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Le Bio et les labels écologiques garantissent-ils l'absence de nanoparticules ?
Le Bio et les labels écologiques garantissent-ils l'absence de nanoparticules ?
Par MD, DL et l'équipe Avicenn - Dernier ajout mars 2019 - Compléments et mise à jour à venir
Cette fiche a vocation à être complétée et mise à jour. Vous pouvez contribuer à l'améliorer en nous envoyant des références à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr. Sommaire
D'un point de vue réglementaire, nano et "bio" ne sont pas incompatibles dans l'alimentaire
Contrairement aux OGM1, il n'existe, actuellement, pas d'incompatibilité déclarée entre nanomatériaux manufacturés et production biologique au niveau européen2.
En France, la marque AB ne prévoit aucune disposition spécifique concernant les nanomatériaux manufacturés .
On trouve bien des nanos dans des produits bio
Des produits "bio" contiennent bien des nanoparticules :
Dans les cosmétiques :
En février 2018, l'UFC Que Choisir a révélé avoir fait tester une crème solaire Lavera bio qui contient bien du TiO2 à 100% nano...
Sans que des tests aient été rendus publics à ce jour pour le confirmer, de forts soupçons pèsent également sur beaucoup d'autres produits. Nos veilleurs nous ont par exemple fléché :
Le dentifrice à l'echinacée bio et à la propolis, classic, de chez Lavera : il contient l'ingrédient "CI77891" (dioxyde de titane) ; questionnée en 2015, LAVERA a répondu à l'époque utiliser des particules dont la taille est supérieure à 100 nanomètres, mais peut-on être sûr qu'il n'y a pas des nanoparticules en dessous de ce seuil ? L'objectif poursuivi : "rendre le dentifrice plus blanc" et "plus efficace", car "associé aux minéraux de silice contenus également dans ce produit, il sert également à nettoyer les dents grâce à sa légère abrasivité"
Des solutions d'argent colloïdal
...
Dans l'alimentaire, la silice présente dans de nombreux plats préparés, condiments, denrées en poudre, etc. est à 100% nano.
Vers une exclusion des nano par les labels bio ?
Différentes organisations ou labels bio se sont engagés dans la voie d'une interdiction des nanomatériaux manufacturés dans la production biologique :
En 2008 :
au Royaume-Uni, l'organisme de certification Soil Association, a décidé d'exclure les nanomatériaux des produits qu'elle certifie (ceux dont la taille moyenne des particules est de 200 nm ou infra et dont la taille de particules la plus petite est de 125 nm ou infra3).
en Autriche, l'organisme de certification Austria Bio Garantie aurait annoncé également son refus d'une utilisation des nanomatériaux dans les cosmétiques certifiés4
En 2009 :
le Canada a interdit l'utilisation de produits manufacturés issus intentionnellement des nanotechnologies pour la production et la manutention des produits biologiques5.
aux Etats-Unis, le National Organic Standards Board (NOSB) a recommandé l'exclusion des nanotechnologies de la production alimentaire biologique6.
En 2010 :
Le plus important organisme de certification bio d'Australie, Biological Farmers of Australia, aurait prévu également l'exclusion des produits et procédés nanotechnologiques pour les normes biologiques en 20107.
Le programme de certification, Cosmos-standard créé au niveau européen pour harmoniser les procédures de certification entre le BDIH allemand, l'association française Cosmebio, Ecocert Greenlife, l'ICEA italien et la Soil Association britannique, stipulait l'interdiction des nanomatériaux8 jusqu'en 2016, date à laquelle il a autorisé certaines nanoparticules anti-UV9
En 2011, l'IFOAM, Fédération internationale des mouvements d'agriculture biologique, a préconisé à son tour l'interdiction d'utilisation des nanos dans le domaine de l'alimentation10.
En 2017, le label Ecolabel a banni le nanoargent de ses composés11
En France :
ECOCERT, organisme international de contrôle et certification biologique, dit aussi "vérifier l'absence de nanoparticules" inférieures à 100 nm pour les cosmétiques (mais autorise du dioxyde de titane au-delà de 100 nm)12.
Idem pour Nature & Progrès qui interdit les particules inférieures à 100 nanomètres dans les cosmétiques13.
En 2014 l'Institut technique de l'agriculture biologique (ITAB) a révisé son "Guide des intrants utilisables en agriculture biologique", qui est une liste positive (ce qui n'y figure pas n'est pas autorisé). Aucune mention « nano » n'y figurant, la position de refus est implicite.
En 2019, du fait des risques et incertitudes autour de l'innocuité des nanoparticules de dioxyde de titane, Cosmébio a rédigé une recommandation à l’attention de ses adhérents encourageant les marques à supprimer le dioxyde de titane de leurs produits ou à le remplacer par une alternative lorsque celle-ci existe14.
