
A quand une obligation d’étiquetage [nano] pour les produits ménagers ?
Lessives, détachants, assouplissants, produits vaisselle et produits WC, désinfectants, détartrants, crèmes à récurer, … En ce début février, l’ANSES propose deux méthodes de catégorisation des produits ménagers selon leur niveau de danger pour la santé et l’environnement. L’objectif ? Mieux informer les consommateurs et inciter les fabricants à améliorer la composition de ces produits. Les experts qui ont planché sur ce travail regrettent de n’avoir pas pu prendre en compte les dangers des nanomatériaux, faute d’obligation pour les marques d’indiquer leur présence dans les produits.
Deux méthodes de catégorisation des produits ménagers selon leurs dangers
Le Plan national santé environnement (PNSE 4) publié en 2021 avait prévu de renforcer la lisibilité de l’étiquetage des produits ménagers que nous utilisons au quotidien, afin de mieux informer les consommateurs. A cet effet, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a publié un rapport proposant deux méthodes de catégorisation des produits ménagers selon leurs dangers pour la santé et l’environnement.
Cette catégorisation se base sur les dangers sanitaires et environnementaux des produits et des substances qui les composent, notamment des substances jugées particulièrement préoccupantes, comme celles ayant des effets cancérogènes, persistantes dans l’environnement ou perturbateurs endocriniens. L’Anses a également tenu compte d’autres facteurs :
- le mode d’utilisation des produits,
- le nombre de substances et donc la probabilité d’un « effet cocktail »,
- la présence de substances d’intérêt limité dans certains produits, comme les parfums ou les colorants.
L’objectif de la démarche : que les consommateurs, mieux informés, puissent se tourner vers les produits ménagers les moins dangereux… ce qui incitera les fabricants à améliorer la composition de ces produits.
Un malus en cas de présence de nanos…
Le groupe de travail de l’Anses aurait souhaité considérer la présence de nanoparticules comme un malus du fait des nombreuses incertitudes relatives :
- à leurs caractérisations physico-chimiques,
- aux méthodes d’évaluation des risques nanospécifiques
- et à leurs effets potentiels sur la santé.
Faute de données disponibles, il n’a cependant pas pu intégrer les nanomatériaux dans ses méthodes de calcul de scores permettant de catégoriser les produits selon leur niveau de danger.
… impossible faute de pouvoir identifier les nanos dans les produits !
De fait, il est en effet aujourd’hui impossible d’identifier si un produit ménager donné contient, ou non, des substances nanos (sauf à le faire tester1Voir la fiche sur nos tests de produits, VeilleNanos) !
Le rapport indique ainsi que « les données disponibles sur le site de l’ECHA [l’agence européenne des produits chimiques] reposent notamment sur la recommandation de définition de la Commission Européenne sur laquelle l’Anses a soulevé des points de désaccords majeurs. De plus, le site de l’ECHA indique seulement que des substances peuvent exister sous forme de nanomatériaux, ce qui n’est pas nécessairement sous cette forme que les substances sont retrouvées dans les produits ménagers. Le GT [groupe de travail] n’ayant pas identifié à l’heure actuelle d’autres bases de données pour prendre en compte ce critère, celui-ci n’a pas été en mesure d’être intégré à la méthode ».
Une demi-douzaine de nanos dans le registre r-nano
Les bilans officiels synthétisant les données déclarées chaque année dans le registre r-nano montrent pourtant qu’il y a bien, chaque année, des déclarations de substances à l’état nanoparticulaire entrant dans la composition et/ou fabrication de savons, détergents et produits d’entretien2Voir les bilans officiels mis en ligne sur le site dédié www.r-nano.fr :
– polychloro copper phthalocyanine (pigment vert),
– n-(5-chloro-2,4- dimethoxyphenyl)-4-[[5- [(diethylamino)sulphonyl]- 2-methoxyphenyl]azo]-3- hydroxynaphthalene-2- carboxamide (pigment rouge),
– noir de carbone (pigment noir)
– yellow iron oxide, ci no. 77492 (pigment jaune)
– silice
– polyéthylène oxydé
– d’autres probablement encore, non déclarés…
A quand une mention [nano] obligatoire sur les produits ?
Ce zoom sur les produits ménagers soulève un problème plus général : aujourd’hui, seuls les cosmétiques, les aliments emballés et les biocides sont couverts par une obligation européenne d’étiquetage [nano] (peu respectée malheureusement).
→ Il est urgent d’étendre l’obligation de rajouter la mention [nano] sur la liste des ingrédients concernés pour les détergents et produits d’entretien, comme, du reste, pour l’ensemble des produits de consommation. AVICENN le demande depuis plusieurs années3cf. par exemple notre rapport « En quête de [nanos] dans les produits du quotidien » (page 25) et le PNSE4 l’a également encouragé4cf. action 13 (volet 4) du PNSE 4.
Outre cet étiquetage obligatoire, une évaluation des risques des nanos concernés devrait être rendue obligatoire AVANT leur mise sur le marché. Ça paraît évident, mais… ça n’est malheureusement toujours pas le cas aujourd’hui !.

