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Nano et Santé au travail (3b/3) : Recommandation b : Minimiser l'exposition des travailleurs

Nano et Santé au travail (3b/3) : Recommandation b : Minimiser l'exposition des travailleurs
Par MD et l'équipe Avicenn - Dernier ajout mai 2021Cette fiche fait partie de notre Dossier Nano et Santé au travail. Elle a vocation à être progressivement complétée et mise à jour avec l'aide des adhérents et veilleurs de l'Avicenn. Vous pouvez contribuer à l'améliorer en nous envoyant vos remarques à l'adresse redaction(at)veillenanos.fr.
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Sommaire :
- Une protection défaillante des travailleurs exposés aux nanomatériaux
- Eviter l'exposition des travailleurs aux nanomatériaux aux postes de travail "nano"
- ... sans oublier de minimiser les potentielles expositions professionnelles en aval de la chaîne de production
- ... ni les travailleurs extérieurs (intérimaires, sous-traitants, pompiers, ...)
- Un autre défi souvent oublié : la protection des nombreux utilisateurs professionnels de produits contenant des nanomatériaux
- En savoir plus
→ Autres recommandations
Une protection défaillante des travailleurs exposés aux nanomatériaux
Des études récentes ont montré que les entreprises, en France comme à l'étranger, sont peu à même d'assurer la protection de la santé et de la sécurité de leurs travailleurs1.
Depuis quelques années, la situation s'améliore lentement : des protections individuelles et des équipements de protection collectives sont mis en place pour les personnels des laboratoires de recherche et développement notamment. Ces questions de sécurité d'utilisation et risques pour la santé sont de plus en plus prises en compte par les CHSCT dont les membres sollicitent des formations sur ce sujet.
Du fait des nombreux effets potentiellement néfastes des nanomatériaux sur la santé des travailleurs, il y a en effet nécessité de minimiser l'exposition des travailleurs aux nanomatériaux, dans le respect du principe de précaution.
Eviter l'exposition des travailleurs aux nanomatériaux...

Il s'agit :
- au mieux, d'éliminer les nanomatériaux et de leur substituer, si nécessaire, des matériaux non - en tout cas moins - dangereux (notons au passage le décalage d'une telle recommandation avec les politiques d'incitation à l'accélération de la commercialisation des nanomatériaux...) ;
- à défaut, de réduire l'exposition au niveau le plus bas possible (selon le principe ALARA), en maintenant au minimum le nombre des travailleurs potentiellement exposés aux nanomatériaux ainsi que la durée et le niveau d'exposition.
A cet effet, différentes mesures doivent être strictement appliquées (pour plus de détails, se référer aux publications de l'INRS2) :
- limiter certaines opérations critiques (le transvasement, la pesée, l'échantillonnage, ...)

- identifier visuellement les zones de travail où sont stockés / manipulés les nanomatériaux et en limiter l'accès aux seuls travailleurs ayant reçu une formation spécifique aux nanomatériaux
- empêcher l'émission de nanomatériaux à l'air libre :
- manipuler les nanomatériaux sous forme de suspension liquide, de gel, en pastilles ou incorporés dans des matrices plutôt que sous forme de poudres (qui sont plus volatiles, avec une plus grande propension à se diffuser dans l'air)
- travailler en vase clos3
- capter les polluants à la source (boîtes à gants, hottes de type chimique et autres moyens d'aspiration adaptés à l'utilisation des nanoparticules)
- filtrer l'air des lieux de travail avec des filtres à fibres à très haute efficacité
- nettoyer les surfaces à l'aide de linges humides et d'aspirateurs spéciaux
- stocker les nanomatériaux :
- dans des réservoirs ou des emballages doubles totalement étanches, fermés et étiquetés
- et dans des locaux frais, bien ventilés, à l'abri du soleil et à l'écart de toute source de chaleur ou d'ignition et des matières inflammables
- installer des vestiaires doubles, contigus à la zone de travail afin de séparer les vêtements de ville des vêtements de travail
- limiter les déchets, les traiter spécifiquement
- protéger directement les travailleurs exposés :
- masques filtrants4, respirateurs, lunettes avec protection latérale, gants, couvre-chaussures, combinaisons sans revers et en membrane non tissée (le coton est déconseillé)
- attention cependant : la possibilité de passage de nanoparticules à travers certains types de gants en nitrile ou en latex ainsi qu'à travers les combinaisons en polyéthylène a été établie par des équipes de recherche (Erest) de l'Ecole de technologie supérieure de Montréal et par l'IRSST (Canada), contredisant les résultats de chercheurs du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) de Grenoble qui n'avaient pas trouvé de passage des nanoparticules à travers les membranes en nitrile des gants de protection5
Les femmes enceintes doivent être particulièrement protégées de toute exposition aux nanomatériaux6.
