La nouvelle restriction européenne des microplastiques est entrée en vigueur… quid des nanoplastiques ?

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Aujourd’hui entre en vigueur la restriction des microplastiques manufacturés adoptée par la Commission européenne il y a trois semaines. Cette restriction est une véritable avancée en matière de santé environnementale mais des interrogations sur le périmètre et les délais d’application de cette réglementation persistent…

Près de 500 000 tonnes de microplastiques en moins dans les 20 prochaines années

Le règlement européen de restriction des microplastiques ajoutés intentionnellement a été adopté le 25 septembre dernier par la Commission européenne. Le délai de vingt jours prévu avant son entrée en vigueur effective est désormais révolu et la restriction est donc en route avec, à terme, de l’ordre de 500 000 tonnes de microplastiques en moins sur les vingt prochaines années. 

Les microplastiques concernés sont ceux introduits volontairement par les industriels dans divers produits : cosmétiques, détergents, peintures, médicaments, engrais, etc. (Il ne s’agit donc pas ici des microparticules de plastique issues de la dégradation des plastiques contenus dans les emballages, textiles, déchets, etc.). 

Outre des interdictions de mise sur le marché, la nouvelle réglementation européenne inclut également des exigences en matière d’information et d’étiquetage de ces matériaux.

Satisfecit des ONG… sauf concernant les délais et les nanoplastiques

L’adoption de ce texte est un soulagement pour les ONG qui, depuis 2017, se sont battues pour obtenir cette restriction de plastiques superflus (notamment  Surfrider Europe, ClientEarth, the European Environmental Bureau (EEB) regroupés au sein de l’alliance Rethink Plastic). Néanmoins, comme elles le redoutaient au vu des textes préparatoires, le résultat final présente d’importantes lacunes déjà soulignées par AVICENN, qui rendent cette restriction bien moins ambitieuse qu’initialement escompté.

Des délais de mise en oeuvre très larges

En dépit des alertes lancées par les ONG, les délais accordés pour l’interdiction des microplastiques dans les terrains de sport et dans les cosmétiques par exemple (respectivement jusqu’à huit et douze ans) posent question. Ils sont nettement plus importants que ceux proposés par le SEAC (Comité d’évaluation socio-économique) en 2020 et témoignent d’une complaisance de la part des autorités vis-à-vis des industriels : les intérêts de ces derniers ont primé par rapport aux considérations sanitaires et environnementales.  

Faute de volonté politique forte, le groupe d’ONG Rethink Plastic Alliance insiste sur la nécessité d’un engagement de l’industrie afin de garantir une application efficace : “Nous exhortons toutes les entreprises qui ajoutent des microplastiques à leurs produits, en particulier celles qui sont exemptées de la restriction ou qui ont bénéficié de périodes de transition plus longues, à commencer immédiatement à utiliser des alternatives sûres et sans microplastiques”.

Qu’en est-il des petits nanoplastiques ?

La proposition de restriction ne prévoit pas de limite inférieure pour la taille des microplastiques, et y intègre toutes les particules de plastique de petite taille, y compris les nano-plastiques (communément définis comme des plastiques de taille inférieure à 1 µm). Toutefois, le texte prévoit une exemption temporaire d’application du règlement pour les particules de taille inférieures à 100 nm dans toutes les dimensions (et 0,3 µm en longueur), lorsque « la concentration1Selon le texte en vigueur « ne peuvent pas être mis sur le marché en tant que substances en tant que telles ou, lorsque les microparticules de polymère synthétique sont présentes pour conférer une caractéristique recherchée, dans des mélanges à une concentration égale ou supérieure à 0,01 % en masse. »de microparticules de polymère synthétique ne peut être déterminée au moyen des méthodes d’analyse disponibles ou des documents d’accompagnement« , et ce, jusqu’à ce que les méthodes soient disponibles. Absente de la proposition initiale rédigée par l’agence européenne des produits chimiques (ECHA), cette exemption été introduite en cours de route.

Il est essentiel que la Commission clarifie les modalités de la levée de cette exemption car, ainsi que l’ont souligné des experts de l’université de West England dans un rapport rendu à la Commission en début d’année, les risques sanitaires et environnementaux sont plus importants encore à l’échelle nano et l’exemption des nanoplastiques constitue un “trou béant” dans la réglementation. Des progrès récents ont été réalisés en matière de détection des nanoplastiques2Voir notre fiche dédiée sur ce sujet, qui risquent d’être freinés faute d’exigence réglementaire. Les avancées considérables obtenues ces dernières années sur la métrologie des nanoparticules métalliques (nanoparticules de dioxyde de titane ou nanoargent notamment) auraient sans doute été bien plus timides sans l’impulsion forte des règlements européens qui ont imposé l’étiquetage « nano » dans les cosmétiques, les biocides et l’alimentaire en 2013 et 2014, alors même ces méthodes n’étaient pas complètement au point à l’époque. 

A noter sur le même sujet : le prochain webinaire de NanoMesure France, organisé le 20 octobre prochain, portera sur les potentialités offertes par la spectroscopie Raman en termes de caractérisation des nanoparticules de dioxyde de titane et de micro- et nanoplastiques.

A suivre donc…

Les prochains RDV nano

22
Sep.
2025
Voies de recherche innovantes en nanosciences et nanotechnologies (Advanced Nano 2025, Cracovie – Pologne)
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15ème réunion sur les avancées des nanosciences (MNA 2025) (C’Nano, île de Porquerolles – France)
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2025
Nanomatériaux: Bonnes pratiques en matière de prévention des risques liés aux nanomatériaux : sensibilisation et mise en situation en laboratoire (CNRS, Paris – France)
Paris
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  • Formation à destination des manipulateurs de nanomatériaux (techniciens, ingénieurs, doctorants, chercheurs, etc.) et des assistants de prévention
  • Organisateur : CNRS
  • Objectifs : connaitre les risques liés à la manipulation de nanomatériaux et les mesures de prévention et de protection à mettre en œuvre, mais aussi acquérir les bonnes pratiques afin de limiter l’exposition
  • Thèmes abordés:
    • Les effets sur la santé / L’évaluation des risques
    • Les mesures de prévention / Les bonnes pratiques de laboratoire / La gestion du temps et de l’espace / Les protections collectives et individuelles / Méthodes de nettoyage des surfaces, matériels, équipements / Le stockage des produits / La gestion des produits
  • Ateliers pratiques:
    •  Mise en oeuvre des bonnes pratiques lors de la manipulation de poudres nanométriques / Mise en situation / Bilan & recommandations
    •  Etudes de cas : analyse des risques et recommandations
    •  Exemples d’aménagement sur des postes de travail mettant en oeuvre des nanomatériaux
  • Site internet : https://formation.ifsem.cnrs.fr/training/1027/4426

Notes and references

  • 1
    Selon le texte en vigueur « ne peuvent pas être mis sur le marché en tant que substances en tant que telles ou, lorsque les microparticules de polymère synthétique sont présentes pour conférer une caractéristique recherchée, dans des mélanges à une concentration égale ou supérieure à 0,01 % en masse. »
  • 2
    Voir notre fiche dédiée sur ce sujet