La garantie "sans nano" affichée par les labels bio ne peut être totale, pour plusieurs raisons :
Certains fournisseurs ne signalent pas la dimension nanométrique des ingrédients qu'ils vendent aux fabricants de cosmétiques et d'autres sont même allés jusqu'à leur vendre comme "non nano" des ingrédients pourtant nano (ECOCERT l'a appris à ses dépens en 2012)15 ; néanmoins les progrès récents en nanométrologie rendent désormais les vérifications possibles, comment en témoignent les analyses réalisées par Agir pour l'Environnement en 201616, 60 Millions de consommateurs17, la DGCCRF18 et l'UFC Que Choisir19 en 2017.
La difficulté à trouver des composants alternatifs dont l'innocuité et l'efficacité soient démontrés, comme dans le cas des filtres anti-UV : depuis 2016, le cahier des charges Cosmos, qui encadre la majorité des cosmétiques bio en France (certifications Ecocert, Cosmébio et BDIH), autorise les filtres nanos de dioxyde de titane et oxyde de zinc, dans certains limites9.
Néanmoins, elles doivent les étiqueter convenablement, en rajoutant la mention [nano] après l'ingrédient. Or, comme l'ont confirmé les tests de l’UFC-Que Choisir publiés en février 2018, des nanomatériaux (non étiquetés) peuvent être présents dans certains produits cosmétiques bio (c'est le cas notamment d'une crème solaire Lavera bio qui contient du TiO2 à 100% nano... mais que la marque n'a pas étiquetée comme tel).
8 - 5.1.1 Nanomaterials - "Nanomaterials are forbidden. It is recognised that there may need to be exceptions and applications for exceptions supported by technical dossiers will be considered" (...) « Nanomaterial » - (taken from European Parliament legislative resolution of 24 March 2009) - an insoluble or biopersistant and intentionally manufactured material with one or more external dimensions, or an internal structure (ie primary particle), on the scale from 1 to 100 nm." Cosmetics organic and natural standard, Janvier 2010
Gestion et évaluation des risques des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture : l'ONU fait le point... et l'impasse sur la France
Gestion et évaluation des risques des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture : l'ONU fait le point... et l'impasse sur la France
par MD, DL et l'équipe Avicenn - 15 juin 2012
Deux institutions onusiennes, la FAO et l'OMS, viennent de rendre public un projet de rapport sur la gestion et l'évaluation des risques des nanomatériaux dans les secteurs de l'alimentation et de l'agriculture. Effet de calendrier, myopie, ignorance du niveau infra-européen et/ou discrétion de nos institutions sanitaires et de recherche sur un sujet qui fait peur ? La France y brille par son absence. L'Avicenn vous invite donc à nous indiquer les projets de recherche français sur la toxicité des nanomatériaux dans l'alimentation et l'agriculture.
Consultation jusqu'au 30 novembre 2012 sur le projet d'état des lieux de la FAO et de l'OMS
L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) ont publié un projet de document présentant les initiatives et activités relatives à la gestion et à l'évaluation des risques des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture.
Les organisations et personnes intéressées peuvent envoyer leurs commentaires sur cette version de travail jusqu'au 30 novembre prochain, à Masami Takeuchi (masami.takeuchi@fao.org) et copie à Mina Kojima (ojimam@who.int).
Le projet de rapport, commandé par l'OMS et la FAO, présente les informations qui sont devenues disponibles depuis une réunion organisée en 2009 par ces mêmes institutions qui avait rassemblé des experts internationaux autour des impacts des nanotechnologies sur la sécurité sanitaire des aliments.
Sont ainsi passées en revue les activités menées au sein de différents Etats et au niveau international sur l'analyse des risques des nanomatériaux dans les secteurs de l'alimentation et l'agriculture qui ont été menées depuis la réunion, ainsi que les stratégies pour faire face aux dangers potentiels associés à l'utilisation des nanotechnologies.
En conclusion, le rapport - comme beaucoup d'autres avant lui - pointe les difficultés rencontrées pour identifier ce qui n'est encore qu'à l'état de projets d'incorporation de nanomatériaux dans l'alimentation et ce qui relève au contraire d'applications déjà commercialisées. En cause : l'absence de définition harmonisée des nanomatériaux, l'absence d'étiquetage (à l'exception de l'Europe), et de base de données publique.
Les instances onusiennes soulignent le fait que certains nanomatériaux échappent aujourd'hui à tout contrôle - comme par exemple les emballages alimentaires incorporant du "nano-plastique" - du fait de l'inadaptation des cadres d'évaluation des risques aujourd'hui en place au niveau international, .
Où en est la France dans la gestion et l'évaluation des risques des nanos dans l'alimentation et l'agriculture ?
Fait notable : effet de calendrier, myopie, ignorance du niveau infra-européen ? La France et les autres Etats de l'Union européenne y brillent par leur absence. Le document publié tout récemment par l'OCDE, intitulé Current Developments on the Safety of Manufactured Nanomaterials, et qui restitue le tour de table de la 9ème réunion du Groupe de travail sur les nanomatériaux manufacturés qui s'est tenu à Paris en décembre 2011, leur accorde plus d'attention. Il mentionne, pour la France notamment :
la déclaration annuelle des "substances à létat nanoparticulaire" qui obligera les entreprises et laboratoires à déclarer à partir de 2013 les quantités et les usages de nanomatériaux qu'ils produisent, distribuent ou importent, dans le but de mieux connaître ces substances et leurs usages, de disposer dune traçabilité des filières dutilisation, dune meilleure connaissance du marché et des volumes commercialisés et enfin de collecter les informations disponibles sur leurs propriétés toxicologiques et écotoxicologiques.
les activités de recherche sur la toxicité des nanomatériaux en lien avec l'alimentation impliquant des chercheurs français, dont le projet NANOGENOTOX.