Il n'existe pas, en France, de valeur limite d'exposition au poste de travail (VLEP) spécifique pour les nanomatériaux, mais des travaux sont menés, en particulier sur le TiO2 et sur le noir de carbone :
- Dans un rapport de décembre 2020 rendu public en mars 2021, l'Anses a dévoilé ses préconisations de VLEP pour renforcer la prévention des risques pour les travailleurs exposés aux nanoparticules de TiO2 par inhalation : VLEP-8h de 0,80 µg/m3 et VLCT-15 min pragmatique de 4 µg/m3.
- INRS, Noir de carbone nanostructuré : vers une valeur limite d'exposition professionnelle, mars 2020
- INRS, Dioxyde de titane nanométrique : de la nécessité d'une valeur limite d'exposition professionnelle, Hygiène et sécurité du travail, n°242, NT 36, mars 2016.
- 0,3 mg/m3 pour les nanoparticules de dioxyde de titane (TiO₂) (celle du TiO₂ "ultrafin" (< 100 nm) 8
- 1µg/m3 pour les nanotubes de carbone (NTC) et les nanofibres de carbone9
- 0,9 μg/m3 pour les nanoparticules d'argent10
En novembre 2019, l'agence européenne pour la santé et la sécurité au travail a attribué le Prix des bonnes pratiques "Lieux de travail sains" 2018-2019 à Atlas Copco Industrial Technique, une entreprise manufacturière suédoise qui a adopté une approche de précaution pour minimiser l’exposition des travailleurs aux nanotubes de carbone12.
Des professionnels soulignent néanmoins que les valeurs limites d'exposition ne sont pas nécessairement pertinentes pour la prise en compte des réactions immunitaires et de la cancérogénèse, de très faibles doses pouvant être aussi toxiques que de fortes doses.
L'INERIS propose depuis 2012 une certification des personnes et des meilleures techniques disponibles pour les postes de travail en présence de nanomatériaux. Sur la base des référentiels Nano-CERT et Nano-CERT / MTD, l'INERIS certifie les compétences des personnes (opérateurs et préventeurs) et les dispositifs de protection (performance des barrières, sûreté de fonctionnement de ces dispositifs). Ces référentiels ont été adoptés par un comité de certification constitué du CEA, du CNRS, d'industriels, de représentants d'une ONG, d'organismes de formation et des fabricants de dispositifs de sécurité.
A noter, le fait que la certification des personnes est "volontaire", car il n'est pas obligatoire de dispenser une formation "certifiante" (mais l'employeur a tout de même l'obligation de fournir une formation à la sécurité du poste de travail).
Autre limite : les certifications portent sur le process, le matériel, le poste de travail et les compétences humaines... mais ne portent pas sur les nanomatériaux eux-mêmes, dont le danger n'est pas évalué dans ce cadre.
... sans oublier les travailleurs extérieurs au site "nano"
L'exposition des travailleurs intérimaires et des sous-traitants doit également être réduite au minimum13.
En cas d'accident ou d'incendie, outre les travailleurs présents, il est nécessaire également que les équipes de secours, pompiers14, etc. soient bien informés de la présence de nanomatériaux sur le site et bien protégés.
... ni de minimiser les potentielles expositions professionnelles aux nanomatériaux en aval de la chaîne de production.
Les précautions précédentes ont été définies d'abord pour minimiser l'exposition des travailleurs manipulant expressément des nanomatériaux, principalement lors des étapes de :
- recherche en laboratoires
- production de nanomatériaux (laboratoires, ateliers d'industrie chimique, start-ups)
- transformation ou intégration des nanomatériaux dans des produits (labos de recherche, cosmétiques, plasturgie, peintures, revêtements, ...)
Mais elles doivent également être appliquées pour les activités périphériques, qui ne doivent pas être négligées, notamment :
- le nettoyage, l'entretien et la maintenance des locaux et des équipements (y compris des filtres)
- la collecte, le transport, le traitement (recyclage) et/ou l'élimination des déchets qui devraient être traités comme des déchets dangereux15. (de même que tout ce qui a été en contact avec des nanomatériaux : conditionnements, filtres des installations de ventilation, sacs d'aspirateurs, équipements de protection respiratoire, combinaisons, etc.)
La confédération syndicale néerlandaise (FNV) a ainsi recommandé en 2011 d'évaluer le cycle de vie depuis leur entrée dans l'entreprise jusqu'à leur sortie (qu'il s'agisse de produits finis ou semi-finis ou de déchets)16.
