractéristiques propres aux nanomatériaux1. Ce cadre réglementaire permettrait de renforcer la traçabilité des nanomatériaux destinés à être intégrés dans les produits de consommation, depuis leur production jusqu'à leur distribution, afin notamment de mieux caractériser les expositions des populations, et permettre de mieux cibler les évaluations de risque à réaliser.
Premiers éléments d'analyse d'Avicenn
Une pression accrue sur les pouvoirs publics chargés de la gestion des risques
Comme le fait remarquer Pierre Le Hir du Monde3, "en 2010, l'agence s'était contentée de mettre en avant "le principe de précaution". Elle va aujourd'hui plus loin, en préconisant d'inscrire les nanomatériaux dans le cadre du règlement européen CLP (classification, étiquetage et emballage) sur les substances chimiques dangereuses.
L'ANSES souligne que "malgré les efforts entrepris en pointillés [par les pouvoirs publics] pour adapter les cadres réglementaires préexistants à cet ensemble hétéroclite et potentiellement infini que constituent les nanomatériaux, l'absence d'évaluations sociale et économique concrètes de leur déploiement continue de se faire sentir" (p.28).
Dominique Gombert, directeur de l'évaluation des risques à l'ANSES, est clair : "Dans dix ans, il sera trop tard pour se poser la question de leur encadrement".
L'enjeu est de taille : il s'agit donc de mobiliser les pouvoirs publics afin qu'ils prennent les dispositions nécessaires pour ne pas répéter les erreurs du passé, en mettant notamment en place des mesures de restriction d'usage voire d'interdiction.
L'ANSES est favorable à des mesures de restriction d'usage voire d'interdiction pour certains nanomatériaux, notamment :
les nanotubes de carbone,
les nanoparticules d'argent,
les nanoparticules de dioxyde de titane,
les nanoparticules de dioxyde de silice,
les nanoparticules d'oxyde de zinc,
les nanoparticules d'oxyde de cérium,
les nanoparticules d'oxyde d'aluminium,
les nanoparticules d'or
Classer ces nanoparticules comme substances dangereuses aurait pour conséquence la mise en place de mesures de protection et l'arrêt de l'utilisation de certaines applications grand public.
Cette préconisation sera-t-elle suivie par les ministères de tutelle de l'ANSES ? Si oui, la France pourrait porter le dossier au niveau de l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA).
Une question politique : comment financer les études de risques ?
Comment financer les études de risques liés aux nanomatériaux ? Cette question est cruciale mais pourtant largement éludée par les pouvoirs publics ou les industriels. Dans son rapport l'ANSES préconise "la mise en place de mécanismes d'incitations financières similaires à ceux mis en oeuvre pour d'autres thématiques (champs électromagnétiques par exemple)". Depuis 2011 pour les radiofréquences, les industriels abondent, par l'intermédiaire d'une taxe, un fond destiné aux recherches sur les effets sanitaires des ondes.
Cette proposition rejoint celle faite par la société civile concernant la mise en place d'une taxe payée par les entreprises ayant une activité en lien avec des nanomatériaux manufacturés qui viendrait alimenter un fonds ensuite attribué à des laboratoires indépendants. Une taxe ne serait cependant "pas à la mode" a-t-on entendu lors de la réunion du comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé" fin avril (2014)...
Quelle autre solution envisager alors ? Le Centre d'Information sur l'Environnement et d'Action pour la Santé (CEIAS), association loi 1901, propose que "l'argent du Crédit Impôt Recherche, qui est l'argent de l'État, soit utilisé pour évaluer la toxicité à court et long terme des nouveaux matériaux".
Vos avis et suggestions nous intéressent ! Car il s'agit assurément d'un chaînon manquant pour passer des paroles aux actes.
Quid des recherches sur les nanos dans l'alimentation à l'ANSES ?
L'Anses souligne que "la voie orale, peu étudiée jusqu'à aujourd'hui, devrait faire l'objet d'efforts de recherche spécifiques" (cf. p.8).
Problème : malgré cette recommandation, l'ANSES a demandé aux chercheurs de ses propres laboratoires de Fougères et Lyon de finir leurs recherches en cours sur le sujet et de ne pas en lancer de nouvelles.
→ Voir à ce sujet notre lettre VeilleNanos parue en décembre dernier.
Depuis, le tout récent rapport d'activité 2013 du laboratoire de Lyon de l'ANSES publié début juin 2014 a confirmé que son "unité Maladies neurodégénératives (MND) a dû arrêter, à la demande de la direction scientifique des laboratoires de l'Anses, toute recherche sur la toxicologie des nanomatériaux" !
Interrogé à ce sujet par Avicenn le 29 avril 2014, à la fin de la dernière réunion du comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé", le directeur général adjoint scientifique de l'ANSES avait invoqué un "recentrage" de l'ANSES sur ses domaines d'excellence, qui dans le domaine nano concernent davantage l'exposition par inhalation.
Reste que les recherches sur l'ingestion des nanomatériaux sont aujourd'hui très limitées (principalement au CEA de Grenoble et à l'INRA de Toulouse).
Autres points marquants
Parmi les autres points marquants, Avicenn a relevé les éléments suivants :
Le groupe de travail considère que "la prise en compte du cycle de vie des nanomatériaux est incontournable pour l'évaluation des risques" (depuis la conception jusqu'à la destruction ou recyclage des produits en passant par la consommation). Cette prise en compte passe notamment par "la transmission des FDS [fiches de données de sécurité] tout au long de la chaîne logistique", qui "devrait permettre le suivi du produit au cours de ses étapes de transformations industrielles" (p.27).
Le groupe de travail préconise "une amélioration du dispositif de déclaration (...) afin d'identifier de manière certaine les nanomatériaux manufacturés produits, distribués et importés sur le territoire national" (p.20). Il rejoint ici l'analyse produite par Avicenn le 2 décembre dernier4.
Il recommande également que soient recherchées, "dans le processus de gouvernance des risques des nanomatériaux, la transparence et une participation accrue des publics concernés (associations de citoyens, partenaires sociaux, professionnels de santé, etc.)" (p.70).
Premières réactions au rapport
Un rapport applaudi par des élus écologistes et des professionnels de la santé...
Michèle Rivasi, députée européenne et tête de liste Europe Ecologie pour les élections européennes dans le Grand Sud-Est, a réagi le jour même de la publication de ce rapport, appelant d'urgence à règlementer les nanotechnologies au niveau européen5.
Corinne Lepage, autre députée européenne verte, aurait affirmé que "mettre sur le marché des produits dont on ne peut pas garantir l'innocuité, c'est prendre les consommateurs européens pour des cobayes. Il est urgent d'établir un cadre législatif rigoureux pour les nanomatériaux au niveau européen. L'union européenne doit imposer une évaluation indépendante des effets de ces particules sur la santé et l'environnement"6.
Le 18 mai, William Dab, médecin et épidémiologiste, écrit sur son blog que "le développement [des nouvelles technologies, dont les nanotechnologies] est plus rapide que notre capacité à en évaluer les risques. Ce n'est pas une raison suffisante pour les bloquer, mais cela justifie la plus grande vigilance et des investissements en recherche qui soient à la hauteur des enjeux sanitaires"7.
Le 19 juin, le groupe écologiste du Conseil régional du Centre a soumis un projet de vœux au vote visant à accroître la vigilance s'agissant des nanomatériaux, en s'appuyant notamment sur le rapport de l'ANSES. Il n'a pas réuni la majorité nécessaire pour être adopté 8.
... moins bien accueilli par l'industrie chimique
Selon l'Usine Nouvelle, "les industriels ne digèrent toujours pas les recommandations" de l'ANSES qui pourraient, selon l'Union des industries chimiques (UIC) "nuire aux capacités de compétitivité et d'innovation européenne" 9.
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L'ANSES recommande de limiter la mise sur le marché de produits contenant des nanoparticules d'argent
L'ANSES recommande de limiter la mise sur le marché de produits contenant des nanoparticules d'argent
Par MD - Brève mise en ligne le 5 mars 2015 - Dernier ajout le 20 mars 2015
L'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) vient de rendre publics son avis et son rapport d'évaluation des risques liés aux nanoparticules d'argent attendus depuis 2013.
Elle recommande de limiter la mise sur le marché de produits contenant des nanoparticules d'argent aux applications dont l'utilité est clairement démontrée. Mais qui va juger de cette "utilité", et comment ?
Dans le rapport qu'elle a publié le 5 mars dernier, lAgence passe en revue les effets sanitaires et environnementaux potentiels des nanoparticules d'argent.
Elle regrette l'insuffisance des efforts de recherche permettant une évaluation des risques sanitaires.
Néanmoins, s'appuyant sur les conclusions de son avis d'avril 2014 relatif aux risques liés aux nanomatériaux manufacturés, l'Anses recommande de limiter la mise sur le marché de produits contenant des nanoparticules d'argent aux applications dont l'utilité est clairement démontrée.
L'ANSES "sera t-elle entendue par les industriels ? Et qui sera chargé de dire ce qui est "utile" ?" se demande le 9 mars l'équipe du projet Nesting1 qui milite pour un environnement sain pour les enfants.
Olivier Toma, directeur de l'Agence primum non nocere, a réagi à son tour le 17 mars2: "Va-t-on reproduire avec les nanoparticules le scandale de l'usage immodéré des phtalates ou du Bisphénol A qu'on s'efforce maintenant de chasser des produits où ils étaient largement utilisés ? L'Anses joue les saint Thomas (ou les Ponce Pilate) sur la toxicité éventuelle des nanoparticules sur la reproduction, les gènes ou le cerveau, mais elle ne craint pas l'accusation de désinvolture en reconnaissant que ces substances ont un effet sur l'environnement "avéré par de nombreuses études, en favorisant la mortalité des organismes aquatiques et terrestre, tout en inhibant leur croissance et leur reproduction". Il nous semblait que tout l'effort actuel entrepris dans les voies du développement durable et de la protection de l'environnement, était lié à l'idée, enfin admise, que l'environnement et l'humain ne faisaient qu'un et que toute dégradation du premier avaient des conséquences funestes sur le second !
Alors l'Anses, comme soucieuse de ménager la chèvre (des industriels) et le chou (des consommateurs) accouche de deux recommandations principales.
1/ Elle consiste à renforcer la traçabilité des données et l'information des consommateurs. "L'argent ne figure pas dans la liste des minéraux pouvant être utilisés pour la fabrication de compléments alimentaires, qu'il soit sous forme nanoparticulaire ou non", rappelle l'Agence. En bref, elle nous dit qu'on peut continuer à empoisonner éventuellement les consommateurs à condition qu'ils en soient dument informés.
2/ Elle recommande la limitation de l'usage des nanoparticules d'argent aux applications dont l'utilité est clairement démontrée suivant un savant dosage où les bénéfices pour la santé humaine contrebalanceraient positivement les dégradations de l'environnement. Ce qui nous ramène au problème de fond : la non prise en compte de l'étroite dépendance de l'une et de l'autre.
Nous en sommes là et nous pouvons nous demander à quoi nous allons aboutir avec des demi-mesures, inutiles s'il n'y a vraiment rien à craindre (ce dont nous doutons fortement pour notre part) et détestables si, comme le prouvent un certain nombre d'études les nanoparticules d'argent sont nocives pour l'environnement et, à terme, pour nous-mêmes."
Dany Neveu, porte-parole de la commission santé environnement d'EELV Aquitaine abonde : "C'est une bonne chose que l'ANSES se préoccupe des effets du nano argent ; mais qui déterminera l'utilité incontournable de cette molécule ? Dans l'état actuel des choses, ce seront encore les industriels qui donneront leur avis, partial. Il conviendrait donc d'interdire complètement l'utilisation du nano argent, tant que des études sérieuses et indépendantes n'auront pas statué sur ses effets collatéraux.
Dans la mesure où c'est un biocide puissant, il peut être suspecté de deux choses :
lorsqu'il est utilisé sous forme de peintures biocides, il peut favoriser les pathogènes les plus résistants qui sont souvent les plus toxiques,
lorsqu'il est libéré dans l'environnement après lavage des vêtements qui en sont enduits, il peut devenir une arme contre la micro faune des cours d'eau, ce qui entraîne des déséquilibres biologiques potentiels dont les effets peuvent se révéler dramatiques sur la santé humaine et environnementale"
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Pas de nanoparticules d'argent dans les lycées d'Auvergne - Rhône-Alpes
Pas de nanoparticules d'argent dans les lycées d'Auvergne - Rhône-Alpes
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Par l'équipe Avicenn - Dernière modification le 22 décembre 2020
Des nanoparticules d'argent dans les lycées d'Auvergne-Rhône-Alpes ?
Le 6 novembre dernier, Avicenn lisait - et relayait - l'information sur le site de l'École centrale de Lyon selon laquelle le Conseil régional Auvergne Rhône-Alpes souhaitait expérimenter des membranes à base de nanoparticules d'argent pour lutter contre le covid-19 dans les lycées de la région1.
Des particules d'argent oui, mais micro et testées dans deux lycées seulement
Nous avions alors contacté le conseil régional d'Auvergne Rhône-Alpes pour en savoir plus sur l'expérimentation en question (périmètre, calendrier, modalités, analyses bénéfices / risques...).
Au terme de plusieurs semaines, nous avons appris que les produits de deux sociétés étaient en cours de tests dans l'académie de Grenoble : dans un lycée, des films Luminis, dans un autre, des housses Serge Ferrari, mais dans les deux cas avec des particules "de taille supérieure à ce qui est généralement admis comme entrant dans la catégorie des nanoparticules".
En parallèle, une série d'échanges a eu lieu entre Avicenn et la société Serge Ferrari qui a bien voulu nous communiquer des éléments plus précis sur la poudre utilisée dans leur produit :
dans un premier temps, une distribution de taille des particules établie par granulométrie laser (donc peu susceptible de détecter des nanoparticules)
puis, après discussion, les résultats d'une analyse faite par microscopie électronique en transmission (MET) - une technique plus fiable pour déterminer la taille de nanoparticules - réalisée à l'Institut des Nanotechnologies de Lyon (INL) et ne trouvant pas de nanoparticules d'argent (les particules mesurées ont une taille micrométrique).
Un bel effort de transparence ; la vigilance reste de mise
Bien rares sont les entreprises qui jouent la carte de la transparence dès lors qu'on aborde la question nano ; la démarche d'ouverture de l'entreprise Serge Ferrari est à cet égard un exemple de bonne pratique qu'il serait intéressant de voir davantage mis en oeuvre.
Malgré les difficultés liées au confinement, les échanges qui ont pu avoir lieu entre associations, chercheur·es, services du conseil régional et du rectorat et entreprises, ont permis, in fine, que chacun puisse en avoir le cœur net. Rappelons en effet que, dans de nombreux cas auparavant mis en évidence par certaines associations ou la répression des fraudes, la présence de nanoparticules dans des produits a été détectée, alors même que les fabricants en ignoraient parfois la teneur nanoparticulaire, faute d'avoir fait vérifier (correctement) la granulométrie de leurs matières premières.
Pour autant, la vigilance reste de mise : étant donné leur toxicité et éco-toxicité, les particules d'argent sont en cours de classification au niveau européen, même à l'échelle non nano (risques d'allergie cutanée, d'anomalies génétiques, de toxicité pour la reproduction et pour la faune aquatique)2. La société Serge Ferrari nous a dit suivre avec attention les publications scientifiques sur le sujet et les évolutions de la réglementation ; avoir fait valider que les produits n’entrainent pas d’irritation de la peau via une série d’essais suivant la norme OCDE TG 439 ; et s'investir sur les technologies de recyclage des membranes souples.
De son côté, la Région nous a appris, le 15 décembre, que les films et housses aux particules d'argent expérimentées dans deux lycées ne seraient pas généralisés : en phase de déploiement, il leur a été privilégié des purificateurs d’air basés sur une technique de filtration HEPA.
Le Groupe de travail pérenne "Nanomatériaux et santé" de l'ANSES (2012 - 2015)
Le Groupe de travail pérenne "Nanomatériaux et santé" de l'ANSES (2012 - 2015)
par MD - Dernière modification mars 2016
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Le Groupe de travail pérenne "Nanomatériaux et santé" ("GT pérenne nano") était issu d'une autosaisine de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES).
Il avait pour mission d'encourager ou de conduire des travaux scientifiques d'évaluation des risques associés aux nanomatériaux.
Résultats attendus
réaliser chaque année une synthèse de l'état des connaissances relatives à l'évaluation des risques sanitaires et environnementaux associés aux nanomatériaux manufacturés pour l'ensemble de leurs usages (le premier (et finalement unique) rapport annuel attendu pour l'automne 2013 a été publié en mai 2014)
Alan Sanh, ANSM, Toxicologie Nanoproduits de santé
Anne Van der Meeren, CEA, Biologie cellulaire
Agenda
Il s'est réuni :
le 9 juillet 2012 ; les 13 et 14 septembre 2012 ; le 19 novembre 2012
plusieurs fois en 2013, 2014, 2015
Arrivé au terme de son mandat en 2015, il n'a pas été renouvelé, contrairement à ce qui avait été initialement prévu par l'ANSES (cf. son rapport de 2014 : "l'Agence a installé, le 9 juillet 2012, un groupe de travail (GT) pérenne « Nanomatériaux et santé - alimentation, environnement, travail » (il a vocation à être renouvelé tous les 3 ans)", page 25).
L'essentiel pour savoir... et pour agir, dans notre 2 pages d'informations, diffusé auprès des professionnels de santé
Par l'équipe Avicenn - Mise en ligne 21 mai 2019
Avicenn est sollicitée depuis plusieurs années par des organismes de formation des médecins, médecins du travail, infirmiers pour faire le point sur les impacts sanitaires et environnementaux des "nanos".
Avicenn engage en 2019 une information spécifique pour les professionnels de santé : sur la ville de Paris, avec le soutien de la Mairie de Paris, un réseau de médecins, dentistes et tous professionnels de santé est destinataire de cette fiche de deux pages, téléchargeable en cliquant ici et accompagnée de bandes dessinées à afficher à l'attention de leur patientèle :
Vous êtes professionnel de santé sur Paris ? Vous souhaitez relayer l'information ?
Vous pouvez demander votre kit d'information auprès de contact@avicenn.fr
Pour en savoir plus, consulter notre rubrique Nanomatériaux et santé
Les nanos dans le Plan "Mon Environnement, Ma santé" (PNSE 4 : 2020-2024)
Les nanos dans le Plan "Mon Environnement, Ma santé" (PNSE 4 : 2020-2024)
Par l'équipe Avicenn - Dernière modification décembre 2020
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Le PNSE 4
Le Plan national santé environnement vise à répondre aux interrogations des Français sur les conséquences sanitaires à court et moyen terme de l'exposition à certaines pollutions de leur environnement.
Le projet de PNSE 4 (2020-2024) vient d'être dévoilé par les ministères des Solidarités et de la santé et de la Transition écologique. Les travaux d'élaboration de ce plan avaient été lancés le 21 mars 2019, pour une sortie officielle initialement attendue pour début 2020 mais repoussée du fait de la crise sanitaire liée au covid-19. Il était soumis à consultation jusqu'au 9 décembre.
Les mesures nanos du projet de PNSE 4 (octobre - décembre 2020)
L'action 12 du projet de PNSE4 rendu public fin octobre 2020 vise à "mieux gérer les risques associés aux nanomatériaux dans un contexte d’incertitude" :
1ère partie : "Améliorer la connaissance sur l’usage des nanomatériaux", via, entre autres, l'amélioration de la qualité des données déclarées dans le registre R-Nano et l'optimisation de l'accès aux données du registre par des organismes scientifiques ou d'expertise (HCSP notamment)
3e partie : "Encadrer les nanomatériaux qui ne présentent pas une utilité forte et qui peuvent présenter des risques", avec, notamment, un recensement de l’usage des nanomatériaux présent notamment dans les cosmétiques, jouets et textiles et, le cas échéant, une réglementation par l’État des usages pour lesquels des risques potentiels existent.
Les mesures proposées rejoignent en grande partie les 20 propositions de la société civile compilées par Avicenn pour son audition en juin 2019.
Avicenn a répondu à la consultation le 9 décembre, avec une contribution1 postée sur le site dédié.
La version finale ne sera pas publiée avant plusieurs semaines.
A suivre donc !
LETTRE OUVERTE A L'ATTENTION DU PREMIER MINISTRE EDOUARD PHILIPPE,
ET DES MINISTRES AGNES BUZYN, NICOLAS HULOT, BRUNO LEMAIRE, MURIEL PÉNICAUD,
STEPHANE TRAVERT et FRÉDÉRIQUE VIDAL
Paris, le 12 juillet 2017
Étiquetage et restriction des nanomatériaux dans les produits de consommation
après la discussion, place à l'action !
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et messieurs les Ministres,
Alors que les industriels viennent de réclamer à l'Etat un milliard d'euros publics pour les nanotechnologies afin de faire suite au plan « Nano 2017 » [1], nous, associations participant au groupe de travail (GT) « étiquetage et restriction des nanomatériaux » piloté par le ministère de l'environnement [2] avons jugé utile de vous faire part de nos propositions en termes de prévention et précaution autour des nanotechnologies. Cela fait en effet bientôt deux ans qu'a eu lieu la première réunion de ce GT et une dizaine d'années que plusieurs d'entre nous formulons, sur la base de considérations scientifiques, des recommandations concernant l'étiquetage et la restriction des nanomatériaux dans les produits de consommation sans résultat tangible à ce jour, ni signal clair d'une volonté de prendre des mesures concrètes à court terme.
Pourtant nous sommes tous exposés, le plus souvent sans le savoir, à toutes sortes de nanomatériaux présents dans des produits de beauté, vêtements, aliments, médicaments, détergents, etc. Chaque année en France, près de 500 000 tonnes de nanomatériaux sont importées ou fabriquées sur le sol national (un chiffre officiel bien en deçà de la réalité [3]). Or ces matériaux extrêmement petits, réactifs et largement utilisés présentent des risques pour la santé et pour l'environnement [4] qui suscitent des inquiétudes très fortes. Les alertes sanitaires mises en évidence depuis plus d'une dizaine d'années se confirment. L'INRA et l'ANSES viennent notamment de confirmer le soupçon de cancérogénicité des nanoparticules de dioxyde de titane contenues dans de nombreux aliments, médicaments et dentifrices [5].