Les dernières actus nano
Les prochains RDV nano

- Wébinaire citoyen à destination du grand public et de la communauté universitaire.
- Organisateur : Département de recherche Droit & transformations sociales (DETS) de l’Université de Bordeaux
- Intervenants :
- Marion Tissier-Raffin, maitre de conférence en droit public, Centre de recherche et de documentation européennes et internationales CRDEI, Université de Bordeaux
- Mathilde Detcheverry, Déléguée générale, Association AVICENN – Veillenanos
- Didier Morin, professeur des universités en Neurosciences, UMR CNRS INCIA, Université de Bordeaux
- Site internet : https://dets.u-bordeaux.fr/animation-scientifique/webinaires-citoyens/saison-2024-2025

- 5ème Joint Symposium on Nanotechnology
- Organisateurs: the Fraunhofer Nanotechnology Network, en partenariat avec l’Institut fédéral allemand d’évaluation des risques (BfR)
- Dates : 13-14 mai 2025
- Au programme :
- l’application de la nanotechnologie dans divers secteurs, notamment la numérisation, l’impression 2D/3D, les matériaux à base de carbone et les matériaux de batterie
- les nanos dans les réglementations européenne (REACh, matériaux en contact avec les aliments, cosmétiques, bioagents, PPP)
- adaptation et développement des lignes directrices de l’OCDE pour les tests nano et les matériaux avancés (Initiative de Malte)
- examen des NAMs spécifiques aux nanomatériaux (méthodologies de nouvelles approches)
- quand on est nano et qu’on le sait : gérer l’incertitude concernant la définition des nanomatériaux dans les cadres réglementaires
- Site internet : www.isc.fraunhofer.de/…2025/5th-symposium-nanotechnology.html
- Formation de 4 jours sur :
- les différentes voies de pénétration des produits toxiques
- l’importance de la toxicocinétique pour prévenir la toxicité des substances,
- l’absorption, la distribution, la métabolisation et l’élimination des xénobiotiques
- la toxicité des nanoparticules
- Organisateur : Association Toxicologie Chimie (ATC)
- Date : 19-22 mai 2025
- Intervenants :
- Frédéric Gaidou (Ingénieur chimiste spécialisé en Toxicologie, Groupe ERAMET, Paris. Président ATC Paris)
- Sarah Dognin dit Cruissat (Docteure en pharmacie, nutritionniste, toxicochimiste, CALMEVA, Lyon)
- Jean-Dominique Puyt (Docteur vétérinaire, Professeur honoraire de l’École Vétérinaire, Nantes)
- Isabelle Malissin (Médecin, Hôpital Lariboisière, Paris)
- Marie-Chantal Canivenc-Lavier (Nutri-toxicologue, Centre des Sciences du Goût et de l’Alimentation INRA-Dijon)
- Nicole Proust (Ingénieure Recherche, Directeur de recherche honoraire du CNRS, Spécialiste Nanotechnologies, Arsenic, Ondes électromagnétiques, Palaiseau)
- Site internet : https://www.atctoxicologie.fr/notre-formation.html
Notes and references
- 1Voir la fiche sur nos tests de produits, VeilleNanos
- 2Voir les bilans officiels mis en ligne sur le site dédié www.r-nano.fr
- 3cf. par exemple notre rapport « En quête de [nanos] dans les produits du quotidien » (page 25)
- 4cf. action 13 (volet 4) du PNSE 4