L'institut allemand pour la sécurité et la santé au travail a alerté dès 2007 sur le fait que les points d'interface dans le processus de production doivent être contrôlés17 au même titre que les zones de manipulation.
Il est ainsi nécessaire d'identifier et de supprimer les autres sources potentielles d'émission des nanomatériaux sur l'ensemble des sites où sont utilisés / fabriqués / stockés des nanomatériaux.
→ Voir notre fiche dédiée à la mesure des émissions ici
Un autre défi souvent oublié : la protection des nombreux utilisateurs professionnels de produits contenant des nanomatériaux
L'un des maillons faibles encore trop peu sensibilisé aujourd'hui : les (nombreux) travailleurs en aval de la chaîne de production, exposés à des nanomatériaux sans le savoir...
- ... lors de leur application / installation / utilisation (ciments, peintures, teintures, produits cosmétiques, nanorevêtements par exemple)
- ... lors de l'usinage (découpe, ponçage, perçage, polissage, etc.) et/ou la réparation des produits qui en contiennent (automobile, BTP, etc.)
Ils sont donc vulnérables et moins (in)formés et protégés que les chercheurs et opérateurs des entreprises directement impliquées dans des activités nano et qui disposent - théoriquement du moins - de la formation, des protocoles et des équipements nécessaires.
⇒ Fiche suivante : "Informer et former les travailleurs et leur hiérarchie"
En savoir plus
- Sommaire de notre Dossier Nano et Santé au travail
- Extraits de notre Bibliographie "Nano et Santé au travail", veillenanos.fr :
- INRS, Équipements de protection individuelle - Nanoparticules : l'efficacité des appareils de protection respiratoire à l'essai, Travail & Sécurité, n° 820, novembre 2020
- AFNOR, Web-conférence – Nanoparticules : découvrez la méthode de gestion des risques, 7 juillet 2020
- INRS, Noir de carbone nanostructuré : vers une valeur limite d'exposition professionnelle, mars 2020
- Organisation mondiale de la santé (OMS), Lignes directrices de l'OMS pour la protection des travailleurs contre les risques potentiels des nanomatériaux manufacturés, mars 2019
- INRS, Performance des appareils de protection respiratoire filtrants vis-à-vis des nanoparticules, février 2019
- AIPALS (service inter-entreprise de santé au travail), Nanomatériaux, comment les repérer et s'en protéger ?, janvier 2019
- INRS, wébinaires :
- Haut Conseil de la Santé publique (HCSP), Bilan des connaissances relatives aux effets des nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) sur la santé humaine ; caractérisation de l'exposition des populations et mesures de gestion, avril 2018 (rendu public en juin 2018)
- Ministère de l'environnement, Meilleures techniques à envisager pour la mise en oeuvre des substances à l'état nanoparticulaire, 2017
- INRS, Rubrique en ligne "Nanomatériaux. Quels risques ? Quelle prévention ?" du site www.inrs.fr
- IRSST, Mesure de l'efficacité des gants de protection contre les nanoparticules dans des conditions simulant leur utilisation en milieu de travail, rapport R-933, octobre 2016
- CORDIS, Le projet SCAFFOLD - Des stratégies de sécurité pour le secteur de la construction (nanomatériaux), janvier 2015
- Debia M et Beaudry C, Exposition potentielle par inhalation et efficacité du confinement quand on utilise des enceintes de sécurité pour la manutention des nanoparticules, résumé en français de "Potential inhalation exposure and containment efficiency when using hoods for handling nanoparticles", J Nanopart Res, 15(9):1880, 2013 in Nanoparticules - maîtrise de l'exposition : concepts et réalisations, Bulletin de veille scientifique (BVS) de l'ANSES, mars 2014
- CFDT, Nanotechnologies, L'exigence d'un développement responsable, novembre 2013
- Raphaël Chevallier (DGT - Direccte PACA), Nanoparticules - Nanotechnologies - Aspects réglementaires, Colloque Nanoparticules Direccte Limousin, 24 octobre 2013
- Aída Maria Ponce Del Castillo (ETUI), Les nanomatériaux sur le lieu de travail, Quels enjeux pour la santé des travailleurs ?, mai 2013
- CEA, Précautions au poste de travail, NanoSmile, cartoon court et pédagogique, avril 2010
- En anglais :
- CDC (NIOSH USA) :
- Continuing to protect the nanotechnology workforce: NIOSH nanotechnology research plan for 2018–2025, janvier 2019
- Workplace Design Solutions: Protecting Workers during the Handling of Nanomaterials, mars 2018
- Workplace Design Solutions: Protecting Workers during Nanomaterial Reactor Operations, mars 2018
- Workplace Design Solutions: Protecting Workers during Intermediate and Downstream Processing of Nanomaterials, mars 2018