Nos organisations ont souligné les questions, inquiétudes et problèmes posés par cet état de fait et proposé des solutions au sein de ce groupe de travail, mais également au sein d'autres groupes et comités ou par écrit [6]. Cela n'a de sens, au-delà de la richesse des échanges et des regards croisés entre « experts » et société civile, que si, intégrant tout ou partie de ces réflexions, le décideur s'en empare et... décide ! Trois mesures concrètes à prendre de toute urgence sont listées en annexe 3 : 1 ) interdire temporairement les nanoparticules de dioxyde de titane susceptibles d'être ingérées, 2 ) mieux informer les consommateurs et enfin 3 ) assurer une vraie traçabilité des nanomatériaux et des produits qui en contiennent.
La mise en place d'une « stratégie nationale sur les nanomatériaux » est indispensable. Si la recherche d'un consensus est louable, l'ériger en principe conduit à ne rien faire... et donc à favoriser la position d'un groupe d'acteurs minoritaires, les fabricants de nanomatériaux, au détriment de la protection de la santé humaine et des écosystèmes. Sur le sujet controversé des nanomatériaux, à l'instar des débats autour des perturbateurs endocriniens et des pesticides, l'unanimité est en effet impossible. Les récentes propositions du Medef sont, de ce point de vue, édifiantes : ne rien initier ou ne réagir qu'en cas de « crise sanitaire avérée ». Très a posteriori donc et en totale contradiction avec le principe de précaution inscrit dans notre Constitution et qui s'applique pourtant par définition en cas d'incertitude.
Comptant sur la volonté politique de l'exécutif en matière de protection de la santé et de l'environnement, nous vous prions d'agréer, Monsieur le Premier ministre et mesdames et messieurs les Ministres, l'expression de nos salutations les plus respectueuses.
David Azoulay (CIEL), Philippe Bourlitio (AVICENN), Michel Dubromel (FNE), Jean-Marc Harmand (ORGECO 54 - FDF), Stéphen Kerckhove (APE), Véronique Moreira (WECF), François Mourgues (C2DS) et Aline Read (CIEAS)
Annexes à la lettre ouverte
Annexe 1 - Fonctions des signataires de la lettre
David Azoulay, directeur du programme Santé environnementale du Center for International Environmental Law (CIEL)
Philippe Bourlitio, président de l'Association de veille et d'information civique sur les enjeux des nanosciences et des nanotechnologies (AVICENN)
Michel Dubromel, président de France Nature Environnement (FNE)
Jean-Marc Harmand, président de l'Organisation générale des consommateurs de Meurthe-et-Moselle, Familles de France (ORGECO 54 - FDF)
Stéphen Kerckhove, délégué général d'Agir pour l'Environnement (APE)
Véronique Moreira, présidente de Women Engage for a Common Future France (WECF France)
François Mourgues, président du Comité pour le Développement Durable en Santé (C2DS)
Aline Read, présidente du Centre d'Information sur l'Environnement et d'Action pour la Santé (CIEAS) Annexe 2 - Détail des mesures concrètes qui doivent être prises sans plus tarder :
1. Interdire temporairement les nanoparticules de dioxyde de titane présentes dans le colorant E171 utilisé dans des confiseries, biscuits, sauces, plats préparés, médicaments et dentifrices. Cette mesure doit être prise de façon urgente, le temps de mettre sur pied une procédure plus générale d'autorisation de mise sur le marché des nanomatériaux en France*.
L'INRA a en effet récemment démontré que le colorant E171, qui contient des nanoparticules, peut entraîner des perturbations immunitaires, des inflammations et des lésions précancéreuses chez les rats. L'ANSES, confirmant la rigueur de cette publication et la valeur des résultats, a rappelé « sa recommandation de limiter l'exposition des salariés, des consommateurs et de l'environnement, notamment en favorisant les produits sûrs, dépourvus de nanomatériaux » [5].
Aussi, en attendant la publication des résultats du groupe de travail « nano et alimentation » tout juste mis en place par l'ANSES sur le sujet et qui ne débouchera pas avant 2018, cette interdiction provisoire constituera une « mesure proportionnée » en phase avec le principe de précaution afin de protéger au plus vite la population, tout particulièrement les enfants et les personnes malades, qui n'ont pas à jouer le rôle de rats de laboratoires en attendant la confirmation des résultats déjà convergents et alarmants.
L'opportunité de lever ou de poursuivre cette interdiction sera ré-évalué(e) en fonction des données obtenues par le GT nano et alimentation de l'ANSES à l'issue de son travail.
* Une procédure d'autorisation de mise sur le marché des nanomatériaux permettra plus généralement à terme que les nanomatériaux ne soient plus utilisés à grande échelle dans de nombreux biens de consommation courante en contact direct avec le corps humain, sans que les conditions sérieuses d'évaluation, de régulation et d'information n'aient été réunies.
Une fois la procédure d'autorisation de mise sur le marché opérationnelle, toute mise en oeuvre de nanoparticules / nanomatériaux devra faire l'objet d'une demande et de justifications précises : intérêt économique, intérêt technique ou technologique, intérêt sociétal (utile / futile), risques sanitaires, environnementaux, éthiques, analyse bénéfices-risques...
Une telle approche présente l'avantage évident d'encadrer la commercialisation des nanomatériaux et produits qui en contiennent, de limiter les risques et d'éviter des restrictions d'usages a posteriori.
Elle renforcera en outre la « marque France » non seulement auprès des consommateurs français mais aussi à l'export, car elle sera une garantie inédite d'un point de vue de la sécurité nano.
2. L'information des consommateurs :
L'étiquetage [nano] obligatoire des biens de consommation qui contiennent des nanoparticules manufacturées est une première étape, nécessaire mais pas suffisante pour assurer le « droit de savoir » des citoyens.
L'obligation d'étiquetage existe au niveau européen pour les produits alimentaires, biocides et cosmétiques depuis plusieurs années mais elle est très inégalement appliquée. Aussi demandons-nous à la DGCCRF un meilleur contrôle de l'application de l'obligation européenne d'étiquetage et la publication des résultats des tests attendus depuis fin 2016 / début 2017.
Nous demandons également un élargissement de l'étiquetage [nano] aux autres biens de consommation en France, mesure qu'il s'agira de promouvoir également au niveau européen par la suite. Cet étiquetage est demandé en vain depuis plus d'une dizaine d'années maintenant par la société civile et les agences sanitaires [7]. De leur côté, des fédérations industrielles ont validé une norme ISO pour un étiquetage volontaire [8] - qu'aucune entreprise n'a jamais appliqué. Il est temps de passer des incantations à l'action.
Cet étiquetage doit être accompagné de mesures d'information complémentaires, avec notamment le renvoi au site https://www.r-nano.fr enrichi d'une nouvelle rubrique « accès grand public », sur laquelle devront être présentés à terme, pour chaque produit, un tableau avec des pictogrammes synthétisant l'exposition pour les travailleurs, les consommateurs et l'environnement, ainsi que les risques toxiques et écotoxiques [9] et les précautions d'usage.
3. Assurer une vraie traçabilité des nanomatériaux et des produits qui en contiennent, en améliorant les fonctionnalités et l'accessibilité du registre français des nanomatériaux R-nano [10] :
Les travaux du groupe de travail R-nano ont été ralentis depuis la consultation européenne de 2014 sur les mesures de « transparence » autour des nanomatériaux : la perspective (bien que peu probable) qu'un registre européen soit mis en place par la Commission européenne a freiné les réflexions en vue d'améliorer le registre français. En 2016, la Commission a cependant rejeté la création d'un tel registre européen. Il est donc temps de procéder aux améliorations du registre R-nano, pour mieux tirer profit de cet outil français qui a le mérite d'exister mais demeure très difficilement exploitable en l'état.
Des modifications relativement simples de l'outil R-nano permettront d'obtenir la traçabilité de chaque substance déclarée, tout au long de la chaîne de transformation jusqu'aux produits finis (ce qui n'est malheureusement pas le cas aujourd'hui [11]) ainsi que le nombre de travailleurs concernés, sans lesquelles les actions de prévention et les mesures de précaution, bien qu'indispensables, ne peuvent être prises.
Ces chantiers urgents prolongent les orientations du PNSE3 et du PST3 et doivent permettre d'abonder une « stratégie nationale sur les nanomatériaux » et de réactiver la dynamique interministérielle observée autour du débat public national nano de 2009-2010, mais perdue depuis [12]. Outre les ministères déjà ouvertement impliqués dans le dialogue avec la société civile sur le dossier « nano » (ministères de l'environnement, de la santé, de l'alimentation, de la consommation), nous souhaitons que les ministères du travail, de l'économie, de la recherche s'impliquent davantage dans les discussions auxquelles nous participons. Une « task force nano » doit être remise sur pied et dotée d'un interlocuteur dédié pour dialoguer avec nos organisations.
La France n'a pas attendu l'Europe pour créer le registre r-nano et cette décision pionnière a motivé d'autres pays européens à faire de même. Il est urgent, sur ce dossier sensible et complexe des nanos, de séparer le bon grain de l'ivraie, de faire preuve de transparence et de prendre les décisions de restriction qui s'imposent. Plus largement, il est urgent, y compris pour reconstruire la confiance des citoyens en l'expert et le décideur, de conjuguer précaution et prévention !
Nous restons bien entendu à votre disposition pour toutes précisions sur l'un ou l'autre de ces sujets. Nous considérons, après plusieurs années d'échanges sur toutes ces questions, que l'heure est bien à prendre des décisions qui servent l'intérêt général et qui vont dans le sens de la protection de la santé humaine et de celle de l'environnement.
[2] Le groupe de travail « étiquetage et restriction des nanomatériaux » a été constitué en 2015 dans le cadre du Plan National Santé Environnement 3 ; il a été réuni cinq fois depuis 2015 par le ministère de l'environnement Cf. http://veillenanos.fr/...GtEtiqRestricNano
[6] Cf. Les « Onze propositions de la société civile » compilées dans le cadre du groupe de travail national [voir ci-dessus, point 2]
[7] Cf. page 3 du document « Onze propositions de la société civile » compilées dans le cadre du groupe de travail national mentionné ci-dessus
[8] Cf. Norme XP CEN ISO/TS 13830 - Nanotechnologies - Lignes directrices pour l'étiquetage volontaire des produits de consommation contenant des nano-objets manufacturés, février 2014
[11] Cette recommandation a été également formulée par le feu « GT pérenne nano » de l'ANSES en 2015 : « Le GT estime que cette traçabilité [de la substance tout au long de la chaîne menant à sa commercialisation finale grâce au numéro de déclaration] qui est une information précieuse devrait être possible à obtenir, alors qu'aujourd'hui elle s'arrête au 5ème rang (saisie unique) sans nécessairement atteindre le stade du produit fini ».
Le Monde, 25 août 2017 : "Huit associations ont adressé, le 17 juillet dernier, une lettre ouverte au gouvernement français demandant « la mise en place urgente de mesures de précaution », avec notamment l'interdiction temporaire des nanoparticules présentes dans le colorant E171"
Lettre VeilleNanos n°017 - Version mise en ligne le 11 mai 2017 - Lire en ligne
Par MD et l'équipe AVICENN
Edito
La lettre VeilleNanos évolue*, au gré des priorités de notre association Avicenn qui a beaucoup diversifié et développé ses activités des derniers mois. Nous avons ainsi accru notre présence sur les réseaux sociaux, via nos comptes twitter, facebook, scoopit. En 2016, la parution et la diffusion de notre livre ont également mobilisé une grande part de notre énergie, avec plus d'interventions en régions en appui à des acteurs relais (notamment les ONG) ou pour les médias.
Veillenanos a, de fait, acquis une notoriété et visibilité accrues, de nouveaux acteurs sont devenus membres associés pour mutualiser et enrichir la veille et soutenir nos efforts vers une plus grande transparence et vigilance nano.
Notre veille d'information citoyenne relaie les recommandations et questions de la société civile et nous essayons d'en tracer les impacts sur les politiques publiques et les stratégies industrielles ; ce numéro propose un éclairage détaillé sur le dossier nano et alimentation, dont les tenants et les aboutissants sont importants : il connaît une forte médiatisation depuis un an, notamment en ce qui concerne les nanoparticules contenues dans les confiseries.
Pour autant, les nanoparticules utilisées dans les bonbons ne doivent pas faire oublier les nombreux autres nano-objets qui nous entourent. Lors du débat national de 2009-2010, il avait été question des dérives liées à la multiplication des nano-objets dans toutes sortes de produits (alimentaires mais aussi textiles, cosmétiques, produits d'entretien, phytosanitaires et vétérinaires, peintures, médicaments... sans oublier les objets "high tech" vantés comme "smart" ou "intelligents"). Aujourd'hui, cette préoccupation remonte jusqu'à la Commission européenne : le document Support for 3rd regulatory review on nanomaterials, rendu public en mars dernier, pointe avec justesse qu'en sus des nanomatériaux et nanoparticules au sens strict, il ne faut pas négliger les matériaux dits "avancés" qui déploient aussi pour beaucoup des propriétés spécifiques à l'échelle nano (céramiques & polymères "de pointe", renforcés par des biofibres et/ou des nanocharges, matériaux composites "intelligents", matériaux bio-actifs, nanocapteurs, etc.), qui ne font pas l'objet d'un encadrement spécifique.
Leur essor entraîne des risques trop peu encadrés à ce jour, au motif que les intérêts industriels et commerciaux doivent être préservés. Cet état de fait a contribué à accroître la crise de confiance des citoyens vis-à-vis des acteurs industriels et des institutions publiques, notamment européennes.
Or nul ne peut plus aujourd'hui ignorer à quel point cette défiance citoyenne et ces défaillances dans la protection des populations et des écosystèmes sont dommageables pour l'avenir - non seulement environnemental et sanitaire mais aussi démocratique - de notre pays et de l'Europe !
En 2013, nous publiions notre dossier "Nano et alimentation", socle documentaire mis à jour au fil de l'eau depuis, en support à la veille et à l'information d'associations, de certaines administrations et même d'industriels.
Ce dossier s'est vu largement étoffé depuis juin dernier, suite au lancement de la campagne de l'association Agir pour l'Environnement (APE). Cette dernière, après avoir adhéré comme membre associé à Avicenn, avait en effet révélé l'année dernière la présence de nanoparticules de dioxyde de titane et de silice dans quatre produits alimentaires grand public, mais sans la mention [nano] sur leur étiquette pourtant requise par la réglementation). Nous avions relayé cette information dans notre précédente lettre et la campagne d'APE avait reçu une forte couverture médiatique1.
Le dossier "nanoparticules et alimentation" a continué de connaître de nombreux rebondissements et pris une ampleur inégalée ; la montée en puissance de la mobilisation des associations, les alertes scientifiques et la médiatisation de ce dossier ont conduit le secteur alimentaire et les décideurs politiques à se pencher plus sérieusement sur le dossier.
Retour sur les nombreux épisodes qu'a connu ce feuilleton depuis l'été dernier :
Septembre 2016 : l'autorisation du E171 est renouvelée
En septembre 2016, l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a validé la prolongation de l'autorisation de l'additif alimentaire E171.
Le E171 est un colorant très courant de dioxyde de titane, pour partie d'échelle nanoparticulaire2.
L'EFSA a considéré que la littérature scientifique ne mettait pas en évidence de problèmes de santé pour les consommateurs (elle a néanmoins recommandé de nouvelles études sur les effets possibles sur le système reproducteur).
Avicenn a sollicité différents experts pour avoir leur avis sur cette interprétation. Les réponses que nous avons obtenues insistaient toutes sur le très faible nombre d'études menées à ce jour sur le E171 dans des conditions réalistes d'exposition. Autrement dit, l'EFSA a ainsi donné son feu vert à la poursuite de l'utilisation d'un additif très répandu, sans procéder à des tests ni disposer d'études suffisamment nombreuses et solides pour permettre d'évaluer les effets réels de notre consommation cumulée (au quotidien et tout au long de la vie, via les différentes catégories de produits qui en contiennent : aliments, mais aussi médicaments et dentifrices pour ce qui concerne la seule voie orale).
Septembre 2016 - Janvier 2017 : Les associations montent au créneau contre l'utilisation de nanoparticules dans l'alimentation
Pour la troisième réunion du Groupe de travail étiquetage / restriction nano (piloté par le ministère de l'écologie) qui s'est tenue fin septembre, Avicenn a compilé onze mesures demandées par ses membres associés et d'autres acteurs de la société civile ou membres d'instances d'évaluation et de gestion des risques. Parmi ces mesures, figure l'interdiction temporaire dans l'alimentation, les médicaments et les dentifrices des additifs contenant des nanomatériaux dont l'innocuité est sujette à caution (E171 en priorité), afin de remédier au laxisme de l'EFSA - l'idée étant de procéder à un bilan / évaluation après la remise des résultats des travaux du groupe de travail « nano et alimentation » de l'ANSES (cf. infra), pour reconduction (ou non) de l'interdiction.
Début octobre 2016, une dizaine d'associations réunies pour une rencontre interassociative nano à Lille ont toutes exprimé leurs inquiétudes face à l'utilisation de nanoparticules dans l'alimentation : parmi elles, France Nature Environnement, le Comité pour le développement durable en santé (C2DS), Agir pour l'Environnement, la CLCV et le WECF notamment ont de nouveau unanimement dénoncé l'utilisation des nanoparticules dans l'alimentation malgré les doutes sur leur innocuité : ce qui n'a pas d'intérêt nutritif mais est susceptible de nuire à notre santé doit tout simplement supprimé des aliments.
Au moment d'Halloween en octobre, Agir pour l'Environnement a alerté sur la présence généralisée de l'additif E171 (dioxyde de titane) dans les confiseries3.
L'association a fait tester des bonbons "Têtes brûlées" (goût framboise) et des chewing-gums NEW'R de Leclerc ; les résultats publiés en janvier 20174 ont montré, une fois de plus, la présence (non étiquetée) de nanoparticules de dioxyde de titane dans ces produits !
Forts de ces tests confirmant que l'obligation d'étiquetage n'est pas appliquée, des membres d'APE munis de banderoles ont apporté à Bercy un caddie rempli de 200 produits alimentaires susceptibles de contenir des nanoparticules (bonbons, chewing-gums, soupes, mélanges d'épices...) et ont fait remettre une lettre à la Secrétaire d'Etat au commerce et à la consommation réitérant leur demande que soient retirés du marché les produits testés (dont les quatre testés six mois plus tôt, toujours en vente et toujours pas étiquetés [nano]). Cet épisode a lui aussi été largement relayé dans les médias5.
Janvier 2017 : Des risques de lésions précancéreuses selon l'INRA
Hasard du calendrier, le lendemain, vendredi 20 janvier 2017, était publiée une étude de l'INRA sur le E171 aux résultats très préoccupants6 : administré à des rats, l'additif (et particulièrement sa fraction nanométrique) induit en effet un affaiblissement immunitaire au niveau de l'intestin, une prédisposition à l'inflammation dans le reste de l'organisme et des lésions précancéreuses au niveau du côlon des rongeurs ! Ces résultats viennent préciser des inquiétudes fortes déjà documentées scientifiquement. Les scientifiques de l'INRA ont néanmoins refusé de se prononcer sur la généralisation de leurs résultats à l'homme, réitérant un refrain répété en vain depuis des années : "il faudrait mener davantage d'études pour en savoir plus". Pour autant, l'absence de certitudes sur les risques pour les humains ne doit pas être assimilée à l'absence de risques !
(En photo à droite, les deux co-auteurs de l'étude, Eric Houdeau et Fabrice Pierre, INRA)
Les pouvoirs publics entre agitation et lenteur
- Quelles mesures pour minimiser les risques ?
Prévenu à l'avance de la parution de cette étude, le gouvernement a immédiatement saisi l'agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) afin qu'elle le renseigne davantage sur la dangerosité du E171 pour les consommateurs. Dans son avis rendu début avril 20177, l'ANSES a confirmé que les soupçons mis en évidence sont à prendre au sérieux et qu'il est nécessaire de réaliser d'autres études sur les effets sanitaires de l'ingestion de l'additif alimentaire E171.
Le contraire aurait été étonnant : l'Anses avait en effet proposé en 2016 de classer le dioxyde de titane en tant que substance cancérogène de catégorie 1B8 ("c'est pas une très bonne note" ainsi que le précise Sarah Grosjean, alias Jackie Poulard dans la websérie Cobayes Squad de Générations Cobayes...) Les ministères à l'origine de la saisine (économie, santé et agriculture) n'avaient cependant pas encore réagi officiellement à l'heure de la mise en ligne de cette lettre.
L'ANSES est en train de mettre sur pied un groupe de travail plus largement dédié aux nanos dans l'alimentation, suite à une saisine de ses ministères de tutelle formalisée en octobre 2016. Les résultats de l'expertise initialement attendus pour fin 2017 ne seront pas connus avant septembre 20189.
Comment et quand l'EFSA prendra-t-elle en compte ces nouvelles données dans le cadre de sa ré-évaluation des additifs alimentaires ? Dix jours après la publication de l'INRA mentionnée plus haut, la Commission européenne a demandé à l'industrie de fournir des données complémentaires sur le E171 d'ici le 30 juillet prochain, notamment en rapport avec la distribution de la taille des particules10. Mais devant des députés européens début mai, le directeur de l'EFSA a affirmé que l'étude de l'INRA ne suffit pas, à elle seule, à revenir sur l'autorisation renouvelée par son agence en septembre dernier, et que... oui, vous l'avez deviné, "de nouvelles données sont nécessaires" !
- Et concernant l'étiquetage [nano] ?
La nécessité de mieux contrôler l'application de l'obligation européenne d'étiquetage et de la renforcer au niveau français a été soulignée par Avicenn dans le cadre du Groupe de travail étiquetage / restriction nano piloté par le ministère de l'écologie ; elle figure en tête des onze mesures qu'Avicenn a compilées en 2016 pour ce groupe de travail.
En novembre 2016, nous avons appris11 que la DGCCRF a lancé des contrôles pour vérifier l'étiquetage de produits suspectés contenir des nanomatériaux ; les résultats devaient être publiés début 2017, mais, selon nos informations, prennent plus de temps qu'escompté.