Les instances onusiennes n'ont sans doute pas été aidées par la grande discrétion dont font preuve les institutions sanitaires et de recherche françaises relativement à leurs activités de gestion et d'évaluation des risques des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture. Ainsi, il y a un an, en mai 2011, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait rendu publiques les contributions à la consultation qu'elle avait lancée en janvier-février sur son Guide dévaluation des risques liés aux applications des nanotechnologies dans le domaine de lalimentation humaine et animale : sur les 35 institutions ayant répondu, aucune n'était française...
En mars 2009, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), ancêtre de l'ANSES, concluait ainsi son rapport sur les Nanotechnologies et nanoparticules dans lalimentation humaine et animale : "le développement de travaux de recherche doit être soutenu et, dans lattente de données pertinentes notamment sur labsorption digestive, la prudence simpose à légard de lutilisation de nanotechnologies et/ou nanoparticules en alimentation humaine et animale". Trois ans plus tard, il est difficile de savoir ce qui a été fait depuis en la matière. En février dernier, le gouvernement s'était engagé à développer la recherche publique dans les domaines de la toxicologie, l'écotoxicologie et la métrologie. Le nouveau gouvernement tiendra-t-il ces promesses ?
L'Avicenn a commencé à lister les projets de recherche français sur la toxicité des nanomatériaux dans l'alimentation et l'agriculture et a ouvert un dialogue avec l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), l'Agence nationale de la recherche (ANR), l'Institut national de la recherche agronomique (INRA, qui, à Toulouse notamment, a étudié les effets d'une exposition aux nanoparticules d'origine alimentaire sur l'intégrité de la fonction intestinale ou la génotoxicité dans le cadre de TOXALIM), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), afin de tenter de dresser ultérieurement un panorama des recherches françaises dans le domaine. Nous vous tiendrons informés de l'avancée de ce chantier...
Pour l'heure, vous pouvez retrouver les informations que nous avons relayées au sujet de l'alimentation et des nanos sur la page Alimentation de notre site veillenanos.fr et dans notre Lettre VeilleNanos n°3 (printemps 2012) téléchargeable en ligne.Vous pouvez également consulter les autres ressources que nous avons collectées sur le sujet en vous rendant à la page Alimentation de notre site wikinanos.fr.
Enfin, adhérez pour avoir accès aux archives et à des informations complémentaires, car nous avons besoin de votre soutien pour réaliser ce travail de veille et d'information !
Nano et Agriculture
Nano et Agriculture
Par l'équipe Avicenn - Dernière modification septembre 2020
Ce dossier synthétique a vocation à être complété et mis à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr. Sommaire de cette synthèse du dossier complet
Les "promesses" des nanos en matière d'agriculture
De nombreuses promesses entourent les nanomatériaux dans les produits phytosanitaires. Schématiquement, on peut distinguer plusieurs types de bénéfices recherchés pour les engrais et les pesticides:
déclencher des mécanismes d'autodéfense de certains végétaux contre des maladies (produits "éliciteurs")
favoriser la biodisponibilité de la matière active :
grâce à sa taille nanométrique, la matière active est plus facilement absorbée par les plantes
ou grâce à une nano-encapsulation qui permet une libération de la matière active plus lente et plus étalée dans le temps ("effet retard")
éviter le lessivage par la pluie ou la dégradation par la lumière, grâce à l'encapsulation de la matière active
Un autre volet d'applications des nanotechnologies concerne l'agriculture dite "de précision", grâce aux nanocapteurs pour optimiser les conditions de culture.
en 2011 au Canada, la promesse reste floue sur une poussière intelligente conçue avec des nanocapteurs pour assure un meilleur contrôle de l'humidité, de la température, des conditions de sol, de la localisation de zones d'infestation par des ravageurs (En savoir +)
une équipe française en charge de ces sujets : Agrotic
aux USA, une expérimentation de l’implantation de nanocapteurs à l’intérieur même d’un végétal pour détecter précocement le stress hydrique est signalée en 2018 (en savoir +) et remplacer (?) l'usage actuel de tensiomètres mesurant l'humidité du sol pour déclencher une irrigation.
Enfin, les nanotechnologies pourraient aider à la conception de capteurs plus performants permettant de détecter plus facilement des traces de produits phytosanitaires dans les produits des récoltes1.
Grâce à la déclaration obligatoire instituée par la France depuis 2013, on sait néanmoins qu'une partie des quelques 500 000 tonnes de substances nano déclarées chaque année dans le registre R-Nano est utilisée en agriculture, sans plus d'indication sur le volume exact ni sur les propriétés de ces nanomatériaux effectivement utilisés dans le secteur agricole.
