Restriction des microplastiques manufacturés : les nanoplastiques sur la sellette

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Le 26 avril 2023, le comité REACH de la Commission européenne a voté en faveur de la proposition de la Commission européenne de restreindre progressivement la mise sur le marché de microplastiques manufacturés. Le sort des nanoplastiques prête à confusion : en principe couverts par cette restriction, ils vont toutefois bénéficier d’une exemption « temporaire » dont l’échéance n’est pas précisée… 

Une proposition de restriction des microplastiques manufacturés dans tous les secteurs

Ce 26 avril 2023, le comité REACH de la Commission européenne a voté en faveur de la proposition de la Commission européenne de restriction des micro- et nanoplastiques manufacturés.

Cette proposition de restriction, attendue de longue date1En janvier 2019, l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) avait proposé de restreindre certains micro- et nanoplastiques intégrés à dessein par les industriels. Ce n’est que le 30 août 2022, que la Commission a présenté, après une longue période d’inertie dénoncée par les ONG, une proposition de restriction pour les microplastiques ajoutés intentionnellement. , couvre les micro- et nanoplastiques ajoutés intentionnellement dans tous les secteurs d’application. En plus des interdictions de mise sur le marché, elle prévoit également des exigences en matière d’information et d’étiquetage.

Ces micro- et nanoplastiques sont ajoutés à une large gamme de produits pour diverses propriétés. On les retrouve dans des produits cosmétiques, dans des couches pour enfants, dans des produits de nettoyage, dans des peintures, sur les terrains de sports, dans des produits phytosanitaires, etc. Leur rejet et diffusion dans les écosystèmes entraînent des effets néfastes en cascade, insuffisamment évalués, depuis la faune aquatique jusqu’aux autres animaux (dont les humains) qui s’en nourrissent.

Globalement, ce texte a été accueilli favorablement par les ONG (Rethink Plastic, ClientEarth, Surfrider, BEE) qui travaillent sur cette restriction depuis des années. Une semaine avant, 32 ONG avaient co-signé une lettre ouverte appelant à l’adoption du texte, tout en insistant sur la nécessité de mettre œuvre des mesures supplémentaires dans les États Membres afin de mieux prévenir et réduire les émissions de micro et nanoplastiques.

Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne disposent désormais d’une période d’examen de trois mois, à l’issue de laquelle le règlement devrait entrer immédiatement en vigueur. 

Grand flou sur les nanoplastiques

Le sort des nanoplastiques prête néanmoins à confusion. Si la proposition de restriction ne prévoit pas de limite inférieure pour la taille des microplastiques, et y intègre toutes les particules de plastique de petite taille, y compris les nano-plastiques, elle prévoit aussi une exemption temporaire d’application du règlement pour les nanoplastiques, sans que son échéance ne soit précisée…

Cette exemption, temporaire, permettrait de garantir l’application du texte, dans un contexte où les méthodes d’analyse existantes ne sont pas suffisantes pour détecter, quantifier et identifier des particules de cette taille, notamment dans les matrices complexes (par exemple, les nanoplastiques issus de la dégradation que l’on retrouve dans l’eau des lacs).

Mais cette exemption exclut de fait les nano-plastiques du champ d’application du règlement, sans en préciser les modalités (en terme de calendrier notamment). Elle pourrait inciter les entreprises à continuer à utiliser des nano-plastiques et retarder les efforts d’élimination ou de substitution. En l’absence de règlementation spécifique, il n’y a pas de pression particulière pour développer des techniques innovantes de détection des nanos… Des progrès récents ont pourtant été fait dans ce domaine, dans des échantillons particulièrement complexes (prélevés dans de l’eau de mer, dans de la neige, dans l’air, dans le sable ou encore dans les sols agricoles)2Voir Cai, H., Xu, E. G., Du, F., Li, R., Liu, J., & Shi, H. (2021). Analysis of environmental nanoplastics: Progress and challenges. Chemical Engineering Journal410, [128208]. https://doi.org/10.1016/j.cej.2020.128208.

En avril 2023, la Commission européenne avait pourtant publié un dossier « Nanoplastics : state of knowledge and environmental and human health impacts« , dans lequel elle réaffirmait la nécessité d’inclure tous les plastiques inférieurs à 1 µm (micromètre) à la définition des microplastiques. Selon les auteurs du dossier, la “réponse réglementaire est à la traîne par rapport au rythme de libération des nanoplastiques et de leur abondance dans l’environnement” alors même que “plus les particules de plastique sont petites, plus elles sont susceptibles de traverser les membranes biologiques et plus elles peuvent imprégner les organismes”.

Ce dossier (ou « future brief ») conclut qu’une catégorisation inclusive où les microplastiques comprend également les nanoplastiques évitera de laisser « un trou béant » dans le régime réglementaire pour les nanoplastiques ajoutés intentionnellement.