- Organisation mondiale de la santé (OMS), WHO guidelines on protecting workers from potential risks of manufactured nanomaterials, 2017
- Mihalache R et al., Occupational exposure limits for manufactured nanomaterials, a systematic review, Nanotoxicology, 11(1), janvier 2017
- Handbook of Nanosafety, Measurement, Exposure and Toxicology, ed. by Ulla Vogel & Kai Savolainen & Qinglan Wu & Martie van Tongeren & Derk Brouwer & Markus Berges, 2014
- NIOSH et al. (USA), The GoodNanoGuide, an Internet-based collaboration platform specially designed to enhance the ability of experts to exchange ideas on how best to handle nanomaterials in an occupational setting
- NanoSafety Cluster (Europe)
- CDC (NIOSH USA) :
NOTES et REFERENCES :
1 - Voir notamment :
- C.D. Engeman et al., Governance implications of nanomaterials companies' inconsistent risk perceptions and safety practices, Journal of Nanoparticle Research, 14 (3), 1-12, Février 2012
- INRS, Repérage des salariés potentiellement exposés aux nanoparticules, Références en Santé au travail, n°132, Décembre 2012
- Conti J.A. et al. Health and safety practices in the nanomaterials workplace: results from an international survey, Environmental Science & Technology, 42 (9), 3155-3162, 2008
2 - Cf. notamment INRS, Les nanomatériaux - Définitions, risques toxicologiques, caractérisation de l'exposition professionnelle et mesures de prévention, ED6050, septembre 2012 et la rubrique Rubrique en ligne "Nanomatériaux. Quels risques ? Quelle prévention ?" du site www.inrs.fr
3 - Dès 2009, le Parlement européen avait demandé spécifiquement à la Commission d'étudier la nécessité de réviser la législation en matière de protection des travailleurs en ce qui concerne, notamment, l'utilisation des nanomatériaux uniquement dans des systèmes fermés ou de toute autre façon garantissant la non-exposition des travailleurs tant qu'il n'est pas possible de détecter et de contrôler l'exposition de manière fiable : cf. Résolution du Parlement européen du 24 avril 2009 sur les aspects réglementaires des nanomatériaux (article 15)
4 - L’INRS a mené une étude sur les performances des masques de protection respiratoire pour les travailleurs exposés aux nanomatériaux ; les résultats publiés en février 2019 confirment l'efficacité des masques testés (demi-masques, masques complets, demi-masques et cagoules) mais mettent néanmoins en évidence une très forte dégradation de la protection respiratoire si le masque est mal ajusté ou si le rythme respiratoire augmente
5 - Voir notamment :
- Mesure de l'efficacité des gants de protection contre les nanoparticules dans des conditions simulant leur utilisation en milieu de travail, IRSST, 14 février 2018
- "Développement de méthodes de mesure des propriétés barrières des membranes polymères et textiles contre les nanoparticules en milieu liquide - Application aux vêtements et aux gants de protection" in Restitution du programme national de recherche environnement santé travail : Substances chimiques et nanoparticules : modèles pour l'étude des expositions et des effets sanitaires : résumé dans le Dossier du participant (p.15) et Diaporama en ligne, novembre 2013.
Des recherches sont en cours au Canada pour en savoir plus : voir la page dédiée au projet de recherche"Mesure de l'efficacité des gants de protection contre les nanoparticules dans des conditions simulant leur utilisation en milieu de travail", réalisé conjointement par l'Université McGill, l'École de technologie supérieure, l'Université de Montréal et financé par l'IRSST et NanoQuébec : de premiers résultats montrent une efficacité variable selon les modèles de gants (deux modèles en nitrile ont présenté une efficacité médiocre, l'un d'entre eux devant même être déconseillé lors de la manipulation de nanoparticules en solution aqueuse) : cf. "Mesure de l'efficacité des gants de protection contre les nanoparticules dans des conditions simulant leur utilisation en milieu de travail", IRSST, octobre 2016
La Commission européenne a demandé au Comité européen de normalisation (CEN) de donner son avis sur de nouvelles exigences de normalisation pour différents EPI - gants, chaussures de protection, filtre et masques, vêtements non tissés - contre les nanoparticules solides. Le Comité technique 162 WG 3 du CEN doit réviser le programme de travail 'Vêtements de protection contre les produits chimiques, les agents infectieux, et la contamination radioactive', qui correspond à la protection contre les particules au format nano, ainsi que le programme de travail relatif aux 'filtres à air pour la propreté générale de l'air'.