Mi-février 2017, la ministre de l'environnement, Ségolène Royal, a tweeté qu'elle allait signer un arrêté sur l'étiquetage des nanomatériaux dans les produits alimentaires12 ; soumis à la co-signature d'autres ministères, cet arrêté a été signé juste avant le deuxième tour de l'élection présidentielle et a été publié le 10 mai au Journal officiel13. Aux yeux d'Agir pour l'Environnement, le nouvel arrêté du 5 mai 2017 est au mieux un "rappel à la loi, au pire (un moyen de) gagner du temps à défaut d'agir réellement et sérieusement !". Dans sa version finale, il est vrai que cet arrêté n'apporte rien de nouveau. Mais selon nos informations, une version initiale plus ambitieuse avait été proposée par Ségolène Royal, mais elle a été retoquée en interministériel (deux autres ministères sont cosignataires : le ministère de l'économie et des finances, ainsi que le ministère des affaires sociales et de la santé).
A tout le moins, cet épisode permet de rappeler une nouvelle fois que l'obligation d'étiquetage existe au niveau européen depuis décembre 2014. Elle a été trop longtemps passée sous silence par les fournisseurs et lobbys, et méconnue par d'autres, comme en atteste le communiqué de l'INRA de janvier 2017 qui indiquait malencontreusement que "le E171 n'est pas soumis à l'étiquetage « nanomatériau »". Avicenn en avait informé les auteurs, mais ce message ayant malheureusement été largement relayé14, nous avions demandé à la DGCCRF de rappeler officiellement l'obligation d'étiquetage : notre requête avait abouti à la publication du communiqué "Produits alimentaires : étiquetage obligatoire pour les nanomatériaux manufacturés" le 24 février 2017 sur le portail du ministère de l'économie.
Rappelons ici que fin 2013, l'étiquetage des nano-objets avait également fait l'objet d'une "norme expérimentale XP CEN ISO/TS 13830" approuvée par des industriels, qui se sont bien gardés de se l'appliquer depuis15. Contrairement à ce qui a pu être affirmé selon certains fournisseurs et fédérations industrielles16, il n'y a pas à ce jour de seuil minimum de 50% requis pour l'obligation d'étiquetage des nanomatériaux dans l'alimentation : c'est le Règlement INCO n°1169/2011 qui impose l'obligation d'étiquetage et c'est sa définition du terme "nanomatériau" (sans seuil !) qui s'impose (coupée-collée dans le Règlement Novel Food n°2015/2283), pas celle de la "recommandation" de la Commission de 2011 (qui n'a pas valeur de règlement).
L'argument souvent entendu dans la bouche des acteurs de l'agroalimentaire, "si c'est blanc, c'est pas nano" n'est pas non plus exact : ainsi que nous l'avions pointé dans notre lettre VeilleNanos de juillet 2015, le dioxyde de titane, même blanc, contient une forte proportion de nanoparticules.
A cela s'ajoute l'usage du E171 pour donner un aspect brillant ou vernis aux produits : dans ce cas, la proportion de particules inférieures à 100 nm peut largement excéder les 50% et même monter jusqu'à 100%, comme en attestent des mesures réalisées par le laboratoire national de métrologie et d'essais (LNE) sur les bonbons Têtes Brûlées4 et d'autres produits !
Mais revenons aux risques : suite aux alertes récapitulées plus haut, de plus en plus de voix se font entendre pour condamner les lenteurs de l'appareil administratif : attendre encore et encore d'hypothétiques futures études plus concluantes revient à perpétuer l'inaction à l'oeuvre depuis trop de temps maintenant. Faute de déclinaison concrète et rapide du principe de précaution, c'est la population qui joue le rôle de rats de laboratoires, dans une expérience grandeur nature dont les conclusions risquent de ne pouvoir être tirées que trop tard, comme dans tant d'autres scandales sanitaires. Face à cette situation néfaste pour l'environnement et la santé publique, les associations se mobilisent.
L'été dernier, Agir pour l'Environnement (APE) avait lancé une pétition "Stop aux nanoparticules dans nos assiettes !" ; toujours en ligne, elle a recueilli plus de 48 000 signatures, en écho aux demandes de restriction déjà formulées par la société civile mais aussi de scientifiques et agences sanitaires depuis plusieurs années maintenant17. Des députés européens18 et plusieurs candidats à la présidentielle19 sont récemment venus les appuyer.
L'association APE a également mis en ligne mi-mars 2017 le site http://www.infonano.org qui répertorie fin avril déjà plus de 300 produits alimentaires suspectés de contenir des nanoparticules de dioxyde de titane (E171) et silice (E551)*. Autant de produits qui viennent s'ajouter aux 128 produits alimentaires déjà listés par la "Nanodatabase" danoise (qui recense au total 3000 produits, toutes catégories confondues).
* Pourquoi aussi le E551 ? Non seulement car il s'agit d'un additif très communément utilisé comme anti-agglomérant (dans le sel et préparations alimentaires en poudre), composé quasi à 100% de nanoparticules, mais aussi parce que des études, jusqu'à présent moins nombreuses et/ou (un peu) moins alarmantes que pour le E171, sont venues renforcer les suspicions sur cet additif20.
La revue Que Choisir a quant à elle dénombré 4 000 médicaments mis sur le marché en France contenant du E17121 ! Doliprane, Dafalgan, Efferalgan et les génériques de paracétamol, Advil et les génériques d'ibuprofène, Spasfon, Augmentin et génériques d'amoxicilline, Tahor et Crestor (statines), antidiabétiques, médicaments contre les ulcères et le reflux gastro-sophagien, antihypertenseurs, etc.
Générations Cobayes a choisi de traiter le sujet sur le mode de l'humour, avec le youtubeur Max Bird dans son épisode 6 de la série déjantée "Cobayes Squad" sur les additifs alimentaires, mis en ligne fin mars.
Début avril, France Nature Environnement a également consacré le quatrième volet de ses "dix propositions pour la France" aux perturbateurs endocriniens et aux nanoparticules : "Un affichage clair est nécessaire pour sensibiliser les consommateurs, et à terme inciter l'industrie à se passer de ces molécules. Il est temps d'agir afin de prévenir les risques et limiter l'exposition, en particulier celle des populations sensibles, femmes enceintes, nourrissons et jeunes enfants"22.
Et Agir pour l'Environnement a haussé le ton mi-avril : "L'inaction du gouvernement engage désormais sa responsabilité pénale"23.
Olivier Toma, fondateur de l'agence Primum non nocere®, est lui aussi en colère et reproche aux autorités de ne pas remplir leur devoir. "Comme pour les phtalates, comme pour le bisphénol A, comme pour les pesticides de toutes sortes" il ne faut pas attendre "les catastrophes à venir pour (...) nous débarrasse(r) des nanoparticules et de leurs méfaits". (...) "En attendant et en respect absolu du principe de précaution inscrit dans la constitution de notre pays, nous appelons les praticiens, pharmaciens et établissements de santé à prescrire ou délivrer des médicaments sans nanoparticules aux femmes enceintes et aux jeunes parents et à proscrire les bonbons et aliments industriels qui contiennent du E171"24.
Le principe de précaution ? Bien qu'il soit inscrit dans notre Constitution, il est, si tôt évoqué, balayé d'un revers de main, au nom du principe de libre circulation des biens et des marchandises ! C'est ce dernier qui fait obstacle à la mise en place des onze mesures demandées par la société civile et les agences environnementales et sanitaires et que nous tentons de faire avancer dans le cadre du Groupe de travail étiquetage / restriction nano piloté par le ministère de l'écologie.
Le livre de Corinne Lepage et Dominique Bourg, Le choix du pire, de la planète aux urnes, paru en février 2017, résume bien la situation : "En fait, le vrai sujet n'est pas le principe de précaution, mais la responsabilité, responsabilité au sens le plus large du terme, c'est-à-dire le fait d'assumer les conséquences de ses choix. Or, avec les nouvelles technologies, qu'il s'agisse des OGM ou des nanotechnologies, à un certain seuil, la dissémination rend impossible la recherche des responsabilités. L'objectif des industriels est de faire traîner les choses en longueur jusqu'à ce que ce seuil soit atteint. Or ce stade me semble atteint aujourd'hui. Les nanotechnologies sont très largement utilisées sans aucun contrôle. Nous vivons dans un système dans lequel le monde industriel invente les règles de son irresponsabilité. On est parvenu à vider la précaution de son contenu et à en faire un principe purement virtuel en faisant croire, comble de l'hypocrisie, qu'il est un obstacle au développement".
Heureusement, malgré le lobbying intense déployé par les fédérations de l'agroalimentaire et de la chimie, les marques, en contact plus direct avec les consommateurs, commencent à adapter leurs pratiques.
Le marché évolue
Plusieurs raisons pouvaient expliquer le silence des marques jusqu'à l'année dernière : réticence par peur de voir les consommateurs se détourner de leurs produits, ignorance (réelle pour certains, feinte pour d'autres), informations incomplètes ou erronées voire déni de la part de leurs fournisseurs et/ou de leur branche professionnelle25.
Société civile, médias et scientifiques ont un rôle important à jouer pour faire évoluer les choses dans le bon sens. Car la population et l'environnement méritent mieux que cela. Les personnes impactées ont le droit de savoir, les fabricants et distributeurs ont le devoir de précaution.
A retenir dans le reste de l'actu nano...
Ci-dessous, une sélection des points saillants des semaines passées et à venir, en Europe et en France.
En bref, en Europe
La révision de la définition européenne du terme "nanomatériau" est annoncée comme "imminente" depuis 2014, mais cette fois-ci, la Commission promet qu'on y est "presque". La Commission annonce qu'elle vise une adoption au second semestre 2017, après une consultation publique de plusieurs semaines. Comme dans le cas des perturbateurs endocriniens, les négociations sur la nouvelle définition des nanomatériaux sont très tendues, car en fonction des critères retenus, beaucoup de matériaux pourraient être concernés ou au contraire sortir du radar des autorités. A suivre avec attention donc !
La révision des annexes de Reach, autre dossier en souffrance (depuis sept ans), devrait elle aussi progresser cet été. Mais le CASG Nano, un sous-groupe européen spécifiquement dédié aux nanomatériaux s'est vu dépossédé de ce dossier ; plusieurs représentants d'Etats membres contestaient sa gestion "peu méthodique" par la Commission. Cette dernière a décidé de traiter désormais directement avec le comité Reach et a promis de soumettre une proposition avant l'été 2017 (dans l'espoir d'être moins critiquée dans ce comité plus docile ?28). Rappelons que depuis plusieurs années, l'industrie chimique refuse de jouer le jeu de la transparence et de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) : elle multiplie les recours contre les demandes d'informations sur leurs nanomatériaux formulées par l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) ; deux ont abouti fin 2016 et début 2017 avec la victoire des fabricants qui se sont réfugiés derrière des arguments juridiques formels29. Cette bataille procédurale se fait au détriment de la protection de l'environnement et de la santé humaine, avec quelles conséquences, potentiellement "catastrophiques" en termes de défiance et de rejet de l'Europe et de ses institutions ?30.
L'Observatoire européen des nanomatériaux (EuOn) est en construction ; une première version devrait être mise en ligne pour l'été. Les internautes pourront à terme y retrouver les informations déjà disponibles ailleurs sur les nanomatériaux. Proposé par la Commission, il est censé compenser la non création du registre européen des nanomatériaux et des produits qui en contiennent demandé en vain et de longue date par de nombreux acteurs (ONG et institutions sanitaires notamment) pour combler notre manque d'information sur les produits nano sur le marché et l'absence d'étiquetage clair et systématique. Les ONG européennes mobilisées sur les nanos ont refusé de participer à son élaboration31, faute de temps, de ressources et d'avoir été entendues : les ONG considèrent en effet que cet "observatoire" est un succédané au registre européen nano tué dans l'uf, et qu'il ne sera pas à la hauteur des besoins en termes de de transparence et de vigilance autour des risques sanitaires et environnementaux associés aux nanomatériaux.
Les organisations de la société civile ont également renouvelé leurs appels à une meilleure protection de la santé humaine et de l'environnement par rapport à la dissémination des nanomatériaux et dénoncé, une fois encore, la résistance déployée depuis des années par la Commission européenne. Dans un texte publié en décembre 201632, elles ont notamment réaffirmé le besoin d'une réglementation spécifique aux nanomatériaux concrétisant réellement le principe de REACH "pas de données, pas de marché", de responsabilisation des fabricants sur l'ensemble du cycle de vie des nanomatériaux ou produits en contenant, de transparence sur les données collectées, d'étiquetage des nanomatériaux, d'études sur les impacts sanitaires, environnementaux, éthiques, légaux et sociaux des nanotechnologies, d'une bio-surveillance de l'environnement, des populations et des travailleurs et d'une gouvernance plus inclusive et participative, avec une meilleure prise en compte des recommandations des ONG.
En bref, en France
Le Groupe de travail étiquetage / restriction nano piloté par le ministère de l'écologie se réunira le 30 mai prochain, pour la cinquième fois depuis sa création ; deux réunions ont eu lieu depuis notre dernière lettre, en septembre et en novembre 2016. Avicenn y participe et a compilé onze propositions. Le MEDEF a également communiqué des propositions au ministère, sans les partager avec le reste du groupe à ce stade.
Le 4 octobre 2016 à Lille, une rencontre interassociative a réuni différents acteurs de la société civile impliqués dans le dossier nano, notamment Agir pour l'environnement (APE), le Collectif citoyen nanotechnologies du plateau de Saclay, la CFDT, CIEL la CLCV, le C2DS, France Nature Environnement (FNE), Générations Cobayes, Sciences citoyennes, Women in Europe for a common future (WECF). L'essentiel en vidéo (6 minutes) est accessible en cliquant sur la photo à droite. Le compte-rendu complet et l'intégral des vidéos des interventions sont réservés aux adhérents (en ligne ici). Quelques mois plus tard, les acteurs industriels et institutionnels ont débattu à Lille des conditions de la confiance, loin d'être réunies dans le contexte actuel.
Les observatoires régionaux des déchets auront accès aux informations du registre R-nano, pour l'exercice de leurs missions et dans la limite des informations correspondant à leur domaine d'expertise, grâce au décret n°2017-765 signé in extremis par la ministre de l'environnement Ségolène Royal le 4 mai 2017.
Nous vous invitons à consulter la "une" de notre site http://veillenanos.fr où nous compilons les actualités nano que nous n'avons pas la place ni le temps de développer dans cette lettre, et où vous trouverez également notre agenda nano régulièrement mis à jour.
Vous pouvez également suivre nos comptes twitter, facebook et scoopit !
Soutenez notre association et bénéficiez d'informations complémentaires !
Une part importante de notre attention sera consacrée dans les mois qui viennent au suivi des dossiers nano pour lesquels des évolutions fortes sont attendues en 2017, notamment les questions de définition, d'enregistrement et traçabilité (améliorations du registre R-nano en France, de l'encadrement des nanomatériaux dans REACH et mise en place de l'Observatoire européen des nanomatériaux (EuOn) au niveau européen).
Nous prévoyons d'ici fin 2017 une quinzaine d'interventions en réponse à des demandes d'acteurs régionaux en plus des réunions des groupes de travail nationaux (au ministère de l'environnement, à l'ANSES). Avicenn a ouvert une nouvelle rubrique dans laquelle elle mettra à disposition de ses adhérents et membres associés des documents ciblés, notamment des comptes rendus de ces réunions et groupes de travail nano. Avis aux intéressés : invitez votre organisation à devenir membre associé d'Avicenn pour pouvoir en bénéficier !
Et pour soutenir notre veille citoyenne, nous lançons un appel aux dons, nécessaires pour nous permettre de continuer nos activités entre deux subventions.
L'essor des nanotechnologies suscite de "maxi défis" pour notre "nano équipe" dynamique et volontaire, mais toujours précaire. Merci à ceux d'entre vous qui peuvent nous aider dans nos efforts pour assurer cette veille transversale, mutualiser et diffuser l'information, construire des ponts entre les différents acteurs afin de concrétiser la vigilance nano !
Avicenn a eu le plaisir de voir grandir le nombre de ses membres associés en 2016 et début 2017 : dix-sept organisations - très diverses - ont déjà adhéré à Avicenn en tant que membres associés ; par ordre historique d'adhésion :
1. Centre Médical Interentreprise Europe (CMIE)
2. Le Collectif citoyen Nanotechnologies du Plateau de Saclay
3. Sciences et Démocratie
4. Sciences Citoyennes
5. APAVE Sud Est
6. OFI Asset Management
7. Center for International Environmental Law (CIEL)
8. Agir pour l'Environnement (APE)
9. European Environmental Citizens' Org° for Standardisation (ECOS)
10. Générations Futures
11. Comité Départemental de Protection de la Nature et de l'Environnement du Loir et Cher (CDPNE)
12. Génération Cobayes, Non, Merci
13. Institut National de l'Environnement industriel et des risques (INERIS)
14. Laboratoire national de métrologie et d'essais (LNE)
15. Le Réseau Santé Environnement (RES)
16. ZeroWaste
17. UFC Que Choisir
Faîtes commes elles et rejoignez-nous ou, à défaut, faîtes un don !
Vos préférences pour la lettre VeilleNanos ?
*Vous souhaitez nous faire part de vos commentaires ou suggestions sur le format et/ou le contenu de la présente lettre ? Nous accueillons vos remarques à l'adresse redaction@veillenanos.fr !
Nanomatériaux et risques pour la santé et l'environnement - Soyons Vigilants !
Nanomatériaux et risques pour la santé et l'environnement - Soyons Vigilants !
Notre livre est paru aux Editions Yves Michel début 2016.
En février 2018, le 1er tirage des 4000 exemplaires avait trouvé un lecteur, un 2ème tirage a donc été effectué.
Vous pouvez l'acheter ici.
Les nanomatériaux sont devenus omniprésents dans notre vie quotidienne. Comment les repérer et quels sont leurs risques ?
Sel de table, plats préparés, dentifrice, crème solaire, pneus, électroménager, peinture, engrais et pesticides : les industriels intègrent désormais des nanomatériaux dans de nombreux produits. Or, leurs impacts sanitaires et environnementaux sont encore insuffisamment connus et des effets néfastes très préoccupants ont déjà été mis en évidence, notamment en laboratoire sur des cellules végétales, animales et humaines. Leur dissémination à large échelle est problématique. Pourtant, aucune réelle restriction n'est aujourd'hui mise en oeuvre par les pouvoirs publics qui encouragent même les industriels à accélérer leur commercialisation via des financements conséquents. Il n'y a pas de traçabilité ni d'étiquetage fiables : il est impossible d'identifier l'immense majorité des produits commercialisés contenant des nanomatériaux.
Consommateurs, pouvoirs publics, acteurs mobilisés sur les questions de santé et d'environnement, entreprises confectionnant des produits en s'approvisionnant auprès de fournisseurs extérieurs : il est urgent de s'informer et d'être vigilants !
12 x 22 cm - Collection Société civile - 7 €
Réalisé par Avicenn avec le soutien du ministère de l'Ecologie, du développement durable et de l'énergie, de la Fondation de France, du Centre Médical Inter-Entreprises Europe (CMIE) et du Conseil régional Rhône-Alpes.
Nous documenterons progressivement les questions qui nous reviennent, certaines ayant un début d'analyse sur notre site, d'autres à documenter. Pour prolonger votre lecture, faites le maximum pour rendre le sujet audible sur vos sites internet, citoyens, associatifs et professionnels, et merci de nous en faire un retour.
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout septembre 2020
Cette sélection de documents initialement compilés pour réaliser notre dossier Nano et Alimentation est périodiquement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn.
Elle est classée par type d'acteurs (recherche, industries, pouvoirs publics, ONG, ...), afin de permettre aux lecteurs de contextualiser l'information qu'il y trouvera. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant des références à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
"Ouvrir le droit à la diversité des risques en matière alimentaire et restaurer la confiance par une meilleure visibilité des risques existants", Arnaud F in Les risques invisibles, Riseo, février 2018
"Nanoparticules et barrière intestinale : comprendre les mécanismes de franchissement" : Diaporama, Carrefour de l'innovation agronomique (CIAG), novembre 2012 ; Article académique, E. Houdeau (INRA), Innovations Agronomiques, 24, 105-112, 2012
Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et Organisation mondiale de la Santé (OMS) :
projet de document présentant les initiatives et activités relatives à la gestion et à l'évaluation des risques des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture, juin 2012
- "L'alimentation à l'heure des nanos" (chapitre 2) in La NANO révolution - Comment les nanotechnologies transforment déjà notre quotidien, Azar Khalatbari, éditions Quae, septembre 2018
- "Vous reprendrez bien une cuillerée de nanoparticules ?" (chapitre 5) in La civilisation des nanoproduits, Jean-Jacques Perrier, éditions Belin, septembre 2017
- "Des nanos se cachent dans les aliments" (chapitre 2) et "Que deviennent les nanos quand nous les avalons" (chapitre 3) in Faut-il avoir peur des nanos ?, Francelyne Marano, Buchet Chastel, avril 2016
- "Etiquetage des aliments : la hantise des industriels" (chapitre 2) in Nanotoxiques, Roger Lenglet, Actes Sud, mars 2014
Industries et professionnels du domaine agro-alimentaire
Opacité généralisée sur les applications nano dans l'agro-alimentaire
A la suite de plusieurs rapports pointant l'opacité généralisée sur les applications nano dans l'agro-alimentaire1, OFI AM avait lancé deux enquêtes en 2014 et 20152 auprès des sociétés européennes du secteur agroalimentaire à propos de l’utilisation et de l'étiquetage des nanoparticules, confirmant une absence totale de transparence sur ce sujet.
Des nanoparticules détectées dans l'alimentation mais non étiquetées
Depuis lors, plusieurs enquêtes réalisées en France par des associations, des médias et les pouvoirs publics (la DGCCRF) ont mis en évidence, dans la quasi totalité des produits alimentaires testés, la présence de nanoparticules3... sans que l'étiquetage comporte de mention [nano] comme le prévoit pourtant la réglementation européenne depuis fin 20144.
Des risques non négligeables
Du côté scientifique, une étude publiée début 2017 par l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA, 1er institut de recherche agronomique en Europe) a mis en évidence les dangers d’une exposition orale aux nanoparticules de dioxyde de titane chez le rat5, soupçonnées de favoriser des problèmes immunitaires voire certains cancers colorectaux.
Le dioxyde de titane est utilisé de manière très répandue dans plusieurs domaines : cosmétiques, peintures, industrie agro alimentaire... Dans l’agroalimentaire, ce colorant blanc est utilisé comme additif (E171), en pâtisserie par exemple, où il permet, en étant intégré à des proportions variables, de décliner une palette de couleurs. Il également peut avoir des propriétés tantôt opacifiantes tantôt brillantes : ces dernières sont très appréciées par certains confiseurs notamment (l'effet varie en fonction de la taille des nanoparticules : plus elles sont petites, plus elles translucides).