Cette restriction en demi-teinte ne surgit pas de manière inattendue, et l’historique de cette restriction montre que l’inclusion – ou non – des nanoplastiques a constitué un enjeu important, notamment pour les industriels :

  • La première proposition de l’ECHA, en janvier 2019, n’excluait pas les nanoplastiques de la restriction3Cf: ECHA proposes to restrict intentionally added microplastics, ECHA, 30 janvier 2019 ; ANNEX XV RESTRICTION REPORT – PROPOSAL FOR A RESTRICTION- intentionally added microplastics, ECHA, janvier 2019 : « ‘microplastic’ means a material consisting of solid polymercontaining particles, to which additives or other substances may have been added, and where ≥ 1% w/w of particles have (i) all dimensions 1nm ≤ x ≤ 5mm, or (ii), for fibres, a length of 3nm ≤ x ≤ 15mm and length to diameter ratio of >3 ».
  • En juin 2020, suite au lobbying des industriels, l’ECHA avait retiré les nanoplastiques de son projet initial de restriction.
  • À la suite de cette décision, les ONG mobilisées au niveau européen (le BEE, Client Earth, Break free from Plastic et Rethink Plastic) avaient publié un rapport pour demander la réintégration des nanoplastiques au projet de restriction des microplastiques comme l’avait initialement proposé l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), en faisant porter les restriction sur les particules de moins de 5 mm, sans limite inférieure de taille. L’objectif étant d’éviter une substitution « absurde » des microplastiques interdits par des nanoplastiques qui ne seraient pas concernés par la restriction en cours de définition.
  • La proposition de la Commission Européenne du 30 août 2022, votée par le comité REACH ce 26 avril 2023, inclut les nanoplastiques dans la définition des microplastiques mais les exclut de fait avec la mise en place d’une exemption temporaire.

Une réglementation encore trop peu ambitieuse

Bien que les nanoplastiques partagent de nombreuses caractéristiques avec les microplastiques, leurs interactions avec leur environnement impliquent des risques qui leurs sont spécifiques4Voir notamment The mobility of plastic nanoparticles in aqueous and soil environments: a critical review, ACS ES&T Water, Brewer, A., Dror, I. and Berkowitz, B., 1(1): 48-57, 2020, à savoir :

  • leur capacité à pénétrer des barrières biologiques plus nombreuses et plus variées
  • leur capacité d’adsorption de quantités importantes d’autres polluants (eco-corona)
  • leur plus grande réactivité due à leur plus petite taille
  • le fait qu’elles soient trop petites pour pouvoir être éliminées grâce aux méthodes d’élimination du plastique existantes.

Pourtant, aucune précaution relative aux risques accrus associés nanoplastiques (à part leur exemption temporaire du champ d’application du règlement…) n’a été spécifiée.

De plus, les délais accordés pour l’élimination des micro-plastiques dans les cosmétiques et dans les terrains de sport, fixés à douze et huit ans respectivement, restent toujours démesurément importants et injustifiés. Dans les deux secteurs, des alternatives ont déjà fait leurs preuves en Europe, et ont même poussé certaines marques à appeler à l’accélération du processus de restriction des microplastiques dans les produits cosmétiques. 

Les ONG mobilisées qui ont, à de nombreuses reprises, pointé du doigt ces délais ont donc demandé aux autorités de mettre en œuvre des mesures supplémentaires dans leurs pays respectifs afin d’éviter une pollution accrue. 

A suivre… 

Les prochains RDV nano

18
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Harmonisation & standardisation des méthodes de tests pour les nanomatériaux et les matériaux avancés (MACRAMÉ & nanoPASS, en ligne)
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20
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Les nanotechnologies : un exemple de prévention du risque chimique en milieu industriel (ATC, Paris)
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  • Module dispensé dans le cadre de la formation « Interactions entre les produits chimiques toxiques et l’organism humain » accessible à toute personne possédant un niveau de formation scientifique de base (niveau licence ou expérience professionnelle).
  • Organisateur : Association Toxicologie Chimie (ATC)
  • Intervenante : Chantal Fresnay, Ingénieure-Hygiéniste, Thales, Palaiseau
  • Site internet : https://www.atctoxicologie.fr/notre-formation.html
21
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Maîtrise des risques liés aux nanomatériaux (CEA, Grenoble – France)
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  • Sensibilisation destinée aux personnels au contact de nanomatériaux en phase de recherche, formulation, production, maintenance, nettoyage, entretien… ainsi qu’aux animateurs ou ingénieurs de sécurité, chefs d’installation, chefs de laboratoires où sont manipulées des nanoparticules.
  • Organisateur : INSTN Grenoble (CEA)
  • Au programme : impact potentiel sur la santé ; métrologie et protections ; maîtrise des risques potentiels liés aux nanomatériaux ; prise en compte des aspects sociétaux
  • Site internet : https://instn.cea.fr/formation/maitrise-des-risques-lies-aux-nanomateriaux-sensibilisation

Notes and references