6 - Voir notamment :
- les études sur le passage des nanomatériaux à travers la barrière placentaire que nous avons compilées ici
- les éléments d'alerte concernant la reprotoxicité des nanomatériaux, dont les effets néfastes sur le développement embryonnaire (reprotoxicité) compilés là
7 - Pour plus de détails voir :
- Comparaison aux valeurs limites liées aux nanoparticules, Nano Inspect, page consultée le 15 juin 2015
- Workshop report: Strategies for setting occupational exposure limits for engineered nanomaterials, Gordon SC et al., Regulatory Toxicology and Pharmacology, 68(3) : 305-311, avril 2014
8 - Cf. NIOSH (Etats-Unis), Occupational Exposure to Titanium Dioxide, Current Intelligence Bulletin, 63, 2011 (la VLEP du TiO₂ "fin" étant quant à elle de 2,4 mg/m3)
9 - Cf. NIOSH (Etats-Unis), Occupational Exposure to Carbon Nanotubes and Nanofibers, Current Intelligence Bulletin, 65, avril 2013
10 - Cf. Health Effects of Occupational Exposure to Silver Nanomaterials, Current Intelligence Bulletin 70, NIOSH, mai 2021
11 - Guidance on the protection of the health and safety of workers from the potential risks related to nanomaterials at work, Guidance for employers and health and safety practitioners, Commission européenne, novembre 2014 (p.31)
12 - Cf. Suède: protection des travailleurs contre les nanotubes de carbone potentiellement dangereux dans le secteur manufacturier, OSHA Europe, 2 novembre 2019
13 - Cf notamment :
- CFDT, Nanotechnologies, L'exigence d'un développement responsable, novembre 2013
- Santé au travail : « Nous sommes face à une forme de crime organisé », Le Nouvel Economiste, décembre 2012
- Intérim : le pari perdu d'un vrai suivi médical, Santé & Travail n° 073 - janvier 2011
- Travailler peut nuire gravement à votre santé, Sous-traitance des risques, mise en danger d'autrui, atteintes à la dignité, violences physiques et morales, cancers professionnels, Annie Thébaud-Mony, La Découverte, 2008
- Sécurité au travail: les sous-traitants sont les oubliés d'une réforme a minima, CGT CHU Toulouse, 12 avril 2015
14 - ENSOSP, Les nanomatériaux : enjeux, risques et éléments de réflexion sur la réponse opérationnelle des sapeurs-pompiers, 2010
15 - Cf. notamment INRS, De la production au traitement des déchets de nanomatériaux manufacturés, mai 2019
16 - Working safely with engineered nanomaterials and nanoproducts - A guide for employers and employees, Confédération syndicale néerlandaise (FNV), Pays-Bas, Août 2012. (La première version date de mai 2011)
17 - Institut fédéral allemand pour la sécurité et la santé au travail (BAuA), Guidance for handling and use of nanomaterials at the workplace, 2007 (une mise à jour a été publiée en 2012, mais disponible en allemand uniquement ici).
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Fiche initialement mise en ligne en juillet 2015
Nano et Alimentation (5/7) : Variations sur les thèmes de la prudence, de la confiance et de la vigilance
Nano et Alimentation (5/7) : Variations sur les thèmes de la prudence, de la confiance et de la vigilance

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- Recommandations des pouvoirs publics sur les nanos dans l'alimentation
- Demandes de moratoire par diffférentes ONG
- Quel traitement des nanos par les labels bio ?
- Des consommateurs peu désireux de jouer les cobayes
- Le marché évolue
Recommandations des pouvoirs publics sur les nanos dans l'alimentation
Devant les nombreuses incertitudes concernant les risques des nanos dans l'alimentation, beaucoup d'organisations publiques ou para-publiques ont émis des recommandations concernant l'utilisation de nanomatériaux ou nanotechnologies dans le domaine alimentaire1.
Ces recommandations peuvent être schématiquement résumées ainsi :
- réaliser une veille scientifique et technologique sur les applications nanotechnologiques dans l'agroalimentaire et les risques associés ;
- approfondir les recherches sur les risques ;
- informer le public ;
- consulter la population ;
- développer l'échange interministériel d'informations sur l'état des connaissances scientifiques sur les risques ;
- permettre l'évaluation publique de l'innocuité et l'encadrement juridique des produits concernés ;
- exiger la transparence des industriels et l'étiquetage des produits concernés.