Les populations les plus exposées actuellement sont les enfants consommateurs de bonbons et les malades car 4000 médicaments contiennent du E1716.
Si l’Agence nationale de sécurité sanitaire française (ANSES) souligne que des études complémentaires devront être menées afin de confirmer ou non les effets cancérogènes de l’ingestion de ces nanoparticules, elle préconise toutefois, en attendant, de "limiter l’exposition des salariés, des consommateurs, de l’environnement" et de "peser l’utilité pour le consommateur ou la collectivité, de la mise sur le marché de tels produits contenant des nanomatériaux, pour lesquels les bénéfices devraient être clairement démontrés"7.
Vers une responsabilité accrue des professionnels de l'alimentaire
Il y a donc bel et bien urgence à voir émerger davantage de transparence sur l’utilisation de nanomatériaux, en particulier dans l’alimentation, comme l'ont signalé différentes ONG au gouvernement français en juillet 20178.
L’association de veille et d'information civique sur les enjeux des nanosciences et des nanotechnologies (AVICENN), dont OFI AM est membre associé, propose notamment un panorama de l’avancement des connaissances scientifiques, des débats en cours, de la réglementation et de son application sur son site http://veillenanos.fr.
De son côté, l'association Agir pour l'Environnement (APE) a mis en ligne en mars 2017 le site http://www.infonano.org, où sont répertoriés aujourd'hui plus de 300 produits alimentaires suspectés de contenir des nanoparticules...
Le marché évolue : de plus en plus de marques et de distributeurs se sont engagées à retirer les nanoparticules de TiO2 et/ou le E171 de la composition de tout ou partie de leurs produits : William Saurin, Mars, Lutti, Verquin, Sainte-Lucie, Picard, Manufacture Cluizel, Motta, Malabar, Fleury Michon, et côté distributeurs : Carrefour, Leclerc, Auchan, Système U, et la liste promet encore de s'allonger (voir la "liste verte" d'infonano.org).
Début 2018, les choses se sont accélérées :
L'association de consommateur UFC-Que Choisir a déposé plainte contre des fabricants de produits alimentaires (et cosmétiques) pour non-respect de l’obligation de l'étiquetage [nano]9.
La répression des fraudes (DGCCRF) a indiqué qu'elle poursuit ses contrôles et engagera les suites appropriées, y compris des suites pénales, face aux manquements mis en évidence. En outre, elle agit auprès de la Commission européenne et de ses homologues des autres Etats membres afin que les contrôles appropriés soient menés aussi dans les autres pays européens10.
En tant qu’investisseur responsable, OFI AM veut s'assurer que les risques potentiels liés à l’utilisation de nanoparticules dans l’alimentation ont bien été analysés par les acteurs industriels, notamment du secteur agro-alimentaire, au regard des bénéfices pour les fabricants, les consommateurs, l’environnement et que la transparence devienne la règle.
OFI-AM propose donc à l’ensemble des signataires des PRI de se joindre à lui pour interpeller les industriels du secteur agro-alimentaire à ce sujet et les encourager à exiger de leurs fournisseurs des informations fiables, sur la base de tests menés avec les méthodes et outils appropriés12.
4 - Cf. le Règlement (UE) n° 1169/2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires (dit Règlement INCO) de 2011 : son article 18, alinéa 3, stipule en effet qu'à compter de la mi-décembre 2014 "tous les ingrédients qui se présentent sous forme de nanomatériaux manufacturés sont indiqués clairement dans la liste des ingrédients. Le nom de l'ingrédient est suivi du mot "nano" entre crochets".
Contrairement à ce que certaines fédérations professionnelles ont pu indiquer à leurs adhérents, les nanomatériaux sont soumis à l’obligation européenne d’étiquetage « nanomatériau », même s’ils comportent moins de 50% de nanoparticules en nombre. Ce seuil de 50% de particules en nombre sous la barre des 100 nm, certes invoqué dans le recommandation de définition du terme « nanomatériau » de 2011, n'est en effet pas inclus dans la définition du Règlement INCO et n'a donc aucune valeur juridique concernant la mise en oeuvre de l'étiquetage.
Le dioxyde de titane utilisé dans l’alimentaire (E171) est composé de particules primaires d'une grande variété de tailles pouvant aller de 40 à 300 nm, avec un diamètre moyen proche de 100 nm. En 2017, plusieurs rapports ont établi que la proportion de particules de dioxyde de titane inférieures à 100nm pouvait être supérieure à 50% dans le E171.
8 - Cf. [[LettreOuverteNanoAction201705 Lettre ouverte au gouvernement - Étiquetage et restriction des nanomatériaux dans les produits de consommation
après la discussion, place à l'action !]], Avicenn, Agir pour l'Environnement, Centre d'Information sur l'Environnement et d'Action pour la Santé, Center for International Environmental Law, Comité pour le Développement Durable en Santé, France Nature Environnement, Organisation générale des consommateurs de Meurthe-et-Moselle, Familles de France, Women Engage for a Common Future France, juillet 2017
Des études ont montré que des nanomatériaux peuvent :
franchir les barrières buccale et intestinale et se diffuser dans l'organisme1 ; des études ont montré également que des nanoparticules de silice ou d'argent s'agglomèrent dans l'eau ou dans les milieux acides (comme l'estomac) mais se réindividualisent dans l'intestin où le pH est neutre ; elles peuvent alors traverser plus facilement la barrière intestinale2.
s'accumuler ensuite dans les organes3 (tube digestif, foie, rate mais aussi estomac, reins, poumons, testicules, cerveau), dans le sang et à l'intérieur des cellules ;
y causer des perturbations voire des effets toxiques :
- Nanoparticules de dioxyde de titane (E171) :
L'additif alimentaire E171 est constitué de particules de dioxyde de titane (TiO2) (dont une partie sous forme nano). Il est autorisé au niveau européen par l'EFSA, qui a néanmoins recommandé en 2016 que soit menées de nouvelles études sur le système reproducteur4. De nombreuses publications postérieures à 2016 font état d'effets délétères sur la santé liés à l'ingestion de nanoparticules de TiO2 : risques pour le foie, les ovaires et les testicules chez les humains, problèmes immunitaires et lésions précancéreuses au niveau du côlon chez le rat, perturbations du microbiote intestinal, inflammations et altérations de la barrière intestinale chez les animaux comme chez les humains, effets néfastes pour la descendance chez les rongeurs, etc.5L'additif E171 est donc suspendu en France depuis le 1er janvier 2020.
- Nanoparticules de silice (E551) :
Des effets potentiellement néfastes sur la santé associés à l'ingestion de nanoparticules de silice (le SiO2 correspond à l'additif E551) ont été montrés6, notamment des dysfonctionnements de la division cellulaire et des perturbations du trafic cellulaire7, ainsi que des effets indésirables sur le foie8 ; inquiétant si l'on considère que nous absorbons en moyenne environ 124 mg de nano-silice (E551) par jour9 ; en outre certaines nanosilices sont plus génotoxiques à faibles doses qu'à fortes doses10. Ayant constaté in vitro que des nanoparticules de dioxyde de silicium peuvent générer des inflammations dans le tractus gastro-intestinal de souris (une atteinte à la défense immunitaire du système digestif), une équipe de chercheurs suisses préconise une moindre utilisation de particules de silice comme additif alimentaire11. La réévaluation de la silice sous forme de E551 (nano et non nano), a été adoptée avec beaucoup de retard sur le calendrier initial, fin 2017, sans que des conclusions définitives puissent en être tirées concernant l'innocuité ou la toxicité de cet additif12. Depuis, de nouvelles études ont été publiées, qui confirment l'existence d'effets néfastes de l'ingestion de nanoparticules de silice, notamment sur le foie, les intestins et les reins13. Des fabricants de silice ont tenté de défendre leur produit en attaquant l'une de ces études, parue en 2019 ; les chercheur·es visé·es ont à leur tour répondu, toujours dans la même revue, en démontant point par point les critiques mises en avant par les fabricants de silice14.
- Nanoparticules d'argent (E174 notamment) :
Des nanoparticules d'argent sont présentes dans l'additif E174 mais également dans des emballages ou contenants alimentaires antibactériens ; or des nanoparticules d'argent injectées dans le sang de rats ont été retrouvées jusque dans le foie, au niveau noyau des hépatocytes, et altèrent les cellules de cet organe vital15 ; une autre étude a montré que des nanoparticules d'argent administrées par voie orale à des souris ont endommagé les cellules épithéliales ainsi que les glandes intestinales des rongeurs et entraîné une diminution de leur poids16 ; une perturbation de la flore intestinale a également été observée chez des poissons zèbres alimentés avec de la nourriture contenant des nanoparticules d'argent17, ainsi que chez la souris18. Il a été également démontré que l'ingestion de nanoparticules d'argent provoque des altérations permanentes du génome chez la souris et pourraient donc conduire à un cancer19, etc. D'autres résultats concordants ont été publiés récemment, montrant également des effets néfastes des nanoparticules d'argent au niveau des reins sur des rats20.
- Nanoparticules d'oxyde de zinc (ZnO):
Les nanoparticules d'oxyde de zinc présentes sur le revêtement intérieur des boîtes de conserve se retrouvent dans les aliments et risquent d'entraîner une moins bonne absorption des nutriments et une plus grande perméabilité de l'intestin, transférant dans le sang des composés indésirables21.
Des nanocomposites de dioxyde de cerium (CeO2) peuvent provoquer une altération du métabolisme22.
On ignore aujourd'hui encore beaucoup de choses sur les répercussions que l'ingestion de nanomatériaux peut avoir sur la santé humaine24. Les études de toxicité des nanoparticules par voie orale sont rares et beaucoup ont pu comporter des faiblesses méthodologiques25 qui rendent difficile l'utilisation de leurs résultats. Les conditions expérimentales reflètent encore mal la façon dont les consommateurs sont exposés ; les nanomatériaux considérés sont souvent synthétisés en laboratoire et donc différents des nanomatériaux (et résidus de nanomatériaux) que les consommateurs ingèrent réellement26.
En outre les caractéristiques physico-chimiques des nanoparticules testées et leurs interactions avec la matrice alimentaire sont insuffisamment documentées.
Néanmoins des progrès sont en cours depuis peu, grâce aux améliorations des pratiques des chercheurs, des outils et des protocoles.
L'un des problèmes qui risque de durer encore néanmoins a trait à la grande complexité de l'évaluation des risques liés à l'ingestion de nanomatériaux : la toxicité des nanoparticules diffère en effet selon leurs caractéristiques physico-chimiques (dimension, forme, degré d'agglomération, etc.). Or, ces caractéristiques sont très variables selon les nanomatériaux et peuvent évoluer tout au long de leur cycle de vie :
en fonction des conditions dans lesquelles les nanomatériaux sont synthétisés, stockés, éventuellement enrobés ;
par les transformations qu'ils subissent lors de la cuisson et de la préparation des plats ou dans l'appareil digestif27 (par exemple au contact du milieu acide de l'estomac, etc.)
lors des interactions avec les emballages et/ou avec les autres ingrédients et substances chimiques avec lesquels les nanomatériaux se retrouvent mélangés (avant puis pendant l'ingestion et la digestion) ; on peut craindre par exemple un "effet cocktail" avec certaines molécules28
L'évaluation du risque doit en outre tenir compte :
de la susceptibilité individuelle (le stress augmente par exemple la perméabilité intestinale aux xénobiotiques)29 ;
de la durée et de la période d'exposition30, sachant que selon une étude récente, les enfants consommeraient deux à quatre fois plus de titane que les adultes du fait de l'ingestion de sucreries ayant des niveaux élevés de nanoparticules de dioxyde de titane31
→ Autant d'éléments qui rendent extrêmement difficile l'évaluation de l'exposition du consommateur et des risques sanitaires liés à l'ingestion des nanoparticules.
En 2009, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ont convoqué une réunion d'experts sur les incidences des nanotechnologies sur la sécurité sanitaire des aliments : le rapport qui en est issu, publié en 2011, liste les besoins de recherche pour mieux évaluer les risques dans le domaine. Nonobstant le large consensus sur la nécessité de renforcer les recherches sur les risques liés aux nanomatériaux ingérés, ces dernières sont aujourd'hui encore très limitées (voir notre fiche Les travaux de recherche sur les risques associés aux nanomatériaux en lien avec l'alimentation pour plus de détails).
Mais de l'aveu même de scientifiques impliqués dans les études de toxicologie et écotoxicologie, évaluer correctement les risques sanitaires et environnementaux des nanomatériaux a un coût prohibitif. En 2012, Mark Wiesner, directeur du CEINT (USA) avait ainsi résumé la situation : "le nombre et la variété des nanomatériaux est sidérant, il n'y a pas assez d'éprouvettes dans le monde pour procéder à toutes les expériences nécessaires"32. En 2009, des chercheurs ont estimé le coût des études de toxicité à réaliser pour les nanomatériaux déjà existants à 250 millions de dollars au minimum, voire 1,18 milliards de dollars en fonction du degré de précaution adopté, nécessitant entre 34 et 53 ans d'études33. Se pose ainsi la question de la prise en charge par les industriels eux-mêmes du coût de ces recherches.
En attendant des évaluations concluantes, la commercialisation de produits alimentaires contenant des nanoparticules continue
En octobre 2016, l'ANSES a été saisie par ses ministères de tutelle pour étudier les risques liés aux nanoparticules dans l'alimentation, et plus précisément :
réaliser une étude détaillée de la filière agro-alimentaire au regard de l'utilisation des nanos dans l'alimentation,
prioriser les substances et/ou produits finis d'intérêt en fonction de critères pertinents déterminés au cours de l'expertise,
réaliser une revue des données disponibles (effets toxicologiques et données d'exposition)
et en fonction de leur disponibilité, étudier la faisabilité d'une évaluation des risques sanitaires pour certains produits.
Un "groupe de travail" ("GT nano alimentation") composé d'experts indépendants a été mis en place courant 2017. Les résultats de l'expertise initialement attendus pour fin 201734 ne seront pas connus avant fin 201935.
Résultats du programme européen Nanogenotox sur la génotoxicité des nanomatériaux, présentés en français à l'ANSES, lors de la Restitution du programme national de recherche environnement santé travail : Substances chimiques et nanoparticules : modèles pour l'étude des expositions et des effets sanitaires : Dossier du participant et Diaporama, novembre 2013.
Documents présentés lors de la réunion du bureau chargé de l'évaluation des risques et de la recherche pour l'autorité de sûreté des produits de consommation des Pays Bas (NVWA) en octobre 2013
Silicon dioxide nanoparticle exposure affects smallintestine function in an in vitro model, Guo Z et al, Nanotoxicology, avril 2018 : "SiO2 NP exposure significantly affected iron (Fe), zinc (Zn), glucose, and lipid nutrient absorption. Brush border membrane intestinal alkaline phosphatase (IAP) activity was increased in response to nano-SiO2. The barrier function of the intestinal epithelium (...) was significantly decreased in response to chronic exposure. Gene expression and oxidative stress formation analysis showed NP altered the expression levels of nutrient transport proteins, generated reactive oxygen species, and initiated pro-inflammatory signaling. SiO2 NP exposure damaged the brush border membrane by decreasing the number of intestinal microvilli, which decreased the surface area available for nutrient absorption. SiO2 NP exposure at physiologically relevant doses ultimately caused adverse outcomes in an in vitro model".
Nanotechnologies et nanoparticules dans l'alimentation humaine et animale, Afssa (aujourd'hui ANSES), mars 2009 : "L'évaluation des risques liés aux nanoparticules est limitée par l'absence de méthodes validées et applicables en routine permettant la détection, l'identification et la quantification des nanoparticules, dans les différentes matrices (aliments, eau, air...), dans les liquides biologiques et les tissus" (p.26).
28 - Des nanomatériaux, combinés avec d'autres substances, ne pourraient-ils pas devenir (plus) dangereux ? Les toxicologues travaillent en isolant des substances ce qui ne permet pas d'établir les effets d'interaction d'une pluralité de substances pénétrant dans l'organisme. Cf. http://veillenanos.fr/wakka.php?wiki=EffetsNanoSante#EffetCocktail
29 - Voir aussi E. Houdeau (INRA), "Nanoparticules et barrière intestinale : comprendre les mécanismes de franchissement" : Diaporama, Carrefour de l'innovation agronomique (CIAG), novembre 2012 ; Article académique, Innovations Agronomiques, 24, 105-112, 2012
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout juillet 2020 (partie "Recherches" à actualiser)
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Depuis 2006, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES, née de la fusion de l'Afsset et de l'Afssa) a publié de nombreuses expertises sur les risques sanitaires et environnementaux liés aux nanomatériaux :
Parallèlement à ces activités, l'ANSES a contribué aux actions de développement de nouvelles méthodologies d'évaluation des risques, en direction des professionnels, au travers d'actions de normalisation ou de la définition de tests de sécurité :
RISKGONE, projet financé par la Commission européenne (2019-2023)
Trois projets relatifs aux risques associés aux nanomatériaux avaient été retenus par l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) dans le cadre de son Programme national de recherche "Environnement Santé Travail" (PNR EST) suite à l'appel à projets 2019 :
NanOCo : Impact sur les fonctions endocrines de NANoparticules métalliques seules et en mélange avec des composés Organiques perturbateurs endocriniens pour l’analyse de l’effet COcktail
NANOWAVE : Evaluation de la co-exposition de nanomatériaux avec des ondes radiofréquences
NaPeauLi : Développement d’un modèle expérimental pour l’étude de la décontamination de la peau après une exposition cutanée aux nanoparticules métalliques
En mars 2014, le laboratoire de Fougères de l'ANSES a commencé son projet SolNanoTOX : Détermination de facteurs de toxicité au niveau intestinal et hépatique de deux nanoparticules de taille similaire utilisées en alimentation et en emballage (aluminium et dioxyde de titane) : Recherches in vitro et in vivo sur l'absorption et les mécanismes impliqués.
Autres partenaires français : ISCR Institut des Sciences Chimiques de Rennes et Biosit UMS Biosit - Plateforme microscopie électronique MRic TEM
Partenaires allemands : Federal Institute for Risk Assessment (BfR ) et University of Leipzig (ULEI)
De 2010 à 2013, l'ANSES a coordonné le programme de recherche NANOGENOTOX auquel ont participé plusieurs laboratoires de l'ANSES (Anses Fougères et Maisons Alfort). Ce programme a rassemblé 30 partenaires (organismes scientifiques et ministères) issus de 13 Etats-membres de l'Union européenne pour étudier quatorze types de nanomatériaux manufacturés dont certains à usage alimentaire. Il a permis de contribuer au développement futur d'une méthode de détection du potentiel génotoxique des
nanomatériaux manufacturés. → Voir notre brève RISQUES : Les leçons du programme de recherche Nanogenotox, veillenanos.fr, 30 décembre 2013
Depuis 2012, l'ANSES a mis en place un comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé", ouvert à la société civile et auquel AVICENN participe. Ses réunions sont néanmoins de plus en plus rares.
Depuis 2012 également, le Réseau R31 animé par l'ANSES (qui regroupe 31 instituts ou organismes français de recherche et d'évaluation de risques environnementaux ou sanitaires) se penche sur les risques associés aux nanomatériaux.
Depuis 2013, le laboratoire de Fougères participe au programme européen NANoREG.
Depuis 2013, l'ANSES est chargée de la gestion des déclarations et des données de R-Nano, le dispositif de déclaration des nanomatériaux produits, importés et distribués en France ; elle est également chargée d'examiner les possibilités d'exploitation à des fins d'évaluation des risques sanitaires des informations issues des déclarations.
En 2014-2015, l'exploitation des données du registre R-Nano et leur impact sur l'évaluation des expositions et des risques professionnels ont fait l'objet de discussions au sein du "groupe de travail permanent nanomatériaux et santé" de l'ANSES2, mais début 2015, le groupe a été remercié sans être renouvelé, malgré les indications contraires qui avaient été données au moment de sa création (et qui lui avaient valu l'appellation, a posteriori inopportune, de "groupe pérenne").
A partir de 2014, l'exploitation des données du registre R-Nano a permis de documenter l'évaluation du dioxyde de titane dans le cadre du plan d'action communautaire pour l'évaluation des substances du règlement REACH2.
réaliser une étude détaillée de la filière agro-alimentaire au regard de l'utilisation des nanos dans l'alimentation,
prioriser les substances et/ou produits finis d'intérêt en fonction de critères pertinents déterminés au cours de l'expertise,
réaliser une revue des données disponibles (effets toxicologiques et données d'exposition)
et en fonction de leur disponibilité, étudier la faisabilité d'une évaluation des risques sanitaires pour certains produits.
Les résultats de l'expertise initialement annoncés pour fin 20174 ont été d'abord repoussés à septembre 20185 avant d'être encore reportés à l'été 20196 voire fin 20197.
Les nanomatériaux sont toujours au programme de travail 2020 de l'Anses : préparation de la consultation publique sur la recommandation de définition des nanomatériaux, poursuite des travaux sur les nanoparticules dans l’alimentation prévus par le PNSE3, ainsi que sur les filières industrielles qui utilisent des nanoparticules, poursuite de la gestion du portail national de déclaration obligatoire et synthèse des pistes d'exploitation et de partage de données issues de r-nano, évaluation de substances sous forme nanométrique dans le cadre de REACH, ... LIRE AUSSI :
Nanomatériaux / Nanoparticules / Nanotechnologies et Eaux : Bibliographie
Nanomatériaux / Nanoparticules / Nanotechnologies et Eaux : Bibliographie
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout octobre 2020
Cette sélection de documents compilés pour préparer notre dossier Nano et Eau a vocation à être progressivement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn.
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Vulnerability of ground water resources regarding emerging contaminants and nanoparticles : Résumé et vidéo, Hofmann T, Harvard Chan School's NIEHS Center for Environmental Health, 5 avril 2018
Les nanoparticules d'argent en milieu naturel : cas d'un estuaire, Millour M, UQAR (Université du Québec à Rimouski), intervention au 83e du Congrès de l'Acfas, Colloque 210 - Présence, persistance, devenir et effets des nanomatériaux dans l'environnement, mai 2015
Les nanoparticules : quels risques en Seine ?, Yann Sivry et al., communication aux 22èmes Journées Scientifiques de l'Environnement - Reconquête des environnement urbains : les défis du 21ème siècle, février 2011
Les véritables effets des nanoparticules dans leur environnement, CORDIS, mars 2018 : "La plupart des nanomatériaux synthétiques émis dans l’environnement arriveront tôt ou tard dans nos océans et nos mers. Le projet SOS-Nano a conçu des tests afin de prédire leur toxicité pour le milieu marin. Les chercheurs ont utilisé un ingénieux système naturel d’exposition à l’eau in vivo pour tester les effets des nanoparticules d’oxyde métallique : l’oxyde de zinc (ZnO) et le dioxyde de manganèse (MnO2). Les larves d’huîtres ont souffert d’un niveau élevé de toxicité occasionnée par le ZnO, en revanche, les NP de MnO2 n’étaient pas toxiques dans tous les scénarios d’exposition."