Depuis 2014, l'agriculture arrive certes en tête des secteurs d'utilisation déclarés avec environ 10 000 déclarations en 2015 et 2016 (soit environ deux tiers des déclarations enregistrées dans R-Nano) pour plus de 100 déclarants3. Mais cette "première place" ne reflète pas nécessairement un fort tonnage, plutôt la bonne transmission de l'information au sein de la filière agricole et sans doute un nombre plus élevé, dans cette filière, d'intermédiaires entre les fabricants et les utilisateurs professionnels (en l'occurrence, les agriculteurs)4.
Dans le bilan 2016, une quarantaine de substances à l'état nanoparticulaires sont listées : alumine, silice, calcium, soufre, dioxyde de titane, cuivre, pigments et divers argiles (kaolin, attapulgite, terre de Fuller, ...).
→ Plutôt que des substances actives, il s'agirait essentiellement d'agents de charge / coformulants (l'ANSES procèdait, courant 2017, à des vérifications sur ce point).
En 2014, Avicenn a néanmoins pu identifier une quarantaine de produits vendus en agriculture ayant été déclarés au registre R-nano par une demi-douzaine d'entreprises... sans que l'on puisse avoir davantage d'informations : les entreprises ne fournissent en effet aucune information sur les nanomatériaux qu'elles utilisent, ni dans les fiches de sécurité des produits concernés (fiches qui ont pourtant été mises à jour après la mise en place de R-nano), ni sur leurs sites ni sur le site de l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP) : info-pesticides.org.
L'effet retard (recherché au champ) est ainsi également très sensible... dans l'information ! L'Union des industries chimiques (UIC) et le Medef, soutenus par la Fédération du négoce agricole (FNA), Coop de France et l'UIPP demandent même depuis 2015 à exonérer les distributeurs de remplir la déclaration obligatoire, ce qui ne ferait qu'accroître le déficit d'information déjà trop important aujourd'hui.
A l'inverse, Avicenn a fait des propositions qui aideraient à renforcer les efforts de vigilance collective5.
Quel impact sur les sols agricoles où sont épandues les boues des stations d'épuration ?
Il existe également une autre voie d'entrée, non intentionnelle cette fois, de nanomatériaux dans les sols agricoles : l'épandage de boues de station d'épuration, qui contiennent des nanomatériaux (filtrés lors de l'épuration). Or, si certains contaminants font l'objet de contrôle, il n'y a aujourd'hui aucune obligation de suivi des nanomatériaux ou de leurs résidus dans les sols et les cultures...
Des études montrent pourtant que le nanoargent qui se retrouve dans les boues d'épuration produit des effets toxiques sur les vers de terre ou les microorganismes du sol essentiels au cycle naturel de l'azote .
En France, des chercheurs français de l'ISTERRE ont constaté des modifications de l'activité enzymatique de sols cultivés après épandage de boues de stations d'épuration contaminées, même à faible doses, par des nanoparticules d'argent.
Fin 2015, l'OCDE a publié un rapport qui juge "alarmant" l'épandage agricole des boues d'épuration des eaux usées, eu égard aux risques liés à la présence des nanomatériaux dans ces boues.
Quelle information des agriculteurs et quels impacts sur leur santé ?
De manière générale, les agriculteurs sont très peu informés sur les utilisations et les risques des nanomatériaux et les nanotechnologies6.
Si les fabricants informent désormais les réseaux de distribution sur la nécessité de remplir la déclaration R-nano comme la loi les y oblige, ils sont beaucoup plus avares d'informations en ce qui concerne "ce qui est nano" dans les pesticides et engrais qu'ils proposent ainsi que sur les questions liées à la présence de ces nanomatériaux dans leurs produits.
Les distributeurs sont tenus de transmettre aux agriculteurs le n° de déclaration (cf. Arrêté du 6 août 2012, Art. 3, II) mais il serait nécessaire d'aller plus loin, en imposant le fait qu'ils leur fournissent surtout une information sur la nature des nanomatériaux présents dans leurs produits, les raisons d'être du dispositif R-Nano, les risques associés à ces substances et les mesures de protection adéquates... une information que les fabricants devraient, en amont, être également tenus de fournir.
Les nanomatériaux, du fait de leur petite taille, sont très mobiles et peuvent traverser les barrières de protection des cellules végétales et peuvent causer des dommages non négligeables sur la flore et la faune, notamment les micro-organismes de certains sols7...
Ils peuvent également remonter la chaîne alimentaire (des chercheurs ont mis en évidence le transfert de nanomatériaux des racines vers les feuilles (de blé ou de colza par exemple) et vers les graines de végétaux (par exemple dans des germes de soja).
Les argiles "nano" sont utilisées pour piéger des molécules de matières actives et provoquer une diffusion lente, ce que l'on nomme "l'effet retard". Si le support est nanostructuré, en interne ou à la surface, la matière active "capturée" ou "encapsulée" l'est donc très probablement elle aussi.