Certaines institutions sont allées plus loin :
- en 2009, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa, aujourd'hui ANSES) a publiquement affirmé que "la prudence s'impose à l'égard de l'utilisation de nanotechnologies et/ou nanoparticules en alimentation humaine et animale"2 ;
- depuis 2009 également, le Parlement européen demande que les aliments incorporant des nanomatériaux ou ayant été produits via des procédés utilisant des nanotechnologies fassent l'objet de tests spécifiques d'innocuité avant leur commercialisation3 (il a partiellement obtenu gain de cause en 2015 avec le Règlement Novel Food qui ne concerne cependant pas les additifs)
- quelques mois plus tard en France, le Conseil national de l'alimentation (CNA) a préconisé qu'"en cas d'absence de méthodologie d'évaluation des risques ou de données reconnues comme suffisamment fiables (ce qui est le cas aujourd'hui des nanomatériaux manufacturés), la mise sur le marché de toute denrée alimentaire issue de ces nouvelles technologies ne soit pas autorisée"4
- en 2010 en Allemagne, l'Institut fédéral d'évaluation des risques (BfR), rattaché au Ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la protection des consommateurs, est allé jusqu'à demander explicitement aux fabricants de "s'abstenir d'utiliser du nanoargent dans les produits de consommation courante (notamment les aliments) tant que nous ne sommes pas en mesure de garantir l'absence de risques pour la santé"5.
- ces dernières années en France, différents experts académiques se sont encore prononcés sur le sujet6 avec l'appui de l'ANSES7, et des prises de position publiques alertant sur les risques associés à l'ingestion de nanoparticules de dioxyde de titane principalement, voire demandant une suspension du E171 (additif qui contient des nanoparticules de TiO2).
Des ONG ont demandé la mise en place d'un moratoire sur les nanos dans l'alimentation
Parmi les ONG qui se sont prononcées contre l'utilisation de nanomatériaux dans les produits de consommation courante8, différentes ONG9 ont spécifiquement appelé au moratoire concernant l'utilisation de nanomatériaux dans l'alimentation, notamment :
- au niveau international, ETC Group dès 2004 au Canada, puis Which? au Royaume-Uni, Les Amis de la Terre Australie et Etats-Unis, As You Sow aux USA
- puis en France, dès 2009 France Nature Environnement10 ou Les Amis de la Terre, et plus récemment, à partir de 2016, Agir pour l'Environnement puis l'AFOC en 2017
Quel traitement des nanos par les labels bio ?
Contrairement aux OGM, il n'existe pas d'incompatibilité déclarée entre nanomatériaux manufacturés et production biologique au niveau européen, mais cela va changer à partir de 2021 : le texte du nouveau règlement relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques prévoit l'exclusion des aliments contenant ou constitués de nanomatériaux manufacturés.
Du fait des difficultés techniques et du coût de la détection des nanomatériaux, la garantie "sans nano" apportée par les labels bio a pu être sujet à caution ; ECOCERT l'a appris à ses dépens en 2012 dans le domaine des cosmétiques11.
Les avancée techniques opérées ces dernières années permettraient néanmoins de réaliser des progrès dans le domaine.
Des consommateurs peu désireux de jouer les cobayes
Dans un contexte général où les consommateurs se montrent de plus en plus suspicieux envers l'alimentation industrielle12, la réticence et la méfiance des consommateurs vis-à-vis des nanoparticules dans l'alimentation sont croissantes :
- une étude réalisée par l'INRA en 2011 des consommateurs français et allemands ont exprimé leur refus de voir se développer des applications nano (fictives) dans le domaine de l'alimentation13.
- au Royaume-Uni, auprès de 120 participants d'un forum citoyen, organisé en 2010-2011 par la Food Standards Agency (FSA), en charge de la sécurité des aliments au Royaume-Uni : les consommateurs britanniques interrogés se sont montrés sceptiques quant à l'usage des nanotechnologies dans l'alimentation, moins réticents concernant les emballages ou dans les aliments pour réduire les teneurs en sel ou en graisses, mais franchement hostiles à leur utilisation comme nouveaux agents de saveur ou de texture14.
- aux Etats-Unis :
- auprès de 1130 personnes interrogées fin 2012 qui ont manifesté une réticence à acheter de l'huile de canola dont la production ou l'emballage ont fait intervenir des nanotechnologies, mais ni attirance ni rejet pour une huile comportant des nano-gouttes avec des allégations de bénéfices pour la santé15
- auprès de 1117 consommateurs qui, bien qu'ils soient dans l'ensemble sont moins hostiles à la nanofood qu'aux OGM, sont pour une part significative plutôt méfiants par rapport aux nanos dans l'alimentation16
De manière générale, les consommateurs attendent plus de transparence et ne veulent pas être "cobayes de la nano-bouffe"17, ce qu'ils sont pourtant déjà, à leur corps défendant, puisque notre alimentation contient déjà des nanomatériaux - et pas seulement des objets nano "virtuels" comme ceux utilisés à l'INRA pour l'étude mentionnée plus haut menée en 2011.