Écrans UV nanos : un danger pour la vie marine, L'Observatoire des Cosmétiques, 5 septembre 2014 : Des chercheurs espagnols ont ainsi estimé que l'activité touristique sur une plage de Méditerranée durant une journée d'été peut relarguer de l'ordre de 4 kg de nanoparticules de dioxyde de titane dans l'eau, et aboutir à une augmentation de 270 nM/jour de la concentration en peroxyde d'hydrogène (une molécule au potentiel toxique, notamment pour le phytoplancton qui constitue la nourriture de base des animaux marins) → Résumé vulgarisé en français de l'article suivant : Sunscreens as a Source of Hydrogen Peroxide Production in Coastal Waters, Sánchez-Quiles D and Tovar-Sánchez A, Environ. Sci. Technol., 48 (16), 9037-9042, 2014
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout juillet 2020 (Page à compléter)
Cette sélection de documents compilés pour réaliser notre Dossier Nano et Risques pour la santé a vocation à être complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant des références à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr. Sommaire
NanoEHS, la base de données répertoriant les publications scientifiques sur les risques en nanotechnologies, mise à jour par the International Council on Nanotechnology (ICON) ne semble plus fonctionner (2016)
Ce dossier synthétique a vocation à être complété et mis à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn.
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Rubrique intialement mise en ligne en juillet 2015
Nano et Santé au travail (2/3) : Quels risques pour les travailleurs exposés ?
Nano et Santé au travail (2/3) : Quels risques pour les travailleurs exposés ?
Par MD et l'équipe Avicenn - Dernière modification novembre 2019
Cette fiche est la deuxième partie de notre Dossier Nano et Santé au travail. Elle a vocation à être complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn. Vous pouvez contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
A l'échelle nanométrique, les matériaux peuvent manifester des propriétés renforcées ou nouvelles, différentes de celles des matériaux micrométriques (voire massifs) de même composition chimique ; certaines de ces nouvelles propriétés peuvent être dangereuses pour les travailleurs exposés (plus forte réactivité, explosivité, inflammabilité, ...).
Les potentiels d'émission et d'exposition professionnelle aux aérosols lors d'opérations mettant en oeuvre des nanomatériaux sont considérés comme l'un des principaux risques émergents sur les lieux de travail depuis au moins 2009 par l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (OSHA)1.
Des risques encore mal cernés, à mieux étudier
Problème : les répercussions que l'exposition aux nanomatériaux manufacturés peut avoir sur la santé humaine sont encore largement méconnues et entachées d'incertitudes2. Les effets sur la santé des travailleurs sont insuffisamment évalués et connus :
Les études toxicologiques sont confrontées à des difficultés méthodologiques et de nombreux paramètres à prendre en compte ; elles ne permettent pas d'entrevoir de réponses simples et univoques sur les risques des nanomatériaux à court terme. Jusqu'à récemment notamment, peu d'études portaient sur l'inhalation des nanomatériaux alors que c'est la voie d'exposition professionnelle la plus probable et la plus préoccupante pour les travailleurs exposés3. Cette voie est cependant davantage prise en compte maintenant. Il reste néanmoins que les effets néfastes observés dans de nombreuses études toxicologiques sont souvent contestés ou minimisés par des industriels qui se retranchent derrière l'attente de résultats probants issus d'études épidémiologiques.
Un des problèmes rencontrés reste la mesure de l'exposition - malgré le développement d'instruments plus performants (en termes de sensibilité, reproductibilité, souplesse, facilité de mise en oeuvre et coût) permettant d'effectuer des mesures aux postes de travail.
Les effets sur la santé des travailleurs peuvent prendre de nombreuses années avant d'apparaître4 (on parle alors de "risques à effets différés") et les tumeurs cancéreuses ne livrent pas d'indication sur ce qui les a déclenchées... or les travailleurs sont souvent exposés à différentes substances chimiques.
Il sera donc sans doute très long et difficile d'établir au final un lien clair de cause à effet entre exposition professionnelle aux nanomatériaux et pathologies. Car les risques liés à leur exposition professionnelle aux nanomatériaux se cumulent en outre avec :
l'exposition non professionnelle aux nanoparticules que subit la population générale via l'alimentation, l'eau, les cosmétiques, la pollution atmosphérique, etc.
l'utilisation de substances chimiques parfois dangereuses, avec des interactions difficilement identifiables et maîtrisables (on parle alors d'"effet cocktail" 5).
En attendant, faute de données toxicologiques, épidémiologiques et biomédicales incontestables, les industriels peuvent continuer à faire manipuler les nanomatériaux par les travailleurs.
Les autorités françaises reconnaissent que "les efforts doivent être poursuivis pour améliorer la connaissance et permettre, en particulier, d'affiner l'évaluation des effets et des risques" 6. Des travaux sur les risques liés à l'exposition professionnelle aux nanomatériaux sont menés aujourd'hui au sein de plateformes spécialisées sur les risques nano, à l'INERIS, à l'INRS, au CEA notamment. Avicenn suit l'avancée des travaux qui y sont menés.
Des signaux néanmoins très inquiétants
Pour autant les données parcellaires dont on dispose sont plutôt inquiétantes : les nanomatériaux inhalés peuvent en effet se diffuser dans l'organisme, se transformer d'un point de vue physico-chimique, s'accumuler ensuite dans certains organes, dans le sang et à l'intérieur des cellules7 et y causer des perturbations voire des effets néfastes (réaction inflammatoire pulmonaire ; fibrose pulmonaire ; risques de cancer du poumon en cas d'inhalation de certains types de nanotubes de carbone, longs et rigides)8.
En avril 2014, l'Agence nationale française de sécurité sanitaire (ANSES) a préconisé le classement des nanomatériaux comme substances dangereuses dans le cadre de la réglementation européenne CLP.
Chez l'animal, des effets semblables à ceux de l'amiante ont été observés : des rats en laboratoire ont développé un mésothéliome suite à une exposition à certains types de nanotubes de carbone.
Comme dans le cas de l'amiante, on redoute les conséquences d'une absence de prévention car les effets sur la santé ne sont susceptibles d'apparaître que plusieurs années - voire décennies - après l'exposition aux nanomatériaux... d'où la nécessité de protéger les travailleurs et de mettre en place un dispositif de suivi de leur état de santé sur le long terme.
Plusieurs cas de pathologies observées chez des travailleurs exposés aux nanoparticules ont néanmoins déjà été rapportés :
En 2009, des problèmes pulmonaires ont entraîné l'hospitalisation de travailleuses chinoises exposées à des nanoparticules d'acrylique pendant 5 à 13 mois9.
Fin 2013, à Taiwan, une étude menée sur six mois a mis en évidence des corrélations entre manipulation de nanomatériaux et des marqueurs de maladies pulmonaires et cardiovasculaires, des marqueurs de l'inflammation et de stress oxydatif et enzymes antioxydantes10.
En 2014, une jeune chimiste nord-américaine ayant manipulé (sans masque) des nanoparticules de nickel à l'état de poudre a présenté divers symptômes (irritation de la gorge, congestion nasale, rougeur du visage, réaction cutanée)11
En 2017, des effets immunologiques ont été rapportés chez des travailleurs manipulant des nanoparticules manufacturées12
Le risque d'incendie et d'explosion est également particulièrement inquiétant (tout particulièrement pour les nanoparticules d'aluminium, de magnésium ou de lithium ainsi que pour les nanotubes de carbone)13.
La plus grande vigilance devrait être appliquée
Tous ces éléments réunis conduisent à préconiser la plus grande vigilance, principe de précaution oblige. L'enjeu est de taille : il s'agit ni plus ni moins d'éviter de renouveler les erreurs du passé : si les effets cancérogènes de l'amiante ont été démontrés dans les années 1930, il a fallu attendre les années 1990 pour que les premières lois d'interdiction entrent en vigueur...
Parmi les défis à relever figurent le développement de travaux de recherche indépendants sur les risques ainsi que l'accélération de la transmission des résultats des recherches auprès des services sanitaires afin qu'ils puissent prendre les dispositions adaptées au plus vite - qu'il s'agisse de la mise au point ou à jour de réglementations ou de mesures d'information et de protection.
Le corpus de connaissances évolue en effet à un rythme que les lourdeurs institutionnelles ne permettent pas de suivre : les délais sont encore trop longs entre l'obtention des résultats, leur publication puis leur prise en compte par les autorités d'évaluation et de gestion des risques, leur communication auprès des acteurs de terrain et enfin la déclinaison concrète de mesures appropriées.
A noter, fin 2017, une "première" juridique en Europe sur l'exposition professionnelle aux nanoparticules : un juge espagnol a considéré qu'un travailleur ayant subi une greffe de rein ne doit pas être affecté à un poste exposant aux nanomatériaux14. Cet avis pourrait avoir des répercussions notables dans les mois et années à venir...
Mi 2018, le Haut Conseil de la Santé publique (HCSP) a publié un rapport15 appelant à protéger les travailleurs et les populations à proximité des sites industriels produisant ou manipulant du nano-TiO2, assorti d'un ensemble de préconisations pratiques à destination des pouvoirs publics et des industriels.
Les projets NanoSafe 2 (6e PCRDT) et Nanoris ont entre autres résultats permis de mettre en évidence les propriétés fortement détonantes de certaines nanoparticules (aluminium), mais aussi le risque de sous-évaluation de l'explosivité et de l'inflammabilité due à la faculté d'agglomération des nanopoudres. Cf. Rapport scientifique 2008-2009, INERIS, novembre 2009
L'énergie minimale d'inflammation décroit avec la taille des particules d'aluminium :
pour les particules de taille micrométrique, elle est à 15 mJ
pour les particules de diamètre de 200 nm, elle est à 7 mJ
pour les particules de diamètre de 100 nm, elle est inférieure à 1 mJ
L'explosion peut alors devenir très violente (similaire à celle provoquée par l'hydrogène !) Cf. Risques liés aux nanoparticules manufacturées, Académie des technologies, 2012 (p.98)
Par l'équipe Avicenn - Dernière modification janvier 2021
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L'article 60 de la loi de modernisation de notre système de santé avait prévu que le gouvernement remette au Parlement, à l'été 2017, un rapport sur les nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux. Mais alors qu'en juillet 2018, le ministère de la santé avait annoncé sa publication prochaine, mi-2020, nous n'avions toujours aucune trace de ce rapport ! Malgré ses nombreuses relances auprès du ministère de la santé, Avicenn n'avait pas réussi à avoir plus d'infos, sinon que le rapport, réalisé par l'ANSM, serait finalisé et en cours de validation interministérielle... depuis au moins décembre 2017 ! En juillet 2020, Avicenn a donc envoyé une lettre recommandée au Premier ministre et au ministre des Solidarités et de la Santé pour réclamer la diffusion du rapport gouvernemental sur les nanomatériaux dans les médicaments et les dispositifs médicaux qui aurait dû être rendu public depuis trois ans.
Le rapport reçu le 3 août 2020 ne présente ni date ni auteur(s), ni précision sur la méthodologie, et comporte des références majoritairement anciennes et des limites importantes. Mais ses recommandations sont, elles, intéressantes et plus que jamais d'actualité : évolutions à apporter à la normalisation et réglementation pour une meilleure identification et évaluation des nanomédicaments et dispositifs médicaux ; modifications du registre R-nano convergentes avec les demandes portées par les acteurs de la précaution et de la prévention ; implication accrue de l'ANSM sur le sujet, etc.
Présence (non désirée) de nanoparticules dans les médicaments
Selon Que Choisir, "4 000 médicaments contiennent le colorant E171" composé en partie de nanoparticules de dioxyde de titane. 60 Millions de consommateurs a apporté la confirmation par des tests de la présence de ces nanoparticules dans 6 médicaments très utilisés (Efferalgan - Upsa, Spasfon - Teva, Zyrtecset - UCB Pharma, Nurofen - Reckitt Benckiser, Doliprane enfant - Sanofi, Euphytose - Bayer).
Il s'agit là de nanoparticules sans visée thérapeutique (présentes dans le pigment blanc E171, utilisé comme colorant et/ou comme opacifiant dans le pelliculage des comprimés ou dans les capsules des gélules pour ses propriétés protectrices vis-à-vis des rayonnements UV), à dissocier des "nano-médicaments", quant à eux volontairement conçus à l'échelle nano dans le but de traverser des barrières physiologiques et d'apporter des substances actives plus rapidement et/ou plus précisément dans le corps.
En juillet 2018, selon le Ministère des solidarités et de la santé en 2018, l'ANSM aurait saisi l'agence européenne des médicaments (EMA) ; des travaux seraient en cours sur l'ensemble des excipients sous forme nanométrique, entrant dans la composition des médicaments autorisés.
Interrogé par les médias, Thomas Borel, directeur des affaires scientifiques du LEEM, l'organisation professionnelle des entreprises du médicament en France, considère lui que "l'excipient E171 assure la stabilité du médicament" et qu'il est donc "indispensable", par exemple pour assurer la protection et l'ingestion du médicament"1.
Ceci dit, des marques promeuvent désormais des enrobages de médicaments sans TiO22. Et en mai 2019, Sanofi a confirmé réfléchir à substituer le dioxyde de titane de ses médicaments3.
En octobre 2020, l'association Agir pour l'Environnement a lancé une pétition "Stop titane" demandant l'élargissement de l'interdiction du dioxyde de titane aux médicaments et dentifrices.
Arnaud Pallotta et Jordan Beurton, Nanoparticules et médicaments, Festival Pint of Science, Laboratoire Cible Thérapeutiques et Formulation – CITHÉFOR (Université de Lorraine), Nancy, 27 mars 2019
CNRS, Un nanomatériau délivre des médicaments sous lumière infrarouge, Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg (IPCMS, CNRS/Université de Strasbourg) et Institut de chimie et procédés pour l’énergie, l’environnement et la santé (ICPEES, CNRS/Université de Strasbourg), 26 novembre 2018
Les dispositifs sont conçus et fabriqués de façon à réduire autant que possible les risques associés à la taille et aux propriétés des particules qui sont libérées dans le corps du patient ou de l'utilisateur, ou sont susceptibles de l'être, sauf si elles entrent en contact uniquement avec une peau intacte. Une attention particulière est accordée aux nanomatériaux.
Tous les dispositifs qui incorporent un nanomatériau ou qui en sont constitués relèvent:
de la classe III s'ils présentent un potentiel d'exposition interne moyen ou élevé,
de la classe IIb s'ils présentent un faible potentiel d'exposition interne, et
de la classe IIa s'ils présentent un potentiel d'exposition interne négligeable.
3 - Cf. intervention de René Labatut, Vice-président, directeur de la stratégie d’innovation technologique, Sanofi, lors du Forum NanoResp, Médicaments et vaccins : à quoi servent leurs nanoparticules ?, 20 mai 2019. En mai 2018, le plan de gestion des nanoparticules de TiO2 mis en place par Sanofi avait fait l'objet d'une présentation lors du forum SOFHYT sur les risques émergents.
Page initialement créée en janvier 2018
FRANCE : Quelle place pour les nanos dans le Plan National Santé - Environnement 3 (PNSE 3) ? Quelle mise en oeuvre des actions ?
FRANCE : Quelle place pour les nanos dans le Plan National Santé - Environnement 3 (PNSE 3) ? Quelle mise en oeuvre des actions ?
par MD et l'équipe Avicenn - Dernière modification avril 2019 (ARCHIVE)
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A noter : fin 2017, la Stratégie nationale de santé 2018-2022 a également été publiée ; les nanoparticules y sont expressément mentionnées comme risques émergents : sont prévues des actions sur les sources de pollution qu'elles représentent et la limitation de notre exposition. Reste à voir quand et comment... Avicenn plaide pour apporter rapidement des améliorations au registre R-nano, afin que les professionnels de la santé disposent d'un outil opérationnel pour mieux cerner les expositions, afin de les réduire.
Les nanos dans la feuille de route environnementale de 2016
Étendre le nombre de sites pour lesquels une campagne de suivi des nanos est mise en place, en accompagnant chaque mesure d’une analyse du bruit de fond dans l’environnement → Une plaquette a été réalisée par l'INERIS et l'UIC
Communiquer aux observatoires des déchets la liste des déclarants dans la base R-nano en veillant au respect des exigences de confidentialité → Un décret n°2017-765 a été signé en ce sens en mai 2017.
Accélérer l’encadrement de l’usage des nanomatériaux dans les filtres UV des produits cosmétiques dans le cadre de l’application du règlement européen, et notamment l'entrée en vigueur au niveau national des mesures concernant l'emploi du dioxyde de titane sous forme nano
Archives : Analyse des dispositions du PNSE3 concernant les nanomatériaux
En 2014, préalablement à la publication du PNSE 3, le ministère des affaires sociales et de la santé et le ministère de l'écologie avaient lancé une consultation restreinte aux acteurs de la santé environnementale sur le projet de PNSE 3 par l'intermédiaire des pilotes des PRSE (au niveau régional). Avicenn avait envoyé le 22 septembre 2014 une contribution au ministère de l'écologie (téléchargeable ici).
Une consultation plus large avait été organisée du 26 septembre au 17 octobre.
L'action 36 du PNSE 3 appelle à "poursuivre les travaux d'évaluation des expositions des consommateurs pour identifier les différents nanomatériaux présents dans les denrées alimentaires" et "poursuivre les travaux de toxicologie, notamment pour la voie orale et l'exposition chronique aux faibles doses" (page 40).
→ Analyse d'Avicenn :
Le terme "poursuivre" suppose qu'il y ait déjà des actions menées en ce sens mais, comme l'Avicenn l'a déjà souligné à plusieurs reprises1, les projets de recherche sur le sujet sont :
et au mieux très insuffisants (concernant la toxicologie notamment) ;
L'ANSES figure comme partenaire et pourtant :
en 2013, elle s'était opposée à ce que les chercheurs de ses propres laboratoires continuent leurs recherches sur le sujet (cf. la lettre VeilleNanos n°8-9 parue en décembre 2013) ; interrogé à ce sujet par Avicenn le 29 avril 2014, lors du comité de dialogue "Nanomatériaux et Santé", le directeur général adjoint scientifique de l'agence avait invoqué un "recentrage" de l'ANSES sur ses domaines d'excellence, qui dans le domaine nano concernent davantage l'exposition par inhalation. En juin 2014, le rapport d'activité 2013 du laboratoire de Lyon de l'ANSES a apporté la précision suivante : "l'unité Maladies neurodégénératives (MND) a dû arrêter, à la demande de la direction scientifique des laboratoires de l'Anses, toute recherche sur la toxicologie des nanomatériaux".
un nouveau projet SolNanoTOX est certes mené par le laboratoire de Fougères de l'ANSES afin de déterminer des facteurs de toxicité au niveau intestinal et hépatique de nanoparticules utilisées en alimentation et en emballage. Il n'est cependant pas financé par l'ANSES ni par le Ministère de l'Agriculture et de l'agroalimentaire mais bénéficie d'une subvention de l'ANR.
en 2016, l'ANSES a modulé son discours, en promettant de mettre sur pied un groupe d'experts sur la question des nanos dans l'alimentation, mais elle dit avoir du mal à trouver des experts indépendants.
Hormis les laboratoires de l'ANSES, quelques recherches sont menées, principalement au CEA de Grenoble et à l'INRA de Toulouse depuis quelques années seulement.
Bref, les recherches sur l'ingestion des nanomatériaux restent aujourd'hui très limitées eu égard aux questions qui se posent et aux préoccupations des consommateurs et trop peu de recherches sont effectuées en France sur les utilisations et les impacts sanitaires et environnementaux des nanoparticules utilisées dans les engrais et pesticides. La définition d'une vraie stratégie nationale sur ces questions est pourtant indispensable.
Réglementations concernant les nanomatériaux
L'action 70 du PNSE3 veut "soutenir le renforcement du corpus réglementaire européen sur les nanomatériaux : modification des annexes de REACH et examen de la pertinence des autres options, en particulier d'un registre européen comparable au dispositif français de déclaration" (page 70).
L'action 72 vise à "proposer aux parties prenantes, dans le cadre du PST3, de porter au niveau européen, au titre du règlement n° 1272/2008 dit « CLP», des demandes de classifications réglementaires harmonisées de familles de nanomatériaux manufacturés pour lesquelles il existe un faisceau de preuves significatif sur des propriétés CMR ou sensibilisants. Cette classification permettra notamment d'étiqueter les produits en contenant et d'assurer ainsi une traçabilité de ces nanomatériaux" (page 71).
→ Analyse d'Avicenn : Il serait souhaitable de voir parmi les sous-actions proposées :
la mise en place de solutions permettant de pallier les faiblesses du dispositif français (lire à ce sujet notre fiche sur les atouts et faiblesses du dispositif R-Nano).
la réalisation d'un "bilan coûts/avantages avant la mise sur le marché de produits contenant des nanoparticules ou des nanomatériaux" auxquels s'étaient engagés les partenaires du Grenelle de l'environnement en 20072, mais qui a été laissé de côté depuis, malgré les demandes croissantes en faveur d'une distinction entre usages "futiles" et "utiles" des nanomatériaux.
Le Comité de développement durable en santé (C2DS) a insisté, fin septembre 2014, sur la nécessité de soumettre à Autorisations de mise sur le marché (AMM) "tous les produits de consommation courante contenant des nanoparticules" 3.
Etiquetage [nano]
Le plan se prononce en faveur de la généralisation de l'étiquetage [nano] "à l'ensemble des produits chimiques qui contiennent des nanomatériaux" (page 72).