Si la quantité globale de produit actif utilisée est plus faible grâce à un ratio surface / volume plus important à l'échelle nanométrique, faut-il pour autant se réjouir de l'efficacité accrue de plus petites quantités ?
Moins de matière active à l'unité sur une surface traitée peut permettre de diminuer l'indicateur IFT (indice de fréquence de traitement). Mais est-ce que cela limite pour autant les impacts environnementaux ? Les outils existent-ils pour aider les agriculteurs à limiter les erreurs d'épandage ? Les gains recherchés en termes d'économie de matière active seront-ils toujours aussi intéressants comparés au prix des outils de précision dont les agriculteurs devraient s'équiper et aux contraintes induites par leur utilisation ? Le débat est ouvert et les inquiétudes sont légitimes.
En définitive, beaucoup de questions restent en effet sans réponse à ce jour :
Quel est le volume de nanomatériaux utilisés dans le domaine agricole ?
Qu'est-ce qui est "nano" dans les pesticides et engrais ? Est-ce la matière active ? Est-ce un ingrédient dans la formulation ?
Pourquoi les fabricants de produits phytosanitaires y ont-ils recours ? Quels sont les bénéfices attendus ?
Quelle est l'influence de la taille des particules actives sur les propriétés des formulations? C'est annoncé plus précis et mieux ciblé donc plus efficace, mais que se passe-t-il après la délivrance de la substance?
Quels risques ont été identifiés ? Quelles sont les mesures de précautions prises ? Avec quel degré de fiabilité ?
Une étude publiée en 2018 dans Nature Nanotechnology le confirme : "Actuellement, il n’existe aucune étude scientifique solide qui a analysé l’efficacité des formulations contenant des nanoparticules et leur impact sur l’environnement dans des conditions de plein champ. Ceci constitue une lacune cruciale dans nos connaissances et rend actuellement impossible une évaluation approfondie et globale. Des travaux de recherche supplémentaires à cet effet s’avèrent nécessaires"8.
Le développement massif des nanomatériaux, sans autre mesure pour mieux connaître et circonscrire le relargage aujourd'hui anarchique des nanomatériaux, ressemblerait à s'y méprendre à une bombe à retardement... C'est pourquoi les voix s'élèvent depuis une quinzaine d'années pour réclamer une meilleure anticipation et régulation des usages des nanomatériaux. Afin de ne pas renouveler les erreurs du DDT, de l'atrazine ou encore des insecticides "néonicotinoïdes", il est important de mieux connaître les produits utilisés par les agriculteurs afin de pouvoir pronostiquer et minimiser les risques.
Car une solution isolée peut devenir un problème si tous les agriculteurs épandent les mêmes produits au même moment sur un même territoire... l'agriculture a déjà été confrontée à de tels dilemmes et des pratiques de gestion collectives existent, de façon contrainte ou volontaire selon les lieux et les sujets.
Ecouter Camille Larue en podcast sur L'infiniment petit dans l'agriculture, Camille Berjonneau, Pierre Lemos, Université fédérale Toulouse Midi-Pyrénées, 8 février 2019
4 - Les distributeurs de la filière agricole sont bien rodés à la transmission des informations, notamment avec la gestion des redevances pollution, via la base nationale de données sur les ventes PhytoData.
6 - Ce constat émane des échanges entre Avicenn et divers acteurs de l'agriculture ; il a été dressé également par trois étudiants de l'ISARA, Beucher M, Chignier M & Hess S dans un projet étudiant Maestro réalisé en 2016 en partenariat avec Avicenn
Par l'équipe Avicenn - Dernier ajout décembre 2020
Cette sélection de documents initialement compilés pour réaliser notre dossier Nano et Agriculture est périodiquement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs d'Avicenn.
Elle est classée par type d'acteurs (recherche, pouvoirs publics, ONG, ...), afin de permettre aux lecteurs de contextualiser l'information qu'il y trouvera. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant des références à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.Sommaire
Projet de document présentant les initiatives et activités relatives à la gestion et à l'évaluation des risques des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture, juin 2012
Les nouvelles technologies au service de l’agriculture, Siècle digital, 25 juin 2019 : Une équipe de chercheurs du Civil and Environnemental Engineering (CEE), viennent de publier le résultat de leurs travaux qui montrent que l’introduction de nanoparticules d'or permettrait d’acheminer des produits agrochimiques des feuilles aux racines d’une plante.
Agriculture et nanomatériaux : comment assurer une meilleure transparence et traçabilité ?
Agriculture et nanomatériaux : comment assurer une meilleure transparence et traçabilité ?
Par DL, MD et l'équipe Avicenn - 16 avril 2015 - Article modifié le 15/03/2017
Cet article a vocation à être complété et mis à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez vous aussi contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr. Sommaire :
Les fabricants de produits phytosanitaires demandent que les distributeurs n'aient à remplir la déclaration obligatoire des nanomatériaux
Avicenn a appris courant 2015 que les représentants nationaux de distributeurs de produits phytosanitaires* se sont joints au MEDEF via l'Union des Industries Chimiques (UIC) pour demander au Ministère de l'écologie une simplification consistant à restreindre l'obligation de déclaration des substances à l'état nanoparticulaire aux seuls fabricants. Aucune information publique n'a été faite sur cette demande.