Depuis 2016, la pétition Stop aux nanoparticules dans nos assiettes ! lancée par Agir pour l'Environnement, exigeant un moratoire sur les nanoparticules dans les produits alimentaires courants, a recueilli plus de 49 000 signatures !
En 2011, les chercheurs de l'INRA avaient conclu qu'"en situation d'incertitude et de controverses, les décideurs devraient porter une attention particulière sur les modes de communication participatifs ou délibératifs". L'association Sciences Citoyennes milite à cet égard depuis plusieurs années pour la mise en place de conventions de citoyens dont les autorités devraient prendre en compte les recommandations.
Les chercheurs de l'INRA rajoutent que "cette communication doit être accompagnée d'une politique forte garantissant la sécurité des nano-aliments dans un contexte de méfiance des consommateurs européens". Reste à déterminer qui doit prendre en charge le coût d'une telle politique de sécurité visant à rassurer la population sur des applications dont les avantages restent à prouver et dont l'industrie agroalimentaire et certains laboratoires de recherche semblent être les principaux bénéficiaires, davantage que les consommateurs : est-ce aux contribuables de payer ou aux entreprises qui espèrent tirer profit de leur commercialisation ?
Le marché évolue
Mais désormais l'ensemble de la filière est sensibilisé aux obligations d'étiquetage et aux risques pour le consommateur. De plus en plus de marques et distributeurs veulent commercialiser des produits "sans nano" (pour ne pas avoir à en étiqueter et/ ou par principe de précaution) et depuis les campagnes d'As you Sow aux Etats-Unis18 et les tests menés par plusieurs associations en France19, plusieurs marques et distributeurs se sont engagés à retirer les additifs incriminés de la composition de tout ou partie de leurs produits : mi 2018, on comptait par exemple William Saurin, Mars, Lutti, Verquin, Sainte-Lucie, Picard, Manufacture Cluizel, Motta, Malabar, Fleury Michon, ainsi que Carrefour, Leclerc, Auchan, Système U*, et la liste s'est allongée encore en octobre 2018 avec Casino puis en novembre 2018 avec les fameux M&M's peanut de Mars (voir la "liste verte" d'infonano.org).

Fin juin 2018, le Syndicat national de la confiserie avait rendu publique sa charte de déontologie, dans laquelle 100 % des confiseurs "se sont engagés à supprimer le dioxyde de titane de leurs produits". La charte formalise une décision prise dès 2017 : 90 % des confiseurs ont déjà éliminé le E171 mi-2018. "La science avance, les exigences de sécurité aussi. Il nous faut aller au-delà de la réglementation et anticiper les attentes des consommateurs" a indiqué Florence Pradier, secrétaire générale des "Confiseurs de France".
Beaucoup de marques exigent désormais des ingrédients "sans nano" de la part de leurs fournisseurs ; elles ont possibilité de les contraindre ou de demander des pénalités s'ils ne respectent pas leur contrat. Mais attention à la politique de l'autruche : les marques peuvent être inquiétées s'il s'avère que les attestations de leurs fournisseurs (certifiant que les ingrédients ne sont pas des nanomatériaux) sont incomplètes ou erronées. Les marques ont en effet l'obligation de vérifier ce qu'elles mettent dans leurs produits et, en cas de manquement, sont considérées comme responsables et peuvent elles aussi être poursuivies au pénal !
En 2017, Synadiet, le syndicat national des compléments alimentaires, a mis en place un groupe de projet dédié qui a identifié deux axes de travail20 :
- un travail d’identification des ingrédients pouvant être utilisés sous forme de nanoparticules dans les compléments alimentaires, avec notamment une enquête auprès des fournisseurs de substances pouvant être trouvées sous forme de nanoparticules
- un travail sur les alternatives aux nanos existantes ou en cours d’études, l’objectif étant de proposer un "catalogue d’alternatives", et de recenser les difficultés analytiques rencontrées, et les solutions trouvées.
Depuis 2018, le groupe italien Perfetti Van Melle, propriétaire de Mentos et des sucettes Chupa Chups,se passe dans l’ensemble de ses recettes du E171, composé de (nano)particules de dioxyde de titane21.
En décembre 2019, Agir pour l'Environnement a publié une liste des marques et enseignes ayant retiré le E171 de leurs produits. L'ONG avait repéré moins de 30 produits contenant du E171.