→ Analyse d'Avicenn : La généralisation de l'étiquetage est effectivement souhaitable ; il serait en outre nécessaire d'améliorer celui qui est prévu pour les rares catégories de produits qui sont censés être obligatoirement étiquetés (cosmétiques, biocides ou alimentation). Même pour ces produits, malgré les réglementations en vigueur, beaucoup de nanomatériaux échappent en effet à l'obligation d'étiquetage du fait des définitions retenues. Le seuil des 100 nm, notamment, a été retenu de façon arbitraire, et le Comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux (SCENIHR) de la Commission européenne a souligné l'absence de fondement scientifique à cette limite de 100 nm. Des résultats d'études toxicologiques font état d'effets toxiques engendrés spécifiquement à l'échelle submicronique dépassant les 100 nm, notamment jusqu'à 600 nm. De nombreux défis doivent encore être relevés pour obtenir un étiquetage pertinent.
Un groupe de travail étiquetage & restriction nano mis en place par le ministère de l'écologie a réuni industriels et associations à l'automne 2015 et à l'automne 2016 ; une nouvelle réunion est prévue début 2017. AVICENN y participe, n'hésitez pas à nous solliciter pour davantage de renseignements.
Voir aussi à ce sujet notre fiche sur L'étiquetage [nano] .
Evaluation des risques sanitaires et environnementaux associés aux nanomatériaux
Le plan considère comme prioritaire "l'harmonisation des méthodologies employées par les équipes de recherche pour contribuer à l'élaboration d'un corpus de connaissances fiables et comparables pour les évaluations des risques sanitaires" et que "les études de toxicité devront se concentrer sur les effets à long terme d'expositions chroniques aux faibles doses" (page 72).
→ Analyse d'Avicenn : Cette harmonisation et l'étude de l'exposition à long terme sont en effet indispensables. Nos remarques énoncées plus haut sur les risques des nanoparticules dans l'alimentaire valent aussi de façon plus générale sur les risques sanitaires et environnementaux des nanomatériaux toutes catégories de produits confondues.
Travailleurs exposés aux nanomatériaux
Le texte rappelle qu'"une cohorte de suivi de travailleurs potentiellement exposés aux nanomatériaux a été mise en place par l'Institut de veille sanitaire" et que "le suivi attentif ce type d'étude doit être encouragé par le gouvernement" (page 72). Il prévoit en outre de "réaliser des campagnes de mesures de nanomatériaux à l'extérieur des sites de fabrication et, en fonction des résultats, saisir les agences sanitaires dans l'objectif de définir des valeurs limites dans les milieux" (page 73).
→ Analyse d'Avicenn : Concernant le projet pionnier de suivi de cohorte EpiNano, sachant que les salariés devront remplir seuls un premier questionnaire de 27 pages, est-il réaliste de penser que le taux de réponse pourra être suffisamment important pour permettre une exploitation satisfaisante des données ?
La mise à disposition d'une personne compétente sur le plan médical ou scientifique permettrait certainement d'améliorer le taux de retours des questionnaires ainsi que la qualité de leur contenu.
Mi-juillet 2016, nous peinions toujours à obtenir des informations de la part de l'Institut national de veille sanitaire (InVS) sur l'avancement du dispositif EpiNano de suivi des travailleurs.
Concernant les campagnes de mesures de nanomatériaux à l'extérieur des sites de fabrication, on savait, en juillet 2016, qu'elles sont réalisées par l'INERIS et se heurtent semble-t-il à des difficultés méthodologiques...
Cycle de vie des nanoproduits et Environnement
Il est prévu d'"étudier le devenir des nanomatériaux, dans une approche du cycle de vie incluant le vieillissement et la phase « déchet » et acquérir des connaissances quant aux déchets industriels issus de la fabrication de nanomatériaux et aux déchets contenant des nanomatériaux" (page 73).
Indicateur : parution d'un rapport sur le vieillissement et la phase « déchets » des matériaux contenant des substances nano
L'action 75 prévoit également de "poursuivre la caractérisation des dangers des nanomatériaux les plus répandus en particulier à faibles doses, en exposition chronique, en appui au développement des modalités adaptées de gestion et de suivi dans l'environnement".
→ Analyse d'Avicenn : Afin de ne pas renouveler les erreurs du passé, il est en effet nécessaire que les industriels, les instances d'évaluation et de gestion des risques et les chercheurs considèrent le cycle de vie des nanomatériaux dans sa globalité : depuis leur conception jusqu'à leur destruction ou recyclage en passant par leur utilisation / consommation. Concernant les déchets, comment bien gérer les risques qui y sont associés dans la mesure où nul ne peut aujourd'hui identifier les produits qui contiennent des nanomatériaux ?
Il faudrait pourtant pouvoir agir préalablement à la commercialisation - et non pas comme "pompier" après l'apparition de problèmes sanitaires ou environnementaux. Le nombre de partenaires impliqués n'est-il pas trop limité eu égard aux questions sanitaires et environnementales qui sont en jeu ?
Quels moyens seront dédiés à la mise en oeuvre de ces actions ?
Quels seront les moyens alloués à la mise en oeuvre des actions "nano" listées dans le projet ? On l'ignore pour l'instant. (Le budget dédié aux nanomatériaux dans le PNSE2 était de 1,6 M sur 2009-2013). L'incitation des industriels à financer la recherche appliquée sur les nanomatériaux n'est-elle plus à l'ordre du jour ? Pourtant le groupe "Risques émergents" du PNSE2 l'avait inscrite dans ses objectifs en 2011 (cf. plus bas), la CLCV et le Réseau Environnement Santé l'avaient de nouveau demandée en 2009 et 20125, et en septembre 2013 le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), dans son évaluation du PNSE 26, s'était dit favorable à un mécanisme stable de longue durée (une taxe parafiscale par exemple sur les volumes de production et d'importation des nanoparticules, y compris dans les nanoproduits - ou une autre modalité de financement dédié) pour financer la recherche et le développement méthodologique sur les expositions et l'identification de leur potentiel dangereux, à l'instar de ce qui a été mis en place pour les ondes radiofréquences. Dans son rapport d'avril 2014, l'ANSES avait elle aussi cité ce mécanisme en exemple.
Pour que la chaîne des acteurs socio-économiques comprenne les enjeux et adhère aux objectifs de ce plan, d'autres leviers doivent en outre être mobilisés. Sans attendre la mise en place de la taxe mentionnée plus haut, les entreprises qui pensent (ou commencent) à faire des bénéfices grâce aux nanomatériaux peuvent en effet (ré-)investir utilement dans le soutien à ces actions et participer aux efforts collectifs y contribuant - citons notamment la participation à la veille et à l'information menée par Avicenn, au Forum NanoResp ou encore le colloque Les nanotechnologies, un nouvel enjeu pour la Responsabilité Sociale des Entreprises ? organisé le 30 septembre 2014 à Paris.
Archives : Quelle place pour les nanos dans le Plan National Santé Environnement 2009-2013 (PNSE2) ?
Les nanomatériaux ont fait l'objet d'une "action spécifique" du PNSE2, l'action 46 : "Renforcer la réglementation, la veille et l'expertise et la prévention des risques sur les nanomatériaux" (il s'agit de la déclinaison de l'engagement 159 du Grenelle).
Le budget dédié à cette action était de 1,6 M sur 2009-2013.
Renforcer la réglementation sur les nanomatériaux en rendant obligatoire leur déclaration de mise sur le marché, en étudiant des possibilités d'évolution de la réglementation relative aux installations classées pour qu'elle prenne en compte les activités relatives à la fabrication des nanomatériaux et leurs impacts éventuels sur l'homme et l'environnement et en mettant en place un programme de contrôles spécifiques permettant de vérifier dès que possible la mise en œuvre de la nouvelle réglementation.
Renforcer l'information et la concertation vis-à-vis du public, renforcer la prévention en milieu de travail vis-à-vis des nanomatériaux conformément aux recommandations de l'Afsset et du HCSP.
Développer et valider des essais pertinents
sous le pilotage de la Direction Générale de la Santé (DGS), la Direction Générale du Travail (DGT)
et en partenariat avec l'ANSES, l'INERIS, l'INRS, l'INVS, et la Direction générale de l'Alimentation (DGAL)
Les recommandations du groupe Risques Emergents concernant les nanomatériaux
Selon le rapport présentant l'état d'avancement des actions du PNSE2 menées en 20117, le groupe « Risques émergents » s'est réuni 6 fois en 2011, l'ordre du jour ayant été préalablement établi par la présidente et la co- présidente.
- Le groupe Risques Emergents
C'est le Groupe "Risques émergents" qui est chargé, entre autres sujets, des nanomatériaux dans le cadre du PNSE2.
Président : Francelyne Marano, Professeur Université Paris-Diderot
Co- présidente : José Cambou, France Nature Environnement
Membres :
André Cicolella, Réseau environnement santé
Alain Tostain, Centrale FO
Patrick Lévy, MEDEF/ UIC/LEEM
Remy Maximilien, CEA
Vincent Nedellec, RISE (VNC)
France Wallet, SFSE
Jean-Marie Haguenoer, Société Française de santé publique
Julien Gauthey, Mines de Paris
Danielle Salomon, Sociologue
Françoise Lavarde, Ministère du développement durable
Fabrice Candia, Ministère du développement durable
Aurélie Veillefosse, Ministère du développement durable
Catherine Mir, Ministère du développement durable
François Rousseau, DREAL Alsace
Anne Rouban, Ministère de l'Industrie - DGCIS
Caroline Paul, Ministère de la santé
Myriam Sahihi, Ministère de la santé
Matthieu Lassus, Ministère du travail
Marion Chaminade, Ministère de l'Agriculture - DGAL
Concernant les nanomatériaux, ses travaux ont porté sur :
les enjeux de la recherche, les suites du débat public, la réglementation sur les cosmétiques et réglements REACH et biocide. Auditions: Mme Marano et Mme Larrieu (CGDD) ; Mme Saihi (DGS) et M Maurer (DGPR) ;
les aspects travailleurs et veille. Auditions: M Lassus (DGT) et M. Merckel, Mme Thieriet et M Rousselle (ANSES).
- Les recommandations concernant l'évaluation des risques et la métrologie des nanomatériaux
Suite à sa réunion du 18 mars 2011 consacrée à l'évaluation des risques et métrologie des nanomatériaux, le groupe risques émergents a recommandé :
d'organiser une cartographie des équipes de recherche sur le sujet (dans le cadre du R 31, le Réseau des 31 organismes partenaires de l'ANSES, et sur la base du rapport sur la métrologie pour la nanotoxicologie du Groupe de concertation thématique Physique, Chimie, Nanosciences du Ministère de la recherche, dès que ce dernier sera disponible), y compris les laboratoires dans le domaine des sciences sociales ;
d'identifier et/ou développer les outils scientifiques pertinents pour l'évaluation des leur danger et de leurs risques en milieu de travail, pour le consommateur et dans l'environnement général ;
d'encourager une synthèse régulière des résultats de recherche en France et à l'étranger à travers les activités de veille scientifique de l'ANSES et de l'OMNT, et de la partager dans le cadre d'un séminaire ouvert au public, dans l'esprit du Nanoforum, afin de contribuer à l'identification des besoins de recherche dans ce domaine ;
de s'intéresser aux travaux "safe by design", consistant à façonner les nanoparticules et nanomatériaux de manière à réduire leur éventuelle toxicité ;
d'inciter à mobiliser les instances nationales sur les enjeux, en particulier de sécurité, liés à l'utilisation des nanoparticules et au développement des nanoparticules et nanotechnologies (Comité consultatif national déthique (CCNE) pour les sciences de la vie et de la santé, le Comité de la prévention et de la précaution (CPP), la CNIL, le Conseil national de la consommation (CNC), le HCSP, et la conférence nationale de santé...) et d'organiser des échanges entre ces différentes instances ;
de solliciter les comités d'éthique des instituts et organismes de recherche sur la question de l'utilisation des nanoparticules et nanomatériaux;
de mobiliser les relais au niveau local, notamment dans le cadre des deuxièmes plans régionaux santé environnement
- Les recommandations concernant la réglementation s'appliquant aux travailleurs et les questions de veille
Le groupe "risque émergents" a auditionné M. Lassus (DGT) et Mme Thieret (ANSES) le 08 juillet 2011 sur la réglementation s'appliquant aux travailleurs et sur les questions de veille et a recommandé :
de faire évoluer le format des fiches de données de sécurité au niveau international pour une prise de la dimension nanométrique des nanomatériaux ;
de coordonner les réseaux de veille sur les nanotechnologies (OMNT : Observatoire des Micro et Nanotechnologies, ANSES ; INSERM etc. ) ;
de mettre en place, d'ores et déjà, des mesures de gestion des risques pour les familles de nanoparticules pour lesquelles des dangers ont déjà été identifiés ou fortement suspectés ;
d'inciter les industriels à financer la recherche appliquée pour permettre la mesure et le contrôle sur les sites concernés ;
de développer les moyens d'information, de formation et de protection des équipes de recherche ainsi que des travailleurs des filières avals et des sous traitants ;
de former les opérateurs dans une logique de certification.
Dans sa lettre de cadrage adressée le 23 janvier 2013 à la ministre de l'Ecologie8, Jean-Marc Ayrault avait demandé à Delphine Batho de « veiller à réduire les risques sanitaires et environnementaux, notamment à travers la préparation du plan national santé - environnement (PNSE) 3, en accordant une attention particulière aux risques émergents » auxquels sont rattachés dans l'actuel PNSE2 les risques liés aux nanomatériaux.
Pour préparer le PNSE 3, les nanomatériaux devaient être pris en compte par le Groupe de Travail n°1 qui traite de l'exposome, c'est à-dire l'exposition tout au long de la vie. Lors de la réunion de mars 2014, il a été décidé que des fiches actions devaient être rédigées.
⇒ Vos informations, avis et analyses nous intéressent : n'hésitez pas à nous les envoyer (redaction(at)veillenanos.fr) afin que nous puissions donner à nos lecteurs le point de vue de l'ensemble des acteurs concernés. LIRE AUSSI sur notre site :
(Résidus de) Nanoparticules et Stations d'épuration
(Résidus de) Nanoparticules et Stations d'épuration
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout novembre 2019
Cette fiche fait partie de nos dossiers Nano et Eau et Nano et environnement. Elle a vocation à être progressivement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr. Sommaire :
Des nanomatériaux - ou leurs résidus - présents dans de nombreux produits de consommation, produits phytosanitaires ou effluents industriels arrivent jusqu'aux stations d'épuration. En 2013, des chercheurs ont estimé qu'entre 0,4 à 7% des 300 000 tonnes de nanomatériaux manufacturés produits dans le monde en 2010 ont été relargués dans l'eau1.
Quel impact sur le fonctionnement des stations d'épuration ?
On redoute que des nanomatériaux détruisent les bactéries utilisées pour dégrader les matières organiques, ce qui remettrait en cause le bon fonctionnement des stations d'épuration : en cause notamment, le nanoargent2 ou des nanoparticules d'oxyde de cuivre3.
En 2009 des gestionnaires de l'eau aux Etats-Unis ont alerté l'agence environnementale fédérale américaine (EPA) sur les effets néfastes du nanoargent sur le fonctionnement des stations d'épuration et l'environnement, références scientifiques à l'appui4.
D'autres études sont depuis venues étayer ces craintes : des études ont établi que certains nanomatériaux manufacturés peuvent avoir des effets préjudiciables sur les processus de traitement des eaux usées, en inhibant les processus anaérobies ou de dénitrification dans les stations d'épuration des eaux usées5. Mais les rares études sur la question ne sont pas toutes concordantes, et les effets ne sont pas les mêmes selon les types de nanomatériaux et les revêtements de surface6.
Quel devenir des nanomatériaux qui arrivent dans les stations d'épuration ?
Les stations d'épuration ne sont pas bien équipées pour filtrer les nanomatériaux dont une partie se retrouve dans nos rivières et dans l'eau potable.
Les estimations varient selon les recherches7, mais une grande majorité des nanomatériaux (en masse) serait captée et concentrée dans les boues des stations d'épuration.
Les estimations de concentrations des boues en nanomatériaux varient selon les études :
des mesures auraient montré que les boues contiennent 10 à 30 mg d'argent par kg de boue sèche (dont des nanoparticules d'argent et des ions argent)8.
d'autres estimations ont établi les concentrations suivantes de nanomatériaux au sein des boues de STEP à 10 mg/kg d'oxydes de cérium (CeO2), 2 mg/kg d'argent (Ag), 370 mg/kg à 2000 mg/kg de dioxyde de titane (TiO2), 65 mg/kg d'oxydes de zinc (ZnO)9.
selon une autre étude, dans les sols sur lesquels ont été épandues des boues de station d'épuration, ce seraient les nanoparticules de CeO2 et de TiO2 qui seraient en tête de liste ; les traitements des eaux conduiraient à des concentrations extrêmement faibles de nanoparticules de ZnO et de nanoparticules d'argent (Ag) dans l'environnement10.
Un groupe de chercheurs de l’Eawag et de l’EPF de Zurich ont démontré que les nanoparticules de plastique sont presque toutes retenues dans les boues des stations d’épuration11.
Quel impact sur la qualité des eaux, la faune et la flore aquatiques ?
Quelle que soit la performance des stations, en l'absence de mesure de restrictions de l'émission de nanomatériaux, les quantités de nanoparticules non filtrées relarguées dans les eaux de surface seront amenées à croître en même temps que ces produits qui envahissent le marché à une vitesse bien plus grande que le rythme de modernisation des stations d'épuration de par le monde.
Quelles sont (et seront) les conséquences sur la faune et la flore aquatiques ? Les études se développent et les résultats préoccupants se multiplient12.
Quel impact sur les sols agricoles où sont épandues les boues des stations d'épuration ?
Entre 70 et 80% des boues des stations d'épuration sont épandues sur les terres agricoles pour achever l'épuration tout en servant d'engrais (le reste est incinéré ou mis en décharge)13. Si certains contaminants métalliques sont contrôlés, il n'y a pas d'obligation de suivi des formes nanométriques de ces contaminants. Et l'argent, même sous forme non nanométrique, n'est actuellement ni systématiquement recherché, ni règlementé.
En 2012, des chercheurs suédois ont constaté que le nanoargent des textiles qui se retrouvait dans les boues d'épuration produisait des effets toxiques sur les vers de terre qui y étaient exposés14.
En Allemagne, une recherche a confirmé en 2013 que des nanoparticules d'argent peuvent être toxiques pour les microorganismes du sol essentiels au cycle naturel de l'azote : des effets néfastes peuvent apparaître à partir de 30 mg de nanoparticules d'argent par kilogramme de boues épandues (sur la base des taux d'application typiques en Allemagne de cinq tonnes par hectare de terres agricoles tous les trois ans)15.
Depuis 2014, des chercheurs français de l'ISTERRE étudient le devenir des nanoparticules d'argent dans les sols cultivés après épandage de boues de stations d'épuration contaminées : ils ont constaté des modifications de l'activité enzymatique du sol, même à faible dose.
Fin 2015, l'OCDE a publié un rapport qui juge "alarmant" l'épandage agricole des boues d'épuration des eaux usées, eu égard aux risques liés à la présence des nanomatériaux dans ces boues16 !
Comment faire pour ne pas renouveler les erreurs du passé ?
Comment tirer les leçons du passé ?
En France, dans les années 70-80, des expérimentations ont été focalisées sur le transfert des métaux lourds des boues d'épuration aux sols et aux cultures jusque dans la chaîne alimentaire17. Le dialogue entre "villes et campagne" a été tantôt un discours urbain sur les bienfaits d'un recyclage complémentaire et biologique par les sols, avec une dilution d'éléments indésirables, tantôt au refus par les agriculteurs du transfert de pollution des zones urbaines vers les zones rurales, sans garanties en cas d'impacts négatifs18.
Les premiers suivis de traçabilité centrés sur les métaux lourds ou éléments-traces métalliques (ETM : chrome, nickel, cadmium, cuivre, zinc, plomb, mercure, voire sélénium...) dans les années 80 ont ensuite été élargis à 10 micro-polluants organiques dans les années 90, et des études ont été menées sur l'impact des oestrogènes (provenant d'urines humaines et de contraceptifs) concentrés dans les eaux résiduaires et leur effet de perturbateur endocrinien sur la faune aquatique19.
En 2013, l'ADEME utilise toujours les termes de « valorisation » par épandage agricole des déchets, réglementé par le décret n° 97-1133 du 8 décembre 1997 et l'arrêté du 8 janvier 1998 ainsi que des arrêtés préfectoraux20. Et un fonds de garantie a été instauré pour indemniser les préjudices éventuellement subis par les exploitants et les propriétaires agricoles suite à un épandage de boues d'épuration urbaines ou industrielles sur leurs parcelles21.
⇒ Le même cycle de questionnements et de jeux d'acteurs reprend à chaque vague de prise de conscience de polluants émergents, provoquant une hausse des obligations de performances de traitement dans les stations d'épuration et de la vigilance tout au long de la chaîne de recyclage. La vague nanoargent est à l'étude ; combien d'années seront nécessaires avant une réaction à la hauteur des enjeux ? Faut-il laisser faire le développement des usages de masse ou bien tirer les enseignements d'expériences similaires ? Encore faut-il pouvoir identifier les principales sources de relargage de nanomatériaux dans les eaux usées - travail qui n'en est qu'à son balbutiement via notamment le registre R-Nano en France.
La transformation potentielle des nanomatériaux manufacturés dans le sol, leurs interactions avec les plantes et les bactéries dans la rhizosphère et leur transfert dans les eaux superficielles commencent tout juste à être étudiés :
5 - Selon l'OCDE (in Les nanomatériaux dans les flux de déchets, novembre 2015), à fortes concentrations, les nanomatériaux manufacturés ayant des propriétés métalliques pourraient inhiber le processus anaérobie ou de dénitrification, ce qui aurait un impact sur les communautés bactériennes et risquerait, à terme, de porter atteinte à la capacité de l'installation de réduire la toxicité des boues :
8 - Ces chiffres ont été cités par Franck Vanderbulcke, professeur à l'université de Lille lors de la séance du 6 mai sur le nanoargent du ForumNanoResp, mai 2015
21 - Cf. article L425-1 du code des assurances et le décret n°2009-550 du 18/05/2009
Fiche créée en septembre 2012
Les travaux du Réseau 31 (R 31) concernant les nanos
Les travaux du Réseau 31 (R 31) concernant les nanos
par MD - Dernière modification janvier 2014
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Le Réseau R31 mis en place en octobre 2010 et animé par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a pour objectif de renforcer les coopérations aux fins :
d'évaluation des risques sanitaires dans le domaine de l'alimentation, de l'environnement, du travail, et de la santé
de veille et d'alerte des pouvoirs publics en cas de risques pour la santé publique
d'amélioration de la connaissance des risques sanitaires dans le domaine de compétence de l'ANSES
Composition
Le R31 regroupe 31 instituts ou organismes1 français de recherche et d'évaluation de risques environnementaux ou sanitaires.