* la Fédération du négoce agricole (FNA) et Coop de France avec l'Union des industries de la protection des plantes (UIPP)
Petit retour en arrière pour resituer cette demande...
Depuis 2013, les entreprises et laboratoires concernés ont l'obligation de déclarer chaque année les quantités et les usages de nanomatériaux qu'ils produisent, distribuent ou importent en France ; la déclaration s'effectue auprès de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES).
L'année dernière ce n'est que fin avril, à quelques jours de la date limite de déclaration du 1er mai, que la plupart des distributeurs qui vendent des engrais et pesticides aux agriculteurs avaient été prévenus par leurs fournisseurs de cette obligation de déclaration. C'est d'ailleurs à cette occasion qu'ils avaient découvert la présence de certains nanomatériaux dans une gamme restreinte de produits phytosanitaires.
Dernier maillon de la chaîne d'approvisionnement concernée par cette obligation de déclaration, les distributeurs auprès des agriculteurs s'étaient retrouvés pris au dépourvu. Avicenn avait porté cette question à connaissance du Ministère de l'écologie et de l'ANSES lors de la 4ème réunion du comité de Dialogue "nano et santé" de l'ANSES, le 29 avril 2014.
Afin de remédier à cette difficulté, le ministère avait accordé in extremis un délai d'un mois1 pour l'ensemble des distributeurs aux utilisateurs professionnels (tous secteurs d'activité confondus, i.e pas spécifiquement dans le domaine agricole).
Les distributeurs concernés, déjà organisés pour transmettre à la place des agriculteurs des statistiques de vente pour la gestion des redevances pollutions, ont fait au mieux, dans le délai qui leur avait été accordé. (Dans le secteur agricole, la pratique des enregistrements est déjà très rodée dans le cadre de la base nationale de données sur les ventes PhytoData).
Il en a résulté une augmentation considérable par rapport à 2013 du nombre de déclarations dans la catégorie "agriculture, sylviculture et pêche" : de 1,2% en 2013, la part de ces déclarations était passée à 64% en 2014, sans que le nombre de fabricants ait beaucoup varié : la forte proportion de ces déclarations s'explique notamment du fait que 99% de ces déclarations ont été remplies par des distributeurs (6 373 sur 6 412)2.
Cette année, l'information est arrivée sur le terrain (aux distributeurs en lien avec les agriculteurs) début avril ; le 30 avril, le ministère a encore une fois accordé un délai d'un mois supplémentaire, en reportant, pour les seuls distributeurs auprès d'utilisateurs professionnels, la date limite de déclaration du 1er (initialement prévu par le décret de 2012) au 31 mai 2015.
Le ministère de l'écologie nous a appris fin juillet qu'il avait décidé d'en discuter en associant les autres parties prenantes dans le cadre du GT R-nano (la prochaine réunion devrait avoir lieu courant octobre 2015). Il a déjà fait part à l'UIC de ses réserves (dont celles que identifiées par Avicenn, cf. ci-dessous) et de contreparties nécessaires, ce qui devrait l'amener à préciser sa proposition.
Analyse, questions et proposition alternative d'AVICENN
Alléger la charge de travail des distributeurs au prix d'une restriction de l'information des autorités sanitaires, des agriculteurs et des consommateurs ?
La demande exprimée par les distributeurs au ministère de l'écologie irait dans le sens d'un allègement de la charge de travail des distributeurs déjà soumis à des obligations d'enregistrement importantes3. Ces derniers envisagent que l'exonération de la déclaration n'intervienne qu'"à partir du moment où le produit est conditionné à l'état final tel qu'il sera commercialisé à l'utilisateur final", afin de permettre aux autorités sanitaires de conserver un minimum d'information exploitable.
Pour autant, cette demande priverait d'information les principaux acteurs concernés :
- les autorités perdraient une information cruciale, même si insuffisante encore à ce stade, pour assurer la traçabilité des nanomatériaux qui figure parmi les objectifs principaux de la déclaration
- les distributeurs informés pour la première fois en 2014 n'auraient pas davantage d'informations
- les agriculteurs, directement concernés lors de la manipulation et l'épandage des produits et théoriquement informés pour la première fois en 2014 de la présence de nanomatériaux dans les produits, seraient dépossédés de la faculté de décider d'utiliser ou non des produits contenant des nanomatériaux introduits par les fabricants à leur insu et sans pouvoir juger eux-mêmes de leurs avantages et inconvénients
- mais aussi à terme les riverains, les clients des agriculteurs, les consommateurs et associations de consommateurs, etc.
Certes de nombreuses questions restent aujourd'hui sans réponses du fait d'un déficit d'information déjà important. Mais la demande des distributeurs ne ferait qu'accroître ce déficit. D'autres pistes doivent être explorées pour alléger leur travail sans perdre d'information et au contraire en gagner.