Depuis le 1er janvier 2020, la commercialisation de l'additif alimentaire E171 est suspendue en France.
⇒ Fiche suivante : "Quels défis en perspective ?"
NOTES et REFERENCES :
1 - Voir notamment les nombreux rapports des pouvoirs publics listés dans notre bibliographie. Parmi les rapports les plus complets figure l'Avis sur les enjeux éthiques des nanotechnologies dans le secteur agroalimentaire de la Commission de l'éthique en science et en technologie du Québec publié en 2011 avec neuf recommandations concrètes qui donnent un bon aperçu des recommandations émises par divers acteurs dans d'autres cadres, avec l'avantage d'être ici relativement bien articulées et presque exhaustives
2 - Afssa (aujourd'hui ANSES), Nanotechnologies et nanoparticules dans l'alimentation humaine et animale, mars 2009
3 - Voir notre fiche "Quel encadrement des nanomatériaux dans l'alimentation en Europe ?", veillenanos.fr
4 - Avis sur le développement des nouvelles technologies dans la fabrication, le conditionnement et la conservation des denrées alimentaires : conséquences, responsabilité des opérateurs et acceptabilité sociale, Conseil national de l'alimentation (CNA), 10 juin 2009
5 - Nanosilver has no place in food, textiles or cosmetics, BfR, 2010
6 - Voir notamment :
- Francelyne Marano, Faut-il avoir peur des nanos ?, Buchet Chastel, avril 2016
- Eric Houdeau et Marie-Hélène Ropers (INRA) in NanoResp, Les nanomatériaux dans l'alimentation. Quelles fonctions et applications ? Quels risques ?, octobre 2015
7 - Cf. Nanoparticules de dioxyde de titane dans l'alimentation (additif E 171) : des effets biologiques qui doivent être confirmés, Communiqué de l'ANSES, 12 avril 2017 et Avis relatif à une demande d'avis relatif à l'exposition alimentaire aux nanoparticules de dioxyde de titane, ANSES, avril 2017
8 - Voir parmi les 51 cahiers d'acteurs des organisations qui ont pris position lors du débat public national sur les nanotechnologies de 2009-2010.
9 - Voir notamment les rapports d'ONG listés dans notre bibliographie.
10 - Voir le Cahier d'acteur de France Nature Environnement (FNE) intitulé "L'urgence de la maîtrise des risques associés aux nanoparticules et nanomatériaux !" et réalisé pour le débat public national sur les nanotechnologies de 2009-2010 : FNE y demandait explicitement un "moratoire partiel sur les nano-objets à usage non médical et en contact, dans leur usage normal, grand public, avec le corps humain" (notamment les produits et emballages alimentaires).
11 - Cf. nos articles :
- Tromperie sur la marchandise ? Des nanoparticules identifiées dans des crèmes solaires prétendument "sans nano", Veillenanos.fr, juillet 2012 ;
- Rebondissement dans l'affaire de "tromperie sur la marchandise" qui oppose les Amis de la Terre à Antaria en Australie, Veillenanos.fr, 4 mars 2013
12 - Voir par exemple Alimentation : face aux doutes, les internautes s'organisent, Le Monde, 15 avril 2013
13 - Voir le résumé "Nano-aliments ou nano-emballages : les consommateurs méfiants", 15 mars 2013 ; et l'étude détaillée "Des consommateurs entre indifférence et méfiance : Comportements français et allemands face à une possible introduction des nanotechnologies dans le secteur agro-alimentaire", Bieberstein A et al., INRA Sciences sociales, juillet 2011. Cette étude a été en partie financée par l'ANR.
14 - FSA Citizens Forums: Nanotechnology and food, avril 2011
15 - Plus de détails ici : Nanotechnology in the Food System: Consumer Acceptance and Willingness to Pay, Zhou, Guzhen, University of Kentucky, Theses and Dissertations--Agricultural Economics, Paper 10.
16 - Heterogeneous Consumer Preferences for Nanotechnology and Genetic-modification Technology in Food Products, Yue C et al., Journal of Agricultural Economics, novembre 2014
17 - Nanotechnologies : tous cobayes de la nano-bouffe ?, Basta!, 14 janvier 2010
18 - As You Sow, Slipping Through the Cracks: An Issue Brief on Nanomaterials in Foods, février 2013
19 - Cf. Quels ingrédients nano dans notre alimentation ?, veillenanos.fr
20 - Cf. Rapport d'activité 2017, Synadiet, 2018
21 - Comment Mentos et Chupa Chups ont réussi à se passer du dioxyde de titane, L'Usine nouvelle, 2 janvier 2020
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Fiche initialement créée en mai 2013