Ce réseau implique des établissements très variés :
des acteurs académiques, notamment des établissements de recherche et d'enseignement supérieur comme le CNRS, le CEA, l'INSERM, l'INRA, et des écoles vétérinaire ou d'agronomie,
des établissements à caractère plus techniques, des EPIC, comme l'INERIS, le CSTB, le LNE
des établissements plus spécifiquement dédiés aux questions de santé comme l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM)
Les travaux "nano et santé" du R31
La thématique "santé et nanomatériaux" est l'un des quatre domaines d'intérêt2 sur lesquels se penche le réseau R31.
Lors d'une réunion du R31 qui a eu lieu le 23 octobre 2012, les membres du réseau ont commencé à dégager quelques pistes de travail communes et de collaborations possibles entre divers organismes sur ce sujet.
Mieux vaut tard que jamais : trouver des synergies entre les différents acteurs concernés par les risques associés aux nanomatériaux est indispensable à la construction d'une vigilance collective.
Ce réseau présente l'avantage de provoquer des échanges entre acteurs académiques et organismes travaillant sur le court terme pour apporter des réponses aux industriels ou aux pouvoirs publics, et de mêler des disciplines extrêmement variées.
Un point a été fait sur les problèmes à résoudre. Trois domaines ont été identifiés afin d'être collectivement examinés, sous forme de réunions plus spécialisées et techniques, associant éventuellement d'autres acteurs que les membres du R31 :
la métrologie, afin de faire converger les outils et méthodes développées par exemple au LNE avec les besoins des biologistes qui souhaitent par exemple mesurer des nanoparticules dans le tube digestif : une réunion a eu lieu le 18 novembre 2013, pilotée par le LNE.
la toxicologie en général, afin de clarifier ce que l'on veut mesurer en toxicologie : des acteurs académiques ainsi que des personnes, proches de l'AFNOR ou de l'OCDE, cherchent des réponses à très court terme et se demandent ce qu'il leur faut donner aux industriels pour la réalisations de tests : une réunion a eu lieu le 9 décembre 2013, co-pilotée par l'ANSES et l'INRA
l'exposition des travailleurs, afin de préciser ce que l'on mesure et la manière de mesurer l'exposition d'un travailleur (domaines sur lesquels travaillent notamment l'INRS et de l'InVS)
Des efforts qui demandent à être confortés
Ces efforts demandent cependant à être confortés par une meilleure coordination nationale et la mise en place d'une vraie stratégie nationale de recherche, à articuler avec les préoccupations de la société civile et avec les besoins des entreprises et des autorités sanitaires et environnementales chargées de mieux évaluer et/ou mieux gérer ces risques. Car la difficulté d'évaluer, de pronostiquer, de gérer des risques reste énorme et plaide pour plus de responsabilité sociétale et environnementale de la part de chacune des parties prenantes (chercheurs, administrations, entreprises, élus, associations, médias, etc.). Le travail de veille et d'information que nous effectuons plus largement sur nos sites wikinanos.fr et veillenanos.fr entendent y contribuer.
NOTES et REFERENCES : 1 - Cf. la liste du réseau d'organismes du R31 sur le site de l'ANSES 2 - Les quatre thématiques sont : la veille prospective, l'antibiorésistance, la santé et les nanomatériaux, les dangers sanitaires et le cycle de l'eau.
Fiche initialement créée en mars 2013
Risques associés aux nanoparticules d'argent
Risques associés aux nanoparticules d'argent
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout décembre 2020
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Evaluations des risques
Des centaines de tonnes de nanoparticules d'argent sont produites chaque année dans le monde1 pour leurs propriétés antibactériennes ou antifongiques, malgré des risques pour l'environnement inquiétants, notamment pour les microorganismes, la flore et la faune aquatiques2 et les microorganismes du sol3, et des risques également sanitaires (argyrisme à fortes doses et surtout résistances des bactéries4 principalement).
En 2015, l'ANSES avait appelé à une classification des nanoparticules d'argent dans le cadre du règlement européen CLP5. Le processus est en cours. Au niveau européen, le 19 octobre 2020, l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) a soumis à consultation une proposition de classification de l'argent et du nanoargent6, avec, pour ce dernier, les valeurs suivantes :
Sensibilisant cutané de catégorie 1, H317 (peut provoquer une allergie cutanée)
Mutagénicité sur les cellules germinales de catégorie 2, H341 (susceptible d'induire des anomalies génétiques)
Toxicité pour la reproduction de catégorie 1B, H360FD (peut nuire à la fertilité, peut nuire au fœtus.)
Danger pour le milieu aquatique H400 et H410 (toxicités aigüe et chronique de catégorie 1).
La consultation a pris fin le 18 décembre 2020 ; la classification qui s'en suivra aura des conséquences comme la mise en place des mesures de protection et l'arrêt de l'utilisation de certaines applications grand public, à préciser en 2021 en fonction de la classification retenue.
Dans le domaine cosmétique, l'argent colloïdal (nano) fait depuis 2015 l'objet d'une procédure d'évaluation par le Comité Scientifique Européen pour la Sécurité des Consommateurs (CSSC ou SCCS en anglais, pour "Scientific Committee on Consumer Safety"). 63 notifications de produits contenant de l'argent colloïdal ont été réalisées auprès de la Commission ; le SCCS a rendu un avis en octobre 2018 réitérant que les données recueillies ne permettaient pas de s'assurer de l'innocuité du nanoargent dans les applications cosmétiques8.
Dans le domaine textile
Beaucoup de vêtements de sport seraient traités au nanoargent.
En décembre 2018, Svenskt Vattens, le syndicat suédois des eaux et des eaux usées a alerté sur l'argent antibactérien et anti-odeur provenant de textiles de sport9 : c'est la plus grande source connue d'argent dans les stations de traitement de l'eau, une menace pour nos lacs et nos mers, ainsi qu'un risque de propagation de la résistance aux antimicrobiens. Les marques et distributeurs sont invités à cesser de vendre des vêtements traités à l'argent pour protéger l'eau (Adidas est pointé comme le plus mauvais élève).
En avril 2019, l'ONG Women's Voices for the Earth s'inquiète de l’utilisation de nanoargent dans les serviettes et sous-vêtements menstruels10, du fait des risques pour la santé et pour l'environnement.
En mars 2020 aux Etats-Unis, plusieurs associations ont contesté la demande autorisation auprès de l'agence de protection de l'environnement américaine (EPA) d'un produit à base de nano-argent destiné à être appliqué sur des textiles, au vu des risques sanitaires et environnementaux qu'il serait susceptible d'entraîner11.
Dans le domaine médical
Même dans le domaine médical l'utilisation de nanoargent doit être mieux évaluée, ainsi que le souligne l'association Health Care without Harm (HCWM)12.
Vers des nanoparticules d'argent "safer by design" ?
En août 2020, des chercheur·e·s français·e·s ont annoncé avoir développé un nanomatériau biocide "safer by design"* comportant un assemblage de nanoparticules d'argent reliées entre elles par une molécule bio-inspirée. Il libère des ions Ag(I) de manière lente et contrôlée, contrairement aux nanoparticules d'argent utilisées actuellement qui subissent des processus non contrôlés de transformations et de libérations des produits13. * Pour en savoir plus sur le concept de "safer by design", cliquer ici.
How Nanosilver Gets Into Our Freshwater, and What We Need To Do About It, Lauren Hayhusrt, Fisheries Research Biologist, IISD Experimental Lakes Area, 16 avril 2020 : les recherches menées dans un lac canadien ont mis en évidence que les nanoparticules d'argent se retrouvent dans le foie et les branchies des poissons - quatre ans encore après l'exposition de ces derniers au nanoargent (en 2014-2015). Le nanoargent a entraîné une diminution de l'appétit et du métabolisme des perches, dont le nombre a diminué ; voir aussi, publié plus récemment, cet article scientifique : Multi‑Level Responses of Yellow Perch (Perca flavescens) to a Whole‑Lake Nanosilver Addition Study, Hayhurst LD et al., Archives of Environmental Contamination and Toxicology (2020) 79:283–297, 2020
Degger N et al., Silver nanoparticles disrupt regulation of steroidogenesis in fish ovarian cells, Aquat Toxicol., 4;169:143-151, novembre 2015 : cette étude montre que des nanoparticules d'argent (nAg) peuvent affecter les gènes spécifiques qui régissent la stéroïdogenèse, conférant aux nAg un potentiel de perturbation endocrinienne (cité par la lettre RES-Actus n°15, novembre 2015).
When enough is enough, Foss Hansen S & Baun A, Nature Nanotechnology, 7(7):409-11, juillet 2012 : "The European Commission should be regulating nanosilver, not asking for yet another report on its impact on health and the environment"
NanoEHS, la base de données répertoriant les publications scientifiques sur les risques en nanotechnologies, mise à jour par the International Council on Nanotechnology (ICON) ne semble plus fonctionner
Institutions publiques ou para-publiques (dont agences sanitaires et/ou environnementales) :
6 - Cf. proposition de classification de l'argent et du nanoargent, ECHA, octobre 2020. Cette classification est le point d'aboutissement d'une longue procédure. Une évaluation des risques liés à l'argent (y compris ses nanoformes) devait être menée par les Pays-Bas en 2014 dans le cadre du plan d'action (CORAP) de l'ECHA du fait des inquiétudes concernant l'écotoxicité et le devenir environnemental de l'argent, particulièrement sous forme nano
Un document de 2016 laissait penser que les informations recueillies auprès des fabricants devaient encore être complétées (cf. DECISION ON SUBSTANCE EVALUATION PURSUANT TO ARTICLE 46(1) OF REGULATION (EC) NO 1907/2006 For Silver, CAS No 7440-22-4 (EC No 23 1-131-3), ECHA, juillet 2016).
En 2018, l'évaluation de l'utilisation biocide de différentes formes d'argent (y compris les formes nanocomposites) et de sels d'argent était en cours, par la Suède, dans la perspective de propositions pour une classification et un étiquetage harmonisés (CLH) de ces formes d'argent (cf. Cf. SUBSTANCE EVALUATION CONCLUSION and EVALUATION REPORT for Silver EC No 231-131-3 CAS No 7440-22-4, novembre 2018)
En 2019, la page dédiée sur le site de l'ECHA indiquait qu'une proposition CLH avait bien été formalisée en mai 2019 par la Suède.
Risques associés aux nanomatériaux utilisés dans les cosmétiques
Risques associés aux nanomatériaux utilisés dans les cosmétiques
Par MD, DL et l'équipe Avicenn - mars 2014 (en cours de rédaction, pas encore accessible sur le site public)
Cette fiche a vocation à être progressivement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
En 2011, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) avait constaté que les études scientifiques ne montraient pas de pénétration cutanée significative des nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) pour les peaux saines, mais ne permettent pas de tirer de conclusion dans un sens ou dans l'autre pour les peaux lésées. L'Afssaps a donc recommandé de ne pas appliquer de crème contenant du nano TiO2 sur des peaux lésées (par exemple par des coups de soleil) du fait des risques potentiels pour la santé humaine ; elle a également déconseillé d'utiliser sur le visage ou dans des locaux fermés les cosmétiques contenant des nanoparticules et se présentant sous formes de spray2.
Roger Lenglet, dans son enquête "Nanotoxiques" publiée en mars 2014 chez Actes Sud, reproduit les confidences d'un toxicologue d'une firme cosmétique, recueillies en septembre 2013 : "Les armoires de toilette qui se sont remplies de cet arsenal vont tôt ou tard apparaître pour ce qu'elles sont : des armoires à poison", me souffle le toxicologue d'une firme, en se plaignant - en off - que ses avis ne soient 'pas pris en compte". "Personnellement, confie-t-il, je me suis toujours méfié de l'utilisation des nanos dans des produits destinés à entrer en contact avec l'organisme. Ça disparaîtra aux premiers procès qu'on ne pourra pas éviter à l'amiable. Je savais depuis le début qu'on jouait avec le feu. En tout cas, je peux vous dire qu'ils ne sont pas près d'entrer dans ma salle de bains".
Vous pouvez déclarer en ligne tout effet indésirable à l'ANSM
Vous pouvez déclarer tout effet indésirable, grave ou non, qui s'est produit dans les conditions normales d'emploi d'un produit cosmétique chez l'homme ou qui a résulté d'un mésusage.
La fiche de déclaration en ligne permet de recueillir de façon standardisée et rapide les effets indésirables survenus suite à l'utilisation de produits cosmétiques.
Un article publié début 2019 dans Nature Nanotechnology montre que les nanoparticules de dioxyde de titane, de silice et d'or peuvent induire des modifications de l'endothélium et donc une fuite de cellules tumorales, à l'origine de métastases. Selon Frédéric Lagarce, professeur de biopharmacie et praticien hospitalier à Angers, "ce qui est intéressant / original c'est de montrer un risque potentiel des nanotechnologies dans le traitement des tumeurs alors que ces technologies sont souvent présentées comme la réponse pour améliorer les performances des anticancéreux. Il faudrait maintenant vérifier si ces modifications endothéliales sont aussi retrouvées avec les nanoparticules polymères ou lipidiques, beaucoup plus utilisées pour encapsuler des actifs et cibler les tumeurs. Si cela était malheureusement le cas, toute la stratégie des nanomédecine (très orientée cancer) serait remise en cause".
Fin 2019, des chercheur·es ont mis en évidence que les nanoparticules d’or ne sont pas si stables que ce que l'on pensait dans les cellules1.
Publiées début 2020, des recherches menées en Allemagne ont montré que l'absorption de nanoparticules d'or par des cellules perturbe le métabolisme de ces dernières "comme si elles avaient couru un marathon" (augmentation du nombre de mitochondries et d'endosomes, baisse d'autres organelles comme les gouttelettes lipidiques et corps multivésiculaires)2.
Des chercheur·es de l'Imperial College de Londres ont mis en évidence3 que :
les nanoparticules plus grosses (50-60 nm) adhèrent parfois à l'extérieur de la membrane, causant une perturbation minimale
les nanoparticules de taille moyenne (25-35 nm) adhèrent plus souvent à la surface et causent une certaine distorsion
les nanoparticules plus petites (5-10 nm) déforment considérablement la membrane, la courbant parfois vers l'intérieur avec plusieurs nanoparticules empilées, causant une distorsion tubulaire.
Les nanoparticules plus petites peuvent donc provoquer des effets secondaires toxiques indésirables dans l'organisme lorsqu'elles ne sont pas fonctionnalisées.
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Les effets potentiellement néfastes des nanoparticules de silice sur la santé1 mais également sur l'environnement2 sont de plus en plus documentés.
Dès 2014, l'Agence française de sécurité sanitaire (ANSES) a préconisé un classement des nanoparticules de dioxyde de silice dans le Règlement CLP afin que soient mises en place des mesures de restriction d'usage voire d'interdiction de l'utilisation de certaines applications grand public3.
Une évaluation du dioxyde de silice et de ses nanoformes par les Pays-Bas était planifiée pour 2012 dans le cadre REACh, via le "Plan d'action continu communautaire" (CoRAP) de l'agence européenne des produits chimiques (ECHA). Elle a été lancée en 20144mais n'a pas abouti aujourd'hui, faute de données suffisantes fournies par les fabricants de silice.
En mars 2015, l'ECHA a relayé les difficultés rencontrées par les Pays-Bas et a demandé davantage d'informations aux industriels sur les nanoformes de silice qu'ils fabriquent, afin de pouvoir mener à bien l'évaluation de ces substances5. Mais en juin 2015, la "Chambre des recours" de l'ECHA s'est vue notifier des recours par les fabricants de nanosilice refusant de donner les informations demandées : l'un isolé, par Grace (Allemagne)6, l'autre groupé, rassemblant 35 entreprises7 : quatre entreprises implantées en France font partie des signataires (Evonik Aerosil France Sarl, Clariant Production S.A.S, Merck Performance Materials SAS, Rhodia Operations SAS).
Un document de l'ECHA daté de mars 2015 stipule qu'une sous-estimation possible des dangers ne peut être exclue sur la base des données fournies par les fabricants de silice, appelés à préciser leurs informations.
Où en est l'instruction de ce dossier ? Ce n'est pas très clair : document CORAP.
Les agrégats ne doivent pas être considérés comme nécessairement moins toxiques que les particules primaires
Début 2020 ont été publiés les résultats de recherches menées en Belgique montrant que les agrégats de taille supérieure à 100 nm ne doivent pas être considérés comme nécessairement moins toxiques que leurs homologues nanométriques8.
Risques spécifiques de la silice dans les cosmétiques
Concernant les cosmétiques : le Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs (CSSC) a fait état, en septembre 2015, de données trop disparates, inadéquates et insuffisantes pour pouvoir conclure tirer aucune conclusion concernant la sécurité des nanoformes de silice9.
Risques spécifiques de la silice dans l'alimentation
Depuis 2011 au moins, on sait que la silice alimentaire (E551) peut contenir des nanoparticules et des chercheurs ont estimé à 124 mg notre consommation de nano-silice par jour10.
Concernant les risques liés à leur exposition par voie orale (via l'alimentation), la réévaluation du E551 (silice en tant qu'additif alimentaire) par l'EFSA, attendue pour décembre 2016, a finalement été publiée début 2018, sans que des conclusions définitives puissent en être tirées concernant l'innocuité ou la toxicité de cet additif11.
Mais des scientifiques signalent des effets indésirables non négligeables ; vous trouverez des informations plus détaillées en cliquant ici.
La 1ère substance nano autorisée comme biocide
En avril 2014, le nano dioxyde de silice amorphe synthétique est devenue la première (et jusqu'à fin 2016 au moins, la seule) substance nano à avoir été approuvée comme pouvant être mise sur le marché comme substance biocide à compter du 1er novembre 201512.
Les propriétés antibactériennes de la silice, recherchées pour certaines applications ciblées, peuvent entraîner des effets indésirables pour certaines communautés bactériennes nécessaires à la santé ou à l'équilibre des écosystèmes. La vigilance doit donc être de mise.
Et dans le domaine médical ?
Dans le domaine médical, un article publié le 28 janvier 2019 dans Nature Nanotechnology montre que les nanoparticules de dioxyde de silice peuvent induire des modifications de l'endothélium et donc une fuite de cellules tumorales, à l'origine de métastases. Selon Frédéric Lagarce, professeur de biopharmacie et praticien hospitalier à Angers, "ce qui est intéressant / original c'est de montrer un risque potentiel des nanotechnologies dans le traitement des tumeurs alors que ces technologies sont souvent présentées comme la réponse pour améliorer les performances des anticancéreux. Il faudrait maintenant vérifier si ces modifications endothéliales sont aussi retrouvées avec les nanoparticules polymères ou lipidiques, beaucoup plus utilisées pour encapsuler des actifs et cibler les tumeurs. Si cela était malheureusement le cas, toute la stratégie des nanomédecine (très orientée cancer) serait remise en cause".En savoir plus sur la nanomédecine en cliquant ici.
En mai 2019, l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) met en garde contre les risques élevés pour la santé associés à la silice cristalline, en particulier pour les 365 000 travailleurs qui y sont exposés, notamment au quartz. Les risques des silices amorphes sont particulièrement importants, à cause de leur taille nanométrique. L’Anses recommande une série de mesures en termes de prévention et de maîtrise des expositions en milieu professionnel, de surveillance médicale et de reconnaissance des maladies professionnelles.
6 - Announcement of appeal - Grace GmbH & Co. KG, ECHA, août 2015 : "The Agency has based its decision very largely on its own classification of SAS as a nanomaterial, a classification that the Agency is not empowered to make and that in any event is irrelevant to the toxicity of SAS; (d) The Contested Decision is disproportionate in that it is not appropriate or necessary to achieve the objective of protecting human health, and places an unduly heavy burden on the Appellants"
7 - Announcement of appeal - Evonik Degussa GmbH and others, ECHA, août 2015 : "On 29 February 2012, silicon dioxide was included on the CoRAP due to initial grounds for concern relating to 'the substance characterisation, nanoparticles and toxicity of different forms of the substance'. The Appellants claim, however, that none of those alleged grounds for concern are criteria for inclusion of a substance on the CoRAP. The Appellants argue that as a result the Agencys decision to include the substance on the CoRAP was adopted in breach of Article 44 of the REACH Regulation and must be set aside. (...) The Appellants claim that the mere fact that the substance meets the non-legally binding definition of 'nanomaterials' in Commission Recommendation 2011/696/EU on the definition of nanomaterial is not sufficient to justify the requests for information in the Contested Decision. By requesting information on the substance on the grounds that the substance meets the nonlegally binding definition of 'nanomaterials' in the Commission Recommendation, the Agency failed to identify a valid concern that needs to be addressed through the substance evaluation procedure."
En plus des entreprises françaises citées plus haut, les signataires étaient des entreprises :
allemandes : Evonik Degussa GmbH, Evonik Industries AG, Akzo Nobel Chemicals GmbH, BASF SE, Cabot Aerogel GmbH, Cabot GmbH, Clariant Produkte (Deutschland) GmbH, Grace Silica GmbH, Johnson Matthey Chemicals GmbH, Merck KGaA, Wacker Chemie AG
espagnoles : Evonik Silquilmica SA, IQESIL S.A, Instituto Suizo Para el Fomento de la Seguridad Swissi-España, S.L.U
belges : Evonik Degussa Antwerpen NV, SCAS Europe S.A./N.V, Specialty Chemicals Coordination Center SA/NV
suédoises : Akzo Nobel Pulp and Performance Chemicals AB
finlandaises : Akzo Nobel Finland OY, Albemarle Europe Sprl, J.M. Huber Finland OY
hollandaises : Albermarle Catalysts Company B.V., PPG Industries Chemicals BV
britanniques : Cabot Carbon Limited, LSR Associates Ltd., PQ Silicas UK Ltd., PPG CENTRAL (UK) Ltd.
italiennes : Deltagran Europe srl, Silysiamont SpA, Solvay Solutions Italia SpA
Risques associés aux nanoparticules de dioxyde de titane (TiO₂)
Risques associés aux nanoparticules de dioxyde de titane (TiO₂)
Par l'équipe Avicenn - Dernière modification novembre 2020
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Une publication récente a établi la présence de nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) dans le foie et la rate de 15 humains (et non plus seulement sur des rats de laboratoire). Dans la moitié des cas, les niveaux étaient supérieurs à celui jugé sans danger pour le foie1.