De nombreuses questions sur l'utilisation des nanomatériaux en agriculture sont toujours sans réponse aujourd'hui
Lors de ses échanges en 2014 avec des acteurs majeurs du domaine agricole (dont le réseau des coopératives agricoles), AVICENN avait pu constater que si les fabricants informent désormais bien les réseaux de distribution sur la nécessité de remplir la déclaration R-nano comme la loi les y oblige, ils sont beaucoup plus avares d'informations en ce qui concerne "ce qui est nano" dans les pesticides et engrais qu'ils proposent ainsi que sur les questions liées à la présence de ces nanomatériaux dans leurs produits.
Les questions suivantes restent en effet sans réponse à ce jour :
- Quel est le volume de nanomatériaux utilisés dans le domaine agricole ? En 2014, on a appris grâce à R-Nano que 64% des déclarations entraient dans la catégorie "agriculture, sylviculture et pêche", mais ce chiffre ne fournit en fait aucune indication fiable sur le volume ou la quantité de nanomatériaux utilisés dans l'agriculture, le registre R-nano n'étant malheureusement pas accessible au public)2.
- Qu'est-ce qui est "nano" dans les pesticides et engrais ? Est-ce la matière active ? Est-ce un ingrédient dans la formulation ?
- Pourquoi les fabricants de produits phytosanitaires y ont-ils recours ? Quels sont les bénéfices attendus ?
- Quels risques ont été identifiés ? Quelles sont les mesures de précautions prises ? Avec quel degré de fiabilité ?
En 2014, Avicenn a initié un travail de repérage afin d'en savoir plus4.
Linventaire des Amis de la Terre Allemagne recense 3 produits dans la catégorie jardinage, notamment deux produits du fabricant Syngenta contenant depuis 2008 des microémulsions de particules de 100 nanomètres les rendant parfaitement solubles et permettant de mieux rincer les pulvérisateurs en ne laissant aucun résidu sur les parois : le fongicide Banner Maxx pour le gazon et les plantes ornementales et le régulateur de croissance pour le gazon Primo Maxx.
Cependant, aucune information sur l'échelle nanométrique des composants ne figure sur les fiches de sécurité des produits5 ni sur les différents sites du fabricant Syngenta.
En agriculture, les argiles (naturelles ou synthétiques comme des formes de zéolites, aussi nommées nanoclay ou tamis moléculaires) semblent être le principal élément "nano" ajouté pour piéger des molécules de matières actives et provoquer une diffusion lente, ce que l'on nomme "l'effet retard".
Mais si le support est nano, alors la matière active "capturée" ou "encapsulée" ne l'est-elle pas ?
Cela peut être un bénéfice... ou un risque : car si la quantité de produit actif est plus petite grâce à un ratio surface / volume plus important à l'échelle nanométrique, faut-il pour autant se réjouir de l'efficacité accrue de plus petites quantités ?
Moins de matière active à l'unité sur une surface traitée peut permettre de diminuer l'indicateur IFT (indice de fréquence de traitement). Mais est-ce que cela limite pour autant les impacts environnementaux ? Les outils existent-ils pour aider les agriculteurs à limiter les erreurs d'épandage ? Les gains recherchés en termes d'économie de matière active seront-ils toujours aussi intéressants comparés au prix des outils de précision dont les agriculteurs devraient s'équiper et aux contraintes induites par leur utilisation ? Le débat est ouvert et les inquiétudes sont légitimes.
En 2014, nous avons pu identifier environ une quarantaine de produits vendus en agriculture ayant été déclarés au registre R-nano. Aucune des 42 fiches de sécurité consultées ne mentionne cependant d'information sur un ingrédient à la taille nanométrique, bien que certaines aient été mises à jour après la mise en place des définitions réglementaires européenne et française.
Parmi les 44 firmes qui commercialisent des produits pour les cultures en France6, 7 se sont senties concernées en 2014 par la déclaration au R-nano pour des usages en agriculture. (Quatre d'entre elles sont aussi fournisseurs pour des produits espaces verts et jardins). Mais à cette date, on ne trouvait pas d'information sur des "nanos" sur leurs sites ni sur le site de lUIPP info-pesticides.org, ce qui est toujours le cas en 2015.
L'effet retard (recherché au champ) est ainsi également très sensible... dans l'information !
Il est important et urgent de porter à ces questions toute la considération qu'elles méritent
Afin de ne pas renouveler les erreurs du DDT, de l'atrazine ou encore des insecticides "néonicotinoïdes", il est important de mieux connaître les produits utilisés par les agriculteurs afin de pouvoir pronostiquer et minimiser les risques.
Car une solution isolée peut devenir un problème si tous les agriculteurs épandent les mêmes produits au même moment sur un même territoire... l'agriculture a déjà été confrontée à de tels dilemmes et des pratiques de gestion collectives existent, de façon contrainte ou volontaire selon les lieux et les sujets.
Ignorance versus co-vigilance - Proposition alternative : et si on mutualisait les informations en partant des enregistrements existants ?
Plutôt que d'opter pour l'ignorance à travers la solution demandée par les représentants nationaux de distributeurs de produits phytosanitaires, Avicenn propose de réfléchir à des pistes alternatives qui permettraient l'exercice d'une "covigilance" par les différents acteurs concernés.
Il pourrait par exemple être demandé aux fabricants d'actualiser le registre e-phy (catalogue des engrais et pesticides autorisés en agriculture consultable en ligne), en spécifiant avec le numéro d'autorisation de mise sur le marché (AMM) lorsque le produit contient des nanomatériaux et est donc concerné par la déclaration R-nano.
Lorsqu'ensuite les distributeurs renseigneraient la base nationale de données sur les ventes Phytodata avec les codes postaux des agriculteurs acheteurs finaux7, l'information sur les usages serait plus complète que dans le registre R-nano et ce, sans enregistrement supplémentaire.
Les codes postaux sont certes relativement imprécis pour géolocaliser des usages mais suffisants pour hiérarchiser et, le cas échéant, alléger la surveillance là où il n'y a pas d'enjeu ou l'augmenter en ciblant les pratiques émergentes "à risques" sur des territoires ou des groupes de population à prévenir.
Qu'en pensent les responsables des différents registres, les distributeurs, les agriculteurs ? Avicenn poursuit l'enquête...
Fin juillet 2015, le ministère de l'écologie nous a précisé qu'il n'avait pas encore creusé nos pistes mais en avait pris bonne note : il intégrera cette discussion dans le cadre d'un retour d'expérience plus global du dispositif R-nano, qui pourrait avoir lieu courant 2016.
Gérer l'information à la source semble un circuit court avec des gains de temps pour les acteurs sur le terrain (après une phase d'investissement public en logiciel informatique pour lier les différents registres).
Mais les utilisateurs finaux, dont les pratiques sont observables ainsi à distance, devraient également avoir en retour un droit de consultation de ces données, comme aide aux décisions individuelles et collectives.
Ce besoin de transparence des données ne se pose pas uniquement en agriculture. Quid des secteurs de la santé, avec les usages médicaux en hôpitaux et à domicile ? Et dans la chaîne des acteurs, comment les centrales d'achat qui fournissent les pharmacies se sont-elles organisées pour remplir le registre R-nano ? A quels niveaux des chaînes de distribution est-il pertinent de collecter l'information ? A quels niveaux la restituer si nécessaire pour être en capacité d'émettre des alertes pour borner des usages le cas échéant, en anticipant des effets indésirables ?
Dans les domaines de consommation courante (alimentation, cosmétiques, textiles) que peuvent faire les distributeurs des grandes et moyennes surfaces pour éclairer les décideurs publics et les consommateurs? A minima, dans un avenir proche, il est nécessaire que R-nano devienne consultable au moins comme e-phy.
3 - Les acteurs agricoles sont soumis à des enregistrements sans bénéficier aujourd'hui en retour des informations agrégées qui leur seraient pourtant utiles.
Ainsi les distributeurs passent du temps à remplir Phytodata sans avoir en retour les données agrégées des matières actives les plus vendues par tous les distributeurs sur leur zone de chalandise avec les limites de bassins versants, qui leur fournirait une valeur indicative des flux entrants dominants. Ce serait un outil pour anticiper localement et éviter que tout le monde répande la même chose.
Un bassin versant représente l'ensemble d'un territoire drainé par un cours d'eau et ses affluents. Les zones de chalandise représentent le territoire des clients d'un fournisseur. Ce n'est qu'en ajoutant les statistiques de ventes des fournisseurs d'un territoire de l'eau que l'on peut avoir une idée des quantités utilisées pour faire un pronostic d'impact sur les ressources en eau.
Du côté des agriculteurs, le fait que leurs fournisseurs renseignent les données à leur place constitue une simplification administrative pour eux, avec une obligation fiscale à la clé, mais rien n'existe pour aider aux décisions de gestion environnementale... Toute information compilant des données pour produire des aides aux décisions collectives ne devrait-elle pas être à disposition d'abord des praticiens de terrain pour décider ensemble s'il faut réorienter des pratiques?
Ce qui se faisait il y a quinze ans en circuit court et en auto-gestion sur des bassins expérimentaux était plus opérationnel... Si quelques opérateurs nationaux administratifs ont gagné une information plus complète sur le territoire national et une collecte fiscale, la phase de retour pour actions sur le terrain est encore inachevée...
7 - L'organisme de centralisation des données de l'observatoire des ventes Phytodata (6000 distributeurs référencés) est l'agence de l'eau Artois Picardie, et pour des usages de fiscalité seulement. Le fichier est hébergé par l'INERIS, piloté par l'ONEMA pour le Ministère de l'écologie, "DEB Direction eau et biodiversité DGALN Direction de l'alimentation, du logement et de la nature Bureau GR4". Et le Ministère de l'Agriculture ? Les personnes qui pourraient être autorisées à faire une demande d'usage sont les partenaires du plan Ecophyto. Piloté par le Ministère de lagriculture, le plan Ecophyto associe, tant au niveau régional que national, lensemble des parties prenantes : administrations, professionnels agricoles et non agricoles, recherche, organisations non gouvernementales.
Les Instituts Techniques n'auraient pas accès à ces données.
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