Des présomptions de risques très fortes pour le dioxyde de titane (même non nano)
Même non nano, le TiO2 inhalé est possiblement cancérigène
En 2006 le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) avait classé le dioxyde de titane (TiO₂) comme cancérigène possible pour l'homme (classe 2 B)2 - et ce, toutes tailles confondues : l'échelle nanométrique est donc concernée mais pas plus ni moins que le TiO2 non nanométrique. Les études qui ont été considérées pour cette classification portaient sur le TiO₂ sous forme de poudre avec la présomption de risques par inhalation qui concernent d'abord les travailleurs potentiellement exposés.
Treize ans plus tard, au terme d'un long bras de fer entre les industriels et les autorités sanitaires françaises et européennes, la classification du TiO2 comme cancérogène de catégorie 2 par inhalation a été adoptée par la Commission européenne le 4 octobre 2019 et publiée en février 20203. En cause : la rétention (biopersistance) dans les poumons et la faible solubilité du dioxyde de titane.
La classification du TiO2 entrera en vigueur à compter du 1er octobre 2021. Lorsqu’il est utilisé sous la forme d’une poudre contenant 1 % ou plus de particules d’un diamètre aérodynamique inférieur ou égal à 10 μm, il sera nécessaire d’informer les utilisateurs des mesures de précaution qui doivent être prises pour réduire autant que possible le risque pour la santé humaine, par exemple avec la mention suivante sur les mélanges liquides : "Attention ! Des gouttelettes respirables dangereuses peuvent se former lors de la pulvérisation. Ne pas respirer les aérosols ni les brouillards".
L'Association professionnelle des fabricants de dioxyde de titane (TDMA) a annoncé que le 13 mai 2020, certains de ses membres ont introduit, devant le Tribunal de l'Union européenne, un recours contre la classification harmonisée du TiO2, dont ils demandent l'annulation4. La décision du Tribunal ne devrait pas être rendue avant deux à trois ans, soit après l'entrée en vigueur de la classification le 1er octobre 2021. En attendant, la TDMA indique qu'elle et ses membres "s'efforceront de trouver un moyen de mettre en œuvre le règlement à partir de cette date, malgré les incertitudes de la classification".
A l'échelle nano, les risques pourraient être encore plus grands
Depuis plusieurs années, les publications scientifiques sur les risques associés aux nanoparticules de dioxyde de titane s'accumulent5.
En mai 2014, l'Agence française de sécurité sanitaire (ANSES) avait donc préconisé un classement des nanoparticules de dioxyde de titane (et autres) comme substances dangereuses afin que soient mises en place des mesures de restriction d'usage voire d'interdiction de l'utilisation de certaines applications grand public6.
Cette préconisation a été reprise dans l'action n°72 du 3ème plan national Santé Environnement (PNSE 3) (2015-2019) fin 2014 et dans l'action 1.13 du Plan Santé au travail (PST 3) (2016-2019).
Nous ignorons à ce stade quelle(s) déclinaison(s) la DGT a donné, ou non, à cette action. Des demandes ont-elles été déposées ou sont-elles en préparation ?
L'impact de la forme cristalline sur la toxicité du dioxyde de titane reste à affiner, mais il semblerait qu'à surface égale les formes anatases induisent moins d'inflammation que les formes rutiles et que la réponse inflammatoire et de phase aiguë est plus importante et plus persistante pour les tubes de TiO27.
En 2018, le Haut Conseil de la Santé publique (HCSP) a appelé à protéger les travailleurs et les populations à proximité des sites industriels produisant ou manipulant du nano-TiO2, et publié différentes préconisations pratiques à destination des pouvoirs publics et des industriels9.
L'évaluation des risques associés au dioxyde de titane (y compris ses nanoformes), prévue dans le cadre de REACH, devait être réalisée par l'ANSES depuis 2012-2013, mais elle a été entravée par le refus des industriels de communiquer les données nécessaires à cette évaluation. Le dioxyde de titane est donc toujours en cours d’évaluation. Des informations complémentaires (au regard des informations disponibles dans le dossier d’enregistrement) vont être demandées aux industriels mettant sur le marché ou fabriquant du dioxyde de titane sur le marché européen. Cette demande d’informations complémentaires doit être validée au niveau européen selon la procédure en vigueur, dans un prochain comité des Etats membres courant 2021.
- Dans l'alimentation
L'additif alimentaire E171 est constitué de particules de TiO2 (dont une partie sous forme nano). Il a été suspendu en France à partir de début 2020. Il reste autorisé au niveau européen par l'EFSA, mais de nouvelles études sont en cours pour évaluer son impact notamment sur le système reproducteur
→ Voir plus de détails ici.
De nombreuses publications font état d'effets délétères sur la santé liés à l'ingestion de nanoparticules de TiO2 : risques pour le foie, les ovaires et les testicules chez les humains, problèmes immunitaires et lésions précancéreuses au niveau du côlon chez le rat, perturbations du microbiote intestinal, inflammations et altérations de la barrière intestinale chez les animaux comme chez les humains, effets néfastes pour la descendance chez les rongeurs...
- Dans les cosmétiques
L'innocuité des nanoparticules de dioxyde de titane dans les cosmétiques n'est pas aussi établie que ce que l'on a pu croire pendant longtemps11 et plusieurs associations demandent l'interdiction du TiO2 dans les produits cosmétiques susceptibles d'être ingérés (dentifrices, baumes et rouges à lèvres notamment).
Dans les crèmes solaires et produits de beauté, les nanoparticules de TiO₂ (Cl 77891) ont été évaluées par le Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs (CSSC), qui a approuvé leur utilisation comme anti-UV, avec une autorisation d'une concentration maximale de 25% (les applications sous forme de spray ne sont pas autorisées)12 ; la forme nano des particules de dioxyde de titane est inscrite depuis août 2016 à l'annexe VI du Règlement Cosmétiques 13. Elle sont utilisées principalement sous forme rutile (ou mélange anatase / rutile) et souvent enrobées d'une couche de silice ou d'alumine afin d'empêcher la formation de radicaux libres (qui provoquent le vieillissement cutané).
Mais plusieurs problèmes ont été relevés :
le chlore des piscines peut dégrader ce revêtement, or au contact de l'eau et sous l'effet de la lumière, le nanoTiO2 peut alors libérer des radicaux libres, responsables du vieillissement de la peau et de l'apparition de cancers14
des recherches en Espagne et en France ainsi estimé que les quantités de nanoparticules de dioxyde de titane relarguées en été sur des plages de Méditerranée et montré une augmentation significative de la concentration en peroxyde d'hydrogène, une molécule toxique pour le phytoplancton qui constitue la nourriture de base des animaux marins15
des dermatologues des Hôpitaux Bichat et Rothschild ont, pour la première fois, observé au Synchrotron soleil la présence de nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) le long de follicules pileux d’une patiente atteinte d’alopécie frontale fibrosante (chute de cheveux en haut du front) qui utilise quotidiennement, depuis 15 ans, des écrans solaires contenant du TiO216.
des chercheurs en République tchèque ont testé une crème solaire contenant des nanoparticules de dioxyde de titane et établi qu'elle ne permet PAS de prévenir le cancer de la peau (bien qu'elle empêche la peau de rougir, elle ne la protège pas du stress oxydatif provoqué par les UV !)17
En mars 2019, du fait de ces risques et incertitudes autour de l'innocuité des nanoparticules de dioxyde de titane, Cosmébio a recommandé18 à ses adhérents de supprimer le dioxyde de titane de leurs produits ou à le remplacer par une alternative lorsque celle-ci existe.
Les effets potentiellement indésirables des nanoparticules de dioxyde de titane dans les crèmes solaires continuent de faire l'objet d'études19 et de controverses20.
Un article publié le 28 janvier 2019 dans Nature Nanotechnology montre que les nanoparticules de dioxyde de titane, de silice et d'or peuvent induire des modifications de l'endothélium et donc une fuite de cellules tumorales, à l'origine de métastases. Selon Frédéric Lagarce, professeur de biopharmacie et praticien hospitalier à Angers, "ce qui est intéressant / original c'est de montrer un risque potentiel des nanotechnologies dans le traitement des tumeurs alors que ces technologies sont souvent présentées comme la réponse pour améliorer les performances des anticancéreux. Il faudrait maintenant vérifier si ces modifications endothéliales sont aussi retrouvées avec les nanoparticules polymères ou lipidiques, beaucoup plus utilisées pour encapsuler des actifs et cibler les tumeurs. Si cela était malheureusement le cas, toute la stratégie des nanomédecine (très orientée cancer) serait remise en cause".
En savoir plus ici.
- Dans les peintures et le bâtiment
Des recherches récentes ont montré que l'efficacité des peintures comportant des nanoparticules de TiO2 n'est pas optimale et que la balance bénéfices / risques n'est pas concluante21.
Le projet « Release_NanoTox » (financement ANSES 2015-2018) a tenté d'apporter des connaissances nouvelles concernant l’impact potentiel des nano-objets issus de matériaux nanocomposites sous contrainte d’usage, sur les fonctions cérébrales. Les équipes scientifiques ont développé un banc expérimental permettant de réaliser une exposition réaliste à partir de nanoparticules de TiO2 issues du ponçage de matériaux nanoadditivés. Le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB) et le LNE (Plateforme MONA) ont participé à la phase de caractérisation aéraulique de ce banc et à la caractérisation physico-chimique des nano-objets émis dans la chambre d’exposition. Puis l’ANSES et le laboratoire CarMeN ont été impliqués pour les phases d’exposition par inhalation et d’analyse in vivo des altérations morphofonctionnelles cérébrales des souris au cours de l’exposition. Les résultats sont en cours d’exploitation22.
Un projet de recherche européen intitulé NanoHouse mené entre 2010 et 2013 avait observé le cycle de vie de nanoparticules de dioxyde de titane contenues dans les peintures et revêtements utilisés en intérieur et à l'extérieur des habitations. Les travaux ont évalué le taux de relargage des nanoparticules de 1 à 2% seulement - et sous forme d'agglomérats23. Mais d'autres études sont beaucoup moins rassurantes : une étude de l'INERIS et de l'université de Compiègne publiée début 2015 a montré qu'un nanorevêtement de dioxyde de titane existant dans le commerce, une fois appliqué sur une façade de bâtiment, peut se détériorer sous l'effet du soleil et de la pluie ; ce faisant, il entraîne le relargage de particules de titane dans l'air en quelques mois - et qui plus est, sous forme de particules libres (plus dangereuses que lorsqu'elles sont agglomérées entre elles ou avec des résidus d'autres matériaux)24, il convient donc dans ces conditions de minimiser le recours aux nanorevêtements.
Source : Emission of titanium dioxide nanoparticles from building materials to the environment by wear and weather, Shandilya, N et al., Environmental Science & Technology, 49(4): 2163-2170, 2015
Outre la toxicité et l'écotoxicité associées aux nanoparticules de TiO2 en elles-mêmes, se pose la question de la production et de la toxicité des composés issus de la réaction photocatalytique : des chercheurs ont constaté que la décomposition de composés organiques volatiles (COV) par des nanoparticules de TiO2 incorporées dans des revêtements ou peintures n'est pas complète et qu'elle génère d'autres molécules nocives (acétone, acétaldéhyde, formaldéhyde notamment)25.
Quelle surveillance environnementale ?
En juin 2020, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) a publié un rapport concernant la surveillance métrologique dans l’environnement des nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) finalisé en octobre 201926. Pour le HCSP, il est envisageable de réaliser des mesures de taux de concentrations de nanoparticules de TiO2 dans l’air autour des sites industriels. En l'absence de méthode unique opérationnelle permettant de mesurer simultanément le nombre / la masse des particules et de réaliser l’analyse chimique du TiO2 nanoparticulaire, le HCSP considère que différentes approches et méthodes de mesure doivent être considérées, en fonction des spécificités de chaque situation.
Depuis 2019, l'usine Tronox (ex-Cristal) dans le Haut-Rhin est tenue de réaliser une surveillance environnementale des incidences de ses émissions de particules de dioxyde de titane incluant les formes nanométriques, à raison de deux campagnes de mesure chaque année27. En octobre 2020, la DREAL du Haut-Rhin a indiqué à Avicenn28 qu'aucune particule nanométrique isolée de TiO2 n'avait été détectée lors de la dernière campagne aux résultats connus à l'époque (juin 2019) ; deux types d'éléments ont été observés : une petite minorité d'agglomérats de taille supérieure à 250 nm composés de nanoparticules et une grande majorité de sphéroïdes de plus de 100 nm pour certaines de plus de 400 nm. Les concentrations 2019 étaient en baisse par rapport aux campagnes exploratoires effectuées en 2013, 2016 et 2018 ; celles de février 2020 dans des niveaux proches de la limite de quantification. Les résultats des campagnes ultérieures de l'été 2020 n'étaient pas encore disponibles.
Des restrictions en Suisse
En 2008, le Grand Conseil de la République et canton de Genève a déconseillé l'utilisation du TiO2 nanoparticulaire sur les chantiers de l'Etat ainsi que dans les constructions des entreprises privées29. Il s'est basé notamment sur l'étude réalisée par le Service cantonal de toxicologie industrielle et de protection contre les pollutions intérieures qui considèrait "irresponsable d'utiliser un tel produit avant même de rechercher les dangers connus et d'évaluer leurs risques", déplorait "l'emploi prématuré de ces produits en Italie, en France et en Belgique" et souhaitait "que ces imprudences ne soient pas répétées sur le territoire de notre Canton"30.
Les larges agglomérats ne doivent pas être considérés comme nécessairement moins toxiques que les petits agglomérats
Début 2020 ont été publiés les résultats de recherches menées en Belgique montrant que les grands agglomérats de nanoparticules de TiO2 ne semblent pas moins actifs que les petits agglomérats31.
En savoir plus
Quelques ressources sur les risques associés aux nanoparticules de dioxyde de titane (nanoTiO₂) :
Nicolle-Mir L, Revue des données toxicologiques sur les nanoparticules de dioxyde de titane, Environnement, risques et santé, 13, 180-181, 2014 (synthèse en français de l'article listé ci-dessous)
TiO2 genotoxicity: an update of the results published over the last six years, Carrière M, Arnal ME, Douki T, Mutation Research/Genetic Toxicology and Environmental Mutagenesis, 15 mai 2020 : cette revue de la littérature scientifique, réalisée par des chercheur·es du CEA, montre que les particules de dioxyde de titane (TiO2), de taille nanométrique et microscopique, entraînent des dommages de l'ADN sur divers types de cellules, pulmonaires et intestinales, même à des doses faibles et réalistes.
Effects of Titanium Dioxide Nanoparticles Exposure on Human Health—a Review, Baranowska-Wójcik E et al., Biological Trace Element Research, 1–12, 2019 : "TiO2 NPs can induce inflammation due to oxidative stress. They can also have a genotoxic effect leading to, among others, apoptosis or chromosomal instability. (...) Regular supply of TiO2 NPs at small doses can affect the intestinal mucosa, the brain, the heart and other internal organs, which can lead to an increased risk of developing many diseases, tumours or progress of existing cancer processes."
NanoEHS, la base de données répertoriant les publications scientifiques sur les risques en nanotechnologies, mise à jour par the International Council on Nanotechnology (ICON) ne semble plus fonctionner (2016)
15 - En 2014, des chercheurs espagnols ont ainsi estimé que l'activité touristique sur une plage de Méditerranée durant une journée d'été peut relarguer de l'ordre de 4 kg de nanoparticules de dioxyde de titane dans l'eau, et aboutir à une augmentation de 270 nM/jour de la concentration en peroxyde d'hydrogène (une molécule au potentiel toxique, notamment pour le phytoplancton qui constitue la nourriture de base des animaux marins). Cf. Écrans UV nanos : un danger pour la vie marine, L'Observatoire des Cosmétiques, 5 septembre 2014
En 2017, des chercheurs du CEREGE en France ont de leur côté mesuré la concentration en titane dans l'eau de trois plages de Marseille et ont estimé à 54 kilos par jour le poids de TiO2 relargué dans les deux mois d'été pour une petite plage. Voir :
Nano et Santé au travail (3d/3) : Recommandation d : Enregistrer l'exposition des travailleurs et surveiller leur santé sur le long terme
Nano et Santé au travail (3d/3) : Recommandation d : Enregistrer l'exposition des travailleurs et surveiller leur santé sur le long terme
Par MD et l'équipe Avicenn - Dernière modification avril 2020
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Les travailleurs exposés (y compris les intérimaires et sous-traitants, étudiants et stagiaires) devraient donc pouvoir conserver les résultats de leurs examens médicaux, non seulement tout au long de leur période d'activité mais également après la fin de leur exposition professionnelle aux nanomatériaux.
Lorsque les travailleurs sont des femmes, il serait opportun, outre toutes les mesures de protection citées plus haut, d'étendre cette surveillance médicale à leur descendance, pour vérifier les éventuelles répercussions sur l'état de santé de leur(s) enfant(s).
Des études avec des premiers résultats de suivi médical commencent à paraître et confirment les inquiétudes des services sanitaires : elles ont été menées à Taiwan2 et en Corée3.
Davantage d'études sont menées en Chine, mais elles sont rarement de bonne qualité : beaucoup comportent des biais, ou ne détaillent pas l'exposition et/ou les conditions de travail.
Les services de santé au travail, les médecins du travail, etc. ont-ils les moyens d'assurer un tel suivi ? Dans l'état actuel des choses, rien n'est moins sûr.
... à adosser à un suivi de leur exposition aux nanomatériaux
Au sein des entreprises où sont manipulés des nanomatériaux, un suivi de l'exposition des travailleurs aux nanomatériaux devrait également être réalisé parallèlement au suivi médical spécifique mentionné plus haut.
Dès 2009, la création de registres d'exposition pour les travailleurs exposés aux nanomatériaux avait été promue par l'institut américain pour la sécurité et la santé au travail (NIOSH)4.
Combinés à la réalisation de ces examens médicaux sur le long terme, de tels registres permettraient :
d'évaluer l'impact à moyen et long terme des nanoparticules manufacturées sur la santé des travailleurs (études épidémiologiques) ; il s'agit là de combler un manque, car jusqu'à peu, les liens entre exposition et maladies n'ont pas pu être dûment établis aujourd'hui, faute de données collectées. (A Taiwan, une étude menée sur six mois et publiée fin 2013 a cependant déjà mis en évidence de premières corrélations entre manipulation de nanomatériaux et des marqueurs de maladies pulmonaires et cardiovasculaires, des marqueurs de l'inflammation et de stress oxydatif et enzymes antioxydantes5)
de notifier aux personnes concernées des mesures préventives ou des progrès thérapeutiques qui n'étaient pas connus au moment où le registre a été établi.
d'adapter les mesures et moyens de prévention et de protection, afin de les ajuster plus finement aux risques mieux identifiés grâce aux études épidémiologiques.
Le registre d'exposition devrait contenir le nom et les caractéristiques physico-chimiques du (ou des) nanomatériau(x) manipulé(s), le type d'activité, les dates, la durée et l'intensité de l'exposition, ainsi que sa fréquence, et les équipements de protection collectifs et individuels utilisés (EPC et EPI). Il est important d'enregistrer le niveau d'exposition par emploi et par processus afin de pouvoir mener d'autres études épidémiologiques6 :
Le registre d'exposition devrait être conservé au sein de l'entreprise et accessible aux autorités sanitaires, dans le respect du secret industriel et commercial.
Comme pour le dossier médical, chaque travailleur devrait pouvoir disposer des données concernant son exposition personnelle.
Vers des registres nationaux des travailleurs exposés
Certains acteurs réclament que ces registres soient même mis en place à l'échelle nationale : la Confédération européenne des syndicats (CES ou ETUC) a ainsi réclamé en 2010 que les États membres de l'Union européenne "établissent un inventaire des travailleurs exposés aux nanoparticules en association avec des programmes de surveillance de la santé. Cet inventaire devrait contenir des informations sur l'identité des travailleurs exposés, les circonstances, la durée et les concentrations d'exposition et les mesures de protection utilisées"7.
Aux Pays-Bas, en 2012, le Conseil de la santé (organisme scientifique indépendant qui conseille le gouvernement et le Parlement sur les questions de santé publique) a recommandé la mise en place d'un registre d'exposition et d'un système de surveillance de la santé des travailleurs en contact avec des nanoparticules manufacturées8.
En 2014 en France, l'Institut national de veille sanitaire (InVS) a lancé le dispositif EpiNano de surveillance épidémiologique des travailleurs potentiellement exposés aux nanotubes de carbone et le dioxyde de titane de dimension nanométrique, en réponse aux demandes de diverses institutions sanitaires.
Mais à ce jour, très peu d'entreprises ont accepté de participer au dispositif et les rares à être entrées dans cette démarche ne vont pas nécessairement jusqu'au bout.
⇒ Plus de détails sur notre fiche dédiée à EpiNano, accessible via le lien suivant : http://veillenanos.fr/wakka.php?wiki=EpiNano
L'InVS étudierait la possibilité d'une surveillance "nano" plus large, avec la participation des services interentreprises de santé au travail (SIST).
Des enquêtes qui butent toutes sur les mêmes difficultés
Quelques années plus tôt, une enquête9 avait été réalisée par le Centre Interservices de Santé et de Médecine du travail en Entreprise (CISME) ; les données ont été collectées jusqu'au 30 juin 2012. Il avait été envisagé que les salariés repérés fassent l'objet d'une veille épidémiologique mise en place avec la Direction Générale du Travail et l'InVS. Mais l'étude du CISME s'est terminée sur un constat de grande difficulté à identifier les entreprises et salariés concernés (le protocole était complexe et lourd à mettre en oeuvre).
Certains services de santé au travail ont fait des enquêtes sur le sujet en se heurtant aux mêmes obstacles.
L'Association interprofessionnelle des Centres Médicaux et Sociaux de santé au travail de la région Île-de-France (ACMS) a une enquête en cours qui rencontre des difficultés comparables.
Aujourd'hui, ces difficultés sont accrues avec le manque de disponibilité des professionnels qui sont mobilisés sur les priorités fixées par les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM, dans la lignée du Plan Santé Travail) et par la pénurie générale de professionnels (médecins, infirmiers et pluridisciplinaires) dans les services interentreprises de santé au travail (SIST).